Elle soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la modification des modalités du contrôle médical porte une atteinte grave et immédiate aux droits et intérêts des agents des industries électriques et gazières en permettant la remise en cause des arrêts de travail par une décision du médecin-conseil, cette décision n'étant susceptible que d'un recours non suspensif devant une commission médicale de recours amiable nationale alors que la médecine-conseil des industries électriques et gazières ne présente pas les garanties d'indépendance et de professionnalisme suffisantes ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
- l'arrêté contesté porte atteinte au principe de sécurité juridique et aux articles L.221-5 et L.221-6 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'il est entré en vigueur dès le 1er janvier 2022 sans mesures transitoires alors que la commission médicale de recours amiable n'est pas en mesure de fonctionner ;
- l'arrêté contesté méconnaît le droit à un procès équitable garanti par l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au droit à la santé, au droit de propriété et au droit au recours effectif en permettant au médecin-conseil de s'opposer aux arrêts de travail sans recours suspensif alors que, en premier lieu, l'indépendance de la médecine-conseil du régime spécial des industries électriques et gazières n'est pas suffisamment garantie, ce manque d'indépendance s'appliquant également à la commission médicale de recours amiable, en deuxième lieu, la compétence professionnelle des médecins-conseil du régime spécial des industries électriques et gazières n'est pas non plus garantie et, en dernier lieu, l'absence de caractère suspensif du recours devant la commission médicale de recours amiable combinée à l'absence de délai dans lequel cette dernière doit se prononcer sur le recours de l'agent porte atteinte au droit au recours effectif et à la garantie de leurs droits ;
- l'arrêté contesté a été adopté à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance, d'une part, de l'article 47 de la loi du 8 avril 1946 et du principe constitutionnel de participation des travailleurs et, d'autre part, de l'article R. 142-21 du code de l'énergie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2022, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à la ministre de la transition écologique qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n°46-628 du 9 avril 1946 ;
- le code de l'énergie ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la FNME-CGT et, d'autre part, la ministre de la transition écologique et le ministre des solidarités et de la santé :
Ont été entendus lors de l'audience publique du 24 février 2022, à 15 heures :
- Me Uzan-Sarano, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la FNME-CGT;
- le représentant de la FNME-CGT ;
- les représentants du ministre des solidarités et de la santé ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
2. Il résulte des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative que le prononcé de la suspension d'un acte administratif est subordonné notamment à une condition d'urgence. L'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.
3. La Fédération nationale des syndicats salariés des mines et de l'énergie CGT (FNME-CGT) demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 27 décembre 2021 modifiant l'arrêté du 13 septembre 2011 portant règlement spécial du contrôle médical du régime spécial de sécurité sociale des industries électriques et gazières. Cet arrêté prévoit que lorsqu'un médecin-conseil du régime spécial des industries électriques et gazières considère qu'un arrêt de travail n'est pas fondé, il en informe l'employeur qui notifie à l'agent une décision conforme à cet avis. L'agent peut présenter une contestation d'ordre médical contre la décision de l'employeur devant une commission médicale de recours amiable nationale.
4. Pour justifier de l'urgence justifiant que soit prononcée la suspension de l'arrêté litigieux, la fédération requérante soutient que cet arrêté entraîne une modification des modalités du contrôle médical qui porte une atteinte grave et immédiate aux droits et intérêts des agents des industries électriques et gazières. Elle fait valoir qu'il permet dorénavant à un médecin-conseil du régime spécial des industries électriques gazières de remettre en cause un arrêt de travail délivré par le médecin traitant de l'agent en imposant à ce dernier de reprendre son travail dans les vingt-quatre heures, le recours devant la commission de recours national ne présentant pas de caractère suspensif. Elle indique également que l'arrêté, en permettant le rattachement le rattachement à un médecin-conseil référent, fait perdre à la médecine-conseil sa proximité et que le caractère national de la commission de recours amiable nationale risque de dissuader l'exercice de recours.
5. Il résulte toutefois de l'instruction et des échanges tenus à l'audience que le service général de médecine conseil et contrôle, responsable du contrôle médical dans les industries électriques et gazières, s'est engagé à ce que les médecins-conseils n'effectuent pas de contrôle sur les arrêts maladie dans l'attente de la mise en place de la commission médicale de recours amiable dont le règlement intérieur fait encore l'objet d'une concertation avec les organisations syndicales. Dans ces conditions, et alors que la 1ère chambre de la section du contentieux du Conseil d'Etat est en mesure d'inscrire la requête au fond de la FNME-CGT au rôle d'une séance permettant son jugement avant l'été, la fédération requérante n'établit pas que sa requête caractériserait une urgence justifiant que, sans attendre ce jugement, une mesure de suspension soit prononcée. Par suite, et sans qu'il y ait lieu d'examiner s'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté contesté, la requête de la FNME-CGT doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de la FNME-CGT est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la Fédération nationale des syndicats salariés des mines et de l'énergie CGT (FNME-CGT), à la ministre de la transition écologique et au ministre des solidarités et de la santé.
Fait à Paris, le 3 mars 2022
Signé : Mathieu Hérondart