2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de prendre toutes mesures nécessaires pour assurer l'exécution de l'ordonnance du juge des contentieux de la protection en date du 27 août 2020 dans un délai de 24 heures à compter de la notification de la présente décision, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est entachée d'une erreur d'appréciation des faits et de la règle de droit applicable ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que l'occupation de leur bien immobilier sans droit ni titre, d'une part, revêt un caractère répétitif et, d'autre part, constitue une entrave à la réalisation de leur projet de vente ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit de propriété et au droit au procès équitable ;
- l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille méconnaît le droit de propriété dès lors que la carence de l'administration, qui fait obstacle à la libre disposition de leur bien, les empêche de réaliser leur projet de vente ;
- elle méconnaît le droit à un procès équitable dès lors que la décision de sursis d'octroi de la force publique ne permet pas d'assurer l'exécution de la décision d'expulsion des occupants sans droit ni titre ;
- les éléments avancés par la préfecture pour justifier du défaut de concours de la force publique ne sont pas démontrés par des éléments objectifs, qu'il s'agisse du nombre élevé d'occupants, qui ressort uniquement des déclarations de ces derniers, ou de la nouvelle scolarisation de leurs enfants, qui ne constitue par ailleurs pas un obstacle à l'exercice de leur droit de propriété ;
- en ce qui concerne le concours de la force publique, la carence de l'administration n'est pas justifiée par un impératif d'intérêt général dès lors qu'aucun élément ne permet de caractériser le risque de trouble à l'ordre public.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 février 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, et qu'il n'est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales invoquées.
Vu les deux nouveaux mémoires, enregistrés les 12 et 16 février 2021, présentés par M. et Mme B... ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 15 février 2021, présenté par le ministre de l'intérieur ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, et notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. et Mme B..., et d'autre part, le ministre de l'intérieur ;
Ont été entendus lors de l'audience publique du mardi 9 février 2021, à 10 heures :
- Me Mégret, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. et Mme B... ;
- les représentantes du ministre de l'intérieur ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a prolongé l'instruction jusqu'au 17 février à 18 heures ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ".
2. Le refus de concours de la force publique, pour expulser des occupants sans titre d'un bien, opposé au propriétaire, est susceptible de revêtir, au sens des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, le caractère d'une atteinte grave à une liberté fondamentale. L'usage par le juge des référés des pouvoirs qu'il tient des dispositions de cet article est toutefois subordonné à la condition qu'une urgence particulière rende nécessaire l'intervention dans les quarante-huit heures d'une mesure de sauvegarde. Le juge des référés saisi sur ce fondement peut, s'il estime que cette condition est remplie eu égard aux circonstances particulières invoquées devant lui par le propriétaire, et si le refus de concours est manifestement illégal, enjoindre au préfet d'accorder ce concours dans la mesure où une telle injonction est seule susceptible de sauvegarder l'exercice effectif de la liberté fondamentale à laquelle il est porté atteinte.
3. M. et Mme B... sont propriétaires d'une maison individuelle édifiée sur un terrain dans le 11ème arrondissement de Marseille, En raison de son occupation irrégulière en dépit des protections mises en place par les époux B..., ils ont requis le concours de la force publique après que la procédure juridictionnelle qu'ils avaient engagée avait abouti à une ordonnance d'expulsion, concours qui leur a été accordé le 12 janvier 2021. Toutefois, une première tentative d'expulsion a échoué le 14 janvier, et les services de l'Etat n'ont depuis pas renouvelé de tentative d'expulsion. Les époux B..., tenus par une promesse de vente qui expire en juin 2021 de vendre les lieux libres de tout occupant, ont en conséquence saisi le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, afin qu'il ordonne, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, que le concours de la force publique leur soit effectivement prêté, sous astreinte. Par une ordonnance du 25 janvier 2021, cette demande a été rejetée faute que le refus de procéder à l'expulsion soit entaché d'une illégalité manifeste. Les époux B... relèvent appel de cette ordonnance.
4. Pour critiquer l'ordonnance attaquée, les requérants estiment qu'elle repose sur une erreur d'appréciation des faits de l'espèce. Ils relèvent que le nombre d'occupants, et parmi ceux-ci d'enfants scolarisés dans le 11ème arrondissement n'est pas établi, que le conditions d'occupation de leur bien sont d'un danger et d'une insalubrité tels que ne pas expulser les occupants est en soi illégal, tandis que les services de l'Etat n'ont accompli aucune diligence pour assurer l'expulsion.
5. Des débats à l'audience et du supplément d'instruction auquel il a été procédé à son issue ressort certes que l'Etat est en effet incapable d'indiquer de manière précise et fiable le nombre de personnes occupant le bien, la nature de leurs liens familiaux, et, afin de respecter les droits des enfants concernées, leur lieu de scolarisation, jetant ainsi un doute sur sa capacité réelle à procéder au relogement d'un nombre incertain de personnes dont il ne connaît pas avec précision le besoins, s'en tenant à l'évaluation d'une association agréée, que ne corroborent pas les constats d'huissier auxquels les requérants ont procédé. Toutefois, il n'est pas contesté, en dépit de ces imprécisions, que des familles occupent le bien, et qu'une fraction au moins de leurs enfants mineurs est scolarisée dans les écoles du XIe arrondissement. Pour déplorables que soient les conditions sanitaires de l'occupation et l'indignité des conditions de vie dans lesquelles les occupants sont placés, les conséquences d'une expulsion sans relogement seraient graves, notamment pour les enfants. L'Etat a établi avoir recherché des solutions de relogement en hôtel sans succès, et a réaffirmé sa volonté de trouver une prompte solution, qui, contrairement à ce qui est soutenu par les requérants, ne consiste pas à maintenir ensemble dans un autre lieu l'ensemble des occupants, mais seulement à respecter l'unité des familles et à faire prévaloir l'intérêt supérieur des enfants en recherchant un relogement n'éloignant pas les familles du lieu de scolarisation. Au vu de l'ensemble de ces circonstances, et compte tenu qu'à la date de la présente ordonnance, la promesse de vente concernant le bien demeure valide jusqu'au 30 juin, les conséquences négatives de la situation pouvant, s'ils s'y croient fondés, ouvrir aux époux B... la voie d'une indemnisation, c'est sans erreur d'appréciation sur les faits de l'espèce que le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a considéré que l'absence de concours effectif de la force public pour assurer l'expulsion n'était pas entaché d'une illégalité manifeste susceptible e fonder l'usage de pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-2. Il en résulte que la requête d'appel des époux B... ne peut qu'être rejetée, y compris en tant qu'elle demande, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, que l'Etat leur verse une somme d'argent, ces dispositions y faisant obstacle dès lors que l'Etat n'est pas la partie perdante à la présente instance.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... et Mme D... B... et au ministre de l'intérieur.