Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juillet 2015, le préfet de police conclut à ce que l'Etat et la Ville de Paris soient mis hors de cause.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2015 et un mémoire récapitulatif enregistré le 8 décembre 2015, MmeC... B... et M. D...B..., représentés par la SCP Portejoie, concluent au rejet de l'ensemble des conclusions du Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions et à ce qu'il soit mis à la charge dudit fonds la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que l'action en nullité comme l'action en tierce opposition ne sont pas fondées dès lors que les sommes octroyées par le fonds de garantie au titre de leur préjudice moral ne reposent pas sur le même fait générateur que celui ayant conduit la Cour de céans à condamner l'établissement public de santé Maison blanche.
Par un mémoire, enregistré le 25 août 2015, le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions persiste dans ses conclusions.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 novembre 2015, présenté pour l'établissement public de santé Maison blanche, par Me Jastrzeb, l'hôpital conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des consorts B...la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'établissement public de santé Maison blanche, fait valoir qu'il a déjà versé la somme de 30 000 euros à Mme C...B...et la somme de 15 000 euros à M. D... B... ; que dans cette hypothèse de double indemnisation, il appartient au Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions de saisir la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) pour obtenir que les consorts B...lui remboursent les sommes versées.
Par une décision n° 405654 du 26 janvier 2018, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la Cour n° 15PA01510 du 30 septembre 2016 et a renvoyé l'affaire devant la Cour, laquelle a été enregistrée sous le n° 18PA00375.
Par des nouveaux mémoires, enregistrés le 6 avril 2018 et le 29 mars 2019, le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions, représenté par la SELAFA Cabinet Cassel, persiste dans ses conclusions.
Par un nouveau mémoire, enregistré le 12 mars 2019, Mme C... B... et M. D...B..., représentés par la SCP Portejoie, persistent dans leurs conclusions.
Par un nouveau mémoire, enregistré le 21 mars 2019, l'établissement public de santé Maison blanche, représenté par Me Jastrzeb, persiste dans ses conclusions.
Par une ordonnance du 11 mars 2019 l'instruction a été close le 29 mars 2019 à 12 heures.
Un mémoire a été produit le 2 avril 2019 pour Mme C...B...et M. D...B..., postérieurement à la clôture de l'instruction.
Un moyen susceptible d'être relevé d'office a été communiqué aux parties le 29 mars 2019, tiré de ce que les conclusions subsidiaires du groupe hospitalier universitaire de Paris Psychiatrie et Neuroscience (GHU Paris) tendant, dans l'hypothèse où la Cour ferait droit à la demande du Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions, à ce que les consorts B...soient condamnés à restituer les indemnités qui leur ont été réglées sont irrecevables parce que présentant un litige distinct de celui soumis à la Cour.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Luben,
- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,
- et les observations de Me A...de la SELAFA Cabinet Cassel, avocat du Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions, et de Me Jastrzeb, avocat de l'établissement public de santé Maison blanche.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêt du 8 juin 2007, la Cour d'appel de Paris, réformant une décision de la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions du Tribunal de grande instance de Paris du 25 juin 2005, a mis à la charge du Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions (FGTI) une somme de 25 000 euros au titre du préjudice moral subi par Mme C... B..., une somme de 10 000 euros au titre du préjudice de son fils, ainsi que les frais d'obsèques, évalués à 2 846 euros. Par un arrêt n° 10PA01714 en date du 25 septembre 2014, la Cour de céans a déclaré l'établissement public de santé Maison blanche responsable du décès de M. E... B..., en raison des défaillances relevées dans le suivi psychiatrique de son meurtrier, et l'a condamné à verser à MmeB..., sa mère, une somme de 30 000 euros et à M. D... B..., son frère, une somme de 15 000 euros en réparation de leur préjudice moral. Le FGTI demande à la Cour d'annuler l'arrêt du 25 septembre 2014 en tant qu'il condamne l'établissement public de santé à verser des sommes correspondant à celles qu'il a lui-même versées aux intéressés.
Sur l'action en nullité :
2. Aux termes de l'article 706-12 du code de procédure pénale : " Si la victime ou ses ayants droit se constituent partie civile devant la juridiction répressive ou engagent une action contre les personnes responsables du dommage, ils doivent indiquer, en tout état de la procédure, s'ils ont saisi la commission instituée par l'article 706-4 et si, le cas échéant, celle-ci leur a accordé une indemnité. A défaut de cette indication, la nullité du jugement en ce qui concerne ses dispositions civiles pourra être demandée par toute personne intéressée pendant deux ans à compter de la date à partir de laquelle ledit jugement est devenu définitif ".
