Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 janvier 2016, M. A...B..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 2 novembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2015 de la préfète du Pas-de-Calais portant obligation de quitter le territoire français, fixation du pays de destination, refus de délai de départ volontaire et placement en rétention ;
3°) d'enjoindre à l'autorité administrative territorialement compétente de lui délivrer sous astreinte et dans un délai fixé par la cour, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me D...de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son protocole additionnel n° 4 ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de MmeC...,
- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A...B..., ressortissant afghan né en 1994, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations au cours de l'été 2015, après avoir voyagé clandestinement dans divers camions par l'Iran, la Turquie, la Bulgarie, la Hongrie, l'Autriche et l'Italie. A la suite de son interpellation le 30 octobre 2015 sur un parking situé en zone enclose du terminal fret à destination de la Grande-Bretagne, alors qu'il tentait de se rendre dans ce pays, la préfète du Pas-de-Calais a, par un arrêté du 30 octobre 2015, d'une part, fait obligation à M. B...de quitter sans délai le territoire français à destination du pays dont il revendique la nationalité, ou tout autre pays où il établirait être légalement admissible et, d'autre part, placé l'intéressé en rétention dans les locaux de la direction départementale de la police aux frontières du Pas-de-Calais et de tout autre centre de rétention administrative durant cinq jours. M. B...a été transféré, le même jour, au centre de rétention de Coquelles où ses droits lui ont été notifiés, avant d'être conduit au centre de rétention de Toulouse-Cornebarrieu. M. B...relève appel du jugement du 2 novembre 2015 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du 30 octobre 2015 de la préfète du Pas-de-Calais.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Par un mémoire enregistré le 2 novembre 2015 et visé par le magistrat désigné, M. B... a invoqué le moyen tiré de la violation de l'article 1er de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Le tribunal administratif de Toulouse n'a pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant, et a ainsi entaché son jugement d'une omission à statuer. Par suite le jugement attaqué doit être annulé. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par le requérant devant le tribunal administratif de Toulouse.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :
3. M. B...soutient " en préambule " et sans plus de précision que l'arrêté contesté du 30 octobre 2015 de la préfète du Pas-de-Calais méconnaît l'article 1er de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne en vertu duquel : " La dignité humaine est inviolable. Elle doit être respectée et protégée. ". Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les mesures prononcées à son encontre auraient par elles-mêmes, indépendamment des conditions de leur exécution, porté atteinte à son droit garanti par ces stipulations.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
S'agissant de la légalité externe de la décision :
4. En premier lieu, M. B...soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée et que sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen particulier. Toutefois, l'arrêté du 30 octobre 2015 en litige, qui vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et mentionne, notamment, les dispositions des articles L. 511-1 I et II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comporte les considérations de droit qui en constituent le fondement. La préfète indique que M. B...se prévaut de la nationalité afghane et que l'intéressé ne dispose d'aucun document transfrontalier en cours de validité. La préfète relève, en outre, que M.B..., qui est démuni de tout document d'identité, n'est pas en mesure de justifier être entré régulièrement sur le territoire français, et mentionne que l'intéressé n'a pas déposé de demande de titre de séjour ni n'a déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, et qu'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes. La préfète indique, enfin, qu'il existe ainsi un risque que l'intéressé se soustraie à une décision d'éloignement susceptible d'être prise à son encontre et dont il a été préalablement informé lors de son audition par les services de la police de l'air et des frontières. Ainsi l'arrêté, qui n'était pas tenu de préciser de manière exhaustive l'ensemble des éléments tenant à la situation de M. B..., comporte, également, les considérations de fait sur lesquelles la préfète s'est fondée pour prononcer l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de ce que la préfète aurait entaché cette décision d'une insuffisance de motivation, en méconnaissance de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, doit être écarté. Il ressort en outre des pièces du dossier et de la motivation même de cet arrêté que l'ensemble des décisions qu'il contient ont été prises après un examen particulier de la situation personnelle de M.B..., y compris la décision de refus de lui accorder un délai pour un départ volontaire ou celle fixant le pays de renvoi.
5. En deuxième lieu, M. B...soutient qu'en ne le mettant pas en mesure de présenter ses observations avant de prendre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, la préfète du Pas-de-Calais n'a mis en oeuvre aucune procédure contradictoire assurant le respect du principe général du droit consacré par la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, imposant à l'administration d'entendre une personne avant de prendre à son encontre une décision lui faisant grief. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. B... a été entendu par les services de la police de l'air et des frontières le 30 octobre 2015, avant l'édiction de la mesure en litige, dans le cadre de la procédure de vérification du droit de circulation ou de séjour, avec l'assistance d'un interprète en langue pachtou. Au cours de cette audition, il a été interrogé sur ses conditions d'entrée et de séjour en France ainsi que sur sa situation dans son pays d'origine et sur les éventuelles démarches entreprises en France ou dans un pays européen en vue de la régularisation de sa situation administrative. Il a été informé qu'une mesure d'éloignement était susceptible d'être prise à son encontre, et a été mis à même de présenter ses observations. En revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B..., qui se borne à soutenir que son droit d'être entendu a été méconnu, sans autre précision, aurait disposé d'informations pertinentes tenant à sa situation personnelle ou familiale, qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise la mesure d'éloignement, et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. Dans ces conditions, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la préfète aurait méconnu le principe du contradictoire ou son droit d'être entendu.
