1°) d'annuler cette décision de la commission nationale d'aménagement cinématographique du 30 juin 2015 ;
2°) d'enjoindre à cette commission de réexaminer le projet dans un délai de deux mois à compter de la décision à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les écritures en défense émanent du centre national du cinéma et de l'image animée et non de la commission nationale d'aménagement cinématographique, et apparaissent dans ces conditions irrecevables, quand bien même l'établissement public en assurerait le secrétariat ;
- la lecture de la décision litigieuse ne permet pas de s'assurer que la commission aurait été composée conformément aux dispositions de l'article L. 212-6-6 du code du cinéma et de l'image animée, ni que l'ensemble des pièces utiles visées à l'article R. 212-7-26 du même code auraient été adressées à ses membres ;
- la décision est illégale dès lors que l'avis émis pour le compte du ministre en charge de la culture n'a pas été signé par une personne dûment habilitée à cet effet ; la délégation dont le signataire dispose est excessivement large, et ne peut légalement recouvrir la totalité des attributions du ministre ; le ministre de la culture prétend s'approprier un avis négatif du centre national de la cinématographie alors que son représentant devant la commission départementale a émis un avis favorable ; par ailleurs, l'avis du ministre en charge du développement durable n'a pas été sollicité ;
- le premier motif tiré de l'absence de plus-value en termes de diversité d'offre cinématographique est erroné ; la commission a d'abord renversé la logique des dispositions du code du cinéma et de l'image animée, selon lesquelles l'autorisation est le principe et le refus l'exception ; les critiques cinématographiques au projet similaire à celui de 2012 ont été écartées par le Conseil d'Etat dans sa décision du 15 octobre 2014, laquelle a conclu que la création cumulée de deux multiplexes de taille équivalente est légalement possible ; le projet est similaire à celui de 2012 en termes de nombre de places, de situation et de transports ; le projet s'inscrit dans la logique du renforcement de la programmation Art et Essai des deux cinémas dont elle est propriétaire tout en offrant un choix de films et d'horaires plus important ; le cinéma du centre-ville pourra accentuer sa vocation culturelle dès lors que le cinéma " Les Toiles du Moun " pourra accueillir des films grand public ; l'agrandissement entraînera une modernisation du cinéma du centre-ville ; le gain de spectateurs, réparti sur 2 établissements d'une même société, permet d'atteindre un équilibre budgétaire sans subventions publiques ; il n'est pas question de fermer l'établissement existant en centre-ville et la diminution de l'activité constatée récemment sur ce site ne résulte pas d'une concurrence outrancière, mais du choix de fermer les salles susceptibles d'être inondées ; en outre, lorsque deux établissements concurrents sont implantés dans la même zone primaire, des copies de films en double sont données par les distributeurs, sur tous les films porteurs commercialement, l'usage étant de distribuer une copie par exploitant local, quel que soit le nombre d'établissements ; l'avantage pour les cinéphiles d'un agrandissement de " Les Toiles du Moun " réside dans la circonstance qu'un même film sera diffusé à la fois en centre-ville par " Le Grand Club " et en périphérie, ce qui permettra au cinéma qu'elle exploite en centre-ville de renforcer indéniablement sa programmation Art et Essai ;
- il n'est pas démontré que le projet détériorerait l'entrée de l'agglomération ; l'architecte des bâtiments de France a émis un avis favorable à la première phase du projet non soumise à autorisation ; pour répondre aux remarques émises sur ce point, il est prévu de le perfectionner encore, via une végétalisation du site renforcée venant améliorer la situation de l'existant ; le projet a également fait l'objet d'un avis favorable de la direction départementale des territoires ;
- la violation du schéma de cohérence territoriale de la communauté d'agglomération de Marsan n'est pas constituée ; la photographie aérienne produite au dossier révèle que le projet ne se situe pas en dehors du centre-ville et n'est pas un facteur d'étalement urbain ; le projet est également proche du centre commercial " Le Grand Moun ", où ont été autorisés 40 000 m² de surface commerciale, et qui constitue un pôle commercial de l'agglomération toute entière ; en outre, les autorisations d'équipement cinématographique doivent seulement être compatibles avec le schéma de cohérence territoriale ; le schéma de cohérence territoriale mentionne que la ville de Saint-Pierre-du-Mont fait partie des lieux d'implantation privilégiés pour des cinémas dans l'agglomération ; les prescriptions dont se prévaut la commission sont très générales, et il n'est nullement démontré que le projet viendrait les contrarier ; la jurisprudence qu'elle cite, qui ne concerne pas des établissements cinématographiques, n'est pas transposable ; le schéma de cohérence territoriale n'avait pas été approuvé à la date de la décision attaquée.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 7 janvier et 26 septembre 2016, la commission nationale d'aménagement cinématographique, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Le Royal Cinéma SAS une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- c'est pour le compte de la commission nationale que le Centre national du cinéma a produit des écritures ; ses services assurent le secrétariat de la commission ; en tout état de cause, elle entend s'approprier l'ensemble des écritures que le Centre national du cinéma a présentées ;
- aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe n'impose que les décisions de la commission attestent du respect des règles de convocation et du quorum, ni qu'elles comportent les mentions attestant de la convocation régulière de ses membres ou de l'envoi dans les délais de l'ordre du jour et des documents nécessaires à ses délibérations ; au demeurant, le procès-verbal fait état de la présence de 5 membres lors de la séance durant laquelle le projet en litige a été examiné ; les convocations à la séance ont été adressées le 22 avril et les dossiers d'instruction ont été communiqués le 25 juin 2015 ;
- l'avis du ministre de la culture et de la communication a été signé par le directeur du cabinet de la ministre, dûment habilité par une délégation consentie par un arrêté de la ministre du 10 novembre 2014 publié au Journal officiel le 14 novembre suivant ; cette délégation se borne à reprendre les dispositions du décret du 27 juillet 2005 autorisant les membres du gouvernement à déléguer leur signature ; à supposer même que cet avis n'aurait pas été signé par une personne dument habilitée, il n'est pas démontré qu'une telle irrégularité aurait été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision querellée ou aurait privé les intéressés d'une garantie ; la consultation du ministre chargé du développement durable n'est pas obligatoire ;
- l'appréciation par la commission des effets d'un projet ne saurait être prédéterminée par une décision juridictionnelle antérieure, d'autant moins lorsque cette dernière se rapporte à un autre projet ; dans sa décision du 15 novembre 2014, le Conseil d'Etat a censuré le premier refus opposé à la société appelante en ce qu'il était fondé sur un contrôle de la densité d'équipement cinématographique ; le nouveau projet ne consiste plus en la création d'un nouvel équipement excentré de neuf salles et 1 298 places destiné à remplacer l'existant en centre ville mais en l'extension de quatre à sept salles et 1 023 places d'un complexe situé en entrée d'agglomération venant s'ajouter au cinéma " Le Royal " existant, amputé de deux salles, et à un multiplexe récemment autorisé ; c'est pourquoi le premier motif de refus est fondé sur l'absence de plus-value en termes de diversité mais également sur les importantes difficultés d'accès aux films que ne manquera pas d'entraîner le projet, tant au sein de l'agglomération de Mont-de-Marsan, ce qui induit des risques pour la pérennité même de l'établissement exploité en centre-ville par l'exploitant, que dans les communes de la zone d'influence cinématographique ; le projet d'extension ne permet pas de renforcer l'offre art et essai ou de créer une complémentarité avec le cinéma historique alors qu'à l'instar du cinéma " Le Royal " la programmation sera consacrée au créneau généraliste et les deux tiers des films programmés dans les deux salles seront les mêmes ; au demeurant, le dossier de demande ne le mentionne pas ; la demande est limitée à l'extension de " Les Toiles du Moun ", sans référence à une modernisation du cinéma " Le Royal " ; l'étude de marché réalisée à la demande du pétitionnaire montre que l'activité du cinéma historique du centre-ville de Mont-de-Marsan a déjà diminué de manière significative depuis la création de " Les Toiles du Moun " et ne survivra pas à l'extension de ce dernier ; enfin, alors que les complexes de la zone disposent de bonnes conditions d'accès aux films, le projet amoindrira l'offre proposée aux spectateurs ; il n'existe aucun systématisme à servir des exploitants différents ; dans un premier temps, et pour les films les plus porteurs, des copies en double seront données aux deux multiplexes, ce qui ne contribuera pas à la diversification de l'offre des films ; dans un second temps, en fonction des résultats de fréquentation de ces multiplexes, les distributeurs opèreront un choix sélectif dans la distribution ; la requérante ne justifie d'aucun engagement de supprimer " Le Royal " ;
- l'insertion architecturale et paysagère du projet n'est pas satisfaisante ; il consiste en l'extension d'une imposante boîte blanche en bardage métallique précédée d'un vaste parc de stationnement en plein air dénué de tout effort de végétalisation, conduisant à détériorer l'entrée de ville de Mont-de-Marsan ; l'avis de la direction des territoires est peu élogieux sur l'insertion du projet dans son environnement ;
- le projet est incompatible avec les objectifs et les prescriptions du schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Marsan ; le document d'orientations et d'objectifs comporte des prescriptions et des recommandations destinées notamment à protéger les paysages et à mettre en valeur les entrées de ville ; or, le projet se situe en entrée de ville, dans une zone péri-urbaine et aucun effort n'est prévu en termes d'insertion du bâtiment dans le paysage ; en outre ce document vise à privilégier les implantations en centre-ville et à éviter "tout nouveau développement d'équipement commerciaux d'une manière diffuse et opportuniste " ; le SCOT a été approuvé le 19 juin 2014.
