Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 octobre 2017, Mme B..., représentée par Me Pierre, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1620719, 1620721 et 1702217/1-1 du 17 mai 2017, en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision implicite du 26 juin 2016 et de la décision du 15 décembre 2016 par lesquelles le préfet de police a rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat, Me Pierre, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision du 15 décembre 2016 du préfet de police est entachée d'erreur de droit dès lors qu'il ne pouvait lui opposer l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour refuser de lui octroyer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " ;
- la décision litigieuse méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 11 septembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stoltz-Valette,
- et les observations de Me Victor, avocat de Mme B....
1. Considérant que MmeB..., ressortissante algérienne née le 1er juin 1981, est entrée en France le 8 juillet 2013 sous couvert d'un visa Schengen, avec sa fille, HanaB..., née le 10 mars 2011 et atteinte d'une aplasie médullaire sévère ; qu'elle a été mise en possession, à compter du 23 septembre 2013, d'autorisations provisoires de séjour successives en qualité d'accompagnant d'enfant malade, sur le fondement des dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'intéressée a sollicité, par une lettre du 24 février 2016, reçue le 26 février, puis en se présentant aux services de la préfecture de police le 13 avril 2016, la délivrance d'un certificat de résidence algérien sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ainsi qu'un document de circulation pour étrangers mineurs au profit de sa fille ; que par des décisions du 2 mars 2016, du 26 juin 2016 et du 15 décembre 2016, le préfet de police a rejeté ces demandes ; que Mme B...fait appel du jugement du 17 mai 2017 du Tribunal administratif de Paris, en tant que ce jugement a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision implicite du 26 juin 2016 et de la décision du 15 décembre 2016 par lesquelles le préfet de police a rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant que si Mme B...demande l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant quatre mois par le préfet de police sur sa demande de titre de séjour, il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 15 décembre 2016, le préfet de police a expressément rejeté cette demande ; que cette décision explicite s'est valablement substituée à la décision implicite initialement contestée ; que, dans ces conditions, Mme B...doit être regardée comme demandant l'annulation de la décision du 15 décembre 2016 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de certificats médicaux des 11 janvier et 21 juin 2016 du Docteur Leblanc, praticien hospitalier à l'hôpital Robert Debré, que la fille de MmeB..., HanaB..., âgée de 5 ans et 9 mois, souffre d'une aplasie médullaire sévère post hépatitique qui nécessite une prise en charge médicale qui ne peut être assurée de façon optimale en Algérie et dont le défaut pourrait entraîner pour l'intéressée des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'il ressort également de ces certificats que la prise en charge de Hana B...devait, à la date de la décision litigieuse, se poursuivre pendant au moins six mois avec éventuellement une greffe de moelle avec un donneur non apparenté et que la présence de sa mère à ses côtés était indispensable ; qu'ainsi, Mme B...a vocation à se maintenir sur le territoire français aux côtés de son enfant et ce pendant plusieurs années si une greffe s'avère être nécessaire ; qu'en outre, la délivrance d'autorisations provisoires de séjour renouvelées d'une durée inférieure à six mois fait obstacle à l'obtention d'un logement stable et d'un emploi et ne permet pas, par suite, à Mme B...de subvenir convenablement aux besoins de sa fille ; que, dans ces circonstances particulières, en refusant de délivrer à Mme B...un certificat de résident portant la mention " vie privée et familiale ", le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 décembre 2016 par laquelle le préfet de police a refusé de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à Mme B...un titre de séjour ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de police d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. Considérant que Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Pierre, avocat de Mme B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Pierre de la somme de 1 500 euros ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement nos 1620719, 1620721 et 1702217/1-1 du 17 mai 2017 du Tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation de la décision du 15 décembre 2016 par laquelle le préfet de police a rejeté la demande de Mme B...tendant à la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ".
Article 2 : La décision du 15 décembre 2016 du préfet de police est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme B...un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Me Pierre, avocat de MmeB..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...épouse B..., au préfet de police, au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me Pierre.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 31 mai 2018.
Le rapporteur,
A. STOLTZ-VALETTELe président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA03293