Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 décembre 2020, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 2 à 4 du jugement n° 2017864/8 du 25 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a retenu comme fondé le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que l'arrêté en litige n'a pas pour objet de renvoyer M. C... en Afghanistan mais seulement de le transférer en Suède qui est l'Etat responsable de sa demande d'asile ;
- les autres moyens soulevés par M. C... en première instance ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à M. C... qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. F... C..., ressortissant afghan, a été reçu par les services de la préfecture le 15 septembre 2020 afin de solliciter son admission au séjour au titre de l'asile. Par un arrêté du 28 octobre 2020, le préfet de police a ordonné son transfert aux autorités suédoises. Le préfet de police relève appel du jugement du 25 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de M. C..., cet arrêté.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Paris :
2. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
3. Pour annuler l'arrêté portant transfert de M. C... aux autorités suédoises au motif qu'il méconnaît les stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le premier juge s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé serait obligé, en cas de renvoi dans son pays d'origine, de passer par Kaboul, seul point d'entrée sur le territoire afghan par voie aérienne depuis l'étranger où il se trouverait exposé à un risque réel de subir des traitements inhumains ou dégradants prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que sa demande d'asile ayant été définitivement rejetée en Suède et ayant fait l'objet de deux obligations de quitter le territoire à destination de l'Afghanistan à l'encontre desquels ses recours contentieux ont été rejetés, il existe ainsi de fortes probabilités que l'intéressé soit expulsé vers son pays d'origine en cas de remise aux autorités de ce pays. Toutefois, l'arrêté en litige a seulement pour objet de renvoyer l'intéressé en Suède et non dans son pays d'origine. Au demeurant la Suède, Etat membre de l'Union européenne, est partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Or M. C... n'établit pas qu'il existerait de sérieuses raisons de croire à l'existence de défaillances systémiques en Suède dans la procédure d'asile ou que la demande d'asile de M. C... n'aurait pas été traitée dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Et il ne ressort pas des pièces du dossier, alors même que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office suédois des migrations du 11 octobre 2018, confirmée par jugement du tribunal administratif de Lulea du 2 mai 2019 puis par un arrêt de la cour administrative d'appel de Stockholm du 4 juillet 2019, et que par ailleurs sa demande d'autorisation de séjour et de travail a également été rejetée par une décision de l'Office suédois des migrations du 6 mars 2020, confirmée par un jugement du tribunal administratif de Stockholm du 17 avril 2020, que les autorités suédoises n'évalueront pas, avant de procéder à un éventuel éloignement de l'intéressé, les risques auxquels il serait exposé en cas de retour en Afghanistan. Dans ces conditions, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé l'arrêté du 28 octobre 2020 au motif qu'il méconnaitrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
4. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Paris.
Sur les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal :
5. En premier lieu, par un arrêté n° 2020-00799 du 1er octobre 2020, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de Paris, le préfet de police a donné à M. A... D..., attaché d'administration de l'Etat au sein du 12ème bureau de la direction de la police générale de la préfecture de police et signataire de l'arrêté contesté, délégation à effet de signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure la police des étrangers, en cas d'absence ou d'empêchements d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l'acte contesté. Le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté aurait été signé par une autorité incompétente doit, par suite, être écarté comme manquant en fait.
6. En deuxième lieu, l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. ".
7. Si M. C... entend soulever le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, il ressort des mentions de l'arrêté contesté que celui-ci indique le prénom, le nom et la qualité de son signataire. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
8. En troisième lieu, en application des dispositions codifiées alors à l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et désormais à l'article L. 572-1 de ce code, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.
9. En outre, selon l'avis n° 420900 du 7 décembre 2018 du Conseil d'Etat, lorsqu'une personne a antérieurement présenté une demande d'asile sur le territoire d'un autre Etat membre, elle peut être transférée vers cet Etat, à qui il incombe de la reprendre en charge, sur le fondement des b), c) et d) du paragraphe 1 de l'article 18 du chapitre V et du paragraphe 5 de l'article 20 du chapitre VI du règlement (UE) n° 604/2013. Cet avis expose en outre qu'est suffisamment motivée, au sens des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile désormais codifiées à l'article L. 572-1 de ce code, une décision de transfert qui mentionne le règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application. L'avis précise à titre d'exemple que, s'agissant d'un étranger ayant, dans les conditions posées par le règlement, présenté une demande d'asile dans un autre Etat membre et devant, en conséquence, faire l'objet d'une reprise en charge par cet Etat, doit être regardée comme suffisamment motivée la décision de transfert qui, après avoir visé le règlement, relève que le demandeur a antérieurement présenté une demande dans l'Etat en cause, une telle motivation faisant apparaître qu'il est fait application du b), c) ou d) du paragraphe 1 de l'article 18 ou du paragraphe 5 de l'article 20 du règlement.