Par ordonnance du 11 avril 2017, la clôture de l'instruction a été fixée 22 mai 2017 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du cinéma et de l'image animée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 15 mars 2018 :
- le rapport de Mme Cécile Cabanne ;
- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
- et les observations de MeA..., représentant la SAS Royal Cinéma et de MeF..., représentant la CNC.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS Royal Cinéma, exploitante du cinéma " Le Royal " à Mont-de-Marsan, a envisagé sa fermeture et son remplacement par un multiplexe de 9 salles et 1 298 fauteuils, implanté sur un autre site de la commune. L'autorisation d'ouverture de ce nouvel équipement déposée en 2012 a été refusée par la Commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique. Ce refus a été annulé par le Conseil d'Etat par une décision du 15 octobre 2014 considérant, notamment, qu'en dépit de l'autorisation accordée par ailleurs par la commission nationale à un autre exploitant d'ouvrir un ensemble de huit salles dans le centre-ville de Mont-de-Marsan, son ouverture ne compromettait pas l'objectif de diversité de l'offre cinématographique. Entre-temps, la société Le Royal Cinéma s'est désistée de ce projet et, maintenant son cinéma en centre-ville de Mont-de-Marsan réduit à 4 salles, a également ouvert en novembre 2014 un établissement de spectacles cinématographiques à l'enseigne " Les Toiles du Moun " de 4 salles et 299 places à Saint-Pierre-du-Mont, en périphérie immédiate, lequel ne nécessitait pas d'autorisation. Par une décision du 5 février 2015, la commission départementale d'aménagement commercial des Landes, statuant en matière d'équipement cinématographique, a refusé à la SAS Royal Cinéma l'autorisation de procéder à une extension de cet établissement par création de trois salles supplémentaires représentant 724 places. L'exploitant demande à la cour d'annuler la décision n° 246 du 30 juin 2015 par laquelle la commission nationale d'aménagement cinématographique a rejeté son recours et confirmé ce refus.
Sur les conclusions en annulation :
En ce qui concerne les moyens de légalité externe :
2. Aux termes de l'article R. 212-7-26 du code du cinéma et de l'image animée : " La Commission nationale d'aménagement cinématographique se réunit sur convocation de son président. Les membres de la commission reçoivent l'ordre du jour, accompagné des procès-verbaux des réunions des commissions départementales d'aménagement cinématographique, des décisions de ces commissions, des recours et des rapports des services instructeurs. La commission ne peut valablement délibérer qu'en présence de cinq membres au moins. "
3. Il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, notamment pas de l'article R. 212-7-26 du code du cinéma et de l'image animée, ni d'aucun principe que les décisions de la Commission nationale d'aménagement cinématographique doivent comporter des mentions attestant de la régularité de sa composition ou de ce que la convocation de ses membres a été accompagnée de l'envoi de l'ordre du jour et des documents nécessaires aux délibérations. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté. Par ailleurs, il ressort des pièces produites que le quorum était réuni et les membres avaient reçu communication des dossiers en temps utile.