3. Le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 706-12 du code de procédure pénale pour soutenir que la décision attaquée serait frappée de nullité dès lors que les dispositions de cet article ne sont pas applicables devant le juge administratif.
Sur la tierce opposition :
En ce qui concerne la recevabilité de la tierce opposition :
4. Aux termes de l'article R. 832-1 du code de justice administrative, " toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu'elle représente n'ont été présents ou régulièrement appelés dans l'instance ayant abouti à cette décision " et aux termes de l'article 706-11 du code de procédure pénale : " Le fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l'infraction ou tenues à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle le remboursement de l'indemnité ou de la provision versée par lui, dans la limite du montant des réparations à la charge desdites personnes. (...) / Le fonds peut exercer ses droits par toutes voies utiles, y compris par voie de constitution de partie civile devant la juridiction répressive et ce, même pour la première fois, en cause d'appel. (...) ". En raison de la subrogation du Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions, prévue à cet article, dans les droits de la victime et en application des principes qui gouvernent la procédure devant le juge administratif, ce dernier, informé de ce que la personne victime d'une infraction a saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infraction pénale ou obtenu une indemnité versée par le Fonds doit, à peine d'irrégularité de son jugement, mettre en cause le fonds dans l'instance dont il est saisi afin, d'une part, de permettre à celui-ci d'exercer son droit de subrogation et, d'autre part, de s'assurer qu'il ne procédera pas, s'il donne suite à la demande de condamnation, à une double indemnisation des mêmes préjudices. Si le Fonds, subrogé dans les droits de la victime, n'est pas appelé dans l'instance engagée par celle-ci contre une personne responsable de son préjudice, il est recevable à former tierce opposition au jugement rendu dans cette instance et qui préjudicie à ses droits, que la juridiction statuant au fond ait été informée ou non de ce qu'une indemnité avait préalablement été versée par le Fonds.
5. Il ressort des pièces du dossier de l'affaire jugée par la Cour le 25 septembre 2014 sous le n° 10PA01714 que la requête de Mme C...B...et M. D... B...n'a pas été communiquée au Fonds, et qu'il n'a été ni appelé ni représenté à l'instance qui préjudicie à ses droits. Dès lors, le recours en tierce opposition formé par le Fonds contre l'arrêt n° 10PA0174 du 25 septembre 2014 de la Cour, qui préjudiciait à ses droits en accordant à Mme B...et à M. B... une indemnisation au titre du préjudice moral subi du fait du décès de leur fils et frère, mise à la charge de l'établissement public de santé Maison Blanche, dès lors qu'il était subrogé dans les droits de ces victimes à raison de l'indemnisation qu'il leur avait lui-même versée, est recevable.
En ce qui concerne le bien-fondé de la tierce opposition :
6. Comme il a été dit ci-dessus, par un arrêt du 8 juin 2007, la Cour d'appel de Paris, réformant une décision de la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions du Tribunal de grande instance de Paris du 25 juin 2005, a mis à la charge du Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions le versement à Mme B... d'une somme de 25 000 euros et à M. D... B...une somme de 10 000 euros au titre de leur préjudice moral subi du fait du décès de leur fils et frère. Par l'arrêt n° 10PA01714 en date du 25 septembre 2014 à l'encontre duquel il est fait tierce opposition, la Cour de céans a déclaré l'Etablissement public de santé Maison blanche responsable du décès de M. E...B...en raison des défaillances relevées dans le suivi psychiatrique de son meurtrier, et l'a condamné à verser à Mme B...une somme de 30 000 euros et à M. D...B...une somme de 15 000 euros en réparation de leur préjudice moral subi du fait du décès de leur fils et frère. En application des dispositions susrappelées de l'article 706-11 du code de procédure pénale, le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions aurait dû être subrogé dans les droits de Mme B...et de M. D... B...dans l'instance qui a opposé ces derniers, devant la Cour, à l'établissement public de santé Maison Blanche pour obtenir de celui-ci, responsable du décès de M. E... B..., le remboursement des indemnités de 25 000 euros et de 10 000 euros versées par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions respectivement à Mme B...et à M. D... B...au titre de leur préjudice moral, ainsi que des sommes de 2 846 euros, versée au titre des frais d'obsèques, et de 450 euros versée au titre de l'article 700 du code de procédure civile. En effet, contrairement à ce que soutiennent les consortsB..., l'indemnité qui leur a été versée par l'arrêt de la Cour n° 10PA01714 du 25 septembre 2014 ne procède pas d'un fondement juridique distinct et de faits différents que l'indemnité qui leur a été allouée par la décision de la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions du Tribunal de grande instance de Paris du 25 juin 2005, réformée par l'arrêt du 8 juin 2007 de la Cour d'appel de Paris, les deux indemnités visant à réparer leur préjudice moral subi du fait du décès de leur fils et frère, M. E...B....
