3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ses protocoles additionnels ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 ;
- la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 ;
- le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Myriam Benlolo Carabot, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
Sur le cadre du litige :
1. A l'expiration, le 1er juin 2021, de l'état d'urgence sanitaire qui avait été déclenché en octobre 2020 pour faire face à une reprise de l'épidémie de covid-19, l'évolution de la situation sanitaire a conduit à une modification des mesures prises pour lutter contre l'épidémie. Aux termes du I de l'article 1er de la loi du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, dans sa rédaction applicable au litige, " le Premier ministre peut, par décret pris sur le rapport du ministre de la santé, dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 (...) réglementer l'ouverture au public, y compris les conditions d'accès et de présence, d'une ou de plusieurs catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, à l'exception des locaux à usage d'habitation, en garantissant l'accès des personnes aux biens et aux services de première nécessité. ".
2. L'article 36 du décret du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de la sortie de crise sanitaire, dans sa version en vigueur à la date à laquelle a été pris le décret du 7 décembre 2021 contesté par M. A..., imposait le port du masque en milieu scolaire dans les seuls espaces clos. Le 3° de l'article 1er du décret du 7 décembre 2021 a complété le II de l'article 36 pour prévoir qu'à compter de son entrée en vigueur : " Les personnels des écoles maternelles, les personnels et élèves des écoles élémentaires, les personnels des structures mentionnées au II de l'article 32 lorsqu'elles accueillent des enfants de six à dix ans, ces mêmes enfants et leurs représentants légaux portent également un masque de protection dans les espaces extérieurs de ces établissements. ". Par ailleurs, aux termes du second alinéa du I de l'article 2 du décret du 1er juin 2021, dont la rédaction n'a pas été modifiée par le décret attaqué : " Les obligations de port du masque prévues au présent décret ne s'appliquent pas aux personnes en situation de handicap munies d'un certificat médical justifiant de cette dérogation et qui mettent en œuvre les mesures sanitaires de nature à prévenir la propagation du virus. ".
Sur les conclusions tendant à l'annulation du 3° de l'article 1er du décret du 7 décembre 2021 :
3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle les dispositions contestées ont été adoptées, les différents indicateurs évoluaient négativement avec une progression rapide de l'épidémie, qui s'est accentuée en octobre 2021. Les données de suivi de l'épidémie démontrent ainsi une courbe exponentielle du taux d'incidence, passant de 90 pour 100 000 mi-novembre à 506 pour 100 000 le 14 décembre, ainsi qu'une hausse constante du taux de positivité des tests, passant de 3 % à 6,6 % en une semaine début décembre. Cette dégradation s'est accompagnée de l'apparition de nouveaux variants, augmentant par conséquent la tension dans les hôpitaux confrontés à une augmentation continue des admissions y compris en soins critiques, dans la quasi-totalité des régions. Le taux d'incidence a fortement augmenté chez les enfants de 6 à 10 ans au cours du mois de décembre pour s'établir à 988 cas pour 100 000 en semaine 48, entre le 30 novembre et le 7 décembre 2021, soit une augmentation de 48 % en une semaine, laissant craindre une augmentation du nombre des formes sévères de la maladie et des hospitalisations touchant des enfants sans comorbidité. A cet égard, il n'est pas sérieusement contesté que ce virus et ses variants sont susceptibles d'être diffusés par l'intermédiaire des enfants et que les établissements accueillant un public scolaire sont des lieux de fort brassage. Dans ce contexte, le Gouvernement a souhaité maintenir la scolarisation au sein de leurs établissements des élèves des classes élémentaires et secondaires, en dépit de la persistance de la pandémie, tout en renforçant les précautions à prendre.
4. Il est constant que le virus peut se transmettre par gouttelettes respiratoires, par contacts et par voie aéroportée et que les personnes peuvent être contagieuses sans le savoir, notamment pendant la phase pré-symptomatique. La transmission du virus est favorisée par le brassage de population, la densité de population, le temps de contact avec des personnes potentiellement contaminées et la ventilation des locaux. Selon les conclusions convergentes de plusieurs rapports de la communauté scientifique, le port du masque par les enfants dès l'âge de 6 ans à l'école élémentaire, accompagné du respect des gestes barrières, est recommandé en période et/ou zone de circulation très active du virus et par précaution. En effet, le jeune âge des élèves et la configuration des locaux rendent difficiles le maintien de la distanciation physique dans ces espaces. Bien que contraignantes et pouvant s'avérer contre-indiquées à la situation médicale d'enfants souffrant de certaines pathologies, les dispositions contestées, qui tiennent compte de l'âge et de la maturité des enfants, et dont la mise en œuvre est placée sous le contrôle des adultes, ne font pas obstacle à ce que les situations particulières soient prises en compte. Par ailleurs, l'obligation ne s'applique pas aux enfants en situation de handicap. Il ne saurait enfin être sérieusement soutenu qu'elles seraient, par elles-mêmes, de nature à porter atteinte au droit à la santé physique et psychique ou à l'insertion sociale des enfants. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que l'obligation de port du masque par les élèves dès l'âge de 6 ans dans les espaces extérieurs des établissements scolaires ne serait pas nécessaire, adaptée et proportionnée n'est pas fondé.
5. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de M. A... tendant à l'annulation du 3° de l'article 1er du décret du 7 décembre 2021 ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'abrogation du 3° de l'article 1er du décret du 7 décembre 2021 modifiant l'article 36 du décret du 1er juin 2021 :
6. Saisi de conclusions à fin d'annulation recevables, le juge peut également l'être, à titre subsidiaire, de conclusions tendant à ce qu'il prononce l'abrogation du même acte au motif d'une illégalité résultant d'un changement de circonstances de droit ou de fait postérieur à son édiction, afin que puissent toujours être sanctionnées les atteintes illégales qu'un acte règlementaire est susceptible de porter à l'ordre juridique. Dans l'hypothèse où il ne ferait pas droit aux conclusions à fin d'annulation et où l'acte n'aurait pas été abrogé par l'autorité compétente depuis l'introduction de la requête, il appartient au juge, dès lors que l'acte continue de produire des effets, de se prononcer sur les conclusions subsidiaires. Le juge statue alors au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision. S'il constate, au vu des échanges entre les parties, un changement de circonstances tel que l'acte est devenu illégal, le juge en prononce l'abrogation.
7. A la date de la présente décision, les dispositions de l'article 36 ont été abrogées en application de l'article 1er du décret du 12 mars 2022 modifiant le décret du 1er juin 2021. Par suite, les conclusions tendant à l'abrogation du 3° de l'article 1er du décret du 7 décembre 2021 sont devenues sans objet. Il n'y a donc pas lieu d'y statuer.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. A... ne peut être accueillie et que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : Les conclusions de M. A... tendant à l'annulation du 3° de l'article 1er du décret du 7 décembre 2021 et à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2. Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... aux fins d'abrogation de ces dispositions.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., au ministre de la santé et de la prévention et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Copie en sera adressée à la Première ministre.
Délibéré à l'issue de la séance du 14 octobre 2022 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; Mme Nathalie Escaut, conseillère d'Etat et Mme Myriam Benlolo Carabot, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 16 novembre 2022.
Le président :
Signé : M. Bertrand Dacosta
La rapporteure :
Signé : Mme Myriam Benlolo Carabot
La secrétaire :
Signé : Mme Naouel Adouane
N° 459468- 2 -