Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 mai 2015, M. A..., représenté par Me Moroni, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite du 7 décembre 2010 approuvant le statut du personnel ;
3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A... soutient que :
- aucune tardiveté ne pouvait être opposée à son moyen de légalité externe ;
- certaines dispositions du statut méconnaissent le principe d'égalité de traitement et de non discrimination posé aux articles L. 1131-1 et suivants du code du travail et le principe de faveur posé aux articles L. 2251-1 et L. 2254-1 ; c'est à tort que le tribunal a jugé qu'il ne conteste pas sérieusement que les modalités d'exercice de son temps de travail sont spécifiques et dérogent à celles des autres salariés de la société ; c'est à tort que le tribunal a indiqué que les règles dérogatoires découlent nécessairement de la spécificité des conditions d'exercice des fonctions ; les médecins ne jouissent nullement d'un contrat de travail plus favorable ; la différence de salaire entre lui et certains de ses collègues titulaires du titre de praticien hospitalier n'est nullement justifiée ; c'est à tort que le tribunal a estimé que l'illégalité du contrat de travail était sans incidence sur l'approbation des nouveaux statuts ;
- la décision d'approbation est entachée de détournement de pouvoir.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'aviation civile ;
- le code de la santé publique ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Orio,
- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- et les observations de Me Moroni, pour M. A..., et de Mes Guillaume et Sikorav, pour Aéroports de Paris.
1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 251-3 du code de l'aviation civile :
" Le conseil d'administration de la société Aéroports de Paris établit les statuts du personnel ainsi que les échelles de traitements, salaires et indemnités et les soumet à l'approbation du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé de l'économie et des finances. A défaut de décision expresse intervenant dans le délai de deux mois à compter de la réception de la délibération, l'approbation est réputée acquise. " ;
2. Considérant que les dispositions générales relatives au champ d'application du nouveau statut des personnels d'Aéroports de Paris (ADP) réputé approuvé le 7 décembre 2010, à défaut de décision expresse des ministres à qui il avait été adressé par courrier du
6 octobre 2010, énoncent que " l'ensemble des articles relatifs à la durée du travail, à la rémunération, à l'avancement, la promotion (articles 12 à 29 inclus), à la cessation d'activité dans le cadre de la retraite (article 32) ou dans le cadre d'un licenciement (article 34) ne sont pas applicables : / - aux médecins exerçant leur activité dans les services médicaux d'urgence d'Aéroports de Paris. La durée de travail et la rémunération de ces salariés sont déterminées au regard des règles fixées par le code de la santé publique pour les médecins hospitaliers exerçant leurs fonctions dans les établissements publics de santé (...) " ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'après l'expiration du délai de recours contre un acte administratif, sont irrecevables, sauf s'ils sont d'ordre public, les moyens présentés par l'appelant qui ne se rattachent pas à l'une ou l'autre des deux causes juridiques, tirées de la régularité de la décision attaquée et de son bien-fondé, invoquée dans la requête avant l'expiration de ce délai ; que ce délai de recours doit être regardé comme commençant à courir soit à compter de la publication ou de la notification complète et régulière de l'acte attaqué soit, au plus tard, à compter, pour ce qui concerne un requérant donné, de l'introduction de son recours contentieux contre cet acte ;
4. Considérant que la demande introductive d'instance enregistrée le 8 juin 2011 ne contenait que des moyens tenant à la légalité interne des décisions attaquées ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie qui a trait à la légalité externe des décisions critiquées, a été présenté à l'appui du mémoire complémentaire enregistré le 6 mai 2013, soit après l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois qui commençait à courir au plus tard à la date d'introduction de la demande ; que par suite, ce moyen qui n'est pas d'ordre public et se rattache à une cause juridique distincte de celle invoquée dans le délai de recours, a été présenté tardivement et c'est à bon droit que le tribunal administratif l'a écarté comme irrecevable ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un comme dans l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ; qu'en l'espèce, le requérant, en se bornant à soutenir que d'autres salariés, comme les infirmières, les ambulanciers et les pompiers, travaillent par plages de 24 heures, ne conteste pas sérieusement que les médecins qui travaillent dans les services médicaux d'urgence d'ADP sont les seuls salariés de la société à travailler selon un rythme annuel de 52 vacations de 24 heures ; que ce rythme correspond, ainsi que stipulé dans les contrats de travail des médecins, à 84 % du temps de travail d'un praticien hospitalier à temps plein et est rémunéré par référence à la rémunération d'un tel médecin, rémunération à laquelle s'ajoutent des indemnités de sujétions dites de pénibilité, une indemnité d'ancienneté et des indemnités de congés payés ; que si le requérant soutient que le juridiction judiciaire aurait jugé illégaux ces contrats de travail pour un motif de discrimination salariale, il ne l'établit pas et cette circonstance serait en tout état de cause sans incidence sur la légalité de la décision d'approbation du statut ; qu'ainsi, la circonstance que l'ensemble des articles relatifs à la durée du travail, à la rémunération, à l'avancement, à la promotion (articles 12 à 19 inclus), à la cessation d'activité dans le cadre de la retraite (article 32) ou dans le cadre d'un licenciement (article 34) du statut ne leur soient pas applicables est liée aux modalités particulières d'exercice de leurs fonctions et, en particulier, à leur rémunération par vacations, et est en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit ; qu'eu égard au fait que les médecins d'urgence d'ADP peuvent également prétendre à une indemnité de départ à la retraite en application de l'article L. 1237-9 du code du travail, à une indemnité de licenciement en application de leur contrat, qu'ils disposent de possibilités d'avancement et qu'il n'est pas établi que les différences se traduiraient par des pertes financières, cette différence de traitement n'apparait pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier ; qu'il n'est pas non plus établi que ces différences constitueraient des discriminations prohibées au sens des articles L. 1131-1 et suivants du code du travail ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'il n'existe aucun droit au maintien des avantages résultant d'un statut ; qu'en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de faveur énoncé aux articles L. 2251-1 et L. 2254-1 du code du travail est inopérant à l'égard de la décision individuelle d'approbation du statut règlementaire des personnels, qui est un acte réglementaire et non une convention ou un accord au sens des dispositions du code du travail ; que ce moyen ne peut qu'être écarté ;
7. Considérant enfin, que par un arrêt du 24 octobre 2000, la Cour de Cassation a jugé qu'aucune disposition ne permettait de ne pas appliquer aux médecins du travail d'ADP le statut des personnels ; qu'à la suite de cet arrêt, ADP a conclu en 2004 avec les médecins de ses services d'urgence de nouveaux contrats de travail dans lesquels ceux-ci s'engageaient à renoncer au bénéfice du statut réglementaire du personnel de la société ; que par un arrêt du 8 avril 2009, la Cour de Cassation a jugé qu'un salarié ne peut renoncer par avance au bénéfice du statut réglementaire d'ordre public dont il relève ; que, tirant les conséquences de cet arrêt la nouvelle rédaction du statut du personnel exclut expressément que certaines dispositions soient applicables aux médecins des services d'urgence ; que la circonstance qu'elle ait été adoptée alors que des contentieux de ces médecins étaient pendants devant la juridiction prud'homale n'est pas, dans ces conditions, de nature à établir un détournement de pouvoir ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... les sommes demandées par l'Etat ainsi que la société Aéroports de Paris sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Etat ainsi que par la société Aéroports de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 15VE01597