Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 20 mai et 15 juin 2020 et le 10 février 2021, M. B..., représenté par Me A..., avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 13 mars 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 avril 2019 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou à défaut de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer, dans cette attente, un récépissé l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et d'ordonner le versement à Me A... au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier car rendu plus de trois mois après la saisine du tribunal en méconnaissance de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le jugement n'est pas signé ;
- le jugement n'est pas suffisamment motivé dès lors qu'il ne se réfère pas à l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme qui protège la vie privée et familiale , qu'il soutenait que la régularisation de sa situation lui permettait d'obtenir un contrat de travail ;
- le tribunal s'est mépris sur l'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision refusant le titre de séjour :
- la décision est insuffisamment motivée et le préfet s'est cru en situation de compétence liée ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ;
Sur l'obligation de quitter le territoire :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant malien, a demandé le 9 octobre 2018 le renouvellement d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 24 avril 2019, le préfet de Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays d'éloignement. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, le délai de trois mois prévu par les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étant pas prescrit à peine de nullité, la circonstance que le tribunal administratif de Montreuil ait rendu son jugement au-delà de ce délai est sans incidence sur la régularité de ce jugement.
3. En deuxième lieu, il ressort de la minute du jugement transmise à la cour par le tribunal administratif de Montreuil que le jugement attaqué a été signé par le président de la formation de jugement, le rapporteur, ainsi que le greffier, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée à M. B... ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.
4. En troisième lieu, le jugement attaqué explique pourquoi le défaut de soins ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité pour M. B.... Si ce dernier soutient qu'il aurait dû examiner également sa situation au regard de sa possibilité d'obtenir un contrat de travail et se référer ainsi à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui protège la vie privée et familiale, il est constant que M. B..., dans sa demande présentée devant le tribunal se bornait à invoquer qu'il bénéficiait d'un contrat à durée indéterminée en qualité d'agent d'entretien depuis mai 2018, sans invoquer de stipulations ou dispositions particulières. Le jugement attaqué est par suite suffisamment motivé au regard des moyens invoqués, conformément à l'article L. 9 du code de justice administrative.
5. En dernier lieu, si M. B... soutient que l'appréciation de son état de santé par le tribunal est entaché d'erreur d'appréciation, cet élément relève du fond du litige et est dépourvu d'incidence sur la régularité du jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant refus d'un titre de séjour :
6. En premier lieu, la décision comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Elle est ainsi suffisamment motivée, contrairement à ce que soutient le requérant. Il ne ressort pas des termes de la décision attaquée que le préfet, qui a examiné l'insertion professionnelle de M. B... et sa situation familiale, se serait cru en situation de compétence liée par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
7. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
8. Si M. B... soutient qu'il bénéficie d'un contrat à durée indéterminée depuis mai 2018 et qu'il a pu développer des liens personnels et amicaux forts, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il est célibataire, sans charge de famille, et qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où vivent ses parents, un de ses frères, et où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
Sur l'obligation de quitter le territoire :
9. En premier lieu, aux termes des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) ". Or, l'arrêté contesté, en ce qu'il refuse la délivrance d'un titre de séjour à M. B..., est suffisamment motivé. La décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a fait obligation à M. B... de quitter le territoire français, en application des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à la suite du refus de renouvellement de son titre de séjour, n'avait donc pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision de refus de titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision faisant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
10. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".
11. Il ressort des pièces du dossier que M. B... bénéficie d'implants cochléaires depuis janvier 2015. S'il soutient que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, en l'espèce une surdité totale, les certificats médicaux produits au soutien de ses affirmations faisant état d'une nécessité de suivi de ses implants cochléaires bilatéraux, ne suffisent pas à remettre en cause l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration selon lequel le défaut de prise en charge de son état de santé ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent par conséquent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
N° 20VE01309 2