Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 18 février 2015 et le 15 octobre 2015, la communauté d'agglomération du Grand Tarbes, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 19 novembre 2014 ;
2°) de rejeter la demande de Mme B...;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise ;
4°) de mettre à la charge de Mme B...une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il a tenu compte de l'avis du comité médical supérieur qui infirmait l'avis du comité médical départemental et que cette pièce ne lui a été communiquée qu'après l'audience ;
- l'inaptitude à l'emploi de Mme B...a été constatée par le comité médical départemental le 7 juin 2011 et par la commission départementale de réforme des agents des collectivités territoriales le 13 octobre 2011; par suite, l'intéressée, qui ne contestait pas avoir épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire, ne pouvait prétendre à un congé de longue maladie ou de longue durée ;
-les prises de position du médecin traitant de la requérante sont partiales, dépourvues d'objectivité et entachées d'erreurs de fait sur l'ancienneté d'une prise en charge psychiatrique ;
Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 septembre 2015 et le 4 novembre 2016, Mme B...conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de la communauté d'agglomération du Grand Tarbes une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'avis du comité supérieur lui a été transmis par son employeur qui en avait nécessairement connaissance ;
- la décision du 16 juillet 2012 repose sur des faits matériellement erronés ; le médecin sollicité par la communauté d'agglomération avait envisagé l'éventualité d'un mi-temps thérapeutique à la fin de l'été 2011 ;
- l'administration l'a placée précipitamment en disponibilité alors qu'elle pouvait proroger son placement en mi-temps thérapeutique, voire solliciter un congé de longue maladie ou de maladie de longue durée à raison d'une des pathologies dont elle est atteinte ; l'administration a manqué à son devoir d'information et l'a ainsi privée de toutes ces possibilités ;
- il n'y a pas eu tentative de reclassement ;
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 3 décembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;
- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur ;
- les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. MmeB..., adjoint administratif, exerçant ses fonctions au sein de la communauté d'agglomération du Grand Tarbes, a été placée en arrêt maladie en 2008 à la suite d'un accident de la circulation. Elle a ensuite bénéficié d'un mi-temps thérapeutique du 5 janvier 2010 au 4 octobre 2010. A compter du 5 septembre 2010, Mme B...a été placée en congé de maladie ordinaire et elle a sollicité le 21 décembre 2010 le bénéfice d'un nouveau mi-temps thérapeutique. Dans le cadre de l'instruction de cette demande, le comité médical départemental s'est prononcé le 7 juin 2011 dans le sens d'une inaptitude totale et définitive de l'intéressée à toute fonction. Le président de la communauté d'agglomération du Grand Tarbes a alors engagé une procédure de mise à la retraite pour invalidité, au cours de laquelle la commission de réforme a rendu le 13 octobre 2011 un avis favorable à l'inaptitude totale et définitive de Mme B.... Après une expertise médicale psychiatrique concluant à l'existence d'une névrose à composante dépressive justifiant qu'un taux d'invalidité de 30 % soit retenu sans préjudice de l'appréciation de l'invalidité résultant des altérations somatiques dont est atteinte la requérante, la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales a émis un avis favorable à sa mise à la retraite. Par un arrêté du 16 juillet 2012, le président de la communauté d'agglomération du Grand Tarbes a admis Mme B...à la retraite pour invalidité non imputable au service à compter du 14 octobre 2011. Mme B...a demandé l'annulation de cet arrêté, ensemble de la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur son recours gracieux formé le 22 août 2012. La communauté d'agglomération du Grand Tarbes relève appel du jugement du tribunal administratif de Pau du 19 novembre 2014 qui a annulé ces décisions.
Sur la régularité du jugement :
2. Il appartient au juge administratif, dans l'exercice de ses pouvoirs généraux de direction de la procédure, d'ordonner toutes les mesures d'instruction qu'il estime nécessaires à la solution des litiges qui lui sont soumis, et notamment de requérir des parties ainsi que, le cas échéant, de tiers, en particulier des administrations compétentes, la communication des documents qui lui permettent de vérifier les allégations des requérants et d'établir sa conviction. Il lui incombe, dans la mise en oeuvre de ses pouvoirs d'instruction, de veiller au respect des droits des parties, d'assurer l'égalité des armes entre elles et de garantir, selon les modalités propres à chacun d'entre eux, les secrets protégés par la loi. Le caractère contradictoire de la procédure fait en principe obstacle à ce que le juge se fonde sur des pièces produites au cours de l'instance qui n'auraient pas été préalablement communiquées à chacune des parties.
