Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 août 2020, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 1705693, 1800201 du 25 juin 2020 du Tribunal administratif de Melun en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2017 du maire de la commune de Villecresnes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 juin 2017 du maire de la commune de Villecresnes ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Villecresnes une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement, qui n'est pas suffisamment motivé, ne comporte pas la signature du président-rapporteur, de l'assesseur le plus ancien et du greffier d'audience ;
- le conseil de discipline était irrégulièrement composé dès lors qu'il ne comportait pas au moins trois membres occupant un emploi fonctionnel ;
- l'arrêté contesté, qui a été pris au terme d'une procédure précipitée, a été pris avant la notification aux parties du procès-verbal de la séance du conseil de discipline ;
- il méconnaît le principe " non bis in idem ", la requérante ayant déjà été sanctionnée pour les mêmes faits, dès lors que la maire de la commune de Villecresnes a mis fin à son détachement dans un emploi fonctionnel et l'a placée en surnombre, et qu'elle a subi, en conséquence, une diminution de sa rémunération ;
- la sanction disciplinaire infligée est disproportionnée ;
- l'arrêté contesté est entaché d'un détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2020, la commune de Villecresnes, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., avocat de la commune de Villecresnes.
Considérant ce qui suit
1. Mme E... A..., attachée territoriale, a été recrutée par la commune de Villecresnes à compter du 1er octobre 2014 pour occuper, en premier lieu, les fonctions de directrice de cabinet du maire. Par un arrêté du 19 décembre 2014, le maire de la commune de Villecresnes l'a détachée dans l'emploi fonctionnel de directrice générale des services pour une durée de cinq ans à compter du 1er décembre 2014. Par un arrêté du 11 mai 2016, le maire de la commune de Villecresnes a suspendu Mme A... de ses fonctions à compter du 10 février 2017. Le maire de la commune de Villecresnes a ensuite mis fin, par un arrêté du 23 juin 2016, au détachement de Mme A... dans l'emploi fonctionnel de directrice générale des services à compter du 1er août 2016 et l'a placée en surnombre par un arrêté du 2 août 2016. Par un arrêté du 12 juin 2017, le maire de la commune de Villecresnes a prononcé à l'encontre de la requérante la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans. Mme A... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".
3. Il ressort des pièces du dossier de première instance transmis à la Cour que la minute du jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, comporte l'ensemble des signatures prévues par les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Si l'expédition du jugement du Tribunal administratif de Melun notifié aux parties ne comporte pas ces signatures, cette circonstance n'est pas de nature à entacher le jugement attaqué d'irrégularité.
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
4. En premier lieu, aux termes de l'article 2 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " Par dérogation au sixième alinéa de l'article 1er ci-dessus, lorsque le fonctionnaire poursuivi occupe un des emplois fonctionnels mentionnés à l'article 53 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée, siègent en qualité de représentants du personnel trois fonctionnaires occupant un emploi fonctionnel classé dans le même groupe hiérarchique, tirés au sort par le président du conseil de discipline sur une liste établie pour le ressort du conseil de discipline de recours mentionné à l'article 18. La liste comporte les noms de tous les agents occupant ces emplois. Elle est dressée par le secrétariat du conseil de discipline de recours [...] ".
5. Mme A... soutient que le conseil de discipline ayant examiné son cas au cours de la séance du 9 juin 2017 était irrégulièrement composé dès lors qu'il aurait dû, selon elle, comporter trois fonctionnaires occupant un emploi fonctionnel, en application des dispositions de l'article 2 du décret du 18 septembre 1989. Toutefois, par un arrêté du 23 juin 2016, le maire de la commune de Villecresnes a mis fin, à compter du 1er août 2016, au détachement de Mme A... dans l'emploi fonctionnel de directrice générale des services. Ainsi, à la date où le conseil de discipline a siégé, Mme A... n'occupait plus d'emploi fonctionnel, de sorte que les dispositions de l'article 2 du décret du 18 septembre 1989 relatives aux fonctionnaires poursuivis occupant des emplois fonctionnels ne trouvaient pas à s'appliquer au cas d'espèce. La circonstance que les fautes reprochées à Mme A... ont été commises alors qu'elle occupait un emploi fonctionnel est à cet égard sans incidence. Par suite, le moyen doit être écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article 14 du décret du 18 septembre 1989 : " L'avis émis par le conseil de discipline est communiqué sans délai au fonctionnaire intéressé ainsi qu'à l'autorité territoriale qui statue par décision motivée ".
7. Les dispositions de l'article 14 du décret du 18 septembre 1989 n'impliquent nullement que soit communiqué à l'intéressé, avant que soit édictée une sanction, le procès-verbal du conseil de discipline. Une notification du sens de l'avis est, en tout état de cause, suffisante. En l'espèce, il ressort du procès-verbal du conseil de discipline du 9 juin 2017 que l'avis du conseil de discipline, estimant à la majorité de ses membres que la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux ans était " proportionnée et appropriée ", a été porté oralement à la connaissance des parties le jour de la séance. Ainsi, le maire de la commune de Villecresnes a pu, sans entacher d'irrégularité la procédure, prononcer la sanction contestée, sans attendre la notification, à la commune ainsi qu'à Mme A..., du procès-verbal de la séance du conseil de discipline. Par suite, et alors que la procédure disciplinaire ne saurait être regardée comme ayant été " précipitée ", le moyen doit être écarté.
