1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 11 octobre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 avril 2018 par lequel le préfet de la Haute-Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler, subsidiairement de prendre une nouvelle décision, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 920 euros au titre de la première instance et la somme de 2 400 euros au titre de la présente instance, à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de répondre, sur la légalité du refus en tant qu'accompagnant d'enfant malade, aux moyens tirés du défaut d'avis du directeur général de l'agence régionale de santé, de l'erreur d'appréciation et de fait quant à la situation de santé et à l'accès aux soins au Maroc, du défaut d'avis et de motivation quant à la possibilité de voyager, du détournement de pouvoir et de l'irrégularité de la procédure, et sur la légalité du refus en tant qu'étranger malade, sur les moyens tirés du détournement de pouvoir et l'irrégularité de la procédure ; le tribunal a également commis des erreurs de droit et de fait s'agissant de ces mêmes moyens ;
Sur le refus de titre de séjour :
- le préfet a omis de consulter la commission du titre de séjour en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne la demande d'accompagnant d'un enfant malade :
- la décision est entachée d'un vice de procédure alors que la demande est antérieure au 1er janvier 2017, de sorte que le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'avait pas compétence pour rendre un avis et qu'il appartenait au médecin de l'ARS de rendre un avis en application des articles L. 311-12, L. 313-11, 11° et R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que de l'arrêté ministériel du 9 novembre 2011 ;
- la décision est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation dans l'application du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auquel renvoie l'article L. 311-12 du même code ;
- cette décision est entachée d'un détournement de pouvoir dès lors que le médecin de l'agence régionale de santé avait initialement rendu un avis favorable ;
- le directeur général de l'agence régionale de santé n'a pas rendu d'avis sur cette demande en méconnaissance de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'arrêté ministériel du 9 novembre 2011 ;
- cette décision méconnaît l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 dès lors qu'aucun avis motivé n'a été rendu quant à la possibilité de voyager ;
En ce qui concerne la demande en qualité d'étranger malade :
- la décision est entachée d'un vice de procédure dès lors que, la demande étant antérieure au 1er janvier 2017, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'avait pas compétence pour rendre un avis et qu'il appartenait au médecin de l'ARS de rendre un avis en application des articles L. 311-12, L. 313-11, 11° et R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que de l'arrêté ministériel du 9 novembre 2011 ;
- la décision est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation dans l'application du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est entachée d'un détournement de pouvoir dès lors que le médecin de l'agence régionale de santé avait initialement rendu un avis favorable ;
- le directeur général de l'agence régionale de santé n'a pas rendu d'avis sur cette demande en méconnaissance de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'arrêté ministériel du 9 novembre 2011 ;
- cette décision méconnaît l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 dès lors qu'aucun avis motivé n'a été rendu quant à la possibilité de voyager ;
- le collège de médecins de l'OFII n'a pas rendu d'avis régulier et complet, au regard notamment de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'arrêté du 27 décembre 2016 qui prévoit en particulier la remise d'un dossier et d'une notice explicative ;
- le préfet s'est estimé lié par l'avis du collège de médecins de l'OFII et a méconnu l'étendue de ses compétences ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative au droit de l'enfant ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :
- ces décisions sont privées de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- la mesure d'éloignement porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa vie personnelle ;
- ces décisions sont entachées d'une erreur d'appréciation et ont été prises en méconnaissance des articles L. 511-4 et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par ordonnance du 8 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 23 avril 2019 à 12 heures
Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 et 15 avril 2019, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 janvier 2019.
II. Par une requête, enregistrée sous le n° 19BX00118 le 14 janvier 2019, et un mémoire, enregistré le 5 avril 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Limoges du 11 octobre 2018 ainsi que de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 200 euros, à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que l'exécution du jugement de première instance aurait des conséquences difficilement réparables et soulève les mêmes moyens que ceux développés au soutien de la requête n° 19BX00035 susvisée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2019, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 8 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 23 avril 2019 à 12 heures.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 avril 2019.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de chambre a décidé, en application de l'article R. 222-29 du code de justice administrative, d'inscrire la demande de sursis à exécution présentée par M. B... au rôle d'une chambre siégeant en formation de jugement.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les observations de Me C..., représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. D... B..., ressortissant marocain né le 21 juillet 1975, entré en France selon ses dires en 2012 en compagnie de sa conjointe, a demandé, le 8 février 2016, son admission au séjour en qualité d'étranger malade ainsi qu'en tant qu'accompagnant d'un enfant malade. Cette demande ayant été complétée le 30 juin 2017 puis le 29 janvier 2018, le préfet de la Haute-Vienne a, par arrêté du 13 avril 2018, refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai. Par sa requête n° 19BX00028, M. B... relève appel du jugement du 11 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par sa requête n° 19BX00118, il demande le sursis à exécution de ce jugement.
Sur la jonction :
2. Les requêtes n° 19BX00028 et n° 19BX00118 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.
Sur la légalité de l'arrêté du 13 avril 2018 :
3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable en l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence. (...) ".
4. D'une part, jusqu'à l'entrée en vigueur du 3° de l'article 13 de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyaient la consultation d'un médecin de l'agence régionale de santé (ARS). Le 3° de l'article 13 qui a substitué à cette consultation celle d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) s'applique aux demandes de titre de séjour présentées à compter du 1er janvier 2017 en vertu du VI de l'article 67 de la même loi.
5. D'autre part, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
6. Il ressort des pièces du dossier, notamment des termes mêmes de la décision litigieuse, que pour rejeter la demande de titre de séjour présentée antérieurement au 1er janvier 2017 par M. B... en raison de son état de santé, le préfet de la Haute-Vienne s'est fondé, non sur un avis émis par un médecin de l'agence régionale de santé dans le cadre de la procédure régie par les dispositions précitées dans leur rédaction antérieure à la loi du 7 mars 2016, mais sur celui émis par le collège de médecins du service médical de l'OFII, lequel a rendu un avis défavorable en estimant que si l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, le refus de séjour en litige est entaché d'un vice de procédure. En l'espèce, cette irrégularité a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision de refus de titre de séjour alors que par un avis initial du 7 avril 2016, le médecin de l'ARS avait estimé à l'inverse que le défaut de prise en charge de l'intéressé pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé.
7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 11 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 13 avril 2018 par laquelle le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour. L'illégalité de ce refus de titre de séjour prive de base légale les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi. Par suite, M. B... est également fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 11 octobre 2018, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. L'exécution du présent arrêt implique seulement, eu égard à ses motifs, que la demande de M. B... soit réexaminée. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Haute-Vienne de procéder à ce réexamen dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur le sursis à l'exécution du jugement :
9. La cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête n° 19BX00028 dirigées contre le jugement attaqué, les conclusions de la requête n° 19BX00118 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Par suite, il n'y a pas lieu d'y statuer.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me C..., avocat de M. B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... de la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés tant en première instance qu'en appel.
DECIDE
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 19BX00118 tendant au sursis à l'exécution du jugement
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 11 octobre 2018 est annulé.
Article 3 : L'arrêté du préfet de la Haute-Vienne du 13 avril 2018 est annulé.
Article 4 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Vienne de procéder au réexamen de la demande de M. B... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera à Me C... une somme de 1 200 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, président,
M. Didier A..., président-assesseur,
Mme Nathalie Gay-Sabourdy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 octobre 2019.
Le rapporteur,
Didier A...
Le président,
Marianne HardyLe greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX00028, 19BX00118