Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 février 2017 au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, dont le jugement a été attribué à la Cour administrative d'appel de Paris par ordonnance n° 428220 du 1er mars 2019 du président de la section du contentieux de Conseil d'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1500146 du 13 décembre 2016 du Tribunal administratif de la Martinique ;
2°) d'annuler la décision du 7 novembre 2014 du garde des sceaux, ministre de la justice ainsi que la décision du 6 janvier 2015 qui a rejeté son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au ministre de réexaminer sa situation en désignant un expert aux fins de vérifier l'absence de consolidation de sa maladie et son inaptitude à toute fonction ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'un vice de forme, faute d'avoir fait état de l'avis médical du docteur Monrose établi le 24 décembre 2014, produit en première instance ;
- les décisions attaquées sont insuffisamment motivées ;
- elles sont entachées d'une erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2019, la garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- à titre principal, la requête de Mme B..., qui ne contient aucun moyen d'appel, est irrecevable ;
- à titre subsidiaire, aucun des moyens soulevés par Mme B... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'organisation judiciaire ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le décret n° 2003-466 du 30 mai 2003 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public,
- et les observations de Mme B....
Une note en délibéré, enregistrée le 13 novembre 2019, a été présentée par Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., greffière au Tribunal de grande instance de Fort-de-France, souffre d'une pathologie au niveau du canal carpien et du coude, reconnue imputable au service. Par avis du 16 octobre 2014, la commission de réforme a estimé, d'une part, que son état était consolidé au 29 avril 2014, avec un taux d'incapacité temporaire permanente de 7 %, et, d'autre part, qu'elle était apte à la reprise de fonctions, avec restrictions. Par une lettre du 7 novembre 2014, le premier président de la Cour d'appel de Fort-de-France et le procureur général près cette cour ont notifié cet avis à Mme B..., en l'informant de ses conséquences à venir. Après que le comité médical, saisi pour avis, eut confirmé le 4 décembre 2014 celui de la commission de réforme, Mme B... a introduit une réclamation que le premier président et le procureur général ont rejeté par lettre du 7 janvier 2015, après avoir décidé, le 6 janvier 2015, de s'approprier l'avis du 16 octobre 2014. Mme B... relève appel du jugement du 13 décembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande, regardée à juste titre comme tendant à l'annulation de la décision du 6 janvier 2015.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si Mme B... reproche aux premiers juges d'avoir confirmé la date de consolidation de son état de santé au 29 avril 2014, sans avoir fait état de l'avis médical du 24 décembre 2014 par lequel le docteur Monrose l'a déclarée temporairement inapte à l'exercice de ses fonctions, un tel moyen relève du fond du litige, pas de la régularité du jugement dont il est fait appel. En tout état de cause, aucun texte législatif ou réglementaire, ni aucun principe, n'impose aux premiers juges de faire état de toutes les pièces produites devant eux. Le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier doit donc être écarté.
Sur la légalité de la décision contestée :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, alors applicable : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) - refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; / (...) ". L'article 3 de la même loi dispose que : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Enfin, en vertu de l'article 4 de la loi du 11 juillet 1979 : " (...) Les dispositions de la présente loi ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation ou la publication de faits couverts par le secret. ".
4. La décision contestée comporte l'énoncé des considérations de droit sur lesquelles elle est fondée et se réfère aux avis émis par la commission de réforme et le comité médical après qu'ils eurent examiné la situation de Mme B.... Fondée sur des motifs médicaux relatifs à l'état de santé de l'intéressée couverts par le secret réservé par la loi, elle doit être regardée comme suffisamment motivée, quand bien même elle s'est bornée à faire état de la date de consolidation de l'état de santé de Mme B..., de ce que ses arrêts de travail délivrés à compter de cette date relevaient de la maladie ordinaire, de ce que son taux d'incapacité temporaire était fixé à 7 % et de ce qu'elle était désormais considérée comme apte à la reprise de ses fonctions, avec restrictions. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 doit donc être écarté.
5. En second lieu, si Mme B... se prévaut de certificats médicaux faisant état de la persistance de ses douleurs au coude, il n'en résulte pas que la pathologie dont elle souffrait à l'époque du litige devait conduire à une inaptitude totale et définitive et que son état n'était pas consolidé à la date du 29 avril 2014 retenue par l'autorité administrative, laquelle a suivi l'avis de la commission de réforme et du comité médical, eux-mêmes fondés sur l'avis du médecin de prévention. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'une erreur d'appréciation doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la garde des sceaux et de désigner un expert, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa requête. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et à la garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 12 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme A..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 26 novembre 2019.
Le rapporteur,
C. A...Le président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOTLa République mande et ordonne à la garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA20565