Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées le 5 septembre 2017 et le 22 juin 2018, M.C..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1612304/4-2 du 7 juillet 2017 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 7 juin 2016 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande tendant à être autorisé à changer son nom en Del Fabro ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que la décision litigieuse est entachée d'erreur d'appréciation dès lors qu'il justifie d'intérêts légitimes pour obtenir le changement de son nom tenant à un usage constant, ininterrompu et prolongé, à la volonté de relever un nom menacé d'extinction et à des motifs d'ordre affectif.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 juin 2018, la garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. C...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Legeai,
- et les conclusions de Mme Nguyên Duy, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A...C..., né le 18 avril 1980, porte le nom de sa mère qui l'avait reconnu préalablement à sa naissance. Le 25 février 1985, il a été reconnu par son père, M. B... D.... Par courrier du 18 février 2014, M. C...a demandé au garde des sceaux, ministre de la justice, de prendre le nom de son père. Par décision du 7 juin 2016, le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande tendant à être autorisé à changer son nom en Del Fabro. M. C...fait régulièrement appel du jugement du 7 juillet 2017 du tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande.
2. L'article 61 du code civil dispose : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom. / La demande de changement de nom peut avoir pour objet d'éviter l'extinction du nom porté par un ascendant ou un collatéral du demandeur jusqu'au quatrième degré. / Le changement de nom est autorisé par décret ".
3. En premier lieu, M. C... reprend le moyen qu'il avait invoqué en première instance tiré de ce qu'il ferait depuis son enfance, et également depuis qu'il travaille aux cotés de son père dans une entreprise familiale, un usage constant dans la vie courante du nom " Del Fabro " ou " C...Del Fabro ". Il n'apporte au soutien de ce moyen que quelques pièces supplémentaires, des attestations de tiers qui ne sont pas de nature à démontrer l'usage constant et ininterrompu du nom de Del Fabro. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 4 de leur jugement.
4. En deuxième lieu, en se bornant à produire l'acte de naissance de son père, né en 1951, et une fiche familiale d'état civil se rapportant à son grand-père, né en 1906 en Italie, d'où il ressort que celui-ci a eu, outre le père du requérant, quatre filles nées en France portant le nom deD..., M.C..., qui affirme que ce nom n'a été transmis à aucun enfant de sa génération, ne le démontre pas, alors qu'il est constant qu'un nom peut être transmis tant par les femmes que par les hommes. Il n'établit pas en tout état de cause, en l'absence notamment de renseignements sur les ascendants et collatéraux de son grand-père, que le nom de D...serait menacé d'extinction au sens de l'article 61 du code civil.
5. En troisième lieu, des motifs d'ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, caractériser l'intérêt légitime requis par l'article 61 du code civil pour déroger aux principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi. Toutefois, la circonstance que M. C... n'a été reconnu par son père que cinq années après sa naissance et qu'il ait de ce fait été impossible de lui attribuer le nom de celui-ci ne saurait caractériser des circonstances exceptionnelles au sens de l'article 61 du code civil permettant de déroger aux principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi. M.C..., habilité à porter le nom D...à titre de nom d'usage, n'établit pas rencontrer des difficultés dans sa vie sociale et dans sa vie professionnelle en raison de la discordance entre son nom à l'état civil et le nom de son père dont il fait usage. Par suite, le moyen tiré du motif d'ordre affectif justifiant qu'il soit dérogé au principe de fixité du nom au sens de l'article 61 du code civil doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à ce que l'Etat, qui n'est pas partie perdante, prenne en charge les frais de procédure sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 13 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 janvier 2019.
Le rapporteur,
A. LEGEAI La présidente,
S. PELLISSIER Le greffier,
A. LOUNIS
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA03016