Résumé de la décision
La présente décision du Conseil d'État concerne le pourvoi du ministre de l'intérieur contre un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux, en date du 7 février 2019, ayant reconnu la responsabilité exclusive de l'État dans le décès de Mme C... D..., une ressortissante comorienne. Le Conseil d'État a annulé cet arrêt, concluant que la cour avait inexactement qualifié les faits en écartant le lien entre le risque assumé par la victime — la traversée dangereuse en mer — et son décès, provoqué par des négligences dans l'organisation des secours.
Arguments pertinents
1. Responsabilité de l'État :
Pour établir la responsabilité de l'État, la cour administrative d'appel avait jugé que les négligences dans la prise en charge de Mme C... D..., telles que constatées par un expert, étaient la cause déterminante de son décès. Cependant, le Conseil d'État a souligné que la cour a erré en ne tenant pas compte du risque intrinsèque que Mme C... D... avait choisi d'assumer en entreprenant une traversée maritime dangereuse.
> "En déduisant […] que le décès de Mme C... D... était exclusivement imputable à des négligences fautives de l'État, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce."
2. Lien de causalité :
Le Conseil d'État insiste sur la nécessité d'établir un lien de causalité direct entre les actions de l'État et le décès, fait qu'il considère inexistant dans ce cas puisque la victime a pris un risque en choisissant de traverser la mer dans des conditions dangereuses.
> "Écartant ainsi tout lien direct de causalité entre le risque assumé par l'intéressée et son décès."
Interprétations et citations légales
1. Causalité et responsabilité :
Les juges ont examiné la notion de causalité dans ce contexte, en rappelant que même s'il existe des manquements de l’État, ceux-ci doivent être directement liés au décès de la victime pour en engager la responsabilité. Cela amène à une interprétation stricte de la responsabilité administrative, qui nécessite une évaluation des risques assumés par la victime elle-même.
2. Code de justice administrative - Article L. 761-1 :
Cet article précise que les frais d'instance ne devront pas être mis à la charge de l'État lorsque celui-ci n'est pas la partie perdante. Cela a été confirmé dans la décision en ce qui concerne les conclusions présentées par M. A... B..., Mme A... B... et M. E...
> "Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'État qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante."
En synthèse, la décision du Conseil d'État reflète une application rigoureuse des principes de causalité et de responsabilité administrative, insistant sur l’importance de considérer le comportement de la victime dans l’évaluation de la responsabilité de l'État.