- d'ordonner un renforcement des mesures de nettoyage des douches ;
- d'ordonner un renforcement des mesures de nettoyage des cours de promenade ;
- d'ordonner la mise en place dans ces deux espaces des modalités de présence de surveillants aptes à assurer le maintien de la sécurité des personnes ;
- d'ordonner la réparation du téléphone situé dans la coursive au rez-de-chaussée ;
2°) S'agissant des mesures destinées à garantir des conditions dignes de détention durant la crise sanitaire :
- de renforcer et rappeler l'obligation pour les personnels pénitentiaires du port du masque en toute circonstance et à plus forte raison dès lors qu'ils sont amenés à entrer en contact avec les personnes détenues ;
- de distribuer aux auxiliaires qui assurent la distribution des repas des masques et gels hydro alcooliques en quantité suffisante ;
- de garantir un nettoyage régulier et renforcé de l'ensemble des établissements, en particulier concernant les points de contact propices à la transmission du virus entre les détenus mais aussi avec l'ensemble du personnel pénitentiaire (portes, barreaux, linge, téléphones dans les coursives, etc.) ;
- d'assurer le nettoyage régulier du linge personnel des détenus ;
- de fournir du savon en quantité suffisante aux détenus ;
- de garantir la mise en place dans l'ensemble des établissements pénitentiaires de modalités de service des repas adaptées à la situation sanitaire ;
- de prévoir que le recours aux fouilles des détenus durant la période de crise sanitaire doit être exceptionnel et accompli en conformité avec les gestes barrières et la distanciation sociale adéquate ;
- de mettre en place des dépistages systématiques du covid-19 auprès des détenus symptomatiques et l'isolement de ceux-ci en attente des résultats ;
- de communiquer le plan des mesures prévues en cas de diffusion rapide de l'épidémie au sein de la maison d'arrêt de Nanterre ou, à défaut, de prévoir une série de plans au sein de l'établissement pénitentiaire, en concertation avec les autorités et établissements sanitaires locaux ainsi qu'avec toute autre autorité publique compétente au niveau local ;
3°) S'agissant des mesures visant à faire cesser l'obstruction à la communication avec son avocat, d'ordonner la réparation du téléphone de sa cellule dans un délai de 48 heures à compter de l'ordonnance à intervenir et sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Par une ordonnance n° 2011433 du 16 novembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a enjoint à l'administration pénitentiaire :
- de prendre sans délai toute mesure pour garantir et assurer la sécurité et l'intégrité physique et psychologique de M. B... au cours de sa détention ;
- de mettre à disposition de la cellule de M. B... un chauffage d'appoint conforme à la réglementation, dans un délai de 8 jours à compter de la notification de cette ordonnance ;
- de prendre toutes mesures nécessaires même transitoires pour assurer une procédure de désinsectisation efficace et régulière de l'ensemble des cellules et pour assurer un lavage hebdomadaire des draps et un lavage mensuel de tout linge de lit à disposition des détenus dans les conditions conformes à la réglementation, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de cette ordonnance.
Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de rejeter les demandes présentées en première instance par M. B....
