Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 12 août 2015, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 23 janvier 2015 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 25 août 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, ou de réexaminer sa demande, dans un délai de deux mois et sous les mêmes conditions d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ne pouvait rejeter son recours par voie d'ordonnance en se fondant sur les dispositions de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative ;
- le refus de séjour est entaché de vice de procédure, faute de saisine de la commission du titre de séjour, et méconnaît l'article 6-1 de l'accord franco-algérien, car il réside en France depuis plus de dix ans ;
- le préfet a entaché son arrêté d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il réside en France depuis 2003 ;
- le refus séjour méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;
- l'obligation de quitter le territoire français est fondée sur un refus de séjour illégal et méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 juin 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... B...ne sont pas fondés.
Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 16 juin 2015 M. A... B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
A été entendu, au cours de l'audience publique le rapport de Mme Carotenuto.
1. Considérant que M. A... B..., ressortissant algérien, relève appel de l'ordonnance du 23 janvier 2015 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 août 2014 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7º Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. " ;
3. Considérant qu'à l'appui de sa demande présentée devant le tribunal administratif de Montpellier, M. A... B...a notamment invoqué à l'encontre de l'arrêté du 25 août 2014 portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français les moyens tirés de la méconnaissance des articles 6-1 et 6-5 de l'accord franco-algérien susvisé du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en faisant valoir qu'il résidait en France depuis 2003, que son père est titulaire d'un certificat de résidence de dix ans et que l'un de ses frères est de nationalité française ; que ces moyens, qui n'étaient pas dépourvus des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé et n'étaient pas inopérants, étaient assortis de faits susceptibles de venir à leur soutien ; que les termes dans lesquels ils étaient exprimés, qui permettaient d'en saisir le sens et la portée, les rendaient suffisamment intelligibles pour que le juge exerçât son office en en appréciant le mérite au regard des pièces produites ; que, dès lors, la demande de M. A... B...n'entrait pas dans le champ d'application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative et relevait de la seule compétence du tribunal administratif statuant en formation collégiale ; qu'il suit de là que l'ordonnance du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier du 23 janvier 2015 est entachée d'irrégularité et doit être annulée ;
4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... B...devant le tribunal administratif de Montpellier ;
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1). Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;
6. Considérant que M. A... B..., qui déclare être entré en France en 2001 puis en 2003 sous couvert d'un visa de court séjour, soutient résider habituellement sur le territoire français depuis au moins dix ans à la date de l'arrêté contesté ; que toutefois, les pièces produites au dossier, constituées principalement d'ordonnances médicales, de bulletins de salaire au titre de missions d'intérim et de relevés de comptes bancaires, ne permettent pas de démontrer le caractère habituel de son séjour sur le territoire national depuis l'année 2003 ; que par suite, M. A... B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) 5. au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;
8. Considérant que si l'un de ses fils vit en France, le requérant n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident cinq de ses enfants, dont deux sont mineurs, et où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de quarante-cinq ans ; que s'il soutient qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche, il ne justifie pas d'une intégration particulière au sein de la société française ; qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments et alors même que M. A... B...peut être regardé comme résidant de manière habituelle en France depuis l'année 2008, le préfet de l'Hérault n'a pas porté au droit de M. A... B...au respect de sa vie privée et familiale en France une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis par la décision attaquée ; qu'il n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet aurait entaché son appréciation des conséquences de la décision litigieuse sur la situation personnelle de M. A... B...d'une erreur manifeste ;
9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour " ; que selon l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 équivalentes aux dispositions des articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces stipulations ; que, pour les motifs exposés aux points 6 et 8, M. A... B...n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien ; que par suite, il ne peut valablement soutenir que, du fait qu'il entrerait dans les prévisions desdites stipulations, le préfet de l'Hérault aurait dû consulter la commission du titre de séjour avant de statuer sur sa demande ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. Considérant d'une part, qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, M. A... B...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour ; qu'il ne peut par suite se prévaloir de l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions en annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
11. Considérant d'autre part, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, que la décision prononçant l'obligation de quitter le territoire français n'est pas de nature à porter une atteinte disproportionnée au droit de M. A... B...au respect de sa vie privée et familiale ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... B...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 25 août 2014 ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance du 23 janvier 2015 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier est annulée.
Article 2 : La demande de M. A... B...présentée devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience 28 juin 2016, où siégeaient :
- M. Martin, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code justice administrative,
- Mme Massé-Degois, premier conseiller,
- Mme Carotenuto, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 juillet 2016.
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N° 15MA03440 3
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