Par un jugement n° 1400285 du 31 mars 2016, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté n° 2013303-0006 du 30 octobre 2013 par lequel la directrice générale de l'ARS Midi-Pyrénées a modifié l'agrément de la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne et rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 juin 2016 et 10 août 2017,
la SELARL Bio Fusion, représentée par MeF..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 31 mars 2016 en tant que ce jugement a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2013303-0005 du 30 octobre 2013 par lequel la directrice générale de l'agence régionale de
santé (ARS) Midi-Pyrénées a modifié l'autorisation de fonctionnement de
la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne et de l'arrêté n° 2013308-0001 du 4 novembre 2013 de la même autorité administrative portant dissolution de
la SELARL Laboratoire Chiche ;
2°) d'annuler lesdits arrêtés ;
3°) de mettre à la charge de l'ARS Midi Pyrénées le paiement de la somme
de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les arrêtés litigieux méconnaissent l'article L. 6223-8 du code de la santé publique ;
- ils méconnaissent la note de service du chef de bureau " coopérations et contractualisations " (PF3) de la sous-direction du pilotage de la performance des acteurs de l'offre de soins de la direction générale de l'offre de soins du ministère des affaires sociales et de la santé ;
- la procédure de régularisation prévue à l'article 5 de la loi du 31 décembre 1990 n'est pas applicable à l'espèce ;
- les arrêtés litigieux doivent être annulés par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté n° 2013303-0006 du 30 octobre 2013, par lequel la directrice générale de
l'ARS Midi-Pyrénées a modifié l'agrément de la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne.
Par des mémoires en intervention, enregistrés les 23 juin 2016, 7 juin, 16 octobre et
22 novembre 2017, le syndicat des biologistes, représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 31 mars 2016 en tant que ce jugement a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2013303-0005 du 30 octobre 2013, par lequel la directrice générale de l'agence régionale de
santé (ARS) Midi-Pyrénées a modifié l'autorisation de fonctionnement de la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne et de l'arrêté n° 2013308-0001 du 4 novembre 2013 de la même autorité administrative, portant dissolution de la SELARL Labo Chiche ;
2°) d'annuler lesdits arrêtés ;
3°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les arrêtés litigieux méconnaissent l'article L. 6223-8 du code de la santé publique de sorte que le directeur général de l'ARS ne pouvait légalement délivrer l'autorisation prévue à l'article L. 6211-2 du code de la santé publique ;
- ils méconnaissent la note de service du chef de bureau " coopérations et contractualisations " (PF3) de la sous-direction du pilotage de la performance des acteurs de l'offre de soins de la direction générale de l'offre de soins du ministère des affaires sociales et de la santé.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 20 octobre 2016, 12 juillet, 11 octobre et 21 novembre 2017, la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de la SELARL Bio Fusion et du syndicat des biologistes, le paiement de la somme de 3 000 euros chacun en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la société appelante et le syndicat intervenant ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2017, le ministre des affaires sociales et de la santé s'en remet à la sagesse de la cour.
Il soutient que :
- la cession de la totalité du capital de la SELARL Labo Chiche au bénéfice de la SELAS Labo Gascogne est contraire aux dispositions de l'article L. 6223-8 du code de la santé publique ;
- le directeur général de l'ARS ne pouvait néanmoins légalement s'opposer à l'agrément de la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne ;
- le directeur général de l'ARS aurait dû cependant refuser de délivrer l'autorisation sollicitée ;
- le directeur général de l'ARS n'a fait que constater la dissolution de
la SELARL laboratoire Chiche.
Par ordonnance du 17 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée
au 22 novembre 2017.
Un mémoire présenté par le ministre des solidarités et de la santé a été enregistré
le 24 septembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 ;
- l'ordonnance n° 2010-49 du 13 janvier 2010 ;
- la loi n° 2013-442 du 30 mai 2013 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.B...,
- les conclusions de M. Normand, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., représentant la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne et de MeA..., représentant le syndicat des biologistes.
Une note en délibéré présentée pour le syndicat des biologistes du Lot a été enregistrée
le 8 novembre 2018.
Une note en délibéré présentée pour le laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne a été enregistrée le 15 novembre 2018.