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de droit dès lors, en premier lieu, que le juge des référés de première instance s'est fondé uniquement sur les constats généraux relevés par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté en 2016 pour considérer que la condition d'urgence était satisfaite, sans prendre en compte la situation concrète de M. B... à la date à laquelle il a statué sur sa requête, en deuxième lieu, qu'il n'a pas pris en compte, dans son appréciation du caractère manifestement illégal de l'atteinte aux libertés fondamentales invoquées, les mesures déjà prises par l'administration, en troisième lieu, qu'il a admis une atteinte grave et manifestement illégale au droit de ne pas subir de traitement inhumain et dégradant sans s'assurer, d'une part, de la réalité de la fouille intégrale qu'aurait subie M. B... et, d'autre part, de son caractère manifestement injustifié et disproportionné au regard du profil pénal et pénitentiaire du requérant ou du maintien du bon ordre de l'établissement, en quatrième lieu, que pour admettre une atteinte grave et manifestement illégale aux stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il s'est fondé sur des faits d'intimidation non étayés, dont M. B... aurait fait l'objet, qui sont sans rapport direct avec le droit d'accès à un tribunal indépendant et impartial ;
- le juge des référés de première instance a méconnu l'étendue de son office en enjoignant à l'administration de prendre toute mesure pour garantir et assurer la sécurité et l'intégrité physique et psychologique de M. B... sans avoir préalablement constaté ni l'existence d'une atteinte à un droit ou une liberté fondamentale ni sa gravité ou son illégalité manifeste ;
- l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle se fonde sur une fouille intégrale datée du 9 novembre 2020 alors qu'aucune fouille intégrale n'a été effectuée sur le requérant entre le 17 juillet et le 21 novembre 2020 ;
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors, en premier lieu, que le juge des référés de première instance a ordonné à l'administration de prendre toute mesure pour garantir et assurer la sécurité et l'intégrité physique et psychologique de M. B... alors que ce dernier ne démontre par aucun élément circonstancié dans quelle mesure elles pourraient être altérées au regard de ses conditions de détention, en deuxième lieu, qu'il a enjoint à la direction de l'établissement de mettre à la disposition de la cellule du requérant un chauffage d'appoint alors que, d'une part, les relevés de température dans cette cellule démontrent qu'il n'est pas nécessaire et, d'autre part, que son installation poserait des difficultés techniques et de sécurité, en troisième lieu, qu'il a enjoint de mettre en place des mesures de désinsectisation efficaces alors que la cellule de M. B... a fait l'objet d'opérations de désinsectisation en juin 2020 et qu'une intervention prioritaire en urgence n'apparaît pas nécessaire et, en dernier lieu, qu'il a enjoint de mettre en place des mesures permettant d'assurer un lavage hebdomadaire des draps et un lavage mensuel de tout linge de lit alors que la prise en charge tous les quinze jours des draps et taies d'oreiller et tous les trimestres des alèses et couvertures est suffisante.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2020, M. B... conclut, en premier lieu, à son admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle, en deuxième lieu, au rejet de la requête d'appel, en troisième lieu, à ce que soit prescrite toute mesure de constat au titre de l'article R. 622-1 du code de justice administrative, en quatrième lieu, à ce que soit ordonnées toutes mesures utiles afin de faire cesser les atteintes graves et manifestement illégales aux libertés fondamentales et précisément :
1°) Sur les mesures destinées à faire cesser les atteintes à sa dignité :
- d'ordonner qu'il soit procédé au nettoyage de la cellule dans laquelle il est placé depuis le 27 novembre 2020 sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- d'ordonner qu'il soit procédé à la désinsectisation de la cellule dans laquelle il est placé depuis le 27 novembre 2020 sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- d'ordonner que les joints de la fenêtre de la cellule dans laquelle il est placé depuis le 27 novembre 2020 soit réparés sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- d'ordonner qu'il soit procédé à une campagne de désinsectisation visant notamment la prolifération des cafards à l'échelle de l'établissement, dans un délai de trois semaines à compter de la notification de l'ordonnance, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- d'ordonner que le lavage des draps soit assuré une fois par semaine, qu'il soit procédé de manière mensuelle au nettoyage des couvertures et des alèses, et que le procédé de nettoyage soit notamment efficace contre les punaises de lit ;
- d'ordonner le nettoyage des douches deux fois par jour, une fois le matin et une fois le soir après le passage des détenus ;
- d'ordonner à l'administration pénitentiaire d'inscrire les fouilles de juillet 2020 et du 9 novembre 2020 sur le registre des fouilles ;
2°) Sur les mesures destinées à garantir des conditions dignes de détention durant la crise sanitaire :
