Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 10 juin 2019, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 24 janvier 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2018 du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 (4°) ou L. 314-9 (3°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat " le paiement des entiers dépens " ainsi que le versement au profit de son conseil d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé en fait et en droit ; il ne vise pas les dispositions spécifiques de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au renouvellement du titre de séjour en qualité de conjoint de français ;
- il est entaché d'incompétence de son auteur ;
- le préfet a entaché son arrêté d'une erreur de droit en refusant de lui octroyer le titre qu'elle soutient avoir sollicité sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11 (4°) et L. 314-9 (3°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté est entaché d'un détournement de pouvoir et de procédure dès lors que le préfet de la Haute-Garonne a attendu plus de deux ans pour l'édicter alors qu'elle remplissait, lors de sa demande le 16 mars 2016, toutes les conditions pour obtenir le titre sollicité sur le fondement des articles L. 314-9 (3°) et L.313-11 (4°) ;
- l'arrêté porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis ; elle réside en France depuis 5 ans, a subi des violences conjugales, et dispose d'un contrat de travail ; elle a fait venir son seul enfant, conformément à l'autorisation de regroupement familial qui lui a été accordée ;
- il est entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et porte une atteinte excessive à sa vie privée et familiale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- l'erreur commise concernant le nombre d'enfants de Mme A... est, en l'espèce, sans incidence sur la légalité de la décision en litige ; l'intéressée n'a d'ailleurs pas contesté cet élément en première instance.
Par ordonnance du 19 septembre 2019, la clôture d'instruction a été reportée au 4 octobre 2019 à 12 heures.
Par une décision n° 2019/005624 du 16 mai 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Bordeaux, le bénéfice de l'aide juridictionnelle a été refusé à Mme A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante malgache née le 6 mars 1985, est entrée en France le 8 juin 2013, munie d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour valant titre de séjour pour une durée d'un an, à la suite de son mariage contracté à Madagascar le 9 février 2013 avec M. E..., de nationalité française. L'intéressée s'est vue octroyer, le 6 juin 2014, une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", régulièrement renouvelée jusqu'au 5 juin 2016. Le 16 mars 2016, Mme A... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant français. Elle relève appel du jugement du 24 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 16 juillet 2018 du préfet de la Haute-Garonne lui refusant le renouvellement de son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixant le pays de renvoi.
2. En premier lieu, Mme A... reprend en appel, sans invoquer d'éléments de fait ou de droit nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance et sans critiquer utilement les réponses apportées par le tribunal administratif, son moyen de première instance tiré de ce que l'arrêté est entaché d'incompétence de son auteur. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, la décision de refus de renouvellement de titre de séjour vise notamment le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et fait état, par ailleurs, des conditions d'entrée et de séjour sur le territoire français de la requérante, indique qu'elle s'est mariée avec un ressortissant français le 9 février 2013 à Madagascar, ce mariage ayant été transcrit le 8 avril 2013 sur les registres d'état civil français. La décision précise qu'elle s'est vue octroyer, le 6 juin 2014, une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention "vie privée et familiale", régulièrement renouvelée jusqu'au 5 juin 2016 et dont elle a sollicité le renouvellement le 16 mars 2016, au titre de conjointe d'un ressortissant français. Elle ajoute que l'enquête conduite par les services de la police nationale n'a pas permis d'établir la réalité d'une vie commune entre Mme A... et son époux et qu'à l'exception d'une simple déclaration, l'intéressée n'apporte aucun élément de preuve établissant la réalité et la continuité d'une vie de couple partagée avec son conjoint depuis leur mariage. Cette décision expose ainsi l'ensemble des considérations de fait et de droit qui la fondent et n'avait pas, au demeurant, à viser l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif aux conditions de renouvellement de la carte de séjour en qualité de conjoint de français dès lors que le préfet a examiné la demande dont il était saisi au regard de l'article L. 314-9 du même code du fait de la durée écoulée depuis le mariage de Mme A.... Par suite, elle répond aux exigences de motivation notamment prévues aux articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire postant la mention ''vie privée et familiale'' est délivrée de plein droit:/( ... ) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ( ... ) ". En outre, aux termes de l'article L.314-9 du même code, " La carte de résident est délivrée de plein droit : ( ... ) / 3° A l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition qu'il séjourne régulièrement en France, que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. ". Enfin, aux termes de l'article L. 313-12 de ce code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences familiales ou conjugales et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et en accorde le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser à Mme A... un titre de séjour, le préfet de la Haute-Garonne, qui avait constaté que l'intéressée était mariée depuis plus de trois ans avec un ressortissant français, s'est fondé, en particulier, sur le procès-verbal de police du commissariat central de Toulouse du 8 février 2017, relatif à l'enquête diligentée sur la réalité de la vie commune de la requérante et de son époux. Ce procès-verbal relevait que la communauté de vie avec le conjoint de Mme A..., de nationalité française, avait cessé, ce qu'au demeurant l'intéressée a confirmé ensuite en indiquant comme date de séparation de fait " septembre 2017". Dès lors, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait commis une erreur de droit en refusant de lui octroyer le titre qu'elle ne conteste pas avoir sollicité sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11 (4°) et L. 314-9 (3 °) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet était, au demeurant, tenu d'examiner sa demande sur ce dernier fondement dès lors qu'à la date à laquelle il a statué, Mme A... était mariée depuis plus de trois ans avec son conjoint de nationalité française.
