Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 juillet 2021, la préfète de l'Aveyron demande à la cour, sur le fondement des articles R. 811-16 et R. 811-17 du code de justice administrative, de surseoir à l'exécution de ce jugement et de l'annuler.
Elle soutient que :
- l'exécution du jugement risquerait d'exposer l'Etat à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où les conclusions d'appel seraient accueillies ainsi qu'à la perte de la somme de 1 500 euros ;
- il existe des moyens sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement ; en effet le calcul de l'astreinte retenu par l'administration a été allégé et a pris en compte les difficultés financières de l'entreprise, la suppression de l'astreinte entraîne un déséquilibre en faveur du droit au respect des biens au dépens de l'application de la loi, le tribunal n'a pas précisé laquelle des trois normes contenu dans l'article 1er du Protocole n°1 était méconnue par l'article 752-23 du code de commerce, la société ne se trouve privée d'aucun de ses biens, la position du tribunal est contraire à celle retenue par le juge administratif dans une précédente affaire et, dans une certaine mesure, à celle de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour des affaires similaires.
Par un mémoire enregistré le 14 septembre 2021, la SAS Sotourdi, représentée par Me de Froment, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les conditions posées par les articles R. 811-16 et R. 811-17 du code de justice administrative ne sont pas remplies.
Vu :
- la requête enregistrée sous le n° 21BX03150 par laquelle la préfète de l'Aveyron demande à la cour d'annuler le jugement du 18 mai 2021 du tribunal administratif de Toulouse ;
- les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... A...,
- et les observations de Me Haas, représentant la société Sotourdi.
La clôture de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiées (SAS) Sotourdi exploite à Saint-Affrique (Aveyron) un supermarché à l'enseigne " Carrefour Market ". Des travaux de réhabilitation ont été réalisés au début de l'année 2015 à la suite d'une importante inondation à l'occasion desquels la surface de vente a été étendue sans autorisation d'urbanisme préalable et sans autorisation d'exploitation commerciale. Par un arrêté du 2 mai 2016, le préfet de l'Aveyron a mis en demeure la société Sotourdi de ramener la surface de vente exploitée dans le supermarché à celle autorisée et, en l'absence de réponse de la part de la société, le préfet a, par un arrêté du 27 juin 2016, ordonné la fermeture au public des surfaces de vente exploitées sans autorisation d'exploitation commerciale. Puis, par un nouvel arrêté du 9 février 2017, le préfet a prononcé à son encontre la liquidation de l'astreinte administrative journalière, en raison de l'exploitation irrégulière du 13 juillet au 31 août 2016 de 514,28 m² de surface de vente au-delà de l'autorisation en vigueur, pour un montant de 3 779 958 euros. Par un jugement du 18 mai 2021, le tribunal administratif de Toulouse, saisi par la SAS Sotourdi, a annulé l'arrêté du 9 février 2017 ainsi que la décision du 2 juin 2017 par laquelle le préfet a rejeté son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au profit de la société Sotourdi. La préfète de l'Aveyron demande à la cour de sursoir à l'exécution de ce jugement.
2. Aux termes de l'article R. 811-16 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel par une personne autre que le demandeur en première instance, la juridiction peut, à la demande de l'appelant, ordonner sous réserve des dispositions des articles R. 533-2 et R. 541-6 qu'il soit sursis à l'exécution du jugement déféré si cette exécution risque d'exposer l'appelant à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où ses conclusions d'appel seraient accueillies.". Aux termes de l'article R. 811-17 du même code : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction. ".
3. A l'appui de ses conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse, la préfète de l'Aveyron se borne à faire état, sans précisions, de ce que l'exécution du jugement " risquerait d'exposer l'Etat à la perte définitive d'une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où les conclusions d'appel seraient accueillies " et " d'entraîner des conséquences difficilement réparables dans le cas où les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction ". Toutefois, en l'absence de toute précision, il ne résulte pas de l'instruction que l'exécution du jugement annulant l'arrêté du 9 février 2017 procédant à la liquidation de l'astreinte prononcée à l'encontre de la société Sotourdi et mettant à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige ferait obstacle, au cas où les conclusions tendant à la réformation de ce jugement seraient accueillies, à ce que l'Etat puisse recouvrer la somme mise à la charge de la société Sotourdi par cet arrêté et exposerait ainsi l'Etat à la perte définitive de cette somme et de celle mise à sa charge au titre des frais de procès. Pour les mêmes raisons, l'exécution du jugement ne peut être regardée comme risquant d'entraîner pour l'Etat des conséquences difficilement réparables au sens de l'article R. 811-17 du code de justice administrative cité ci-dessus. Dans ces conditions, l'une des conditions posées par les dispositions de ces articles n'étant pas remplie, la requête de la préfète de l'Aveyron tendant à la suspension de l'exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 mai 2021 doit être rejetée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des conclusions à fin d'annulation ni d'examiner si les moyens énoncés dans la requête présentent un caractère sérieux.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par la SAS Sotourdi.
ORDONNE :
Article 1er : La requête de la préfète de l'Aveyron est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à la SAS Sotourdi une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à la SAS Sotourdi.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Aveyron.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 septembre 2021.
La présidente,
Marianne A...La greffière,
Sophie LecarpentierLa présidente,
Marianne A...La greffière,
Sophie LecarpentierLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX03151 2