- d'ordonner un affichage à destination du personnel pénitentiaire rappelant l'obligation pour lui de porter un masque en toute circonstance ;
- de distribuer aux auxiliaires qui assurent la distribution de ses repas des masques et gels hydro-alcooliques en quantité suffisante notamment durant l'exécution des tâches prévues ;
- de fournir du savon en quantité suffisante aux détenus afin de garantir leur hygiène personnelle en période de crise sanitaire ;
et, en dernier lieu, à ce que soit mise à la charge de l'administration pénitentiaire la somme de 3 000 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé et que :
- le comportement de l'administration pénitentiaire envers lui depuis le dépôt de sa requête de première instance rend l'urgence d'autant plus prégnante, en premier lieu, qu'elle use de pratiques intimidatrices et humiliantes à son encontre, en deuxième lieu, qu'elle l'a affecté dans une cellule isolée dans un quartier spécifique contre son gré et, en troisième lieu, que ses conditions de détention dans cette nouvelle cellule sont indignes ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, eu égard, d'une part, à la saleté de la cellule dans laquelle il est placé depuis le 27 novembre 2020 et de ses draps, à la présence de cafards, au froid et aux dysfonctionnements du mobilier et, d'autre part, au nouveau régime de détention, plus restrictif, auquel il est soumis ;
- le prononcé d'astreintes est nécessaire eu égard au comportement de l'administration pénitentiaire, qui n'a pas exécuté les injonctions prononcées par l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a présenté des observations, enregistrées le 7 décembre 2020.
Par un mémoire en intervention, enregistré le 7 décembre 2020, dont les conclusions ont été rectifiées lors de l'audience, l'Association pour la défense des droits des détenus conclut à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. B.... Elle soutient que son intervention est recevable et que l'administration pénitentiaire n'a pas exécuté l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 9 décembre 2020, le garde des sceaux, ministre de la justice, maintient ses conclusions et ses moyens et soutient, en outre, que :
- les conclusions présentées par M. B..., par la voie de l'appel incident, sont nouvelles et ainsi irrecevables ;
- l'intervention de l'Association de défense du droit des détenus est irrecevable.
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le garde des sceaux, ministre de la justice, d'autre part, M. B..., l'Association pour la défense des droits des détenus et la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté :
Ont été entendus lors de l'audience publique du 9 décembre 2020, à 11 heures :
- les représentants du garde des sceaux, ministre de la justice ;
- Me Goldman, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de la cassation, avocat de M. B... ;
- la représentante de M. B... ;
- Me Robillot, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'Association de défense des droits des détenus ;
- la représentante de l'association de défense des droits des détenus ;
- la représentante de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction au 10 décembre à 20 heures puis au 11 décembre à 16 heures.
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 9 décembre 2020, par lequel M. B... maintient ses conclusions et ses moyens ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 10 décembre 2020, par lequel le garde des sceaux, ministre de la justice, maintient ses conclusions et ses moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de procédure pénale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ;
- le décret n° 2010-1711 du 30 décembre 2010 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., en détention provisoire au centre pénitentiaire des Hauts-de-Seine, a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, lui demandant d'ordonner toutes mesures utiles pour faire cesser ce qu'il considère être des atteintes graves et manifestement illégales à ses libertés fondamentales, et précisément à sa dignité et à son droit de communiquer avec son avocat, résultant de ses conditions de détention. Par une ordonnance du 16 novembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a enjoint à l'administration pénitentiaire de prendre sans délai toute mesure pour garantir et assurer la sécurité et l'intégrité physique et psychologique de M. B... au cours de sa détention, de mettre à disposition de sa cellule un chauffage d'appoint conforme à la réglementation, dans un délai de huit jours, de prendre toutes mesures nécessaires, même transitoires, pour assurer une procédure de désinsectisation efficace et régulière de l'ensemble des cellules et pour assurer un lavage hebdomadaires des draps et un lavage mensuel de tout linge de lit à disposition des détenus dans les conditions conformes à la réglementation, dans un délai de quinze jours, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Le garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel de cette ordonnance. M. B... forme un appel incident.
Sur l'intervention de l'Association pour la défense des droits des détenus :
2. Eu égard à son objet, l'Association pour la défense des droits des détenus justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir à l'appui des conclusions de M. B.... Son intervention est dès lors recevable.