Considérant ce qui suit :
1. La SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne a acquis,
le 17 octobre 2013, la SELARL Laboratoire Chiche qui exploitait un laboratoire de biologie médicale à Castelsarrasin (Tarn-et-Garonne). La SELARL Bio Fusion qui exploite neuf sites de biologie médicale dans le même département relève appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 31 mars 2016 en tant que ce jugement a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 2013303-0005 du 30 octobre 2013 par lequel la directrice générale de l'agence régionale de santé (ARS) Midi-Pyrénées a modifié l'autorisation de fonctionnement de la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne incluant le laboratoire de biologie médicale situé à Castelsarrasin et de l'arrêté n° 2013308-0001 du 4 novembre 2013 de la même autorité portant dissolution de la SELARL Laboratoire Chiche.
Sur l'intervention du syndicat des biologistes :
2. Est recevable à former une intervention, devant le juge du fond comme devant le juge de cassation, toute personne qui justifie d'un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l'objet du litige. Eu égard à la nature et à l'objet du litige, le syndicat des biologistes justifie, par son objet statutaire, d'un intérêt de nature à le rendre recevable à intervenir. Son intervention doit, dès lors, être admise.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne l'arrêté portant modification de l'autorisation de fonctionnement de la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne :
3. Il est constant que l'arrêté du 30 octobre 2013 portant modification de l'autorisation détenue par la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne a été délivré par la directrice générale de l'ARS, dans les conditions fixées au premier alinéa de
l'article L. 6211-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à la publication de l'ordonnance du 13 janvier 2010, en vertu des dispositions transitoires de l'article 7 de cette ordonnance.
4. En premier lieu et d'une part, aux termes de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1990, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Plus de la moitié du capital social et des droits de vote doit être détenue, directement ou par l'intermédiaire des sociétés mentionnées
au 4° ci-dessous, par des professionnels en exercice au sein de la société. (...) Dans l'hypothèse où l'une des conditions visées au présent article viendrait à ne plus être remplie, la société dispose d'un délai d'un an pour se mettre en conformité avec les dispositions de la présente loi. A défaut, tout intéressé peut demander en justice la dissolution de la société. Le tribunal peut accorder à la société un délai maximal de six mois pour régulariser la situation. La dissolution ne peut être prononcée si, au jour où il est statué sur le fond, cette régularisation a eu lieu. (...)". Aux termes de l'article 5-1 de la même loi : " Par dérogation au premier alinéa de l'article 5, plus de la moitié du capital social des sociétés d'exercice libéral peut aussi être détenue par des personnes physiques ou morales exerçant la profession constituant l'objet social ou par des sociétés de participations financières de professions libérales régies par le titre IV de la présente loi./ La majorité du capital social de la société d'exercice libéral ne peut être détenue par une société de participations financières régie par l'article 31-2 qu'à la condition que la majorité du capital et des droits de vote de la société de participations financières soit détenue par des professionnels exerçant la même profession que celle constituant l'objet social de la société d'exercice libéral. (...) ".
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 6223-8 du code de la santé publique, issu de la loi du 30 mai 2013, dans sa rédaction alors en vigueur : " I.-Le premier alinéa de l'article 5-1 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales n'est pas applicable aux sociétés d'exercice libéral de biologistes médicaux. / II.-Les sociétés d'exercice libéral de biologistes médicaux créées antérieurement à la date de promulgation de la loi n° 2013-442 du 30 mai 2013 portant réforme de la biologie médicale et qui, à cette date, ne respectent pas
le I du présent article ou le I de l'article 10 de la même loi conservent la faculté de bénéficier de la dérogation prévue à l'article 5-1 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 précitée. / La cession de leurs parts sociales ou actions se fait prioritairement au bénéfice des biologistes exerçant dans ces sociétés. Si ces derniers se trouvent dans l'incapacité d'acquérir les parts sociales ou les actions qui leur sont proposées, la cession peut avoir lieu au bénéfice de toute personne physique ou morale exerçant la profession de biologiste médical ou de toute société de participations financières de profession libérale de biologistes médicaux. Sous réserve du respect des seuils prévus en application de l'article 6 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 précitée, cette cession peut également avoir lieu au bénéfice d'une ou plusieurs personnes ne répondant pas aux conditions du premier alinéa ou des 1° et 5° de l'article 5 de la même loi. (...) ".
6. Il résulte des dispositions combinées précitées qu'un laboratoire de biologie médicale ne peut être régulièrement autorisé à fonctionner qu'à la condition que plus de la moitié de son capital social et de ses droits de vote soit détenue par des biologistes en exercice en son sein, sauf si à la date de l'entrée en vigueur de la loi du 30 mai 2013 il ne remplissait pas la seule condition tenant à la détention de la majorité du capital social. Dans tous les cas, plus de la moitié des droits de vote doit être détenue, dans les conditions fixées par l'article 5 de la loi
du 31 décembre 1990, par des biologistes en exercice au sein de ce laboratoire.
