Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 août 2016, M. C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2016 ;
2°) d'annuler la décision du 2 décembre 2015 confirmant les arrêtés des 29 et
30 septembre 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa demande dirigée contre la décision du 2 décembre 2015 est recevable dès lors que cette dernière rejette son recours gracieux adressé le 20 novembre 2015 par lettre recommandée avec avis de réception, lequel ne constituait pas une simple demande d'éclairage;
- l'arrêté du 29 septembre 2015 qui comporte une mention manuscrite d'abrogation dont l'auteur n'est pas identifié est entachée d'incompétence ;
- les arrêtés des 29 et 30 septembre 2015 sont dépourvus de motivation en méconnaissance de la loi du 11 juillet 1979 ;
- la décision du 2 décembre 2015 qui fait suite à son recours gracieux dirigé contre les arrêtés des 29 et 30 septembre 2015 lui fait grief et le recours contentieux qui vise cette décision doit être regardé comme tendant également à l'annulation desdits arrêtés ;
- les arrêtés des 29 et 30 septembre 2015 sont entachés d'une rétroactivité illégale ;
- l'arrêté du 20 juillet 2015 créateur de droits n'était pas illégal de sorte qu'il ne peut être réputé abrogé par les arrêtés contestés ni être retiré en application de la jurisprudence Ternon ;
- le recteur de l'académie de Poitiers a commis une erreur manifeste d'appréciation et ne peut utilement invoquer la circulaire n° 2014-080 du 17 juin 2014 relative aux modalités d'organisation de l'année de stage pour l'année scolaire 2014-2015 des lauréats des concours de recrutement des personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement public.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2017, le ministre de l'éducation nationale conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la demande de première instance était irrecevable dès lors que, contrairement à ce que soutient M.C..., il ne peut être regardé comme ayant formé un recours administratif à l'encontre des arrêtés du 29 septembre 2015 alors qu'il a seulement demandé dans sa lettre
du 20 novembre 2015 que lui soit clairement précisée sa situation administrative et professionnelle, sans contester la légalité de ces arrêtés ni en demander le retrait ; ainsi la lettre du 2 décembre 2015 constitue une réponse à sa demande d'explications qui ne présente pas le caractère d'une décision faisant grief susceptible de recours pour excès de pouvoir ;
- les moyens soulevés par M. C...à l'encontre des arrêtés du 29 septembre 2015 ne sont en tout état de cause pas fondés.
Par ordonnance du 6 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 6 novembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le décret n° 92-1189 du 6 novembre 1992 ;
- l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de M. Normand, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., nommé professeur de lycée professionnel stagiaire à compter
du 1er septembre 2014, à la suite de sa réussite au concours externe de recrutement des professeurs de lycée professionnel en vue de l'obtention du certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel (CAPLP), section lettres histoire et géographie, a été affecté pour l'année scolaire 2014-2015 à Chasseneuil (Charente), dans l'académie de Poitiers. Par arrêté
du 20 juillet 2015, il a été affecté à compter du 1er septembre 2015 et jusqu'au 31 août 2016 au lycée professionnel Bernard Palissy à Saintes (Charente-Maritime), dans la même académie, pour y effectuer un service hebdomadaire de dix-huit heures en lettres histoire-géographie dans le cadre d'une prolongation de son stage dans les mêmes conditions que le stage initial. Toutefois, à la suite de la réunion du jury d'examen de qualification professionnelle,
le 23 septembre 2015, chargé d'évaluer son stage 2014-2015, lequel a émis un avis défavorable à sa titularisation mais ayant proposé le renouvellement de son stage afin de lui permettre d'atteindre le niveau requis, le recteur de l'académie de Poitiers a, par deux arrêtés
du 29 septembre 2015, affecté M. C... en qualité de fonctionnaire enseignant stagiaire au lycée professionnel Bernard Palissy à Saintes pour un service hebdomadaire de dix-huit heures pour la période du 1er au 30 septembre 2015, d'une part, et, à compter du 1er octobre 2015 et jusqu'au 31 août 2016 pour une durée de neuf heures, d'autre part. M. C...relève appel du jugement du 15 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation du courrier du 2 décembre 2015 par lequel le recteur de l'académie de Poitiers a rejeté, selon lui, son recours formé à l'encontre des arrêtés du 29 septembre 2015.
2. Aux termes de l'article 10 du décret du 6 novembre 1992 relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel, dans sa rédaction applicable au litige : " Les candidats reçus aux concours prévus à l'article 4 et remplissant les conditions de nomination dans le corps sont nommés fonctionnaires stagiaires et affectés pour la durée du stage dans une académie par le ministre chargé de l'éducation. Les prolongations éventuelles du stage sont prononcées par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le stage est effectué. / Le stage a une durée d'un an. Au cours de leur stage, les professeurs stagiaires bénéficient d'une formation organisée, dans le cadre des orientations définies par l'État, par un établissement d'enseignement supérieur, visant l'acquisition des compétences nécessaires à l'exercice du métier. Cette formation alterne des périodes de mise en situation professionnelle dans un établissement scolaire et des périodes de formation au sein de l'établissement d'enseignement supérieur. Elle est accompagnée d'un tutorat et peut être adaptée pour tenir compte du parcours antérieur des professeurs stagiaires. / Les modalités du stage et les conditions de son évaluation par un jury sont arrêtées conjointement par le ministre chargé de l'éducation et par le ministre chargé de la fonction publique. / À l'issue du stage, la titularisation est prononcée par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le stage est accompli, sur proposition du jury. La titularisation confère le certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel./ Le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le stage a été effectué peut autoriser l'accomplissement d'une seconde année de stage. À l'issue de cette période, l'intéressé est soit titularisé par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle il a effectué cette seconde année, soit licencié, soit réintégré dans son grade d'origine ou dans son corps, cadre d'emplois ou emploi d'origine. ". En vertu de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires, un jury académique établit la liste des fonctionnaires stagiaires qu'il estime aptes à être titularisés. Pour les stagiaires qui effectue une première année de stage, l'avis défavorable à leur titularisation " doit être complété par un avis sur l'intérêt, au regard de l'aptitude professionnelle, d'autoriser le stagiaire à effectuer une seconde et dernière année de stage. ".