Sur le cadre juridique du litige :
3. Aux termes de l'article 22 de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire : " L'administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits. L'exercice de ceux-ci ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles résultant des contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements, de la prévention de la récidive et de la protection de l'intérêt des victimes. Ces restrictions tiennent compte de l'âge, de l'état de santé, du handicap et de la personnalité de la personne détenue ".
4. Eu égard à la vulnérabilité des détenus et à leur situation d'entière dépendance vis-à-vis de l'administration, il appartient à celle-ci, et notamment aux directeurs des établissements pénitentiaires, en leur qualité de chefs de service, de prendre les mesures propres à protéger leur vie ainsi qu'à leur éviter tout traitement inhumain ou dégradant afin de garantir le respect effectif des exigences découlant des principes rappelés notamment par les articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le droit au respect de la vie ainsi que le droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants constituent des libertés fondamentales au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. Lorsque la carence de l'autorité publique crée un danger caractérisé et imminent pour la vie des personnes ou les expose à être soumises, de manière caractérisée, à un traitement inhumain ou dégradant, portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à ces libertés fondamentales, et que la situation permet de prendre utilement des mesures de sauvegarde dans un délai de quarante-huit heures, le juge des référés peut, au titre de la procédure particulière prévue par l'article L. 521-2, prescrire toutes les mesures de nature à faire cesser la situation résultant de cette carence.
Sur l'appel du garde des sceaux, ministre de la justice :
En ce qui concerne l'injonction tendant à la prise de toute mesure pour garantir et assurer la sécurité et l'intégrité physique et psychologique de M. B... au cours de sa détention :
5. A l'appui de sa demande d'injonction, M. B... fait valoir, en premier lieu, qu'il a subi, le 9 novembre 2020 matin, soit trois jours après avoir introduit sa requête de première instance, une fouille intégrale qui n'a pas été répertoriée et qui n'était pas justifiée par la présomption d'une infraction ou par les risques que son comportement ferait courir à la sécurité des personnes et au maintien du bon ordre dans l'établissement. En deuxième lieu, il affirme avoir fait l'objet de menaces de la part d'un surveillant pénitentiaire, qui lui ont été rapportées par un autre détenu le 10 novembre 2020. En troisième lieu, il indique avoir été convoqué à plusieurs rencontres, dites " audiences ", avec des responsables de l'établissement, qui auraient revêtu un caractère humiliant et punitif en raison de son action devant le juge des référés. En quatrième lieu, il fait valoir qu'il a été écarté du statut de détention normale contre son gré, en étant transféré, le 27 novembre 2020, dans une cellule située dans le " quartier spécifique ", au sein de laquelle il se retrouve seul alors qu'il n'a jamais formulé une telle demande.
6. Si le garde des sceaux, ministre de la justice, conteste en appel l'existence de la fouille du 9 novembre 2020 et estime que M. B... n'apporte aucune preuve des menaces qu'il allègue, il résulte de l'instruction, notamment des échanges tenus lors de l'audience et compte tenu de la difficulté pour une personne détenue de rapporter la preuve des menaces dont elle affirme être l'objet, que M. B... a subi des mesures humiliantes, notamment une fouille intégrale injustifiée le 9 novembre 2020, effectuée en dehors du cadre réglementaire, dans un objectif d'intimidation. De telles mesures constituent, dans les circonstances de l'espèce, une atteinte grave et manifestement illégale aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui prohibent les traitements inhumains et dégradants. Dans ces conditions et dès lors que la condition d'urgence est satisfaite, eu égard à la situation de vulnérabilité de M. B..., le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a enjoint à l'administration pénitentiaire de prendre sans délai toute mesure pour garantir et assurer la sécurité et l'intégrité physique et psychologique de M. B... au cours de sa détention.