6. Par ailleurs, la requérante fait valoir qu'elle a subi des violences conjugales et se prévaut d'un certificat établi le 11 mai 2014 par l'hôpital Rangueil dépendant du centre hospitalier universitaire de Toulouse, lequel fait état de quelques ecchymoses et abrasions et indique seulement que celles-ci auraient pour origine, selon les dires de la patiente, des coups reçus de son mari. Cependant, Mme A... n'a pas porté plainte contre celui-ci, et ce seul document ne permet pas d'établir la réalité des violences alléguées, lesquelles seraient, au demeurant, intervenues plus de trois ans avant la séparation effective du couple. En l'absence de tout autre élément produit par la requérante tant en première instance qu'en appel de nature à corroborer ses dires, le moyen tiré de ce qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour le préfet aurait fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, en tout état de cause, être écarté.
7. En quatrième lieu, si Mme A... se prévaut d'une durée de présence en France de cinq ans, elle ne fait toutefois état d'aucun lien personnel ou familial sur le territoire français, en dehors de son fils né d'une précédente union. Elle n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans, alors qu'elle a mentionné dans le formulaire de demande de renouvellement de son titre de séjour la présence à Madagascar de quatre personnes relevant de son entourage familial, dont sa mère et son fils, âgé de 9 ans, qui a été depuis lors autorisé à la rejoindre en France en septembre 2017. Séparée de son époux et sans enfant issu de cette union, elle n'établit pas davantage ne pas pouvoir poursuivre sa vie familiale ailleurs qu'en France. A cet égard, la circonstance qu'elle ait obtenu le bénéfice du regroupement familial pour son fils Moussa n'est pas de nature à établir qu'elle ne pourrait pas maintenir sa vie familiale notamment dans son pays d'origine, où elle dispose donc de l'essentiel de ses attaches et où son fils, qui y a vécu jusqu'à son entrée récente en France à l'âge de 7 ans, pourra l'accompagner. Par suite, les décisions contestées n'ont pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme A... une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en refusant de renouveler son titre de séjour, le préfet de la Haute-Garonne aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressée.
8. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande (...) de renouvellement de titre de séjour un récépissé qui autorise la présence de l'intéressé sur le territoire pour la durée qu'il précise ". Aux termes de l'article R. 311-12 du même code issu du décret du 28 octobre 2016 : " Le silence gardé par l'administration sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet ", et aux termes de son article R. 311-12-1 : " La décision implicite mentionnée à l'article R. 311-12 naît au terme d'un délai de quatre mois. ".
9. Si Mme A... soutient qu'elle a été maintenue sous récépissés pendant deux ans, que rien ne justifiait un délai aussi long de traitement de sa demande et que le préfet a adopté un comportement déloyal, la seule circonstance qu'à la suite de sa demande de titre de séjour présentée au cours du mois de mars 2016, l'intéressée a été maintenue sous le régime des récépissés de demande de titre de séjour, le temps de l'enquête de vie commune, et que la décision de refus de titre de séjour ne soit intervenue que le 18 juillet 2018, n'est révélatrice d'aucun détournement de pouvoir.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 juillet 2018 du préfet de la Haute-Garonne. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens, doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A..., épouse E..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
Mme Anne Meyer, président-assesseur,
M. Thierry C..., premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 19 novembre 2019.
Le rapporteur,
Thierry C...Le président
Catherine Girault
Le greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 19BX02396