Résumé de la décision
La décision porte sur une contestation de M. et Mme B..., usufruitiers de locaux à Paimpol, contre une imposition à la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les années 2012 et 2013, concernant des locaux utilisés par la SARL Ferme Marine du Trieux, spécialisée dans l'élevage et la transformation de truites arc-en-ciel. Les requérants ont sollicité une décharge de ces cotisations en se fondant sur l'exonération prévue par le code général des impôts. Le tribunal administratif a initialement rejeté leur demande, mais cette décision a été annulée, en raison d'une irrégularité procédurale, et les requérants ont été en fin de compte déchargés de la taxe foncière, sauf pour les locaux d'habitation. L’État a été condamné à verser une somme de 3 000 euros aux requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Arguments pertinents
1. Irrégularité de la Procédure : Le rapporteur public n’a pas communiqué aux parties le sens de ses conclusions dans un délai raisonnable avant l’audience, une violation de l'article R. 711-3 du code de justice administrative. Cette irrégularité a conduit à l'annulation du jugement du tribunal administratif. Comme stipulé dans la décision, « les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l’audience, l’ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer. »
2. Exonération de la Taxe Foncière : Concernant la demande de décharge pour les locaux utilisés pour la transformation des produits issus de l’exploitation piscicole, la cour a reconnu que ces opérations s'insèrent dans le prolongement de l'activité agricole, en conformant ainsi à l’article 1382 du code général des impôts. La décision précise que « les opérations en cause peuvent présenter des caractéristiques physiques différentes de celles de la matière première non transformée », sans que cela ne remette en cause leur nature agricole.
3. Locaux d'Habitation : En revanche, la cour a rejeté la demande de décharge concernant les locaux d'habitation des gérants de la SARL, car ceux-ci ne peuvent pas être considérés comme des « gardiens de bestiaux » au sens des dispositions fiscales. Ce point souligne la distinction claire entre les bâtiments affectés à l'exploitation agricole et ceux à usage d'habitation.
Interprétations et citations légales
1. Article R. 711-3 du Code de Justice Administrative : Cet article impose que les parties soient informées des conclusions du rapporteur public avant l’audience afin de garantir un procès équitable. La décision a souligné que "la communication aux parties du sens des conclusions [...] a pour objet de les mettre en mesure d’apprécier l’opportunité d’assister à l’audience publique".
2. Code Général des Impôts - Article 1382 : Cet article définit les exercices d'exonération de la taxe foncière pour les bâtiments affectés à des activités agricoles. La cour a statué que « l'exonération est toutefois maintenue lorsque ces bâtiments ne servent plus à une exploitation rurale ». Par conséquent, les bâtiments destinés à la transformation des produits de l'exploitation piscicole peuvent bénéficier de l’exonération, tant qu'aucune adjonction substantielle de produits non issus de l'exploitation agricole n’est en jeu.
3. Article L. 761-1 du Code de Justice Administrative : Cet article permet de condamner l'État à verser des frais de justice aux parties ayant obtenu gain de cause dans un litige administratif. La cour a ainsi ordonné que "l'État versera une somme de 3 000 euros à M. et Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative". Cela reflète l’intention de compenser les coûts liés à la procédure injustement prolongée.
Ainsi, cette décision illustre la nécessité pour l’administration de respecter les exigences procédurales tout en clarifiant les conditions d'éligibilité à l'exonération fiscale pour des activités qui s'inscrivent dans le cadre de l'agriculture, tout en définissant les limites de ces exonérations en fonction de l'usage des biens.