10. La décision de transfert en litige vise, notamment, le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle indique que M. C..., de nationalité afghane, a demandé l'asile en France le 15 septembre 2020, que la comparaison de ses empreintes digitales au moyen du système "Eurodac " a révélé qu'il avait sollicité l'asile auprès des autorités suédoises le 9 novembre 2015, expose que les critères prévus par le chapitre III ne sont pas applicables à sa situation et que les autorités suédoises doivent être regardées comme responsables de sa demande d'asile. En outre, elle précise que ces autorités, qui ont été saisies le 23 septembre 2020 d'une demande de reprise en charge de l'intéressé en application de l'article 18-1-b du règlement (UE) n° 604/2013 ont fait connaître leur accord le 30 septembre 2020 sur le fondement de l'article 18-1-d de ce règlement. Ainsi, la décision expose, de façon suffisamment précise, les considérations de droit et de fait qui ont conduit le préfet de police à estimer, sur le fondement des dispositions de l'article 18-1-d du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, que la Suède est responsable de l'examen de la demande d'asile de M. C.... Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision contestée ne satisferait pas à l'exigence de motivation posée par les dispositions codifiées alors à l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et désormais à l'article L. 572-1 de ce code, ne peut qu'être écarté.
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Droit à l'information / 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; / e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. (...) ".
12. Il ressort des pièces du dossier que M. C... s'est vu remettre contre signature, le 15 septembre 2020, la brochure intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " (brochure A), la brochure intitulée " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " (brochure B), le guide du demandeur d'asile et la brochure Eurodac. Il ressort des pièces du dossier que ces brochures, dont M. C... a signé la première page sans émettre aucune réserve, lui ont été remises dans leur intégralité ainsi que cela ressort des mentions apposées sur chacune d'elles. Par ailleurs, M. C... soutient que la notice d'information pour les personnes dont l'examen de la demande d'asile relève de la compétence de la France et portant sur le choix de la langue dans laquelle ils souhaitent être entendus ne lui a pas été remise et qu'il n'a ainsi pas pu porter à la connaissance de l'administration la langue dans laquelle il souhaitait que les informations lui soient communiquées. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les documents lui ont été remis en langue dari, l'une des deux langues officielles de l'Afghanistan, que l'intéressé n'a émis aucune réserve quant à la compréhension de cette langue lors de la remise des brochures et qu'il a déclaré comprendre lors de l'entretien individuel. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013.
13. En cinquième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) . / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. ".
14. La conduite de l'entretien par une personne qualifiée en vertu du droit national constitue, pour le demandeur d'asile, une garantie. Il ressort des pièces du dossier, notamment du compte-rendu de cet entretien versé au dossier de première instance par le préfet de police, que M. C... a bénéficié d'un entretien individuel le 15 septembre 2020 dans les locaux de la préfecture de police, que cet entretien a été réalisé en présence d'un interprète en langue dari, langue que l'intéressé a déclaré comprendre et qu'il a ainsi eu la possibilité de faire part de toute information pertinente relative à la détermination de l'Etat responsable. L'intéressé ne fait état devant la Cour d'aucun élément laissant supposer que cet entretien ne se serait pas déroulé dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article 5 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013. Si le résumé de l'entretien individuel, dont l'intéressé a eu connaissance, comme l'atteste l'apposition de sa signature, ne mentionne pas le nom et la qualité de l'agent qui a conduit l'entretien, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été reçu par un agent du 12ème bureau de la direction de la police générale en charge de l'asile à la préfecture de police. Dès lors que l'entretien de M. C... a été mené par une personne qualifiée au sens du 5 de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013, l'absence d'indication de l'identité de l'agent ayant conduit l'entretien est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie dès lors qu'elle n'a pas privé M. C... de la garantie tenant au bénéfice de cet entretien et à la possibilité de faire valoir toutes observations utiles et, en l'espèce, n'a pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise. Par ailleurs, il ne résulte ni des dispositions du règlement (UE) du 26 juin 2013, ni d'aucune autre disposition législative ou règlementaire que l'agent chargé de mener l'entretien individuel en vue de déterminer l'Etat membre responsable de l'examen de la demande d'asile, qui revêt le caractère d'une mesure préparatoire, devrait bénéficier d'une délégation de signature du préfet de police. En outre, aucune disposition n'impose de mentionner dans ce résumé la durée de l'entretien, la possibilité de procéder à une relecture dudit résumé ou la possibilité pour le conseil de l'intéressé d'en solliciter la communication. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait méconnu les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.
15. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ".
