2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Agnoux, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de la société L'Immobilière Leroy Merlin France ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société L'Immobilière Leroy Merlin France est propriétaire de locaux sur le territoire de la commune de Bouliac, commune membre de la métropole Bordeaux Métropole, au titre desquels elle a été assujettie à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. La société demande l'annulation de l'ordonnance du 4 février 2019, prise sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation de taxe d'enlèvement des ordures ménagères à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2015 et lui a infligé une amende de 10 000 euros au titre de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.
2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...) ".
3. Aux termes du I de l'article 1520 du code général des impôts, applicable aux établissements publics de coopération intercommunale, dans sa rédaction applicable à l'imposition en cause : " Les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service dans la mesure où celles-ci ne sont pas couvertes par des recettes ordinaires n'ayant pas le caractère fiscal. (...) ". En vertu des articles 1521 et 1522 du même code, cette taxe a pour assiette celle de la taxe foncière sur les propriétés bâties. La taxe d'enlèvement des ordures ménagères n'a pas le caractère d'un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l'ensemble des dépenses budgétaires, mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées par la commune ou l'établissement de coopération intercommunale compétent pour assurer l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères et non couvertes par des recettes non fiscales. Ces dépenses sont constituées de la somme de toutes les dépenses de fonctionnement réelles exposées pour le service public de collecte et de traitement des seuls déchets ménagers et des dotations aux amortissements des immobilisations qui lui sont affectées, telle qu'elle peut être estimée à la date du vote de la délibération fixant le taux de la taxe. A cet égard, doivent être déduites de ces dépenses, le cas échéant, les dépenses se rapportant aux déchets non ménagers, qui n'ont pas à être financées par la taxe, ainsi que le montant des recettes non fiscales de la section de fonctionnement, telles qu'elles sont définies par les articles L. 2331-2 et L. 2331-4 du code général des collectivités territoriales.
4. Pour vérifier si le produit de la taxe et, par voie de conséquence, son taux ne sont pas manifestement disproportionnés par rapport au montant des dépenses exposées par la commune ou l'établissement de coopération intercommunale compétent pour assurer l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères et non couvertes par des recettes non fiscales, il appartient au juge de se prononcer au vu des résultats de l'instruction, au besoin après avoir demandé à la collectivité ou à l'établissement public compétent de produire ses observations ainsi que les éléments tirés de sa comptabilité permettant de déterminer le montant de ces dépenses estimé conformément au point 3 ci-dessus.
5. En particulier, lorsque le contribuable se prévaut, à l'appui de sa contestation de la légalité de la délibération fixant le taux de la taxe, de ce que les éléments retracés dans le compte administratif ou le rapport annuel relatif au service public d'élimination des ordures ménagères établis à l'issue de l'année en litige font apparaître que le produit constaté de la taxe excède manifestement le montant constaté des dépenses d'enlèvement et de traitement des ordures ménagères non couvertes par des recettes non fiscales, il appartient au juge de rechercher, au besoin en mettant en cause la collectivité et en ordonnant un supplément d'instruction, si les données prévisionnelles, découlant notamment des éléments retracés dans le compte administratif ou le rapport annuel relatif au service public d'élimination des ordures ménagères relatifs à l'année précédente, au vu desquelles la délibération a été prise, diffèrent sensiblement de celles, constatées a posteriori, sur lesquelles le requérant fonde son argumentation.
6. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société L'Immobilière Leroy Merlin France se prévalait, pour établir le caractère disproportionné du taux de taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour l'année 2015 fixé par délibération du 10 avril 2015, du rapport annuel d'activité relatif au service public d'élimination des ordures ménagères établi à la fin de l'année en litige. En rejetant par ordonnance, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, la demande de la société au motif qu'elle ne pouvait sérieusement soutenir que la métropole Bordeaux Métropole connaissait, le 10 avril 2015, les résultats de l'activité de traitement des déchets de l'année 2015 et que son moyen n'était, par conséquent, assorti que de faits insusceptibles de venir à son soutien, alors qu'il lui appartenait, dans cette situation, de rechercher si les données prévisionnelles au vu desquelles la délibération fixant le taux de la taxe avait été adoptée différaient sensiblement de celles, constatées a posteriori, sur lesquelles la société fondait son argumentation, au besoin en demandant à la métropole de lui fournir les éléments comptables permettant d'estimer, à la date du vote de la délibération, le montant des dépenses du service d'enlèvement des ordures ménagères, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux a méconnu son office et fait une inexacte application des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, que la société L'Immobilière Leroy Merlin France est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société l'Immobilière Leroy Merlin France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 4 février 2019 du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Bordeaux.
Article 3 : L'Etat versera à la société L'Immobilière Leroy Merlin France la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société L'Immobilière Leroy Merlin France et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.