7. Il ressort des pièces du dossier que la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne a acquis, le 17 octobre 2013, l'ensemble des parts sociales de la
SELARL Laboratoire Chiche avec transmission universelle de patrimoine et dissolution de
la SELARL laboratoire Chiche, le médecin biologiste associé unique de la SELARL dissoute devenant concomitamment associé avec droit de vote et biologiste coresponsable au sein de la SELARL absorbante. À la date de la décision litigieuse du 30 octobre 2013,
la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne, qui conservait la faculté de bénéficier de la dérogation prévue à l'article 5-1 de la loi du 31 décembre 1990 en application de l'article L. 6223-8 précité du code de la santé publique, justifiait, notamment au regard de l'article 20 de ses statuts, de la possession par les biologistes en exercice au sein de ce laboratoire de plus de la moitié des droits de vote.
8. La SELARL Bio Fusion n'établit pas, par ailleurs, qu'à cette même date
la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne ne remplissait pas les autres conditions légales pour exploiter, dans le cadre de la dérogation dont elle bénéficiait, un laboratoire d'analyse médicale dans les sept sites ouverts au public, incluant celui de Castelsarrasin. À cet égard, elle ne peut utilement se prévaloir de la nullité de la cession intervenue le 17 octobre 2013, dont il n'est d'ailleurs pas établi qu'elle aurait fait l'objet d'une contestation devant le juge judiciaire compétent, dès lors que cette circonstance, à la supposer même établie, est sans incidence sur le contrôle porté par l'administration à la date à laquelle cette dernière a pris la décision litigieuse, alors au surplus que la possibilité d'une régularisation était ouverte à la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne par les dispositions précitées de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1990, contrairement à ce que soutient la société appelante. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de
l'article L. 6223-8 du code de la santé publique doit être écarté.
9. En deuxième lieu et ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges,
la SELARL Bio Fusion ne saurait utilement se prévaloir d'une note de service du chef de bureau " coopérations et contractualisations " du ministère des affaires sociales et de la santé qui est dépourvue de caractère réglementaire.
10. En troisième et dernier lieu, l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative que si cette dernière a été prise pour son application ou s'il en constitue la base légale. La décision du 30 octobre 2013 par laquelle la directrice générale de l'ARS a modifié l'agrément détenu par la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne ne constitue pas la base légale de la décision litigieuse, laquelle n'est pas davantage prise pour l'application de la décision portant modification de l'agrément. Par suite, le moyen tiré de ce que l'annulation par les premiers juges de la décision portant modification de l'agrément détenu par la SELARL priverait de base légale la décision litigieuse doit être écarté comme inopérant.
En ce qui concerne l'arrêté portant " dissolution de la SELARL laboratoire Chiche " :
11. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été développés aux
points 6, 7 et 8 ci-dessus, les moyens soulevés par la SELARL Bio Fusion au soutien de ses conclusions dirigées contre l'arrêté litigieux, lequel n'a d'ailleurs pour objet que de constater la dissolution de la SELARL Laboratoire Chiche, doivent être écartés.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la SELARL Bio Fusion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés des 30 octobre et 4 novembre 2013 portant modification de l'autorisation détenue par la SELARL Laboratoire de biologie médicale
Labo Gascogne et constatant la dissolution de la SELARL laboratoire Chiche.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est en tout état de cause pas partie perdante à l'instance, la somme que demande la SELARL Bio Fusion au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de
la SELARL Bio Fusion une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par
la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne et non compris dans les dépens.
15. Le syndicat des biologistes, intervenant en demande, n'étant pas, en cette qualité, partie à la présente instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne le paiement de la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Ces mêmes dispositions font également obstacle, pour les mêmes motifs aux conclusions présentées au même titre à son encontre par
la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne.
DÉCIDE :
Article 1er : L'intervention du syndicat des biologistes est admise.
Article 2 : La requête de la SELARL Bio Fusion est rejetée.
Article 3 : La SELARL Bio Fusion versera à la SELARL Laboratoire de biologie médicale
Labo Gascogne une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code
de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la SELARL Laboratoire de biologie médicale
Labo Gascogne est rejeté.
Article 5 : Les conclusions du syndicat des biologistes tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à SELARL Bio Fusion, au ministre des solidarités et de la santé, à la SELARL Laboratoire de biologie médicale Labo Gascogne et au syndicat
des biologistes.
Délibéré après l'audience du 6 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 décembre 2018.
Le rapporteur,
Didier B...
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX01828