3. En premier lieu, il n'est pas contesté que le recteur de l'académie de Poitiers était compétent pour décider la prolongation de stage de M.C.... La circonstance que, sur une copie qu'il produit au dossier de première instance de l'arrêté du 29 septembre 2015 portant affectation du 1er octobre 2015 au 31 août 2016, ait été ajoutée, à sa demande du 30 septembre, une mention manuscrite selon laquelle " cet arrêté annule et remplace l'arrêté
du 20 juillet 2015 " est à cet égard sans incidence. Le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des arrêtés du 29 septembre 2015 doit en conséquence, être écarté.
4. En deuxième lieu, si la nomination dans un corps en tant que fonctionnaire stagiaire confère à son bénéficiaire le droit d'effectuer un stage dans la limite de la durée maximale prévue par les règlements qui lui sont applicables, elle ne lui confère aucun droit à être titularisé. Ainsi, d'une part, la décision refusant de le titulariser à l'issue du stage et celle renouvelant ce dernier n'a pour effet, ni de refuser à l'intéressé un avantage qui constituerait pour lui un droit ni, dès lors que le stage initial a été accompli dans la totalité de la durée prévue par la décision de nomination comme stagiaire, de retirer ou d'abroger une décision créatrice de droits. Il en est de même en l'occurrence de la décision modifiant les modalités du stage des professeurs de lycée professionnel et affectant un stagiaire à mi-temps en situation professionnelle conformément à son statut. Une telle décision n'est, dès lors, pas au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 alors en vigueur. Ainsi, le moyen tiré de ce que les arrêtés du 29 septembre 2005 seraient entachés d'un défaut de motivation ne peut qu'être écarté comme inopérant.
5. En troisième lieu, il résulte des dispositions citées au point 2 que l'évaluation des stages et la titularisation des professeurs de lycée professionnel intervient après avis du jury académique. Il ressort des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas contesté que ledit jury n'a en l'espèce pu être réuni que le 23 septembre 2015, soit après l'expiration du stage d'une durée d'une année auquel M. C...était astreint et que l'arrêté du 29 septembre 2015 décidant son redoublement n'a pu ainsi intervenir que postérieurement. En prononçant le renouvellement de son stage pour une année à compter du 1er septembre 2015, le recteur de l'académie de Poitiers a régularisé la situation de cet agent notamment pour la période du 1er au 30 septembre 2015 durant laquelle il a confirmé son affectation au lycée professionnel Bernard Palissy à Saintes afin d'y accomplir un service hebdomadaire de dix-huit heures. Ce faisant, le recteur de l'académie de Poitiers n'a pas pris une décision entachée d'une rétroactivité illégale. Le second arrêté contesté du 29 septembre 2015, qui fixe quant à lui un service hebdomadaire d'enseignement de neuf heures pour la période du 1er octobre 2015 au 31 août 2016, n'a pas de caractère rétroactif. Le moyen tiré de la méconnaissance du principe de non rétroactivité des actes administratifs doit par suite être écarté.
6. En quatrième lieu, un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. M. C...ne peut dès lors utilement se prévaloir, ainsi qu'il a été dit au point 4, d'aucun droit à être titularisé, ni à ce que la deuxième année de stage qu'il a été autorisé à accomplir s'effectue en situation professionnelle à temps plein, selon les modalités initialement définies par l'arrêté du 20 juillet 2015. Ainsi, le moyen tiré de ce que les arrêtés
du 29 septembre 2015 contestés auraient procédé irrégulièrement au retrait ou à l'abrogation d'une décision créatrice de droits est inopérant.
7. En cinquième et dernier lieu, M. C...n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'en renouvelant son stage et en l'affectant à compter du 1er octobre 2015 en situation de responsabilité professionnelle à mi-temps, soit pour neuf heures d'enseignement dans un établissement, afin de lui permettre de suivre pendant l'autre mi-temps les formations dispensées par l'école supérieure du professorat et de l'éducation (ESPE), correspondant au parcours dit n° 4 de formation adaptée des enseignants stagiaires, le recteur de l'académie de Poitiers aurait commis une erreur manifeste d'appréciation. En outre, cette décision devant être prise au vu de la manière de servir de l'agent durant son stage, l'appelant ne peut utilement faire état de ce qu'il a donné entière satisfaction lorsqu'il était agent contractuel pour le rectorat de l'académie de Poitiers.
8. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, que M. C...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Délibéré après l'audience du 9 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme Aurélie Chauvin, premier conseiller.
Lu en audience publique le 20 novembre 2018.
Le rapporteur,
Aurélie B...
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 16BX02748