Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 avril 2018, MmeC... B..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse en date du 5 janvier 2018 ;
2°) d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi comprises dans l'arrêté du 10 octobre 2017 et la décision du 26 décembre 2017 portant assignation à résidence ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à tout le moins, de procéder au réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la motivation de l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration faute de mentionner la présence en France de sa première fille, la scolarisation de ses enfants mineurs, la nationalité de son frère, la circonstance que sa soeur est titulaire d'une carte de résident. Il en résulte un défaut d'examen de sa situation ;
- l'obligation de quitter le territoire français est privée de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- la motivation du refus de titre de séjour méconnaît les articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration faute de prendre les éléments précédemment énoncés. Il en résulte un défaut d'examen de sa situation ;
- le refus de titre de séjour méconnaît le 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Son frère, de nationalité française, sa soeur et sa fille aînée, titulaires d'une carte de résident, son petit-fils résident en France. Ses quatre enfants mineurs sont scolarisés. Elle réside depuis trois ans en France chez sa fille ;
- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 7 b) de l'accord franco-algérien car elle est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée et le préfet n'a même pas consulté la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ;
- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour les motifs énoncés précédemment ;
- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. L'intérêt de ses enfants est de poursuivre leur scolarité en France ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation pour les motifs précédemment énoncés ;
- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvu de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision d'assignation à résidence est insuffisamment motivée en méconnaissance de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faute de démontrer le caractère raisonnable de la perspective de mise à exécution de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision d'assignation à résidence est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement qui la fonde ;
- la décision d'assignation à résidence méconnaît l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'absence de perspective raisonnable d'exécution de l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2018, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête en s'en remettant à ses écritures de première instance.
Par ordonnance du 5 juin 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 juillet 2018 à midi.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code du travail ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné M. Nicolas Normand pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M Paul-André Braud a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., ressortissante algérienne née le 27 mai 1968, est, selon ses déclarations, entrée en France le 28 août 2014 accompagnée de quatre de ses enfants mineurs. Après le prononcé de son divorce par un jugement du tribunal d'Oran du 24 avril 2017, elle a sollicité, le 9 mai suivant, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 10 octobre 2017, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Puis, par une décision du 26 décembre 2017, le préfet de la Haute-Garonne a décidé de l'assigner à résidence jusqu'à son départ. Mme B...relève appel du jugement du 5 janvier 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 octobre 2017 et de la décision du 26 décembre 2017 du préfet de la Haute-Garonne à l'exception des conclusions tendant à l'annulation du refus de titre de séjour, lesquelles ont été renvoyées devant une formation collégiale.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
En ce qui concerne l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, Mme B...reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement les réponses qui lui ont été apportées par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif, les moyens tirés du défaut de motivation, du défaut d'examen de sa situation, de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
3. En second lieu, aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien susvisé : " Les dispositions du présent article (...) fixent les conditions de délivrance du certificat de résidence aux ressortissants algériens autres que ceux visés à l'article 6 nouveau, ainsi qu'à ceux qui s'établissent en France après la signature du premier avenant à l'accord (...) b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française (...) ". Aux termes de l'article 9 du même accord : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis al.4 (lettre c et d) et du titre III du protocole (...), les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ". Aux termes de l'article R. 5221-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Peut faire l'objet de la demande prévue à l'article R. 5221-11 l'étranger résidant hors du territoire national ou, lorsque la détention d'un titre de séjour est obligatoire, l'étranger résidant en France sous couvert d'une carte de séjour, d'un récépissé de demande ou de renouvellement de carte de séjour ou d'une autorisation provisoire de séjour. " Il ressort de ces stipulations que l'octroi d'un tel titre de séjour est subordonné notamment à la production d'un contrat de travail revêtu du visé des services chargés du contrôle des travailleurs immigrés. Il résulte par ailleurs de l'application combinée de ces stipulations et de ces dispositions qu'aucune stipulation de l'accord franco-algérien ni aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet, saisi par un étranger déjà présent sur le territoire national et qui ne dispose pas d'un visa de long séjour, d'examiner la demande d'autorisation de travail ou de la faire instruire par les services compétents du ministère du travail, préalablement à ce qu'il soit statué sur la délivrance du certificat de résidence.
4. Si Mme B...a joint à sa demande un contrat de travail à temps complet et à durée indéterminée en qualité d'employée polyvalente dans un restaurant, ce contrat n'est pas revêtu du visa des services chargés du contrôle des travailleurs immigrés. Mme B...n'étant titulaire ni du visa de long séjour mentionné à l'article 9 de l'accord franco-algérien ni d'un titre de séjour, le préfet de la Haute-Garonne n'était pas tenu de transmettre son contrat de travail aux services compétents du ministère du travail. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien doit être écarté.
En ce qui concerne les vices propres de l'obligation de quitter le territoire français :
5. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour.
6. En second lieu, Mme B...reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement les réponses qui lui ont été apportées par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif, les moyens tirés du défaut de motivation, du défaut d'examen de sa situation, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
Sur la légalité de l'assignation à résidence :
8. En premier lieu, il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que la décision d'assignation à résidence est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement qui la fonde.
9. En deuxième lieu, Mme B...reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement la réponse qui lui a été apportée par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif, le moyen tiré du défaut de motivation de l'assignation à résidence. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
10. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable (...) ".
11. En se bornant à soutenir qu'il n'y a pas de perspective raisonnable que l'obligation de quitter le territoire français dont elle fait l'objet soit exécutée, sans expliquer pourquoi, Mme B...n'assortit pas son moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi comprises dans l'arrêté du 10 octobre 2017 et de la décision du 26 décembre 2017 du préfet de la Haute-Garonne. Par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées.
DECIDE
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à MmeC... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier conseiller,
Mme Agnès Bourjol, conseiller.
Lu en audience publique, le 26 octobre 2018.
Le rapporteur,
Paul-André Braud
Le président,
Marianne PougetLa greffière,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX01751