Par une requête et un mémoire enregistrés le 11 mai 2020, M. F..., représenté par Me H..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler les arrêtés du 26 décembre 2019 du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 72 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à Me H... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la décision portant transfert aux autorités italiennes :
- elle a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée. Le préfet n'a pas indiqué les raisons pour lesquelles il ne faisait pas usage de la clause discrétionnaire ;
- elle méconnaît les articles 4, 5, 18, 26 et 29 du règlement (UE) n° 604/2013, ainsi que les articles 25 § 4 et 29 §1 du règlement (UE) n° 603/2013 ;
- le préfet n'a pas pris en compte ses observations ;
- le préfet n'a pas justifié que l'Italie aurait été saisie d'une demande sur le fondement de l'article 18.1 du règlement précité, ni que l'Italie aurait donné son accord ;
- il n'a pas procédé à un examen suffisant de sa situation ;
- la décision est entachée d'erreur d'appréciation au regard de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 et de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que l'Italie connaît une situation de défaillance systémique ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 et de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu des conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Italie et de sa situation particulière qui justifiait qu'il bénéficie de la clause discrétionnaire permettant l'examen de sa demande d'asile en France.
S'agissant de la décision portant assignation à résidence :
- elle a été signée par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est privée de base légale du fait de l'illégalité de l'arrêté de transfert ;
- l'assignation à résidence ne présente pas un caractère nécessaire et les obligations prescrites par l'arrêté portent une atteinte excessive à sa liberté d'aller et venir.
Par un courrier enregistré le 25 mai 2020, accompagné de pièces justificatives, le préfet de la Haute-Garonne a informé la cour que la décision de transfert en litige a fait l'objet d'une décision de prolongation.
M. F... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par décision du 24 avril 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du
26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats-membres par un ressortissant d'un pays tiers ou un apatride ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013 relatif à la création d'Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace du règlement (UE) n° 604/2013 ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme B... A... a été entendu au cours de l'audience publique
Considérant ce qui suit :
1. M. F..., ressortissant nigérian né en 1998, déclare être entré en France le 27 avril 2019 et a formalisé une demande d'asile le 13 juin 2019 auprès des services de la préfecture de la Haute-Garonne. Le relevé de ses empreintes digitales ayant révélé que l'intéressé avait déjà sollicité l'asile en Italie le 18 janvier 2016, les autorités de ce pays ont été saisies et ont explicitement accepté de le reprendre en charge. Par un premier arrêté du 18 décembre 2019, le préfet de la Haute-Garonne a donc décidé de le transférer aux autorités italiennes et par un second arrêté édicté le même jour, il a décidé de l'assigner à résidence dans le département. M. F... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler ces deux arrêtés et relève appel du jugement du 26 décembre 2019, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse, après avoir admis
M. F... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert
2. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé, pour le préfet de la Haute-Garonne, par Mme G... D..., laquelle exerce la fonction de directrice des migrations et de l'intégration au sein de cette préfecture et bénéficiait d'une délégation de signature en vertu d'un arrêté du 11 décembre 2019, régulièrement publié le 12 décembre 2019 au recueil des actes administratifs spécial n° 31-2019-323 de la préfecture de la Haute-Garonne. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte ne peut donc qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. ".
4. La décision de transfert en litige vise la convention européenne des droits de l'homme, notamment ses articles 3 et 8, le règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et notamment son article 18 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle indique que la consultation du fichier " Eurodac " a révélé que M. F... avait demandé l'asile en Italie et que les autorités de ce pays, saisies sur le fondement de l'article 18 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ont donné leur accord explicite à sa reprise en charge le 22 juillet 2019. Par ailleurs, elle énonce sa situation administrative, familiale, les observations qu'il a faites valoir au cours de son entretien individuel le
13 juin 2019, notamment " le certificat médical du 27 novembre 2019 " prescrivant un traitement oculaire et enfin, elle comporte un examen de sa situation au regard, notamment de l'article 17.1 du règlement précité. Dès lors, la décision litigieuse est suffisamment motivée.
5. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient M. F..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas envisagé la possibilité, prévue par les dispositions de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013, d'examiner sa demande d'asile, relevant de la compétence d'un autre Etat, en considération d'éléments tenant à sa situation personnelle. Par suite, la décision en litige n'est pas entachée d'un défaut d'examen personnel et circonstancié de sa situation.