6. En troisième lieu, M. B...soutient qu'il est entré en France en vue de solliciter l'octroi d'une protection internationale et que l'administration aurait dû le considérer comme un demandeur d'asile et se prononcer sur son admission au séjour en France à ce titre avant de lui faisant obligation de quitter le territoire français. Il fait valoir que faute de l'avoir fait, la préfète du Pas-de-Calais a méconnu les dispositions des articles L. 741-2, L.741-4 et L.742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ou principe applicable n'exigent de l'autorité préfectorale qu'elle se prononce sur l'admission au séjour au titre de l'asile d'un étranger qui n'a pas présenté de demande d'asile, avant de prendre à son encontre une décision lui faisant obligation de quitter le territoire. Il ressort des pièces du dossier et, notamment du procès-verbal de l'audition de M.B..., que l'intéressé a seulement fait part de son souhait " d'être laissé libre " et de se rendre en Grande-Bretagne et qu'il n'a à aucun moment sollicité l'asile en France ou dans un autre des pays européens qu'il a traversés. Dans ces conditions, la préfète a pu légalement prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M.B..., qui ne détenait aucun document ou titre en cours de validité l'autorisant à séjourner ou à circuler sur le territoire français et n'a pas justifié y être entré régulièrement, sans se prononcer au préalable sur son admission au séjour au titre de l'asile.
S'agissant de la légalité interne de la décision :
7. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée.(...) / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office. / II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. ".
8. En premier lieu, et ainsi qu'il a été dit précédemment, M.B..., de nationalité afghane, ne détenait, lors de son interpellation, aucun document ou titre en cours de validité l'autorisant à séjourner ou à circuler sur le territoire français et n'a pas justifié y être entré régulièrement. Il se trouvait donc dans le cas prévu par les dispositions sus-rappelées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où peut être prise à son encontre une décision lui faisant obligation de quitter le territoire.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4 du protocole additionnel n°4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Les expulsions collectives d'étrangers sont interdites ". La même interdiction figure également à l'article 19-1 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Contrairement à ce que soutient M.B..., le fait que plusieurs étrangers fassent l'objet de décisions semblables ne permet pas, en tout état de cause, en lui-même, de conclure à l'existence d'une expulsion collective. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 4, il ressort des pièces du dossier que la décision faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français n'a pas eu un caractère automatique, qu'elle a été prise après un examen objectif de sa situation personnelle et se fonde sur des circonstances de fait propres à cette situation et que l'intéressé a été mis à même de faire valoir auprès des services de police et de l'administration préfectorale les arguments qui, selon lui, s'opposeraient à son éloignement. Dans ces conditions, M. B...ne saurait utilement se prévaloir de ce que d'autres mesures d'éloignement auraient été prononcées à l'encontre de nombreux étrangers en situation irrégulière, le même jour que celui où a été prise à son encontre la décision litigieuse, pour soutenir qu'il aurait fait l'objet d'une expulsion collective interdite par les stipulations susmentionnées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article 5 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 : " Lorsqu'ils mettent en oeuvre la présente directive, les États membres tiennent dûment compte : / a) de l'intérêt supérieur de l'enfant, / b) de la vie familiale, / c) de l'état de santé du ressortissant concerné d'un pays tiers et respectent le principe de non-refoulement ". L'article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 stipule que : " 1. Aucun des Etats contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques. / 2. Le bénéfice de la présente disposition ne pourra toutefois être invoqué par un réfugié qu'il y aura des raisons sérieuses de considérer comme un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou qui, ayant été l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement grave, constitue une menace pour la communauté dudit pays. ". En vertu de l'article 18 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Le droit d'asile est garanti dans le respect des règles de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et du protocole du 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés et conformément au traité instituant la Communauté européenne ". Enfin, selon l'article 19. 2 de la même charte : "Nul ne peut être éloigné, expulsé ou extradé vers un État où il existe un risque sérieux qu'il soit soumis à la peine de mort, à la torture ou à d'autres peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
11. Si M. B...soutient que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît le principe de non-refoulement rappelé par les dispositions précitées de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, ces dernières ont été transposées dans l'ordre juridique interne, à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par la loi n°2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité. Dès lors, l'intéressé, qui n'établit ni même allègue que cette transposition aurait été irrégulière, ne peut pas se prévaloir des dispositions de cette directive pour contester la légalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français. Par ailleurs, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de non-refoulement n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier la portée. En outre, M.B..., qui n'est pas titulaire du statut de réfugié et n'a jamais présenté de demande d'asile, ne peut utilement se prévaloir des stipulations précitées de l'article 33 de la convention de Genève et de l'article 18 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Enfin, il n'est pas davantage fondé à soutenir que la mesure d'éloignement aurait été prise en méconnaissance de l'article 19.2 de la même charte dès lors que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas pour objet de fixer le pays vers lequel l'intéressé doit être éloigné.