16. Il ressort des pièces du dossier, et ainsi qu'il a été dit au point 14 du présent arrêt, qu'un entretien individuel a été accordé à M. C... le 15 septembre 2020, à l'occasion duquel l'intéressé a pu faire valoir utilement les éléments pertinents susceptibles d'influencer la décision du préfet de police sur son éloignement. M. C..., qui a signé le compte-rendu de cet entretien sur lequel a été apposé la mention " Observations : l'administré n'a pas d'autre déclaration ", n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'il aurait été empêché de présenter ses observations avant l'édiction de la mesure prise à son encontre. Le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux aurait été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration doit dès lors être écarté.
17. En septième lieu, les dispositions de l'article 24 du règlement n° 604/2013 régissent la procédure applicable aux requêtes aux fins de reprise en charge lorsqu'aucune nouvelle demande d'asile n'a été introduite dans l'Etat membre. La situation de M. C... ne relevant pas de ces dispositions, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 24 du règlement n° 604/2013 comme inopérant.
18. En huitième lieu, aux termes de l'article 23 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Lorsqu'un Etat membre auprès duquel une personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu'un autre Etat membre est responsable conformément à l'article 20, paragraphe 5, et à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre Etat membre aux fins de reprise en charge de cette personne. / 2. Une requête aux fins de reprise en charge est formulée aussi rapidement que possible et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac (" hit "), en vertu de l'article 9 paragraphe 5, du règlement (UE) n° 603/2013. ". Aux termes de l'article 25 du même règlement : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. / 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée ".
19. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a saisi le 23 septembre 2020 les autorités suédoises d'une demande de reprise en charge de la demande d'asile de M. C... sur la base des résultats positifs du système Eurodac communiqués le 15 septembre 2020 et que, par une réponse en date du 30 septembre 2020, les autorités suédoises ont accepté leur responsabilité sur le fondement des dispositions de l'article 18-1 d) du règlement n° 604/2013. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté aurait été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, faute pour le préfet de police de justifier avoir procédé aux diligences requises dans le délai imparti par les dispositions précitées, doit être ainsi écarté.
20. En neuvième lieu, aux termes de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 : " (...) / 2. La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'État membre responsable. ".
21. M. C... soutient que le préfet de police a méconnu les dispositions précitées de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 au motif qu'il n'est pas établi qu'il aurait porté à sa connaissance les informations relatives à la mise en oeuvre du transfert, notamment s'agissant des informations relatives à l'hypothèse où il souhaiterait exécuter le transfert par ses propres moyens, ni que ces informations lui auraient été délivrées au moyen d'un laissez-passer. D'une part, si les conditions de notification de l'arrêté litigieux peuvent avoir une incidence sur l'opposabilité des voies et délai de recours, elles sont sans incidence sur sa légalité. D'autre part, les dispositions citées au point précédent n'imposent pas la mention systématique des informations relatives au lieu et à la date auxquels le demandeur doit se présenter mais précisent uniquement que ces informations sont indiquées " si nécessaire ". Dans ces conditions, et alors que l'intéressé n'allègue pas avoir avisé les autorités françaises de son intention de se rendre par ses propres moyens dans l'Etat responsable du traitement de sa demande d'asile, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait méconnu l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013.
22. En dixième lieu, aux termes de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement ".
23. M. C... soutient que sa demande d'asile ayant définitivement été rejetée en Suède, sa remise aux autorités de ce pays entraînera par ricochet son renvoi en Afghanistan où il risque d'être exposé à des traitements inhumains ou dégradants compte tenu du climat de violence généralisée qui y règne. Toutefois, et ainsi qu'il a déjà été dit, l'arrêté en litige a seulement pour objet de prononcer le transfert de M. C... vers la Suède et non de le renvoyer en Afghanistan. En outre, la Suède, Etat membre de l'Union européenne, est partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. De même, et ainsi qu'il a été dit au point 3 du présent arrêt, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existerait des défaillances systémiques en Suède dans la procédure d'asile ou que la demande d'asile de l'intéressé n'aurait pas été traitée dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et s'il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile de M. C... a définitivement été rejetée par les autorités suédoises, il n'est pas établi que ces autorités n'évalueront pas avant de procéder à un éventuel éloignement de l'intéressé, les risques auxquels il serait exposé en cas de retour en Afghanistan. Par suite, les moyens tirés de ce que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 et aurait méconnu les stipulations de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doivent être écartés.
24. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 28 octobre 2020 décidant la remise aux autorités suédoises de M. C..., lui a enjoint de délivrer à M. C... une attestation de demandeur d'asile en procédure normale et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, et à demander en conséquence l'annulation de ce jugement.
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 2 à 4 du jugement n° 2017864/8 du 25 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente,
- Mme B..., première conseillère,
- Mme E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 mai 2021.
La présidente de la 8ème chambre,
H. VINOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA04076