4. En deuxième lieu, l'avis du ministre de la culture et de la communication a été signé par M. B...E..., directeur du cabinet, ayant reçu délégation par un arrêté en date du 10 novembre 2014 publié au Journal officiel du 14 novembre 2014, à l'effet de signer tous actes, arrêtés et décisions, à l'exclusion des décrets, en ce qui concerne les affaires pour lesquelles délégation n'a pas été donnée aux personnes mentionnées aux 1° et 2° de l'article 1 du décret du 27 juillet 2005. Cette délégation n'est ni générale ni imprécise. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'avis de la ministre de la culture et de la communication ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, la société requérante soutient que l'avis transmis à la Commission nationale d'aménagement cinématographique ne mentionne pas les éléments ayant conduit la ministre de la culture et de la communication à émettre un avis défavorable sur le projet d'extension qui lui était présenté et que cette absence de précision montre que la ministre s'est en réalité contentée de valider la proposition du délégué du Centre national du cinéma et de l'image animée, commissaire du gouvernement auprès de la Commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique. Toutefois, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que les avis rendus par les ministres intéressés, qui présentent un caractère purement consultatif, devraient être spécifiquement motivés. Par ailleurs, rien ne s'oppose à ce que la ministre de la culture et de la communication s'approprie l'analyse du Centre national du cinéma et de l'image animée. En tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette irrégularité alléguée, à la supposée établie, aurait privé l'intéressée d'une garantie, ni qu'elle aurait été susceptible d'exercer une influence sur la légalité de la décision en litige. Par suite, le moyen doit être écarté.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 212-7-29 du code du cinéma et de l'image animée, en vigueur à la date de la décision contestée : " Le commissaire du Gouvernement recueille l'avis du ministre chargé de la culture, qu'il présente à la Commission nationale d'aménagement cinématographique. Il donne son avis sur les demandes examinées par la commission au regard des auditions effectuées ". Il résulte de ce qui précède que le ministre chargé du développement durable n'avait pas à être obligatoirement consulté lorsque la commission nationale statue en matière cinématographie. Par suite, la requérante ne peut utilement faire valoir que la Commission nationale n'aurait pas recueilli l'avis du ministre chargé du développement durable.
En ce qui concerne l'appréciation de la commission nationale d'aménagement cinématographique :
7. Aux termes de l'article L. 212-6 du code du cinéma et de l'image animée, dans sa rédaction applicable à la présente instance : " Les créations, extensions et réouvertures au public d'établissements de spectacles cinématographiques doivent répondre aux exigences de diversité de l'offre cinématographique, d'aménagement culturel du territoire, de protection de l'environnement et de qualité de l'urbanisme, en tenant compte de la nature spécifique des oeuvres cinématographiques. Elles doivent contribuer à la modernisation des établissements de spectacles cinématographiques et à la satisfaction des intérêts du spectateur tant en ce qui concerne la programmation d'une offre diversifiée, le maintien et la protection du pluralisme dans le secteur de l'exploitation cinématographique ". L'article L. 212-9 du même code
prévoit que, dans le cadre de ces principes, " les commissions d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique se prononcent sur les deux critères suivants : / 1° l'effet potentiel sur la diversité cinématographique offerte aux spectateurs dans la zone d'influence cinématographique concernée, évalué au moyen des indicateurs suivants : / a) le projet de programmation envisagé pour l'établissement de spectacles cinématographiques objet de la demande d'autorisation et, le cas échéant, le respect des engagements de programmation éventuellement souscrits en application des articles L. 212-19 et L. 212-20 ; / b) la nature et la diversité culturelle de l'offre cinématographique proposée dans la zone concernée, compte tenu de la fréquentation cinématographique ; / c) la situation de l'accès des oeuvres cinématographiques aux salles et des salles aux oeuvres cinématographiques pour les établissements de spectacles cinématographiques existants./ 2° L'effet du projet sur l'aménagement culturel du territoire, la protection de l'environnement et la qualité de l'urbanisme, évalué au moyen des indicateurs suivants : / a) l'implantation géographique des établissements de spectacles cinématographiques dans la zone d'influence cinématographique et la qualité de leurs équipements ; / b) la préservation d'une animation culturelle et le respect de l'équilibre des agglomérations ; / c) la qualité environnementale appréciée en tenant compte des différents modes de transports publics, de la qualité de la desserte routière, des parcs de stationnement ; / d) l'insertion du projet dans son environnement ; / e) la localisation du projet, notamment au regard des schémas de cohérence territoriale et des plans locaux d'urbanisme. / Lorsqu'une autorisation s'appuie notamment sur le projet de programmation cinématographique, ce projet fait l'objet d'un engagement de programmation cinématographique souscrit en application du 3° de l'article L. 212-23 (...) ".
8. Il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet d'équipement cinématographique contesté compromet la réalisation des objectifs et principes énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique, lorsqu'elles se prononcent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs et principes, au vu des critères d'évaluation et indicateurs mentionnés à l'article L. 212-9 du code du cinéma et de l'image animée, parmi lesquels ne figure plus la densité d'équipement en salles de spectacles cinématographiques dans la zone d'attraction du projet.