12. En quatrième lieu, en faisant état d'interpellations d'autres migrants dans la région de Calais et de leur déplacement vers différents centres de rétention administratives, M. B... expose que la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet n'a pas été prise en vue de son départ du territoire mais dans le but de l'éloigner de la région de Calais et de décourager les migrants de s'y installer, et en conclut qu'elle est pour ce motif entachée de détournement de pouvoir et de procédure. Toutefois M.B..., de nationalité afghane, qui ne détenait aucun document ou titre en cours de validité l'autorisant à séjourner ou à circuler sur le territoire français et n'a pas justifié y être entré régulièrement, se trouvait, ainsi qu'il a été dit précédemment, dans le cas prévu par les dispositions législatives du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où peut être prise à son encontre une décision lui faisant obligation de quitter le territoire. Il ne ressort pas des pièces du dossier et alors même qu'aucune diligence pour éloigner l'intéressé à destination de son pays d'origine n'avait encore été engagée, qu'en prenant la décision contestée, la préfète du Pas-de-Calais aurait poursuivi un but autre que ceux en vue desquels le pouvoir de prendre cette décision lui a été conféré par les dispositions législatives relatives à l'entrée et au séjour des étrangers. Par suite, le détournement de pouvoir et de procédure allégué n'est pas établi.
En ce qui concerne la décision refusant un délai de départ volontaire :
13. Ainsi qu'il vient d'être dit, l'obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégale, M. B...n'est pas fondé à soutenir, par voie d'exception, que la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est entachée d'illégalité.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
14. En premier lieu, la décision contestée vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cite les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et mentionne que M. B...n'établit pas être exposé personnellement et directement à des peines ou traitements contraires à ces stipulations en cas de retour dans son pays d'origine. Elle est, par suite, suffisamment motivée. De plus, alors même que M. B...a été interpellé en même temps que d'autres personnes, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des termes dans lesquels est rédigé l'arrêté du 30 octobre 2015, que la préfète du Pas-de-Calais ne se serait pas livrée à un examen particulier de sa situation avant de prendre l'ensemble des décisions que cet arrêté contient, y compris les décisions portant fixation du pays de renvoi et refus de délai de départ volontaire. Par suite, le moyen invoqué doit être écarté.
15. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. (...) ".
16. Le dispositif de l'arrêté attaqué fait obligation à M. B...de quitter le territoire français " à destination du pays dont il revendique la nationalité ou tout autre pays où il établirait être légalement admissible ". Dans la mesure où cet arrêté précise, par ailleurs, que l'intéressé est de nationalité afghane, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait omis de fixer le pays de renvoi , alors que les motifs précisent " Considérant que conformément à l'article L.513-2 du CESEDA, l'intéressé sera reconduit à destination du pays dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible ". Par suite, l'arrêté, qui permet bien la mise à exécution de la mesure d'éloignement, n'est pas entaché d'erreur de droit. De même, la préfète ayant prioritairement fixé comme pays de renvoi celui dont le requérant se déclare ressortissant, il n'est pas davantage fondé à soutenir que l'arrêté méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'est pas en possession d'un document lui permettant d'être admissible dans un autre pays que celui dont il a la nationalité.
17. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de cette convention énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article 19 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " (...) / 2. Nul ne peut être éloigné, expulsé ou extradé vers un État où il existe un risque sérieux qu'il soit soumis à la peine de mort, à la torture ou à d'autres peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'il s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée.
18. Il ressort des pièces du dossier que M.B..., qui n'a pas demandé l'asile lors de son arrivée en Europe, se borne à faire état du contexte d'insécurité pour les populations civiles résultant des conflits entre groupes rivaux en Afghanistan, sans assortir ses allégations d'éléments suffisamment précis et probants ou vérifiables concernant sa propre situation. Il n'établit pas, ce faisant, faire l'objet en cas de renvoi en Afghanistan, de manière suffisamment personnelle et actuelle, de menaces quant à sa vie ou sa liberté ou de risques d'être exposé à des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En particulier, les informations publiques relatives à la situation géopolitique du pays, rassemblées par des organismes internationaux, et notamment par le bureau de l'ONU pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), par la mission d'assistance des Nations-Unies en Afghanistan (MANUA) ou encore par l'organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR) dont se prévaut l'intéressé, et qui font état d'une intensification du conflit et d'une généralisation des combats à l'ensemble du territoire, ne permettent pas, par elles-mêmes, d'établir que le degré de violence généralisée caractérisant la zone dont il est originaire ou dans laquelle il a résidé, atteindrait un niveau suffisamment élevé pour que des motifs sérieux et avérés permettent de penser qu'un civil renvoyé dans la région concernée courrait, du seul fait de sa présence sur ce territoire, un risque réel de subir une menace grave, directe et individuelle. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 19 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté.
