Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 23 novembre 2015, et un mémoire enregistré le 7 avril 2016, M.A..., représenté par la Selas Devarenne associés Grand Est, demande à la Cour :
1°) - d'annuler l'ordonnance du 3 novembre 2015 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) - de condamner le SMITU à lui verser une provision d'un montant de 12 215,44 euros au titre de prélèvements indus sur ses traitements pour la période 2011/2014 avec intérêts de droit à compter de la présentation de la requête enregistrée le 15 septembre 2015 au tribunal administratif ;
3°) - de condamner le SMITU à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- il a exercé les fonctions de directeur des services techniques du SMITU depuis le 1er décembre 2009 ;
- le SMITU, au cours de la période du 1er mars 2011 au 28 février 2014, a indument prélevé sur ses traitements des cotisations CSG et CRDS qui ont été versées à l'URSSAF de Lorraine ;
- il a demandé, le 7 juillet 2014, le paiement de ses congés payés pour l'année 2014 à concurrence de 164 heures ;
En ce qui concerne sa réclamation au titre des congés payés :
- si l'indemnité compensatrice de congés payés de l'année 2014 lui a été versée, c'est avec un retard important et seulement à la suite de l'introduction de sa requête de référé dont le bien-fondé était justifié ;
- le premier juge aurait donc dû faire droit à ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
En ce qui concerne le prélèvement indu sur sa rémunération :
- le SMITU entretient sciemment une confusion entre ses relations avec l'URSSAF et ses obligations à son égard ;
- il n'invoque pas une créance à l'encontre de l'URSSAF, mais à l'encontre du SMITU qui a, à tort, prélevé sur ses traitements, des contributions qui n'étaient pas dues ;
- le SMITU a reconnu expressément son erreur et n'a jamais contesté sa réclamation d'un montant de 12 215,44 euros ;
- la question de sa domiciliation au Luxembourg, retenue par le premier juge pour rejeter sa demande, n'a jamais été discutée par le SMITU ;
- il produit en annexe de son mémoire du 7 avril un certain nombre de documents justifiant sa domiciliation au Luxembourg ;
- sa créance sur le SMITU n'est pas sérieusement contestable ;
Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 mars et 25 avril 2016, le syndicat mixte des transports urbains de Thionville-Fensch (SMITU), représenté par la société civile professionnelle d'avocats Seban et associés, demande à la Cour :
1°) - de rejeter la requête de M.A... ;
2°) - de condamner M. A...à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
3°) - de rejeter les conclusions de M. A...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- l'ordonnance du 3 novembre 2015 du juge des référés du tribunal administratif a été rendue dans des conditions régulières ;
- les règles relatives à la sujétion à la CSG et la CRDS relèvent de l'article 136-1 du code de la sécurité sociale ;
- les personnes considérées comme exonérées du régime prévu par l'article 136-1 du code de la sécurité sociale sont celles qui, soit ne sont pas à la charge d'un régime obligatoire français d'assurance maladie, soit n'ont pas leur domicile fiscal en France ;
- la notion de domicile fiscal est définie à l'article 4 B du code général des impôts ;
- si M. A...justifie de l'existence d'une adresse postale au Luxembourg, il n'a jamais démontré l'existence d'un domicile fiscal dans ce pays ;
- M. A...n'a jamais communiqué de certificat de résidence de la commune concernée, délivré par l'autorité locale compétente, document réclamé tant par le SMITU que l'URSSAF ;
- M. A...ne lui a jamais fait part des documents qu'il a produits dans son mémoire du 7 avril 2016 ;
- la procédure de paiement de l'indemnité de congés payés au bénéfice de M. A...a été engagée bien avant sa saisine du juge des référés du tribunal administratif ;
- c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le premier juge n'a pas fait droit aux conclusions de M. A...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un courrier du 26 avril 2016, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître des conclusions tendant à l'allocation d'une provision dans le cadre de l'assujettissement à la contribution des revenus mentionnés à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale.
Par un mémoire enregistré le 2 mai 2016, M. A...a présenté des observations sur le moyen relevé d'office par la Cour.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B...A..., ingénieur territorial principal, a exercé les fonctions de directeur technique du syndicat mixte des transports urbains de Thionville-Fensch (SMITU) jusqu'au 23 octobre 2014, date à laquelle il a été placé en surnombre en raison de la suppression de cet emploi. Il reproche au SMITU d'avoir, au cours de la période du 1er mars 2011 au 28 février 2014, indument prélevé sur son traitement une somme globale de 12 215,44 euros qui a été versée à l'URSSAF de Lorraine au titre des cotisations à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution de remboursement de la dette sociale (CRDS). Par courrier du 2 février 2015, il a demandé au SMITU que lui soit reversée cette somme.
