Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 février 2019, la SARL 6ème Sens, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1708494/1-2 du 31 décembre 2018 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la réduction des impositions litigieuses, en droits et pénalités ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement du Tribunal administratif est insuffisamment motivé ;
- la provision pour créance douteuse était fondée et précise ;
- la majoration de 40 % pour dépôt tardif de déclaration n'est pas fondée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL 6ème Sens a notamment pour objet la réalisation de prestations de service aux entreprises en matière de management, stratégie, communication et marketing. A la suite de la vérification de sa comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013, l'administration fiscale lui a notamment notifié, par une proposition de rectification du 29 juillet 2015, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 mai 2013, selon la procédure de taxation d'office prévue au 2° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, et une majoration fondée sur l'article 1728 du code général des impôts. La SARL 6ème Sens fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la réduction des impositions et pénalités litigieuses.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments présentés par la société requérante, ont suffisamment motivé le rejet du moyen par lequel la SARL 6ème Sens soutenait que la provision pour créance douteuse était déductible en relevant, d'une part, que la société invoquait les données financières de l'entreprise débitrice au regard du montant de ce que celle-ci lui devait, et se prévalait de plusieurs relances réalisées auprès de cette société à compter de juin 2013 par des entreprises lui réclamant le paiement de créances, et, d'autre part, que ces circonstances ne lui permettaient pas de considérer, à la date du 31 mai 2013, que le remboursement de sa créance était compromis. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
3. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice. " Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provisions et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées, à cette date, par l'entreprise.
4. La société 6ème Sens détenait, à la clôture de son exercice le 31 mai 2013, des créances sur la société Ice Moon d'un montant total de 105 962,51 euros. Elle a déduit une provision s'élevant à 90 % de ce montant, soit 95 366 euros, que l'administration a rejetée dans la proposition de rectification du 29 juillet 2015. Pour justifier de la régularité de son écriture comptable, et apporter la preuve, qui lui incombe, de l'exagération de l'imposition mise à sa charge, la société requérante invoque, d'une part, la situation financière et commerciale dégradée de la société Ice Moon dont elle avait alors connaissance, notamment un chiffre d'affaires de seulement 67 036 euros au 31 décembre 2012. Elle n'établit pas, ainsi, que les perspectives de redressement de sa cliente étaient improbables. Elle fait, d'autre part, valoir que n'étaient toujours pas réglées, le 31 mai 2013, des créances nées dès le mois de juin 2012. L'écoulement d'un délai de moins d'un an pour les plus anciennes des créances non recouvrées ne démontre toutefois pas le caractère probable de la perte, alors en outre qu'il résulte de l'instruction que le compte de la société Ice Moon dans les livres de 6ème Sens a été crédité, au cours de l'exercice clos le 31 mai 2013, de 57 408 euros, dont encore 7 176 euros le 25 avril 2013. La société requérante n'invoque, enfin, pas utilement des relances vainement réalisées par des entreprises auprès de la société Ice Moon, notamment le 3 juin 2013 et le 27 juin 2014, ou une ordonnance de référé prise par le Tribunal de commerce le 9 juin 2015, postérieures à la clôture de l'exercice, le 31 mai 2013, à la date de laquelle doivent être constatées les circonstances rendant probable la perte des créances en cause. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la provision litigieuse était déductible.
Sur les pénalités :
5. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ".
6. Il est constant que la SARL 6ème Sens n'a déposé sa déclaration n° 2065 d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 mai 2013 que le 15 mai 2015, plus de trente jours après la réception, le 18 juillet 2014, d'une mise en demeure de la déposer du 11 juillet 2014. L'administration était dès lors fondée à appliquer à l'imposition litigieuse la majoration de 40 % prévue au b du 1 de l'article 1728 du code général des impôts, sa bonne foi alléguée étant sans incidence sur le bien-fondé de la pénalité contestée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL 6ème n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL 6ème Sens est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL 6ème Sens et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré).
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme A..., présidente assesseure,
- M. C..., premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2020.
Le rapporteur,
A. C...Le président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19PA00931 2