Résumé de la décision
La décision concerne l’affaire de M. D..., pédicure-podologue à Montpellier, sanctionné par la chambre disciplinaire de première instance de Languedoc-Roussillon pour avoir vanté les mérites d'un produit médical à travers un article de presse. Cette sanction consistait en une interdiction d'exercer pendant une semaine avec sursis. M. D... a fait appel et la chambre disciplinaire nationale a annulé la décision régionale, rejetant la plainte du conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues d'Occitanie. Ce dernier s'est alors pourvu en cassation. Le Conseil d'État a finalement annulé la décision de la chambre disciplinaire nationale, considérant qu'elle avait commis une erreur de droit en estimant que l'initiative d'un procédé de publicité était un critère d'exonération de faute disciplinaire.
Arguments pertinents
Erreur de droit sur la publicité interdite :
Le Conseil d'État a estimé que la chambre disciplinaire nationale a fauté en considérant que le simple fait que M. D... n'ait pas été à l'initiative de l'article le protégeait d'une sanction. Le juge a indiqué que l'absence d'initiative ne doit pas exonérer un praticien des obligations déontologiques, notamment en ce qui concerne la prévention des procédés de publicité.
> "En jugeant ainsi que la circonstance qu'un praticien ne soit pas à l'initiative d'un procédé prohibé par le code de déontologie était, à elle seule, de nature à l'exonérer de toute faute disciplinaire, la chambre disciplinaire nationale a commis une erreur de droit."
Protection de la santé publique :
Bien que M. D... ait soulevé des arguments fondés sur les principes de libre circulation des services au sein de l'UE, le Conseil d'État a précisé que les restrictions à la publicité pour les professionnels de santé sont justifiées par la nécessité de protéger la santé publique et de maintenir la dignité de la profession.
> "Les stipulations de l'article 56 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne [...] ne font pas pour autant obstacle à ce que soit sanctionné, sur le fondement des règles et principes déontologiques [...] le fait, pour un professionnel de santé, de porter atteinte [...] à la confiance des malades."
Interprétations et citations légales
Article R. 4322-39 du Code de la santé publique : Cet article établit clairement que la profession de pédicure-podologue ne doit pas être exercée comme un commerce, interdisant ainsi toute forme de publicité qui pourrait compromettre l'intégrité de la profession.
> "La profession de pédicure-podologue ne doit pas être pratiquée comme un commerce. / Sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité et notamment tout aménagement ou signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale."
Lien avec le droit européen : La décision rappelle que, si le droit de l'Union européenne favorise la libre prestation de services, cela ne peut pas empiéter sur les règles déontologiques en vigueur qui tendent à protéger la santé publique et la confiance des patients. Cela est particulièrement souligné par l'arrêt C-339/15 de la Cour de justice de l'Union européenne, qui traite des limitations imposées par les États membres sur les pratiques publicitaires des professionnels de santé.
En somme, le Conseil d'État a tranché en faveur de la protection déontologique de la santé publique tout en clarifiant les limites à la liberté d'expression et de publicité des professionnels de santé. Cette décision souligne l’importance d’un équilibre entre droits individuels et exigences réglementaires.