Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 23 octobre 2018, M. B...A..., représenté par Me Lévy, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement du 20 septembre 2018 ;
2° d'enjoindre au préfet des Yvelines de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travailler dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :
- elle n'a pas été précédée de la saisine de la commission du titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;
- elle porte atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire :
- elle est entachée d'un défaut de base légale ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il remplit les conditions d'obtention d'un titre de séjour de plein droit ;
- elle méconnaît les dispositions du 10° de ce même article au regard de son séjour en France et de son état de santé ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision fixant un délai de départ volontaire de 30 jours :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
S'agissant de la décision fixant l'Algérie comme pays de renvoi :
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu le jugement attaqué.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;
- l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Dibie et les observations de MeC..., substituant Me Levy, pour M. A...ont été entendus au cours de l'audience publique.
Une note en délibéré présentée par M. A...a été enregistrée le 14 mai 2019.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant algérien né le 25 juillet 1968 à Alger (Algérie), est, selon ses déclarations, entré sur le territoire français au cours du mois de janvier 2013. Il a bénéficié d'une autorisation de séjour délivrée le 25 novembre 2015 et de deux certificats de résidence délivrés en 2016 et en 2017 sur le fondement des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Il a sollicité du préfet des Yvelines le renouvellement de son dernier certificat de résidence le 28 août 2017. Le 7 janvier 2018, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), saisi par le préfet des Yvelines, a émis un avis défavorable à sa demande. Par un arrêté en date du 22 mai 2018, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de renouvellement de certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai. M. A...relève appel du jugement du 20 septembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algérien et de leurs familles stipule que : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
3. Si M. A...soutient qu'il réside habituellement en France, que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourra pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie dès lors que les établissements de santé sont inadaptés à la demande de soins, que la prise en charge des besoins de la population reste difficile, et que, en ce qui le concerne, il conserve d'importantes séquelles physiques justifiant l'utilisation d'un matériel renouvelable qui représente à lui seul un coût annuel de 4 000 euros, il ressort toutefois des pièces du dossier que, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, les certificats médicaux antérieurs et postérieurs à la date de l'arrêté attaqué que produit l'intéressé font apparaître qu'il a été soigné en France avec succès et qu'il ne suit actuellement plus aucun traitement médical mis à part un protocole de surveillance trimestriel avec un scanner et un dosage des marqueurs dont il peut également bénéficier en Algérie. La circonstance, au demeurant non établie, que M. A...n'aurait pas les moyens financiers de se procurer le matériel nécessité par son état de santé, qui ne constitue pas un traitement médical, est sans incidence sur l'appréciation des conditions énoncées par les dispositions précitées. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les stipulations précitées du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 en rejetant sa demande de certificat de résidence pour raisons de santé.
4. En deuxième lieu, l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stiple que : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien (...) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ".
5. M. A...fait valoir qu'il est marié avec une compatriote titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 30 mars 2026 et qu'il est père de trois enfants nés en 2000, 2003 et 2008 dont un réside avec un de ses frères à Marseille où il est scolarisé. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ses enfants nés en 2000 et 2008 résident en Algérie avec leur mère dont le requérant est séparé, et il n'est pas établi ni même allégué que son enfant né en 2003 qui réside à Marseille, ne puisse pas suivre son père en cas de retour en Algérie. Il n'établit pas non plus, par les pièces qu'il produit, qu'il aurait repris une communauté de vie avec sa seconde épouse dont il était séparé. Si M. A... établit que deux de ses frères résident en France, que ces derniers subviennent en partie à ses besoins et aux besoins de son fils résidant à Marseille, et qu'il a exercé une activité professionnelle en 2017 après avoir suivi une formation de chauffeur VTC et qu'il travaille de nouveau depuis mars 2018, il n'est pas contesté qu'il a vécu éloigné de ses frères pendant 45 ans lorsqu'il vivait en Algérie où il a passé la majeure partie de sa vie et où résident ses autres frères ou soeurs ainsi que deux de ses enfants. Enfin, il n'établit pas, par la seule production d'un contrat de travail saisonnier signé le 1er juin 2018, exercer à la date de la décision préfectorale en litige une activité professionnelle. Dans ces conditions, la décision en litige n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Cet arrêté n'a dès lors pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 6 de l'accord franco-algérien, et n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....
6. En troisième lieu, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant stipule que : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Cependant, ainsi qu'il a été dit au point précédent, deux de ses enfants résident en Algérie et il n'est pas établi que son fils résidant à Marseille ne puisse pas le suivre en cas de retour dans son pays d'origine. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit dès lors être écarté.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission [du titre de séjour] est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. ". Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles visés par ces dispositions ou, en ce qui concerne les ressortissants algériens, les conditions prévues par les stipulations équivalentes de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé, et auxquels il envisage néanmoins de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent. Ainsi qu'il est dit aux points 3 et 5, M. A... ne remplissait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'un titre de séjour. Dès lors, le préfet des Yvelines n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande de certificat de résidence algérien. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision attaquée doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour au requérant, ne peut qu'être écarté.
9. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 5 que M. A...n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des stipulations précitées du 5° et du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par suite, le préfet des Yvelines pouvait légalement prononcer à son encontre une décision l'obligeant à quitter le territoire français.
10. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) ".
11. M. A...n'invoque aucun argument de droit ou élément de fait distinct de ceux énoncés à l'encontre de la décision portant refus de séjour, propre à faire ressortir que la décision l'obligeant à quitter le territoire méconnaîtrait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Il s'ensuit que ces deux moyens doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux exposés au point 3.
Sur la légalité de la décision fixant un délai de départ volontaire :
12. Aux termes de l'article 7 de la directive 2008/115/CE susvisée : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux ". Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pris pour la transposition de cette disposition : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) ".
13. En se bornant à soutenir, d'une part, qu'il bénéficie en France d'un suivi médical depuis plusieurs années et qu'il conserve d'importantes séquelles, d'autre part, qu'il exerce une activité professionnelle depuis mars 2018, enfin qu'il a tissé de nombreux liens amicaux, sociaux et professionnels en plus des liens existants avec sa famille présente en France, qu'un délai de trente jours ne lui permettrait pas de s'assurer qu'un tel suivi pourrait être effectué en Algérie, M. A...ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à rendre nécessaire la prolongation du délai de trente jours qui lui a été accordé pour quitter volontairement le territoire. Au surplus, l'intéressé n'établit pas, ni même n'allègue, avoir sollicité auprès de l'autorité préfectorale une telle prolongation. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant à trente jours son délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Sur la légalité de la décision fixant l'Algérie comme pays de renvoi :
14. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants ".
15. Ainsi que l'indique l'avis émis par le 7 janvier 2018 par le collège des médecins de l'OFII, et l'ont retenu les premiers juges, M. A...peut effectivement bénéficier, en Algérie, d'un traitement approprié à son état de santé. L'intéressé n'établit pas que les soins qui lui sont nécessaires seraient indisponibles en Algérie. Par suite, la décision du préfet des Yvelines fixant l'Algérie comme pays de destination ne méconnaît pas les stipulations et dispositions précitées.
16. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 20 septembre 2018, le Tribunal administratif de Versailles rejeté la demande dont il était saisi. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions aux fins d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
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N° 18VE03516