Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 12 juillet 2019, 21 juillet 2020 et 2 décembre 2020, Mme C..., représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 23 mai 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de La Flotte du 2 octobre 2017 ;
3°) de rejeter les conclusions de la SCI Les Jardins d'Hélios présentées sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme ;
4°) de mettre à la charge de la commune de La Flotte et de la SCI Les Jardins d'Hélios le paiement de la somme de 2 500 euros chacune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé, dès lors que les premiers juges n'ont pas recherché le niveau du terrain naturel réel avant travaux des parcelles cadastrées AC 1300 et AC 1301 pour répondre au moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 10 du règlement au plan d'occupation des sols ;
- le principe du contradictoire a été méconnu dès lors que les mémoires en défense enregistrés les 2 et 25 octobre 2018 ne lui ont pas été communiqués ;
- le dossier de déclaration préalable aux travaux déposé par la SCI Les Jardins d'Hélios était incomplet ; en effet, le plan de masse n'était pas suffisamment précis, et les travaux insuffisamment représentés par un plan graphique, en méconnaissance de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme ; le dossier ne comprenait pas de plan en coupe, en méconnaissance de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ; le projet étant situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable, une notice indiquant les matériaux utilisés et les modalités d'exécution des travaux aurait dû être jointe au dossier, conformément à l'article R. 431-14 du code de l'urbanisme ;
- le projet de la SCI Les Jardins d'Hélios méconnaît l'article UA 10 du plan d'occupation des sols de la commune de La Flotte, dès lors que le mur mitoyen à sa parcelle bénéficie d'une déclivité d'au moins trente centimètres qui a pour effet de lui faire supporter une surélévation plus importante ;
- sa requête n'est pas abusive, et n'a pas causé de préjudice à la SCI Les Jardins d'Hélios.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 19 juin 2020 et 5 février 2021, la société civile immobilière (SCI) Les Jardins d'Hélios, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C... le paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- Mme C... ne justifie pas d'un intérêt à agir ;
- les moyens de Mme C... ne sont pas fondés.
Par des mémoires distincts, enregistrés les 24 juillet 2020 et 5 février 2021, la SCI Les Jardins d'Hélios, représentée par Me G..., demande :
1°) de condamner Mme C... à lui verser la somme de 10 000 euros, sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme, au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis ;
2°) de mettre à la charge de Mme C... le paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que le recours de Mme C... est abusif, lui causant un préjudice indemnisable sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme, qu'elle évalue à 10 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 janvier 2021, la commune de La Flotte, représentée par Me H..., conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce que soit mis à la charge de Mme C... le paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme I... E...,
- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant Mme C..., et les observations de Me B..., représentant la SCI Les Jardins d'Hélios.
Une note en délibéré présentée par Me F... pour Mme C... a été enregistrée le 2 avril 2021.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., propriétaire de la parcelle cadastrée section AC n° 1300 sur le territoire de la commune de La Flotte (Charente-Maritime) a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2017 par lequel le maire de La Flotte ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée par la SCI Les Jardins d'Hélios portant sur le rehaussement de deux murs mitoyens séparant les parcelles cadastrées AC 1301 et AC 87 et les parcelles cadastrées AC 1301 et 1300. Mme C... relève appel du jugement du 23 mai 2019 par lequel le tribunal a rejeté sa demande. Par un mémoire distinct, la SCI Les Jardins d'Hélios demande, quant à elle, de condamner Mme C... à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Il résulte des motifs exposés aux points 5 à 7 du jugement attaqué que le tribunal administratif de Poitiers a suffisamment motivé sa réponse au moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 10 du plan d'occupation des sols de la commune de La Flotte. Les éventuelles erreurs qu'il aurait commises en examinant ce moyen relèvent du bien-fondé de ce jugement. Par suite, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité pour ce motif.
4. En second lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. (...) / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".
