Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 avril et 6 mai 2016, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1509415/6-3 du 28 janvier 2016 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont annulé son arrêté comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, eu égard à la brièveté du séjour en France de M.A..., à l'absence de spécificité des études et d'intégration particulière en France ; en outre, les premiers juges se sont fondés sur des éléments postérieurs à la décision attaquée et M. A...ne justifie pas d'attaches familiales en France ;
- s'agissant des autres moyens soulevés devant les premiers juges, il se rapporte à ses écritures de première instance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2016, M.A..., représenté par Me Sulli, avocat, conclut au rejet de la requête, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, subsidiairement, dans l'hypothèse où il serait admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle, à la condamnation de l'Etat à verser à Me Sulli la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que les moyens invoqués par le préfet de police ne sont pas fondés.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 23 septembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dalle,
- et les observations de Me Sulli, avocate de M.A....
1. Considérant que M.A..., ressortissant guinéen né le 21 septembre 1995, entré en France, selon ses déclarations, le 15 octobre 2012, a sollicité le 24 décembre 2014 la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " à raison de ses liens privés et familiaux en France, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 7 avril 2015, le préfet de police a rejeté sa demande ; que, par la présente requête, le préfet de police, relève appel du jugement du 28 janvier 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté et lui a enjoint la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;
2. Considérant que le préfet de police soutient que M.A..., entré irrégulièrement en France, était présent en France depuis moins de trois ans à la date de l'arrêté contesté, que ses études ne revêtent pas de spécificité particulière et qu'il ne justifie pas être particulièrement bien intégré en France, ni être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; que toutefois il ressort des pièces du dossier que M. A...est arrivé en France à l'âge de 17 ans ; qu'il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) du département de Paris et maintenu auprès de ces services jusqu'à sa majorité ; qu'il a ensuite conclu successivement deux contrats " jeune majeur ", dont le dernier prenait fin le 30 septembre 2015, pour lui permettre de poursuivre ses études et passer un bac professionnel ; qu'il a fait preuve d'un réel effort d'intégration et d'un grand sérieux dans le suivi de sa formation puisqu'arrivé en France en cours d'année scolaire 2012-2013, il a obtenu à l'issue de celle-ci un brevet d'études professionnelles avec les félicitations du jury ; qu'il est ensuite passé en première, puis en terminale et a obtenu en juin 2015 un baccalauréat professionnel spécialité " transport " ; qu'au cours de ces trois années d'études, il a obtenu de bons résultats et recueilli régulièrement les compliments ou les encouragements du conseil de classe ; que tous ses éducateurs et formateurs ont noté sa volonté de s'insérer socialement ; qu'en 2016, il était administrateur de l'association départementale d'entraide des personnes accueillies en protection de l'enfance (ADEPAPE 91) ; que même si elle est postérieure à la décision attaquée, cette circonstance confirme sa volonté d'intégration ; que, dans ces conditions et alors même qu'à la date de la décision de refus de séjour contestée, M. A...n'était pas encore assuré de pouvoir intégrer un centre de formation d'apprentis, faute d'avoir trouvé une entreprise lui proposant un contrat d'apprentissage et qu'il ne serait pas dépourvu d'attaches familiales en Guinée, le refus de séjour qui lui a été opposé est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 7 avril 2015 ;
4. Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me Sulli, son conseil, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Me Sulli, avocat de M.A..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B...A..., au préfet de police et à Me Sulli.
Délibéré après l'audience du 16 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 30 mars 2017.
Le rapporteur,
D. DALLELe président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA01184