Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 mars 2020 sous le n° 20MA01063 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 20TL01063 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, M. et Mme B..., représentés par Me Guyon, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013, et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les documents obtenus par l'administration en réponse à ses demandes de communication faites le 19 mai 2015 et le 4 juin 2015 ne leur ont pas été communiqués, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
- l'information ainsi donnée par l'administration sur l'existence de documents obtenus de tiers a méconnu les droits de la défense ;
- les frais de déplacements professionnels sont justifiés dans leur réalité et leur caractère professionnel par la production, notamment, des agendas et de tableaux des déplacements qui ont été effectués au moyen de deux véhicules ;
- la pénalité pour manquement délibéré n'est pas fondée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 juillet 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 7 janvier 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de M. et Mme B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Barthez,
- et les conclusions de Mme Torelli, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société BCL Telecom, qui réalise des travaux de câblage et de maintenance sur les lignes téléphoniques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2012 au 30 novembre 2014. A la suite de ces opérations de contrôle, l'administration a rehaussé les revenus de M. B..., directeur salarié de cette société, et de son épouse au titre des années 2012 et 2013 dans la catégorie des traitements et salaires, notamment à raison de frais de déplacement professionnel non justifiés, et dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les sommes virées des comptes bancaires de la société BCL Telecom sur le compte bancaire personnel de M. B... sans aucun enregistrement comptable étant regardées comme des distributions occultes au sens du c de l'article 111 du code général des impôts. M. et Mme B... font appel du jugement du 7 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013 et des pénalités correspondantes, notamment de la pénalité pour manquement délibéré.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il résulte de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus après de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée.
3. Il résulte de l'instruction que, dans sa réponse du 13 janvier 2016 aux observations de M. et Mme B..., l'administration les a pour la première fois informés qu'elle avait exercé son droit de communication le 19 mai 2015 et le 4 juin 2015 ainsi que des documents qu'elle avait obtenus en réponse le 29 juillet 2015, après la proposition de rectification du 22 juillet 2015, et qui confirmaient que M. B... était le bénéficiaire de sommes versées par la société BCL Telecom. Toutefois, M. et Mme B... n'ont fait aucune demande de communication de ces documents, qui étaient précisément identifiés, après avoir été informés que l'administration les avait obtenus. La seule mention générale contenue dans la réponse antérieure des contribuables du 25 septembre 2015 tendant à l'obtention des documents obtenus par l'administration ne peut être regardée comme une demande tendant à la communication de ces documents. Pour ce motif, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit donc être écarté.
4. En deuxième lieu, l'exercice par l'administration, le 19 mai 2015 et le 4 juin 2015, de son droit de communication auprès de tiers n'a pas été mentionné dans la proposition de rectification du 22 juillet 2015 et n'a été révélé à M. et Mme B... que dans la réponse du 13 janvier 2016 aux observations des contribuables. Toutefois, cette information a été donnée avant la mise en recouvrement des impositions. Elle est donc conforme aux dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et, en tout état de cause, n'a pas porté atteinte aux droits de la défense.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 82 du code général des impôts : " Pour la détermination des bases d'imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés en sus des traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères proprement dits (...) ". L'article 83 du même code dispose que : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : / (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales (...) ".
6. Les agendas manuscrits et les tableaux établis par la société BCL Telecom elle-même reconstituant les trajets qui auraient été effectués par M. B... ne suffisent pas à établir, en l'absence de toute autre pièce, que les déplacements professionnels au titre des années 2012 et 2013 auraient été supérieurs à 20 000 km par an. Par suite, M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que les frais de déplacements professionnels seraient supérieurs à ceux qui ont été retenus par l'administration.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ". L'article 1729 du code général des impôts dispose que : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
8. Les rectifications concernent, notamment, la surévaluation des frais professionnels et l'absence de déclaration de plusieurs versements de la société BCL Telecom sur le compte bancaire personnel de M. B.... Ces inexactitudes et omissions sont répétées et, en outre importantes, le revenu rectifié au titre de l'année 2012 s'établissant à la somme de 197 053 euros alors qu'un montant de 33 508 euros seulement a été déclaré et le revenu rectifié au titre de l'année 2013 s'établissant à la somme de 131 951 euros alors que seul un montant de 39 633 euros a été déclaré. Ainsi, l'administration établit le caractère délibéré des manquements reprochés à M. et Mme B.... C'est, par suite, à bon droit que la majoration litigieuse a été appliquée aux droits supplémentaires mis à la charge des requérants.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à M. et Mme B... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2022, où siégeaient :
- M. Barthez, président,
- Mme Fabien, présidente assesseure,
- Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2022.
Le président-rapporteur,
A. BARTHEZL'assesseure la plus ancienne,
M. FABIEN
Le greffier,
F. KINACH
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°20TL01063 2