5. Si le mémoire enregistré le 2 octobre 2018 au greffe du tribunal administratif de Poitiers présenté pour la SCI Les Jardins d'Hélios, et le mémoire enregistré le 25 octobre 2018 pour la commune de La Flotte, n'ont pas été communiqués à Mme C..., il ressort des pièces du dossier que ces mémoires ne comportaient pas d'élément nouveau par rapport à ceux contenus dans les mémoires précédents. Par suite, en s'abstenant de communiquer ces mémoires à Mme C..., le tribunal n'a pas méconnu les dispositions citées ci-dessus et n'a donc pas entaché son jugement d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le caractère complet du dossier :
6. Aux termes de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la déclaration comprend : (...) / b) Un plan de masse coté dans les trois dimensions lorsque le projet a pour effet de créer une construction ou de modifier le volume d'une construction existante ; / c) Une représentation de l'aspect extérieur de la construction faisant apparaître les modifications projetées et si le projet a pour effet de modifier celui-ci ; (...) Il est complété, s'il y a lieu, par les documents mentionnés aux a et b de l'article R. 431-10, à l'article R. 431-14 (...) ". Aux termes de l'article R. 431-10 de ce code : " Le projet architectural comprend également : (...) b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; ". Et aux termes de l'article R. 431-14 du même code : " Lorsque le projet porte sur des travaux nécessaires à la réalisation d'une opération de restauration immobilière au sens de l'article L. 313-4 ou sur un immeuble inscrit au titre des monuments historiques, sur un immeuble situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, la notice mentionnée à l'article R. 431-8 indique en outre les matériaux utilisés et les modalités d'exécution des travaux. ".
7. La circonstance que le dossier de déclaration préalable de travaux ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
8. En premier lieu, le plan de masse joint au dossier de la déclaration préalable présentée par la SCI Les Jardins d'Hélios indique, en ce qui concerne sa parcelle cadastrée AC n° 1301, des cotes altimétriques comprises entre 7,37 et 7,53 m A..., et, en ce qui concerne la parcelle de Mme C... cadastrée AC n° 1300, des cotes comprises entre 7,10 et 7,16 m A..., de part et d'autre du mur mitoyen entre ces deux parcelles. Il mentionne par ailleurs une hauteur de ce mur existant d'environ 1 mètre 70. Les plans de masse joints à des demandes de permis de construire antérieures de la SCI Les Jardins d'Hélios, dont Mme C... se prévaut, présentent une cote altimétrique de 7,40 m A... pour la parcelle AC n° 1301, soit sensiblement similaire aux valeurs indiquées dans les documents joints à la déclaration préalable en litige, mais n'indiquent pas le niveau naturel du terrain de Mme C..., contrairement à ce que cette dernière soutient. Par ailleurs, si des plans établis en 2014 mentionnent une hauteur du mur mitoyen de 2 mètres, aucun élément au dossier ne permet de considérer que la hauteur de 1,70 mètre mentionnée dans la demande de la SCI Les Jardins d'Hélios, présentée en 2017 pour la surélévation du mur mitoyen, serait erronée. À cet égard, la mention de l'édification future d'un mur mitoyen d'une " hauteur finie de deux mètres " dans l'acte de vente du 24 juillet 2014 produit par la requérante, ne permet pas davantage de conclure que les mentions du plan de masse fournis par la SCI Les Jardins d'Hélios seraient fausses. Ainsi, les indications portées sur le plan de masse joint au projet de la SCI ne peuvent être regardées comme ayant faussé l'appréciation de la commune de la Flotte sur le projet de surélévation de la pétitionnaire. Les dispositions du b) de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme n'ont, par suite, pas été méconnues.
9. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que les photographies jointes à la déclaration préalable de travaux permettaient d'apprécier, par comparaison, les modifications projetées par la SCI Les Jardins d'Hélios lors de la réalisation des travaux. Par suite, les dispositions du c) de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnues.
10. En troisième lieu, le projet de surélévation de murs déclaré par la SCI Les Jardins d'Hélios n'a pas pour effet de modifier le profil du terrain. À cet égard, la circonstance que des cotes altimétriques différentes aient été mentionnées dans de précédentes demandes d'autorisation d'urbanisme en 2014 et en 2015 est sans incidence, dès lors que les travaux envisagés par la déclaration préalable n'ont pas, en eux-mêmes, d'impact sur le profil du terrain. Par suite, Mme C... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme.
