Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 avril 2019, M. D..., représenté par Me C..., avocate, demande à la cour :
1°) de désigner Me C... au titre de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler ce jugement et d'annuler cet arrêté en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et fixe le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une attestation de demande d'asile justifiant de son droit au maintien sur le territoire français, dans un délai de sept jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me C... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que Me C... renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
M. D... soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ; le tribunal n'a pas pris en compte l'argument selon lequel il n'a pas reçu notification de la décision de l'Ofpra ;
- les nouvelles dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sauraient s'appliquer dès lors qu'il a fait l'objet d'un refus de l'Ofpra le 18 septembre 2018, soit antérieurement au premier jour du troisième mois suivant la publication de la loi du 10 septembre 2018 ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence de l'auteur de l'acte ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- la décision de l'Ofpra ne lui a jamais été régulièrement notifiée ;
- les dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;
- les stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 ont été méconnues ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté en date du 14 janvier 2019, le préfet des Yvelines a refusé l'admission provisoire au séjour de M. B... D... et l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. M. D... fait appel du jugement en date du 6 mars 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation des décisions du 14 janvier 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.
Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Il ressort des pièces du dossier que par une décision en date du 22 novembre 2019, le président du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Versailles, section cour administrative d'appel, a accordé à M. D... l'aide juridictionnelle totale et a désigné Me C... pour l'assister. Dès lors, il n'y a plus lieu de statuer sur sa demande tendant à ce qu'il lui soit accordé l'aide juridictionnelle à titre provisoire.
Sur les conclusions à fin d'annulation, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :
3. Aux termes des dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. (...) ". En l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire. En cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision a été régulièrement notifiée à l'intéressé.
4. Il ressort des pièces du dossier que le relevé des informations de la base de données " TelemOfpra " produit par le préfet en première instance fait mention de l'existence d'un recours pendant devant la Cour nationale du droit d'asile introduit le 28 janvier 2019 contre une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 18 septembre 2018, notifiée au requérant le 17 novembre 2018, soit plus de deux mois avant l'introduction de la requête. Toutefois, M. D... qui produit le relevé des courriers présentés à sa domiciliation postale dont il ressort qu'aucun recommandé ne lui a été présenté au mois de novembre 2018 conteste avoir reçu notification de la décision de l'Ofpra. Le préfet n'établissant pas, par la seule production du relevé d'information de la base de données que la décision de l'Ofpra ait été régulièrement notifiée, le recours présenté le 29 janvier 2019 devant la Cour nationale du droit d'asile n'était pas tardif au regard du délai d'un mois prévu par l'article L. 731-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, par suite, le préfet des Yvelines ne pouvait regarder M. D... comme ne bénéficiant plus d'un droit au séjour justifiant qu'il soit obligé de quitter le territoire français.
5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 14 janvier 2019 en tant qu'elle porte obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de renvoi.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". L'article L. 911-2 du même code dispose : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ".
7. Aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. ".
8. L'annulation de la décision par laquelle le préfet des Yvelines a obligé M. D... à quitter le territoire français implique seulement qu'il lui délivre une autorisation provisoire de séjour, et qu'il réexamine sa situation. Il y a lieu d'enjoindre au préfet des Yvelines de statuer à nouveau sur la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
9. M. D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me C..., avocate de M. D..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement à Me C... de la somme de 1 500 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la demande d'admission au titre de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : Le jugement n° 1900676 du 6 mars 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles et la décision en date du 14 janvier 2019 du préfet des Yvelines portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de statuer à nouveau sur la situation de M. D... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours.
Article 4 : L'Etat versera à Me C..., avocate de M. D..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me C... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 19VE01167