Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2018, la commune d'Aubervilliers, représentée par Me Kukuryka, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) à titre principal, de rejeter le déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) à titre subsidiaire, de prévoir que l'annulation ne prendra effet qu'à une date postérieure à la décision d'annulation et que, sous réserve des actions contentieuses engagées à la date du jugement, les effets produits par les deux délibérations en litige antérieurement à leur annulation seront regardés comme définitifs ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué ne comporte pas les signatures exigées par les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- le rapporteur public n'a pas précisé avant l'audience les moyens sur lesquels il proposait de fonder l'annulation des délibérations litigieuses, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 711-3 du code de justice administrative ;
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative ;
- le déféré préfectoral était irrecevable dès lors qu'il n'a pas été introduit dans le délai de deux mois suivant la transmission des délibérations prévu à l'article L. 2131-6 du code général des collectivité territoriales ;
- à titre subsidiaire, les dispositions de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984, sur lesquelles s'est fondé le tribunal, sont contraires à la Constitution ;
- les délibérations litigieuses ne méconnaissent pas les dispositions de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 dès lors qu'elles instaurent bien un complément indemnitaire annuel respectant les plafonds issus de cette loi ;
- les délibérations litigieuses fixent bien les conditions d'attribution et le taux de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise, en application des dispositions de l'article 2 du décret du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- une annulation rétroactive des délibérations en litige emporte des conséquences manifestement excessives dès lors qu'elle impacte la situation de 112 agents.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de M. Clot, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La commune d'Aubervilliers relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montreuil a annulé, sur déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis, les délibérations du conseil municipal de la commune d'Aubervilliers n° 072 et n° 072-1 du 27 avril 2017 mettant en place le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel pour les agents relevant respectivement du cadre d'emploi des administrateurs territoriaux et du cadre d'emploi des attachés territoriaux.
2. Aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. (...) " Si une transmission, par télécopie, du recours gracieux formé par le représentant de l'Etat dans le département, effectuée avant expiration du délai de deux mois dont il dispose, en vertu des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, pour déférer au tribunal administratif une décision d'une collectivité locale qu'il estime contraire à la légalité, est susceptible d'être prise en considération pour déterminer la date à laquelle a été interrompu ledit délai, alors même que l'original n'est enregistré que postérieurement à l'expiration de ce délai, il appartient au représentant de l'Etat qui s'en prévaut de justifier que la copie des documents ainsi transmis est effectivement parvenue à la collectivité dont la décision est déférée, pour y être enregistrée en temps utile.
3. Il ressort des pièces du dossier que les délibérations en litige ont été reçues le 28 avril 2017 au service du contrôle de légalité de la préfecture de la Seine-Saint-Denis. La seule production par le préfet de la Seine-Saint-Denis d'un rapport d'émission d'une télécopie, en date du 27 juin 2017, alors que la commune d'Aubervilliers conteste avoir reçu les recours gracieux, en date du 26 juin 2017, avant le 5 juillet 2017, date des accusés de réception postaux desdits recours, ne peut, eu égard aux conditions techniques dans lesquelles un tel document est établi, apporter une telle justification. Par suite, ces recours gracieux n'ont pu proroger le délai de recours contentieux et la commune d'Aubervilliers est fondée à soutenir que le déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis, enregistré au greffe du tribunal le 26 octobre 2017, était tardif et donc irrecevable.
4. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que la commune d'Aubervilliers est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a annulé les délibérations n° 72 et 72-1 du conseil municipal de la commune d'Aubervilliers du 27 avril 2017.
5. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune d'Aubervilliers présentées sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1709538 du 24 mai 2018 du tribunal administratif de Montreuil est annulé.
Article 2 : Le déféré du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejeté.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune d'Aubervilliers sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
N° 18VE02268 2