Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2021, Mme A... C..., représentée par Me Lanne, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 juin 2021;
2°) d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Lot-et-Garonne de lui délivrer une carte de séjour pluriannuelle mention " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire, une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " et, à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le tribunal a considéré à tort que les conditions d'application de l'article L.313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étaient pas remplies ; les violences conjugales sont à l'origine de la rupture de la vie commune ;
- cet arrêté a été pris en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de sa situation de concubinage, des liens qu'elle a développé en France et de son intégration professionnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 janvier 2022, le préfet de Lot-et-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-marocain ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C..., ressortissante marocaine née le 10 octobre 1997, est entrée sur le territoire français le 16 janvier 2018, sous couvert d'un visa D mention " vie privée et familiale " valable un an à la suite de son mariage avec un ressortissant français. Elle a obtenu le renouvellement de ce titre de séjour en qualité de conjoint de français du 19 décembre 2018 au 18 décembre 2019. Elle a ainsi été autorisée à séjourner sur le territoire français jusqu'au 18 décembre 2019 en raison de son mariage avec un ressortissant français. Le 9 décembre 2019, Mme A... C... a demandé le renouvellement de son titre de séjour ainsi que la délivrance d'une carte de séjour pluriannuelle mention " vie privée et familiale ". Par un arrêté du 18 janvier 2021, le préfet de Lot-et-Garonne a refusé de lui délivrer le titre sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par la présente requête, elle relève appel du jugement du 30 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) ". Et aux termes de l'article L. 313-12 du même code alors en vigueur : " Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences familiales ou conjugales et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et en accorde le renouvellement. (...). "
3. Il est constant qu'à la date de la décision attaquée, la communauté de vie avait cessé entre Mme A... B... et son époux français et qu'elle avait bénéficié d'un premier renouvellement de son titre de séjour postérieurement à cette rupture, qui est intervenue le 27 juillet 2018. Mme A... B... fait cependant valoir que cette séparation de corps était motivée par les violences physiques et morales exercées sur elle par son mari. Toutefois, elle ne produit, à l'appui de cette affirmation, que deux certificats médicaux établis les 13 et 27 juillet 2018 qui relatent ses déclarations et constatent uniquement, pour le premier, l'existence d'une excoriation au 4ème doigt, ainsi qu'un syndrome anxieux avec troubles et, pour le second, des troubles de l'humeur et du sommeil. Les attestations établies par une amie proche et sa conseillère de la mission locale se bornent à reproduire ses dires. Ainsi, alors que ses déclarations sur les violences varient dans le temps, que son ex-mari nie les accusations portées à son encontre et que sa plainte déposée le 3 août 2018 a été classée sans suite, ces éléments sont à eux-seuls insuffisants pour établir la matérialité des violences alléguées. En outre, la requérante ne saurait se prévaloir utilement du comportement de son ex-mari en juin 2021 près de trois ans après la séparation du couple et postérieur à la décision attaquée. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées ci-dessus du 4° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
5. Il ressort des pièces du dossier que l'arrivée en France de Mme A... C... en janvier 2018, à la suite de son mariage avec un ressortissant français, est récente et que la vie commune n'a duré que six mois. Si la requérante se prévaut de la relation qu'elle aurait avec un compatriote, titulaire d'une carte de résident valable dix ans, et de sa grossesse, il ressort de ses propres écritures que la vie commune n'a débuté qu'en février 2021, postérieurement à la décision attaquée, et que cette relation qui daterait de janvier 2020 est très récente. Par ailleurs, il n'est pas contesté que Mme A... C... dispose d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu la majeure partie de son existence. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des motifs du refus de séjour et des buts poursuivis par la mesure d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Lot-et-Garonne.
Délibéré après l'audience du 3 février 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,
Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mars 2022.
La rapporteure,
Christelle Brouard-LucasLa présidente,
Marianne HardyLa greffière,
Stéphanie Larrue
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX03046