En ce qui concerne l'injonction tendant à la mise à disposition de M. B... d'un chauffage d'appoint :
7. Aux termes de l'article D. 350 du code de procédure pénale : " Les locaux de détention et, en particulier, ceux qui sont destinés au logement, doivent répondre aux exigences de l'hygiène, compte tenu du climat, notamment en ce qui concerne le cubage d'air, l'éclairage, le chauffage et l'aération ".
8. Le garde des sceaux, ministre de la justice, soutient, d'une part, que les relevés de température effectués dans la cellule de M. B... démontrent qu'un chauffage d'appoint n'est pas nécessaire et, d'autre part, que l'installation de celui-ci soulèverait des difficultés techniques et de sécurité.
9. M. B... fait valoir que la cellule qu'il partageait avec son codétenu avant son changement d'affectation intervenu le 27 novembre 2020 n'était chauffée que par leurs propres soins, au moyen d'une casserole chauffée en permanence sur la plaque électrique, et que dans sa nouvelle cellule, il ne dispose plus de cette plaque électrique et les joints de sa fenêtre étant usés, il doit utiliser une couverture pour la calfeutrer. Il soutient en outre que l'appareil utilisé par l'administration pour effectuer les derniers relevés de température, dans sa nouvelle cellule, le 8 décembre 2020, est manifestement défaillant dès lors qu'il a indiqué une température de 19,1 degrés alors que la fenêtre avait été ouverte pendant une heure avant qu'il soit procédé à ce relevé.
10. Il résulte de l'instruction, et notamment des observations produites par la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, que plusieurs personnes détenues à la maison d'arrêt des Hauts-de-Seine se plaignent du froid dans les cellules en période hivernale, due notamment à la vétusté des fenêtres. Les photographies de la nouvelle cellule de M. B..., produites par le garde des sceaux, ministre de la justice, montrent que sa fenêtre a été calfeutrée à l'aide d'une couverture. Dans ces conditions, le garde des sceaux, ministre de la santé, qui se borne à se prévaloir des relevés de température qu'il produit, dont il ne conteste pas qu'ils ont été effectués en l'absence de M. B..., et qui n'établit pas la réalité des risques qu'il invoque, n'est pas fondé à soutenir que la mise à disposition d'un chauffage d'appoint dans la cellule de ce dernier n'est pas nécessaire.
11. La détention de M. B... dans une cellule dotée d'un chauffage très insuffisant au regard des températures extérieures constitue, dans les circonstances de l'espèce, une atteinte grave et manifestement illégale au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, qui constituent une liberté fondamentale au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. La condition d'urgence requise par les dispositions de cet article est remplie compte tenu des températures très basses en cette période hivernale. Par suite, le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a enjoint à l'administration de mettre à la disposition de M. B... un chauffage d'appoint conforme à la réglementation.
En ce qui concerne l'injonction tendant à la prise de toutes mesures nécessaires même transitoires pour assurer une procédure de désinsectisation efficace et régulière de l'ensemble des cellules et pour assurer un lavage hebdomadaire des draps et un lavage mensuel de tout linge de lit à disposition des détenus dans les conditions conformes à la réglementation :
12. Aux termes de l'article D. 349 du code de procédure pénale : " L'incarcération doit être subie dans des conditions satisfaisantes d'hygiène et de salubrité, tant en ce qui concerne l'aménagement et l'entretien des bâtiments, le fonctionnement des services économiques et l'organisation du travail, que l'application des règles de propreté individuelle et la pratique des exercices physiques. ". Le dernier alinéa de l'article 12 du règlement intérieur type annexé à l'article R. 57-6-18 du même code dispose que : " Chaque personne détenue doit disposer d'un lit individuel et d'une literie appropriée, entretenue convenablement et renouvelée de façon à en assurer la propreté. (...) ".