2. Par ailleurs, M. A... a, le 7 juillet 2015, formé une demande indemnitaire préalable, d'un montant 2 913,90 euros, au titre de congés payés de l'année 2014 dont il restait bénéficiaire. Il a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à la condamnation du SMITU à lui verser une somme globale de 15 129,34 euros à titre de provision. Par ordonnance du 3 novembre 2015, le juge des référés a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions tendant au versement d'une provision de 2 913,90 euros correspondant à l'indemnité de congés payés au titre de l'année 2014 et a rejeté le surplus des conclusions du requérant. M. A... interjette appel de cette ordonnance en tant, d'une part, qu'elle n'a pas fait droit à sa demande de provision correspondant au reversement de la somme prélevée sur son traitement au titre des cotisations à la CSG et à la CRDS et, d'autre part, qu'elle a rejeté ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
3. En premier lieu, l'article L. 5 du code de justice administrative qui prévoit que l'instruction des affaires est contradictoire, précise que les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence. Ainsi, le juge des référés rend son ordonnance à la suite d'une procédure particulière, adaptée à la nature de la demande et à la nécessité d'une décision rapide. Dans les circonstances de l'espèce, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a pu, sans méconnaître le principe du contradictoire de l'instruction, statuer par ordonnance sur la demande de provision dont il était saisi, treize jours après avoir communiqué à M. A...le mémoire en défense présenté au nom du SMITU.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale applicable au litige : " Il est institué une contribution sociale sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement à laquelle sont assujettis : 1° Les personnes physiques qui sont à la fois considérées comme domiciliées en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et à la charge, à quelque titre que ce soit, d'un régime obligatoire français d'assurance maladie ; (...) ". Aux termes du dernier alinéa du III de l'article 136-5 du même code : " Les différends nés de l'assujettissement à la contribution des revenus mentionnés aux articles L. 136-1 à L. 136-4 relèvent du contentieux de la sécurité sociale et sont réglés selon les dispositions applicables aux cotisations de sécurité sociale, conformément aux dispositions du chapitre III du titre III et des chapitres II, III et IV du livre Ier dans leur rédaction publiée à la date de publication de la dernière loi de financement de la sécurité sociale. (...) ".
5. M. A...demande, notamment, la condamnation du SMITU à lui verser une provision d'un montant de 12 215,44 euros correspondant au remboursement des prélèvements opérés par cet établissement sur son traitement de directeur technique au titre des cotisations à la CSG et à la CRDS pour la période du 1er mars 2011 au 28 février 2014.
6. En application des dispositions précitées de l'article L. 136-5 du code de la sécurité sociale, les litiges relatifs aux prélèvements opérés au titre de la CSG et de la CRDS sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement relèvent de la compétence du juge judiciaire, y compris pour les fonctionnaires dont la contribution est précomptée sur leur traitement par l'Etat ou un établissement public. Dès lors, alors même que le litige relatif aux prélèvements qui ont été opérés sur le traitement de M. A...l'oppose au SMITU, son employeur, ledit litige ressortit à la compétence du tribunal des affaires de sécurité sociale territorialement compétent. Par suite, c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg s'est reconnu compétent pour connaître des conclusions du requérant tendant à la condamnation du SMITU à lui verser une provision au titre du remboursement des cotisations à la CSG et à la CRDS qui auraient été indument prélevées sur son traitement. Il y a lieu, dès lors, d'annuler dans cette mesure l'ordonnance attaquée et, statuant immédiatement par la voie de l'évocation, de rejeter les conclusions susdites comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Sur le rejet des conclusions présentées par M. A...en première instance sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à condamnation. " ; ces dispositions ont notamment pour objet de permettre l'indemnisation de la personne qui a dû s'adresser à une juridiction pour faire valoir ses droits.
8. Il ressort des pièces du dossier que le conseil de M. A...a adressé, le 7 juillet 2015, au SMITU une demande préalable de versement d'indemnité compensatrice de congé payés au titre de l'année 2014. Le versement de cette indemnité a été effectué en même temps que le traitement de l'intéressé du mois de septembre 2015, avec une date de mise en paiement le 24 septembre 2015. Alors même que ce versement a été effectué postérieurement à la saisine du juge des référés du tribunal administratif par M.A..., le SMITU ne saurait être regardé comme ayant témoigné d'une attitude réticente pour répondre à la demande présentée par l'intéressé. Les conclusions de M.A... tendant au versement d'une provision correspondant à ladite indemnité ayant fait l'objet d'un non lieu à statuer et le surplus de ses conclusions ayant été rejeté, le SMITU ne pouvait être regardé comme la partie perdante. M. A...n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SMITU, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions de mettre à la charge de M. A...le versement au SMITU d'une somme de 1 000 euros.
ORDONNE :
Article 1er : L'ordonnance du 3 novembre 2015 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg est annulée en tant qu'elle a statué sur les conclusions de M. A...tendant à la condamnation du SMITU à lui verser une provision au titre du remboursement des cotisations à la CSG et à la CRDS auxquelles il a été assujetti pour la période du 1er mars 2011 au 28 février 2014.
Article 2 : Les conclusions de M. A...tendant à la condamnation du SMITU à lui verser une provision au titre du remboursement des cotisations à la CSG et à la CRDS auxquelles il a été assujetti pour la période du 1er mars 2011 au 28 février 2014 sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A...est rejeté.
Article 4 : M. A...versera au SMITU une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B...A...et au syndicat mixte des transports urbains de Thionville-Fensch.
Fait à Nancy, le 10 mai 2016.
La présidente de la Cour
Signé : Françoise SICHLER
La République mande et ordonne au préfet de la Moselle, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition conforme
Le Greffier,
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15NC02322