3. La communauté d'agglomération du Grand Tarbes fait valoir que le principe du contradictoire n'a pas été respecté devant les premiers juges dès lors qu'elle n'aurait pas eu connaissance avant l'audience du courrier adressé au tribunal administratif par Mme B...le 28 octobre 2014 faisant état de l'avis du comité médical supérieur émis le 12 février 2014, lequel infirmait l'avis émis par le comité médical départemental le 7 juin 2011. Il ressort toutefois de la motivation du jugement querellé que les premiers juges ne se sont pas fondés sur cette pièce pour annuler l'arrêté en date du 16 juillet 2012 par lequel le président de la communauté d'agglomération du Grand Tarbes a placé Mme B...à la retraite pour inaptitude définitive à toutes fonctions. Par suite, le moyen doit être écarté.
Sur la légalité de l'arrêté du 16 juillet 2012 :
4. D'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) ". L'article 72 de la même loi dispose que : " La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux (...)2° de l'article 57 (...) ". L'article 17 du décret du 30 juillet 1987 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux dispose que : " (...) Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...) " Aux termes de l'article 37 du même décret : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée attribuable, reprendre son service est soit reclassé (...), soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...) " L'article 38 du même décret précise que : " La mise en disponibilité visée aux articles 17 (...) du présent décret est prononcée après avis du comité médical (...) sur l'inaptitude du fonctionnaire à reprendre ses fonctions (...). Le renouvellement de la mise en disponibilité est prononcé après avis du comité médical (...) ".
5. D'autre part, aux termes de l'article 30 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités territoriales : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande ". Aux termes de l'article 39 du même décret : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'une invalidité ne résultant pas du service peut être mis à la retraite par anticipation soit sur demande soit d'office (...) ".
6. A l'appui de sa requête, la communauté d'agglomération du Grand Tarbes fait valoir que l'inaptitude à tout emploi de Mme B...a été constatée par le comité médical départemental le 7 juin 2011 et par la commission de réforme des agents des collectivités territoriales le 13 octobre 2011. Il ressort toutefois des pièces du dossier que pour les pathologies organiques dont souffre MmeB..., le comité médical départemental a émis depuis 2001 des avis favorables soit à la prolongation du congé de longue maladie, soit à une reprise du travail avec un mi-temps thérapeutique. Si l'avis du 7 juin 2011, émis par le comité départemental, qui était à nouveau saisi d'une demande de temps partiel thérapeutique, se prononce pour l'inaptitude définitive de Mme B...au vu d'un rapport médical établi le 17 mai 2011 qui conclut à l'impossibilité pour Mme B...d'exercer sa fonction ou tout autre fonction tout en indiquant également qu'il faudra " attendre la fin de l'été 2011 avant de se prononcer sur une éventuelle reprise de travail qui pourrait être envisagée à mi-temps thérapeutique ", le rapport du médecin traitant de Mme B...indique qu'elle ne souffre d'aucun trouble de nature psychologique ou anxio-dépressive. En outre, il est constant qu'à la suite de l'avis émis le 7 juin 2011, Mme B...a saisi le comité médical supérieur avant l'édiction de la décision de mise à la retraite d'office. Or, cet avis du comité médical supérieur rendu deux ans après sa saisine, le 12 février 2014, et notifié à Mme B...le 5 septembre 2014 conclut à " l'aptitude à la réintégration pendant trois mois à temps partiel thérapeutique à 50 % puis réintégration temps plein, favorable à la demande de l'agent, non conforme au comité médical. ". Ainsi, à la date à laquelle la décision a été prise, et même si la commission de réforme des agents des collectivités territoriales s'est prononcée le 13 octobre 2011 pour la mise à la retraite de MmeB..., l'inaptitude totale et définitive de Mme B... n'était pas démontrée et le président de la communauté d'agglomération du Grand Tarbes a commis une erreur manifeste d'appréciation en prononçant sa mise à la retraite pour cause d'inaptitude totale et définitive.
7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée à titre subsidiaire par l'appelante, que la communauté d'agglomération du Grand Tarbes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé la décision du 16 juillet 2012 ainsi que la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur le recours gracieux formé par MmeB....
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8.Mme B...bénéficie de l'aide juridictionnelle totale et ne justifie pas que des frais soient restés à sa charge. Par suite, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération du Grand Tarbes est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de Mme B...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération du Grand Tarbes et à Mme C...B....
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
M. Jean-Claude Pauziès, président-assesseur,
M. Paul-André Braud, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.
Le rapporteur,
Jean-Claude PAUZIÈSLe président,
Catherine GIRAULT
Le greffier,
Delphine CÉRON
La République mande et ordonne au ministre de la fonction publique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 15BX00188