9. Pour refuser le projet, la commission nationale a considéré qu'il n'apportait aucune plus-value en termes de diversité d'offre cinématographique aux habitants de la zone d'influence ni d'augmentation sensible de la fréquentation cinématographique compte tenu des établissements déjà existants et du multiplexe autorisé en 2012. En outre, la commission a estimé que la réalisation du projet d'extension entraînera des difficultés d'accès aux films tant au niveau de l'agglomération que des établissements de la zone secondaire. Dans ce contexte, compte tenu de ses caractéristiques, elle a également considéré que le projet ne respecte pas l'équilibre des agglomérations et ne permet pas d'assurer l'attractivité et le maintien d'une animation culturelle cinématographique au sein de la zone d'influence. De plus, la commission a regardé le projet comme n'étant pas de nature à embellir l'entrée d'agglomération de Mont-de-Marsan et ne permettant pas une insertion harmonieuse du projet dans l'environnement. Enfin, elle conclut à l'incompatibilité du projet avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Marsan.
10. Il ressort des pièces du dossier que la zone d'influence cinématographique retenue par la société pétitionnaire, qui compte 103 313 habitants, se caractérisait par l'existence prochaine d'un établissement " Le Grand Club " de type multiplexe, comprenant 8 salles et 1 350 places, de taille équivalente au cinéma projeté après extension, qui avait été autorisé en 2012 et devait ouvrir en décembre 2016, un cinéma " Le Royal " comprenant 4 salles et 577 places, tous deux situés à Mont-de-Marsan en sous-zone primaire, le cinéma " Les Toiles du Moun " ouvert en novembre 2014 avec 4 salles et 299 fauteuils, ainsi que de trois cinémas d'un écran offrant un nombre de séances limité situés en sous-zone secondaire. Le projet de programmation des salles envisagées par la société requérante propose une offre généraliste et mixte associant une programmation principalement grand public à une offre de films Art et Essai. Le classement Art et Essai n'est pas envisagé et 40 % des séances seraient consacrées à l'offre Art et Essai, ce qui représente une offre équivalente à celle proposée par les deux cinémas situés en centre-ville de Mont-de-Marsan. La complémentarité alléguée entre les cinémas " Le Royal " et " Les Toiles du Moun ", propriétés de la requérante, n'est pas démontrée, alors, au demeurant, qu'un recentrage du cinéma " Le Royal " classé Art et essai sur ce créneau ne ressort pas du dossier de demande. En outre, l'implantation de trois cinémas susceptibles de diffuser les mêmes films situés à dix minutes en voiture, alors même que deux d'entre eux appartiennent au même exploitant, présente de forts risques de compromettre l'accès aux films, notamment pour les films Art et Essai. Ces difficultés sont par ailleurs confirmées par une étude produite par la Commission nationale d'aménagement cinématographique dans ses écritures en défense, dont le contenu n'est pas utilement remis en cause par la société requérante. Dans ces conditions, quand bien même le projet permettrait une amélioration des conditions d'accueil et de confort des spectateurs, en particulier, ceux extérieurs à l'agglomération montoise, en retenant que le projet d'extension présenté par la société Le Royal Cinéma était de nature à compromettre l'objectif de diversité cinématographique et l'aménagement culturel au sein de la zone d'influence cinématographique, la Commission nationale d'aménagement cinématographique n'a pas méconnu les dispositions précitées.
11. En admettant même que la commission ait fondé à tort sa décision sur les motifs tirés de l'incompatibilité avec le SCOT du Marsan et d'une qualité de l'urbanisme insuffisante, il résulte de l'instruction que la Commission nationale d'aménagement commercial statuant en matière cinématographique aurait pris la même décision si elle ne s'était fondée que sur les autres motifs examinés au point précédent.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la société Le Royal Cinéma n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision de la Commission nationale d'aménagement cinématographique du 30 juin 2015.
13. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er: La requête de la société Royal Cinéma est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la Commission nationale d'aménagement cinématographique au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Royal Cinéma, au ministre de la culture (Commission nationale d'aménagement cinématographique).
Délibéré après l'audience du 15 mars 2018 à laquelle siégeaient :
- Mme Catherine Girault, président,
- M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
- Mme Cécile Cabanne, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 avril 2018.
Le rapporteur,
Cécile CABANNELe président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Virginie MARTY
La République mande et ordonne au ministre de la culture, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 15BX02965