8. En troisième lieu, Mme A... soutient que l'administration aurait méconnu le principe " non bis in idem " dès lors que, avant l'édiction de l'arrêté contesté, le maire de la commune de Villecresnes a mis fin à son détachement dans l'emploi fonctionnel de directrice générale des services par un arrêté du 23 juin 2016 et qu'elle a été placée en surnombre par un arrêté du 2 août 2016, ces changements de situation administrative ayant entraîné une baisse de sa rémunération et la perte de ses primes. L'arrêté du 23 juin 2016, qui a mis fin au détachement de Mme A... dans l'emploi fonctionnel de directrice générale des services, est motivée par la " détérioration des relations de travail et la perte de confiance [du] maire à l'égard de son plus proche collaborateur attestées par les faits suivants : / - manque de compétences et de conscience des impératifs du bon fonctionnement des services et ceci malgré un certain nombre de rappels [du] maire [...] / mise en cause de l'autorité de M. le maire ". Cette mesure, prise dans l'intérêt du service, n'avait pas pour objet de sanctionner Mme A... et ne saurait être regardée comme une sanction, même déguisée. L'arrêté du 2 août 2016 plaçant Mme A... en surnombre, à la suite de la fin de son détachement et en l'absence d'emploi vacant, ne saurait davantage être regardé comme une sanction. Ainsi, et alors même que Mme A... a fait l'objet ultérieurement de poursuites disciplinaires à raison de certains comportements mentionnés dans l'arrêté du 23 juin 2016, elle ne saurait soutenir qu'elle a été sanctionnée deux fois pour les mêmes faits, ni que la commune de Villecresnes aurait méconnu le principe " non bis in idem ". Par suite, le moyen doit être écarté.
9. En quatrième lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
10. L'arrêté contesté relève " qu'il est reproché à Mme A... d'avoir sollicité le maire, es qualité de président du CCAS, pour l'octroi d'une indemnité pour une activité accessoire, disproportionnée, pour compléter sa rémunération et en certifiant le caractère légal de ladite indemnité ", que " Mme A... a soumis à la signature du maire deux arrêtés [...] en date du 5 décembre 2014 et 8 juin 2015, lui attribuant une indemnité pour activité brute de 964 euros bruts portée à 2 560 euros bruts, alors que ces décisions étaient illégales ", que " Mme A... a ignoré les demandes de production de justificatifs de la trésorerie de juillet à septembre 2015, mettant en évidence le caractère illégal des indemnités attribuées, et n'a pas régularisé la situation en qualité de directrice générale des services ", qu'elle " a entrepris des discussions avec la trésorerie pour éviter d'avoir à rembourser les sommes indûment perçues ", qu'elle " a tenté de faire supporter au CCAS de Villecresnes le remboursement des sommes indûment perçues en proposant l'adoption de délibérations illégales, alors qu'il lui appartenait de rechercher une solution légale au versement desdites indemnités ", que Mme A..., " au lieu de rechercher la régularisation de la situation, a proposé au Président du CCAS, au mois de novembre 2015, de faire adopter par le conseil d'administration de l'établissement une délibération illégale tendant à l'attribution de sommes équivalentes à celles indûment perçues pour l'année 2015, que " à la suite de l'émission d'un second titre exécutoire le 12 février 2016 portant sur le recouvrement de la somme de 12 271,08 euros, Mme A... a tenté de faire adopter une seconde délibération illégale tendant à la prise en charge par le CCAS de la demande de remboursement ", qu'enfin, Mme A... " a ouvertement critiqué le maire auprès d'un tiers et défié son autorité ". La matérialité de ces faits n'est pas contestée par Mme A.... Les faits qui lui sont reprochés étaient de nature à justifier une sanction disciplinaire. Eu égard à la gravité des manquements ainsi commis aux obligations lui incombant au titre des fonctions de responsabilité qu'elle occupait alors, la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions n'est pas disproportionnée, en dépit des évaluations ou des appréciations dont a bénéficié Mme A... au cours de sa carrière et de la circonstance qu'elle n'avait jamais fait l'objet, avant l'édiction de l'arrêté contesté, d'une sanction disciplinaire. Elle ne saurait par ailleurs se prévaloir d'un courrier du 18 avril 2016, dans lequel le maire de la commune de Villecresnes indique au maire de la commune de Nogent-sur-Marne qu'elle est disponible pour un recrutement. Par ailleurs, la circonstance que l'arrêté contesté ne comporte pas l'un des motifs de saisine du conseil de discipline - à savoir le fait que Mme A... a sollicité peu après son arrivée l'octroi d'une prime de performance - est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté.
11. Enfin, si Mme A... soutient que l'arrêté attaqué serait entaché d'un détournement de pouvoir dès lors que le maire de la commune de Villecresnes aurait entendu la sanctionner pour avoir contesté le titre de perception du 12 février 2016 devant le Tribunal administratif de Melun et pour avoir tenté de dénoncer un trafic de métaux au sein de la commune, les pièces qu'elle produit n'établissent pas ses allégations, alors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, la sanction infligée est justifiée au regard des faits commis par l'intéressée. Par ailleurs, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi par les conditions de notification de l'arrêté contesté ni par les circonstances de saisine du conseil de discipline, qui ne sauraient être regardées " comme brutales ", ni enfin, par le courrier du maire de Villecresnes du 18 avril 2016, déjà mentionné au point précédent.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
13. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Villecresnes, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
14. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme de 1 500 euros au titre des conclusions de la commune de Villecresnes présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Mme A... versera à la commune de Villecresnes la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... A... et à la commune de Villecresnes.
Délibéré après l'audience du 13 avril 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- M. C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 mai 2021.
Le rapporteur,
K. C...
Le président,
C. JARDIN Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA02385 2