2°) de rejeter la requête de Mme C....
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier ; en effet, le premier juge a méconnu l'étendue des conclusions présentées par Mme C... en première instance ;
- Mme C... ne pouvait être regardée comme étant entrée régulièrement en France ; l'intéressée ne pouvait séjourner que pour une durée maximale de trois mois sur le territoire Schengen, or il ressort de ses déclarations lors de son audition qu'elle avait l'intention de s'établir durablement en Espagne ;
- les autres moyens invoqués par Mme C... en première instance ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à Mme C..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), abrogeant le règlement (CE) n° 562/2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C..., née le 2 février 1991 au Honduras, de nationalité hondurienne, est arrivée à l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle le 30 mai 2018, en provenance du Panama. Elle a été interpelée au contrôle transfrontière alors qu'elle rejoignait un autre vol pour Barcelone, prévu le même jour, et a été maintenue en zone d'attente. Par une ordonnance du 3 juin 2018, le juge des libertés et de la détention a autorisé son maintien en zone d'attente pour une durée de huit jours. Elle a refusé à deux reprises, les 1er et 6 juin 2018, d'embarquer pour des vols à destination du Panama. Elle a ensuite été placée en garde à vue le 6 juin 2018, puis en rétention administrative le 7 juin 2018. Par un arrêté du même jour, le 7 juin 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 13 juin 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a fait droit à sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Le préfet de la Seine-Saint-Denis fait appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement :
2. Le premier juge, saisi de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de Mme C..., a retenu que l'intéressée avait le droit d'entrer sur le territoire français au sens de l'article 6 du règlement visé ci-dessus du 9 mars 2016, si bien qu'en application des dispositions combinées des articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. Par suite, le premier juge n'a pas méconnu l'étendue des conclusions présentées par Mme C... en première instance.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. D'une part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d 'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; / 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé ; / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...) II. (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger ne se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 511-2 de ce code : " Le 1° du I et le a du 3° du II de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne : / 1° S'il ne remplit pas les conditions d'entrée prévues à l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (...) ".
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions des articles L. 511-1 et L. 511-2 que l'étranger, qui ne remplit pas les conditions d'entrée prévues par l'article 6 du règlement visé ci-dessus du 9 mars 2016, qui, comme il ressort de son annexe X, reprend les dispositions de l'article 5 du règlement n° 562/2006 du 15 mars 2006, et entre ainsi dans les prévisions du 1° de l'article L. 511-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 1° du I de l'article L. 511-1 de ce code.
5. Par ailleurs, l'article 6 du règlement visé ci-dessus du 9 mars 2016 prévoit que : " 1. Pour un séjour prévu sur le territoire des États membres, d'une durée n'excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours, ce qui implique d'examiner la période de 180 jours précédant chaque jour de séjour, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes : / (...) c) justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer de moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans leur pays d'origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel leur admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens / (...) / 4. L'appréciation des moyens de subsistance se fait en fonction de la durée et de l'objet du séjour par référence aux prix moyens en matière d'hébergement et de nourriture dans l'État membre où les États membres concernés (...) / Les montants de référence arrêtés par les États membres sont notifiés à la Commission conformément à l'article 39. L'appréciation des moyens de subsistance suffisants peut se fonder sur la possession d'argent liquide, de chèques de voyage et de cartes de crédit par le ressortissant de pays tiers (...) ". L'annexe I à ce règlement dispose que " Les justificatifs visés à l'article 6, paragraphe 3, peuvent être les suivants : / (...) / c) pour des voyages à caractère touristique ou privé : / i) justificatifs concernant l'hébergement : / (...) - Une pièce justificative de l'établissement d'hébergement (...) ". Enfin, l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / (...) / 2° Sous réserve des conventions internationales, du justificatif d'hébergement prévu à l'article L. 211-3, s'il est requis et des autres documents prévus par décret en Conseil d'Etat relatifs, d'une part, à l'objet et aux conditions de son séjour et, d'autre part, s'il y a lieu, à ses moyens d'existence, à la prise en charge par un opérateur d'assurance agréé des dépenses médicales et hospitalières (...) ainsi qu'aux garanties de rapatriement ".
6. Pour annuler l'arrêté préfectoral du 7 juin 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a estimé que le préfet de la Seine-Seine-Denis avait fait une fausse application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que Mme C... remplissait les conditions d'entrée prévues à l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes, dont les dispositions sont reprises par l'article 6 du règlement n° 2016/399 du 9 mars 2016, puisqu'elle disposait d'une somme d'argent liquide de mille euros, et d'une réservation d'hôtel à Barcelone. En appel le préfet de la Seine-Saint-Denis, ne conteste pas ces éléments. Dans ces conditions, Mme C... disposant bien à la date de son arrivée en France d'un justificatif d'hébergement en Espagne et de moyens de subsistance suffisants, c'est à bon droit que le premier juge a estimé que le préfet de la Seine-Saint-Denis avait fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 7 juin 2018.
DÉCIDE :
Article 1 : La requête du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 septembre 2019.
Le rapporteur,
MI. B...Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
T. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA02479