Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 mai 2018 et le 28 décembre 2019, M. D..., représenté par Me B..., puis, en dernier lieu, par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1613950/1-1 du 14 mars 2018 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées.
Il soutient que :
- les procédures pénales et fiscales sont indépendantes ;
- l'administration ne saurait se constituer des preuves à elle-même ;
- il n'a pas bénéficié de la somme de 5 000 000 de dollars américains ayant fondé les redressements en cause ;
- il n'a pas exercé une activité d'apporteur d'affaires au bénéfice de M. C... F., les allégations de ce dernier étant erronées ;
- le montant de la somme en cause n'est pas vraisemblable ;
- l'acquisition au titre de laquelle il aurait oeuvré en qualité d'apporteur d'affaires n'a jamais été conclue ;
- il n'est pas détenteur du compte de la société Himola Cie Corp, qui n'est pas davantage à sa disposition ;
- les majorations et intérêts de retard ne sont pas justifiés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 23 octobre 2018, le 15 octobre 2019 et le 10 juillet 2020, le ministre de l'action et des comptes public conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. D... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. G...,
- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... a été mis en examen le 21 octobre 2014 pour des faits de corruption passive, blanchiment de corruption, blanchiment de fraude fiscale, en France et à l'étranger. Il a fait l'objet d'un contrôle sur pièces de son dossier fiscal à l'issue duquel le service, se fondant sur des éléments obtenus dans l'exercice de son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire, a estimé que l'intéressé avait effectué, au cours de l'année 2009, des prestations d'apporteur d'affaires pour lesquelles il avait perçu des commissions d'un montant total de 5 000 000 de dollars américains. L'administration fiscale, qui a estimé que l'intéressé s'était livré à une activité commerciale occulte d'apporteur d'affaires, a, à raison de cette somme, mis à la charge de M. D..., d'une part, une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu, selon la procédure d'évaluation d'office prévue par l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, selon la procédure de taxation d'office, en application de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. M. D... demande l'annulation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions, ainsi que des pénalités correspondantes.
Sur le bien-fondé des impositions :
2. Aux termes de l'article 34 du général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale [...] ".
3. Aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Aux termes de l'article 259 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle ".
4. L'autorité de la chose jugée qui appartient aux décisions des juges répressifs devenues définitives s'attache à la constatation matérielle des faits mentionnés dans le jugement qui sont le support nécessaire du dispositif. La même autorité ne saurait, en revanche, s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe tirés de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité.
5. Par un jugement du 13 septembre 2019, le Tribunal de grande instance de Paris a déclaré M. D... coupable des faits de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt : dissimulation de sommes - fraude fiscale, commis en 2009 et 2015 à Giverny et Levallois-Perret, sur le territoire national, et condamné l'intéressé à un emprisonnement délictuel de quatre ans. Par un arrêt du 4 mars 2020, la Cour d'appel de Paris a, sur l'action publique, confirmé le jugement du Tribunal de grande instance de Paris sur les déclarations de culpabilité de M. F... D.... Il résulte des motifs de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 mars 2020, qui est devenu définitif faute d'avoir fait l'objet d'un pourvoi en cassation, que M. C... F., industriel belgo-congolais, a effectué, au cours de l'année 2009, deux virements d'un montant total de 5 000 000 de dollars américains sur un compte ouvert au nom de la société Himola Company Corp auprès d'une succursale de la Commerzbank à Singapour. M. C... F. a déclaré qu'il avait entendu, par ce virement, rétribuer M. D... au titre d'une mission d'apporteur d'affaires effectuée par ce dernier dans le secteur de l'uranium en Namibie. Les deux virements effectués par M. C... F. sur le compte de la société Himola Company Corporation ont été confirmés par la réponse du 28 janvier 2015 des autorités fiscales de Singapour à la demande d'assistance administrative internationale qui leur avait été adressée. La Cour d'appel de Paris a par ailleurs relevé, sur la base notamment d'une note Tracfin du 29 septembre 2014, que le compte ouvert par la société Himola Company Corporation - société dont M. D... était le bénéficiaire économique - auprès de la Commerzbank à Singapour avait été ensuite été débité à quatre reprises, entre octobre 2009 et janvier 2010, dans le cadre de l'acquisition, par la SCI Dar Gyucy, d'une villa à Marrakech, dont les époux D... étaient les véritables propriétaires. Au regard de ces divers éléments, la Cour d'appel de Paris a estimé que M. D... était le bénéficiaire effectif de la somme de 5 000 000 dollars américains versée par M. C... A... au titre d'une mission d'apporteur d'affaires. A cet égard, et compte tenu de l'autorité de la chose jugée qui s'attache à la constatation matérielle des faits mentionnés dans l'arrêt de la Cour d'appel de Paris, M. D... ne saurait, d'une part, remettre en cause ni la réalité du versement de la somme en cause, ni son motif, ni son montant, en soutenant notamment qu'il n'a effectué aucune mission auprès de M. C... F., que l'acquisition au titre de laquelle il avait été mandaté en qualité d'apporteur d'affaire ne s'est finalement pas conclue, ou encore qu'il n'entretenait aucun lien avec la société Himola Company Corporation. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service, qui, contrairement à ce que soutient M. D..., ne s'est pas " constitué des preuves à lui-même ", a estimé qu'il avait, en 2009, perçu une rémunération de 5 000 000 de dollars américains à raison d'une activité occulte d'apporteur d'affaires et a mis à sa charge une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée à raison de cette somme.
Sur les majorations et les intérêts de retard :
6. En premier lieu, aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / [...] c. 80 % en cas de découverte d'une activité occulte [...] ".
7. Pour appliquer la majoration de 80 % prévue par le c. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts, le service s'est fondé sur la circonstance que M. D... avait exercé une activité commerciale d'apporteur d'affaires sans être immatriculé au registre du commerce et des sociétés et sans avoir satisfait à ses obligations déclaratives. Eu égard à ce qui a été dit précédemment au point 5, M. D... ne saurait soutenir qu'il n'a pas exercé effectivement une activité occulte d'apporteur d'affaires. Par suite, M. D... n'est pas fondé à demander la décharge de la majoration de 80 % prévue au c. du 1. de l'article 1728 précité du code général des impôts.
8. En second lieu, si M. D... conteste les intérêts de retard qui ont été appliqués sur le fondement de l'article 1727 du code général des impôts, il n'apporte aucune précision au soutien de ses écritures sur ce point.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
D E C I D E:
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction nationale des vérifications de situations fiscales.
Délibéré après l'audience du 9 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- M. G..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 février 2021.
Le rapporteur,
K. G...
Le président,
C. JARDIN Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18PA01646 2