11. Enfin, il est constant que le projet litigieux est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable. Il ressort des pièces du dossier que la SCI Les Jardins d'Hélios a précisé, dans la rubrique n° 5 du formulaire de déclaration préalable, les matériaux qui seraient utilisés, ainsi que l'aspect du sommet des murs dont le rehaussement est envisagé. Les éventuelles insuffisances du dossier n'ont ainsi pas, en l'espèce, été de nature à fausser l'appréciation portée par le service instructeur sur la conformité du projet à la réglementation applicable au regard de l'article R. 431-14 du code de l'urbanisme, alors au surplus que les prescriptions de l'architecte des bâtiments de France dont est assorti l'arrêté litigieux et qui y sont annexées précisent les matériaux devant être utilisés par la pétitionnaire.
En ce qui concerne l'autre moyen :
12. Aux termes de l'article UA 10 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de La Flotte : " Hauteur maximum des constructions (...) / Hauteur des murs de clôture : La hauteur des murs de clôtures, notamment des murs définis aux articles UA 6 et 7 du règlement doivent être compris entre 1,70 et 2,30 mètres (...). Cette hauteur est mesurée par rapport au terrain naturel de la parcelle (hauteur moyenne) en limite de propriétés et en hauteur moyenne du terrain le plus élevé lorsque le mur est mitoyen. (...) ".
13. Il résulte des dispositions citées ci-dessus que la hauteur d'un mur de clôture est mesurée par rapport au terrain naturel de la parcelle dans le cas où ce mur se situe en limite de propriétés. Toutefois, quand le mur est mitoyen, comme c'est le cas en l'espèce, la hauteur moyenne du terrain le plus élevé doit être prise en compte pour effectuer cette mesure. En l'espèce, il ressort du " plan de l'état actuel " établi par un géomètre-expert en 2017 que le terrain de la SCI Les Jardins d'Hélios présente un niveau plus élevé, avec un niveau moyen de 7,45 m A..., tandis que la parcelle de Mme C... fait apparaître des cotes altimétriques comprises entre 7,10 m A... et 7,16 m A.... Ce plan fait apparaître le sommet du mur mitoyen entre les 2 parcelles à une altitude de 9,16 m A.... En tenant compte de ces éléments, le rehaussement de 55 centimètres projeté par la SCI Les Jardins d'Hélios n'aura pas pour effet de porter le mur à une hauteur supérieure à 2 mètres 30 par rapport au sol naturel du terrain de la pétitionnaire, lequel est le plus élevé au droit du mur mitoyen, conformément aux prescriptions de l'article UA 10 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de la Flotte citées ci-dessus. A cet égard, le fait, à le supposer avéré, que le terrain d'assiette de la pétitionnaire aurait été exhaussé à l'occasion de travaux antérieurs n'est pas de nature à modifier la hauteur du terrain naturel qui doit être prise en considération pour l'application de ces dispositions, telle qu'elle ressort des relevés effectués par le géomètre-expert antérieurement aux travaux de construction pour la réalisation desquels l'arrêté litigieux du 2 octobre 2017 a été pris, alors au demeurant qu'aucun élément au dossier ne permet de considérer que la pétitionnaire aurait présenté des déclarations frauduleuses. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées ci-dessus doit être écarté.
14. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée à sa demande, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 octobre 2017.
Sur les conclusions présentées par la SCI Les jardins d'Hélios sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :
15. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel ".
16. La contestation par Mme C..., voisine immédiate du projet, de la déclaration de non opposition à travaux délivrée à la SCI Les Jardins d'Hélios ne traduit pas un comportement abusif de sa part. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité, les conclusions présentées par la SCI Les Jardins d'Hélios sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SCI Les Jardins d'Hélios, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Mme C..., en application de ces mêmes dispositions, une somme de 1 500 euros à verser à la SCI les Jardins d'Hélios et une somme de 1 500 euros à verser à la commune de La Flotte.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Mme C... versera une somme de 1 500 euros à la SCI Les Jardins d'Hélios, et une somme de 1 500 euros à la commune de La Flotte en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la SCI Les Jardins d'Hélios est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme J... C..., à la société civile immobilière Les Jardins d'Hélios et à la commune de La Flotte.
Délibéré après l'audience du 1er avril 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Salvi, président,
Mme K..., première conseillère,
Mme I... E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2021.
Le président,
Didier Salvi
La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 19BX02953 2