En ce qui concerne la décision ordonnant le placement en rétention :
19. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité dont serait entachée l'obligation de quitter sans délai le territoire français doit être écarté.
20. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) / 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) ". Au regard tant de l'objet de la mesure de placement en rétention administrative que des dispositions de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'administration ne peut placer l'étranger en rétention administrative que dans la mesure où cela est strictement nécessaire à son départ et en vue d'accomplir les diligences visant à permettre une exécution d'obligation de quitter le territoire français. Il appartient au juge administratif, lorsque le caractère strictement nécessaire du placement en rétention est contesté devant lui, de contrôler que l'administration met en oeuvre de telles diligences.
21. M. B...soutient que la mesure coercitive de placement en rétention administrative ne se justifiait pas. Toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, M. B...n'a pas établi, ni même allégué, être en possession de documents d'identité et n'a pas fait état de circonstance particulière de nature à établir qu'il aurait eu l'intention d'exécuter volontairement la mesure d'éloignement prise à son encontre, dès lors qu'il s'est maintenu en situation irrégulière sur le territoire français sans effectuer de démarches en préfecture, n'avait présenté aucune demande d'asile en France non plus que dans les pays qu'il a traversés avant son entrée en France, n'a pas exprimé le souhait de demander l'asile sur le territoire lors de son interpellation et a indiqué ne pas vouloir retourner dans son pays d'origine. Ainsi, la préfète du Pas-de-Calais a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que l'intéressé ne présentait pas de garanties de représentation effectives de nature à écarter le risque de fuite, et ordonner en conséquence son placement dans un centre de rétention administrative en application des dispositions précitées de l'article L. 551-1 du code susmentionné.
22. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Pas-de-Calais aurait ordonné le placement en rétention de M. B...dans un autre but que l'exécution de l'obligation de quitter sans délai le territoire français à destination de l'Afghanistan prononcée à son encontre et l'organisation de son départ. Si le requérant fait valoir que l'administration n'a pas justifié avoir effectué des démarches en vue de procéder à son éloignement, aucune disposition n'exige de l'autorité préfectorale qu'elle engage de telles démarches avant même de décider de placer en rétention administrative un étranger soumis à une obligation de quitter le territoire sans délai faute pour lui d'être en possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité. A supposer même que durant les cinq jours de rétention de M.B..., l'administration n'ait pas entrepris de démarche auprès des autorités de l'Etat dont il prétendait être ressortissant, il ne saurait être inféré de cette circonstance que dès l'origine, au moment où elle a pris l'arrêté litigieux à l'encontre de M. B..., la préfète aurait su qu'il n'existait aucune perspective raisonnable d'éloignement de l'intéressé, ni qu'elle n'ait pas envisagé de faire exécuter une telle mesure d'éloignement ou aurait seulement entendu user des pouvoirs qu'elle tient des dispositions susénoncées dans un but étranger à ceux en vue desquels ceux-ci lui ont été conférés. Par suite, le moyen tiré de ce que cette mesure serait entachée d'un détournement de procédure doit être écarté.
23. En troisième et dernier lieu, aux termes du premier paragraphe de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales : / (...) f. s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention régulières d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou d'extradition est en cours ". Selon le quatrième paragraphe de l'article 5 de la même convention : " Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale ".
24. M. B...soutient que la décision ordonnant son placement en rétention administrative aurait méconnu les stipulations précitées en l'absence de lien entre la rétention et le but poursuivi d'éloignement du territoire national, cette mesure n'ayant eu en réalité pour objet que de l'éloigner de Calais et de le sanctionner pour ne pas avoir sollicité l'asile. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'eu égard à la nécessité de prendre les mesures qu'exigeait l'organisation matérielle du retour de l'intéressé dans son pays d'origine et compte tenu de ce que ce dernier ne justifiait ni d'une adresse stable ni de garanties effectives de représentation, la préfète a pu, sans méconnaître les stipulations invoquées, décider de placer M. B...en rétention administrative.
25. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
26. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions présentées au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
27. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par le requérant au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 2 novembre 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse est annulé.
Article 2 : La demande de M. B...et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Pas-de-Calais.
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No 16BX00141