Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire en réplique respectivement enregistrés le 9 juin 2017 et le 29 novembre 2017, l'EURL Jivago, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Lyon du 11 avril 2017 ;
2°) de la décharger de la pénalité mise à sa charge en application de l'article 1759 du code général des impôts ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761 -1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure de demande de désignation des bénéficiaires des revenus distribués est irrégulière dès lors que la demande ne mentionnait ni l'assiette ni le taux de la pénalité encourue ;
- la notification de la pénalité, qui ne mentionnait ni la base, le montant et le taux de la pénalité, était insuffisamment motivée au regard de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs.
Par des mémoires en défense enregistrés respectivement les 27 novembre 2017 et 1er mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts ;
- le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de MmeA..., première conseillère,
- et les conclusions de M. Savouré, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Jivago exerce une activité de vente de pizzas, à emporter ou livrées, sous l'enseigne Pizz'a Pax. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos des années 2008, 2009 et 2010. Par des propositions de rectification du 28 décembre 2011 et du 24 janvier 2012, l'administration fiscale a rejeté sa comptabilité comme non probante et a procédé à une reconstitution de son chiffre d'affaires. Des impositions supplémentaires ont été mises à sa charge au titre de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée, assorties de pénalités de 40 % pour manquement délibéré et, pour les exercices clos des années 2009 et 2010, de la pénalité prévue à l'article 1759 du code général des impôts. L'EURL Jivago a saisi le tribunal administratif de Lyon de conclusions tendant à la décharge d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 à 2010 et des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er octobre 2007 au 30 septembre 2010, assortis des pénalités, et, d'autre part, de la pénalité mise à sa charge en application de l'article 1759 du code général des impôts. Par un jugement du 11 avril 2017, le tribunal administratif de Lyon a uniquement prononcé la décharge des pénalités pour manquement délibéré et a rejeté le surplus de ses conclusions. L'EURL Jivago relève appel de ce jugement en tant qu'il rejette sa demande tendant à la décharge de la pénalité mise à sa charge en application de l'article 1759 du code général des impôts.
2. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 ". Et aux termes de l'article 1759 du même code : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. Lorsque l'entreprise a spontanément fait figurer dans sa déclaration de résultat le montant des sommes en cause, le taux de l'amende est ramené à 75 % ".
3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'administration a informé l'EURL Jivago des résultats du contrôle opéré et l'a invitée à désigner les bénéficiaires des revenus regardés comme distribués dans la proposition de rectification du 24 janvier 2012, portant sur les exercices clos des années 2009 et 2010. Celle-ci mentionnait, d'une part, les articles du code général des impôts dont il était fait application, en particulier l'article 1759 du code général des impôts, et faisait état de l'amende encourue à défaut d'une telle désignation, dont le taux pouvait être déterminé à la seule lecture de l'article 1759. Elle précisait, d'autre part, le montant des revenus en cause servant d'assiette à l'application de la pénalité. Dans ces conditions, l'EURL Jivago n'est pas fondée à invoquer l'irrégularité de la procédure de demande de désignation des bénéficiaires mise en oeuvre par l'administration fiscale.
4. En second lieu, aux termes de l'article L 80 D du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable (...) ". Aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public alors en vigueur : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
5. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a indiqué notamment dans la réponse aux observations du contribuable du 12 mars 2012, que faute pour l'EURL Jivago d'avoir déféré à l'invitation qui lui a été faite, sur le fondement de l'article 117, de désigner le bénéficiaire de l'excédent de distributions résultant du rehaussement de ses bénéfices imposables, elle se verrait appliquer la pénalité prévue à l'article 1759 du code général des impôts et a précisé le montant des revenus constituant l'assiette de cette pénalité. Par suite, l'EURL Jivago, qui a été mise en mesure de connaître le taux et le montant de la pénalité appliquée, n'est pas fondée à soutenir que cette pénalité n'aurait pas fait l'objet d'une motivation suffisante au sens de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, dont les dispositions ont été reprises dans le code des relations entre le public et l'administration.
6. Il résulte de ce qui précède que l'EURL Jivago n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de la pénalité mise à sa charge en application de l'article 1759 du code général des impôts. Par suite, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'EURL Jivago est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Jivago et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Fischer-Hirtz, présidente de chambre,
M. Souteyrand, président-assesseur,
MmeA..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 9 janvier 2019.
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N° 17LY02387