13. En premier lieu, le garde des sceaux, ministre de la justice, soutient qu'une intervention de désinsectisation prioritaire en urgence dans la cellule de M. B... n'apparaît pas nécessaire, notamment dès lors que des opérations de lutte contre les cafards ont eu lieu dans sa cellule en mai et juin 2020 et qu'il a été mis en place un plan annuel sur ce point. Il fait également valoir qu'une intervention dans la nouvelle cellule de M. B... a eu lieu le 8 décembre 2020. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des observations produites par la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, que ces mesures demeurent insuffisantes pour remédier de manière efficace à la prolifération des cafards au sein de la maison d'arrêt des Hauts-de-Seine, qui avait déjà fait l'objet de recommandations de la part de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté dès 2016.
14. En second lieu, le garde des sceaux, ministre de la justice, fait valoir que le lavage du linge est pris en charge par un prestataire privé et que le cahier des clauses techniques particulières du marché prévoit que les draps et taies d'oreiller sont lavés tous les quinze jours et les alèses et les couvertures tous les trimestres. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des échanges tenus lors de l'audience, que cette périodicité n'est pas toujours respectée en pratique. Il n'est en outre pas sérieusement contesté que la couverture de M. B... n'a pas été lavée depuis son arrivée dans l'établissement en mai 2020.
15. La situation décrite aux points 13 et 14 constitue, dans les circonstances de l'espèce, une atteinte grave et manifestement illégale au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants. La condition d'urgence doit être regardée comme remplie. Il suit de là que le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a enjoint à l'administration de prendre toutes mesures utiles et nécessaires pour assurer une procédure de désinsectisation rapide, efficace et régulière de l'ensemble des cellules et pour assurer un lavage hebdomadaire des draps et un lavage mensuel de tout linge de lit à disposition des détenus, dans les conditions conforme à la réglementation.
16. Il résulte de tout ce qui précède que l'appel du garde des sceaux, ministre de la justice, doit être rejeté.
Sur l'appel incident de M. B... :
En ce qui concerne les conclusions tendant au nettoyage, à la désinsectisation et à la réparation des joints de la fenêtre de la nouvelle cellule de M. B... :
17. M. B... soutient que la cellule dans laquelle il est affecté depuis le 27 novembre 2020 est particulièrement sale et infestée par les cafards. Il fait également valoir que les joints de sa fenêtre sont en très mauvais état.
18. Il résulte toutefois de l'instruction qu'un nécessaire de nettoyage de sa cellule a été octroyé à M. B... le 4 décembre 2020. En outre, les opérations de désinsectisation ne peuvent être efficaces que si elles sont mises en oeuvre à l'échelle de l'établissement, et non d'une seule cellule. Enfin, l'usure des joints de la fenêtre de la cellule de M. B... ne peut suffire, à elle seule, à caractériser une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
En ce qui concerne les conclusions tendant au nettoyage des douches deux fois par jour, à l'inscription des fouilles qu'il a subies sur le registre prévu à cet effet et à la prise de mesures destinées à garantir des conditions dignes de détention durant la crise sanitaire :
19. D'une part, M. B... reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau, ses demandes présentées devant le premier juge tendant à ce que les douches soient nettoyées deux fois par jour, à ce que soit mis en place un affichage à destination du personnel pénitentiaire rappelant l'obligation pour lui de porter un masque en toute circonstance, à ce que soit distribués aux auxiliaires qui assurent la distribution des repas au requérant des masques et des gels hydro-alcooliques en quantité suffisante et à ce que soit fourni du savon en quantité suffisante aux détenus afin de garantir leur hygiène personnelle. Il convient d'écarter ces demandes par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
20. D'autre part, l'absence d'inscription sur le registre prévu à cet effet de certaines fouilles intégrales subies par M. B... ne constitue pas, en elle-même, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
21. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par M. B... par la voie de l'appel incident doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin de prendre une mesure de constat prévue à l'article R. 622-1 du code de justice administrative ni de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre.
22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sans qu'il soit besoin d'admettre provisoirement M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : L'intervention de l'Association de défense des droits des détenus est admise.
Article 2 : La requête du garde des sceaux, ministre de la justice, est rejetée.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. B... devant le juge des référés du Conseil d'Etat est rejeté.
Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, à M. A... B... et à l'Association de défense des droits des détenus.
Copie en sera adressée à la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté.