Par un arrêt n° 17BX01169 du 6 février 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer et l'appel incident formé par les sociétés Investaq Energie et Celtique Energie Limited contre ce jugement.
Par un pourvoi et un autre mémoire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 9 avril et 24 mai 2018, le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de liquidation de l'astreinte présentée devant le tribunal administratif par les sociétés Investaq Energie et Celtique Energie Limited.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code minier ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Coralie Albumazard, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société Investaq Energie et autre ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 octobre 2019, présentée par la ministre de la transition écologique et solidaire ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 7 juillet 2016, le tribunal administratif de Pau a, sur demande des sociétés Investaq Energie et Celtique Energie Limited, titulaires du permis de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux dit " permis de Claracq ", enjoint à l'administration d'accorder à ces sociétés la prolongation jusqu'au 3 novembre 2017 de la deuxième période de validité de ce permis, sous astreinte de 3 000 euros par jour à l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du jugement. Les sociétés Investaq Energie et Celtique Energie Limited ont ensuite saisi le tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à la liquidation provisoire de l'astreinte prononcée par ce jugement pour la période courant du 5 août 2016 à la date de la décision à intervenir. Par un nouveau jugement du 7 février 2017, le tribunal administratif de Pau a liquidé l'astreinte prononcée par le jugement du 7 juillet 2016 et condamné l'Etat à verser la somme de 342 000 euros aux sociétés Investaq Energie et Celtique Energie Limited. Par deux arrêts du 6 février 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, d'une part, annulé le jugement du 7 juillet 2016, et, d'autre part, rejeté l'appel formé par la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer et l'appel incident des deux pétitionnaires contre le jugement du 7 février 2017.
2. Aux termes de l'article L. 4 du code de justice administrative : " Sauf dispositions législatives spéciales, les requêtes n'ont pas d'effet suspensif s'il n'en est autrement ordonné par la juridiction ". Aux termes de l'article L. 11 du même code : " Les jugements sont exécutoires ". Les articles L. 911-1 et L. 911-2 du même code reconnaissent à la juridiction saisie un pouvoir d'injonction. Aux termes de l'article L. 911-3 du même code, dans sa version applicable : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ". Aux termes de l'article L. 911-7 du même code : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. / Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée ".
3. L'astreinte a pour finalité de contraindre la personne qui s'y refuse à exécuter les obligations qui lui ont été assignées par une décision de justice. Sa liquidation a pour objet de tirer les conséquences du refus ou du retard mis à exécuter ces obligations. Par suite, lorsque, par un premier jugement, un tribunal enjoint à l'autorité administrative, sous astreinte, de prendre une mesure d'exécution dans un sens déterminé ou de procéder à une nouvelle instruction, que ce jugement n'est pas exécuté et que, par un second jugement, le tribunal procède à la liquidation de l'astreinte, l'annulation ultérieure du premier jugement n'a pas pour effet de priver la liquidation de cette astreinte de son fondement pour la période comprise entre la notification de ce jugement et son annulation ultérieure par la cour administrative d'appel.
4. Par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel a relevé, d'une part, qu'à la date du 7 février 2017 à laquelle est intervenu le jugement du tribunal administratif attaqué devant elle, prononçant la liquidation de l'astreinte, le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer n'avait pas exécuté le précédent jugement du tribunal administratif du 7 juillet 2016 lui enjoignant sous astreinte de prolonger la deuxième période de validité du permis de Claracq et d'autre part, que le jugement du 7 février 2017, dont le ministre n'avait pas sollicité le sursis à exécution, avait un caractère exécutoire. Elle en a déduit, après avoir écarté les différentes circonstances mises en avant par le ministre pour justifier l'absence d'exécution de ce jugement dans le délai imparti par le tribunal, qu'il n'y avait pas lieu de faire droit à l'appel formé par ce dernier contre le jugement du 7 février 2017. Eu égard à l'objet de la liquidation de l'astreinte, rappelé au point 3, la cour administrative d'appel, qui a suffisamment motivé son arrêt, n'a ni commis d'erreur de droit, ni méconnu la portée de sa propre décision, la circonstance qu'elle ait, par un arrêt du même jour, annulé le jugement du 7 juillet 2016 n'ayant pas eu pour effet de priver de fondement l'astreinte prononcée par ce jugement en sanction de son inexécution par l'autorité administrative.
5. Il résulte de ce qui précède que le ministre chargé de la transition écologique et solidaire n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Dès lors, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par les sociétés Investaq Energie et autre, son pourvoi doit être rejeté.
6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les sociétés Investaq Energie et Celtique Energie Limited au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, est rejeté.
Article 2 : Les conclusions des sociétés Investaq Energie et Celtique Energie Limited présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la ministre de la transition écologique et solidaire et aux sociétés Investaq Energie et Celtique Energie Limited.
Copie en sera adressée au ministre de l'économie et des finances.