7. Il s'en suit que le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions est fondé à demander, d'une part, que l'article 2 de l'arrêt n° 10PA01714 de la Cour du 25 septembre 2014 soit déclaré non avenu en tant qu'il a condamné l'établissement public de santé Maison Blanche à verser à Mme B...une somme supérieure à 5 000 euros et à M. D...B...une somme supérieure à 5 000 euros au titre de leur préjudice moral, d'autre part, que le groupe hospitalier universitaire de Paris Psychiatrie et Neuroscience (GHU Paris), venant aux droits et obligations de l'établissement public de santé Maison Blanche, soit condamné à lui verser, en sa qualité de subrogé dans les droits de Mme B...et de M. D...B..., une somme de 25 000 euros et une somme de 10 000 euros correspondant aux indemnités par lui versées respectivement à Mme B...et à M. D...B...au titre de leur préjudice moral en exécution de l'arrêt, devenu définitif, du 8 juin 2007, de la Cour d'appel de Paris, et enfin à ce que les frais d'obsèques de M. E... B..., pour une somme de 2 846 euros, qu'il a été condamné à rembourser aux consorts B...par l'arrêt du 8 juin 2007, de la Cour d'appel de Paris, et la somme de 450 euros correspondant aux frais irrépétibles mis à la charge par la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions dans sa décision du 24 juin 2005 sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur les conclusions subsidiaires du groupe hospitalier universitaire de Paris Psychiatrie et Neuroscience (GHU Paris) tendant, dans l'hypothèse où la Cour ferait droit à la demande du Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions, à ce que les consorts B...soient condamnés à restituer les indemnités qui leur ont été réglées :
8. Les conclusions susvisées du groupe hospitalier universitaire de Paris Psychiatrie et Neuroscience (GHU Paris), qui présentent un litige distinct de celui soumis à la Cour, sont, par suite, irrecevables et doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge du Fonds de garantie des actes de terrorismes et d'autres infractions et des consortsB..., qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, les sommes que demandent, pour le premier, les consortsB..., et pour les seconds, l'établissement public de santé Maison Blanche, au titre des frais liés à l'instance et exposés par eux.
10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge du Fonds de garantie des actes de terrorismes et d'autres infractions les frais liés à l'instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La tierce opposition formée par le Fonds de garantie d'actes de terrorismes et d'autres infractions est admise.
Article 2 : L'article 2 de l'arrêt n° 10PA01714 du 25 septembre 2014 de la Cour est déclaré non avenu en tant qu'il a condamné l'établissement public de santé Maison Blanche, aux droits et obligations duquel vient le groupe hospitalier universitaire de Paris Psychiatrie et Neuroscience (GHU Paris), à verser à Mme B...une somme supérieure à 5 000 euros et à M. D...B...une somme supérieure à 5 000 euros au titre de leur préjudice moral.
Article 3 : L'établissement public de santé Maison Blanche, aux droits et obligations duquel vient le groupe hospitalier universitaire de Paris Psychiatrie et Neuroscience (GHU Paris), est condamné à verser au Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions la somme totale de 38 296 euros.
Article 4 : Le surplus des conclusions du Fonds de garantie d'actes de terrorismes et d'autres infractions et les conclusions des consorts B...sont rejetés.
Article 5 : Les conclusions présentées par Mme C... B...et par M. D... B..., par l'établissement public de santé Maison Blanche, et par le Fonds de garantie d'actes de terrorismes et d'autres infractions, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au Fonds de garantie d'actes de terrorismes et d'autres infractions, à Mme C...B..., à M. D... B..., au groupe hospitalier universitaire de Paris Psychiatrie et Neuroscience (GHU Paris), à la ministre des solidarités et de la santé et au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 4 avril 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 juillet 2019.
Le rapporteur,
I. LUBENLe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
Y. HERBER
La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA00375