6. En quatrième lieu, M. F... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés de la méconnaissance des articles 4, 5, 18, 26 et 29 du règlement (UE) n° 604/2013. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Toulouse.
7. En cinquième lieu, le premier juge a justement écarté comme inopérant à l'encontre de la décision de transfert le moyen tiré de la méconnaissance des obligations d'informations sur la protection des données personnelles exigées par le paragraphe 1 de l'article 29 du règlement (CE) n° 613/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 relatif à la création d'EURODAC, ainsi que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 25 §4 de ce même règlement relatif à l'exécution de la comparaison et transmission des résultats des données dactyloscopiques. Le requérant n'apporte aucun élément nouveau en appel pour critiquer le raisonnement retenu, qu'il y a donc lieu d'adopter.
8. En sixième lieu, d'une part, aux termes de l'article 18 du règlement n°604/2013 : " 1. L'État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : (...) / d) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le ressortissant de pays tiers ou l'apatride dont la demande a été rejetée et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre ". L'article 23 du même règlement prévoit que " 1. Lorsqu'un État membre auprès duquel une personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu'un autre État membre est responsable conformément à l'article 20, paragraphe 5, et à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre État membre aux fins de reprise en charge de cette personne. 2. Une requête aux fins de reprise en charge est formulée aussi rapidement que possible et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac (" hit "), en vertu de l'article 9, paragraphe 5, du règlement (UE) n° 603/2013. (...) / 3. Lorsque la requête aux fins de reprise en charge n'est pas formulée dans les délais fixés au paragraphe 2, c'est l'État membre auprès duquel la nouvelle demande est introduite qui est responsable de l'examen de la demande de protection internationale ". L'article 25 de ce même règlement prévoit que : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée ".
9. D'autre part, aux termes de l'article 15 du règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié par le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 : " 1. Les requêtes et les réponses, ainsi que toutes les correspondances écrites entre États membres visant à l'application du règlement (UE) n° 604/2013, sont, autant que possible, transmises via le réseau de communication électronique " DubliNet " établi au titre II du présent règlement. (...) / 2. Toute requête, réponse ou correspondance émanant d'un point d'accès national visé à l'article 19 est réputée authentique. / 3. L'accusé de réception émis par le système fait foi de la transmission et de la date et de l'heure de réception de la requête ou de la réponse ". Selon l'article 19 de ce même règlement : " 1. Chaque Etat membre dispose d'un unique point d'accès national identifié. / 2. Les points d'accès nationaux sont responsables du traitement des données entrantes et de la transmission des données sortantes. / 3. Les points d'accès nationaux sont responsables de l'émission d'un accusé de réception pour toute transmission entrante ".
10. La décision de transfert d'un demandeur d'asile vers l'Etat membre responsable au vu de la consultation du fichier Eurodac ne peut être prise qu'après l'acceptation de la reprise en charge par l'Etat requis, saisi dans le délai de deux mois à compter de la réception du résultat de cette consultation. A cet égard, s'il est nécessaire que les autorités françaises aient effectivement saisi les autorités de l'autre Etat avant l'expiration de ce délai de deux mois et que les autorités de cet Etat aient, implicitement ou explicitement, accepté cette demande, la légalité de la décision de transfert prise par le préfet ne dépend pas du point de savoir si les services de la préfecture disposaient matériellement, à la date de la décision du préfet, des pièces justifiant de l'accomplissement de ces démarches.
11. Le juge administratif, statuant sur des conclusions dirigées contre la décision de transfert et saisi d'un moyen en ce sens, prononce l'annulation de la décision de transfert si elle a été prise alors que l'Etat requis n'a pas été saisi dans le délai de deux mois ou sans qu'ait été obtenue l'acceptation par cet Etat de la reprise en charge de l'intéressé. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur ce point au vu de l'ensemble des éléments versés au dossier par les parties. S'il peut écarter des allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, il ne saurait exiger de l'auteur du recours que ce dernier apporte la preuve des faits qu'il avance.
12. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir été informé le 13 juin 2019 que le passage des empreintes de M. F... dans le fichier Eurodac avait révélé que celles-ci avaient été déjà relevées en Italie, le préfet la Haute-Garonne a adressé le 9 juillet 2019, au point unique d'accès national établi auprès du ministre de l'intérieur, une demande de reprise en charge de M. F... à transmettre à l'Italie au moyen du réseau de communication
" DubliNet ". Il ressort des pièces produites par le préfet de la Haute-Garonne en première instance que les autorités italiennes ont donné leur accord à la reprise en charge de
M. F... le 22 juillet 2019. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'est pas établi que les autorités italiennes n'auraient pas été saisies et qu'elles n'auraient pas donné leur accord.
13. En septième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n°604/2013 : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. / Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III (...), l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable. ".
14. En vertu du 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 susvisé : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. Le cas échéant, il en informe, au moyen du réseau de communication électronique " DubliNet " établi au titre de l'article 18 du règlement (CE) no 1560/2003, l'État membre antérieurement responsable, l'État membre menant une procédure de détermination de l'État membre responsable ou celui qui a été requis aux fins de prise en charge ou de reprise en charge. L'État membre qui devient responsable en application du présent paragraphe l'indique immédiatement dans Eurodac conformément au règlement (UE) no 603/2013 en ajoutant la date à laquelle la décision d'examiner la demande a été prise. 2. L'État membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'État membre responsable, ou l'État membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre État membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre État membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit. ". Il résulte de ces dispositions que la faculté laissée à chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. Cette possibilité doit en particulier être mise en oeuvre lorsqu'il y a des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé courra, dans le pays de destination, un risque réel d'être soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
15. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, l'étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la fin de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. (...) / Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat. ". Et aux termes de l'article L. 742-7 de ce même code : " La procédure de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile ne peut être engagée dans le cas de défaillances systémiques dans l'Etat considéré mentionné au 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013. ".
16. Si les rapports d'information émanant d'organisations non gouvernementales et les articles de presse et les documents versés au dossier font état des difficultés rencontrées par l'Italie pour faire face à l'afflux massif de migrants, ils ne suffisent pas à établir l'existence de défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil de ces derniers. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande d'asile de M. F... ne serait pas traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Par ailleurs, si M. F... soutient être exposé à un risque de refoulement dès son arrivée sur le territoire italien au motif que sa demande d'asile aurait déjà été rejetée dans ce pays et qu'il risque de se voir priver de toute possibilité d'hébergement par les autorités italiennes, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existerait, à la date de l'arrêté, un risque sérieux et avéré de craindre que la situation du requérant ne soit pas réexaminée en Italie selon des modalités conformes aux garanties exigées par le respect du droit d'asile ou que l'intéressé y soit exposé à des traitements présentant un caractère inhumain ou dégradant. Enfin, si M. F... fait valoir ses problèmes de santé, il n'a cependant fourni qu'une ordonnance d'un médecin généraliste lui prescrivant un traitement ophtalmologique pour une durée d'un mois. Cette production n'est pas à elle-seule de nature à laisser présumer que l'état de santé du requérant présenterait une gravité particulière susceptible de faire obstacle à son transfert ou que l'intéressé ne pourrait pas accéder à un traitement médical adapté en Italie. Dans ces conditions, M. F... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Haute-Garonne aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de le faire bénéficier de la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 du règlement n° 604/2013.
Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté portant assignation à résidence :
17. M. F... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance et tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, de l'insuffisance de motivation, de ce que l'arrêté contesté serait dépourvu de base légale en raison de l'illégalité de la mesure de transfert sur laquelle il se fonde et d'une atteinte à sa liberté d'aller et venir. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Toulouse
18. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. F..., qui faisait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne pouvait quitter immédiatement le territoire français alors que son éloignement demeurait effectivement une perspective raisonnable, d'autant que les autorités italiennes avaient accepté explicitement la reprise en charge de l'intéressé. Ainsi, contrairement à ce qui est allégué, il était au nombre des étrangers visés par L. 561-2 du même code, à l'égard desquels l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le magistrat désigné par le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des arrêtés du 18 décembre 2019 du préfet de la Haute-Garonne décidant son transfert et l'assignant à résidence. Ses conclusions en injonction et celles présentées au titre de ses frais d'instance doivent être rejetées par voie de conséquence.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... F.... Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme E... I..., présidente-assesseure,
Mme B... A..., premier conseiller,
Lu en audience publique, le 16 novembre 2020.
Le rapporteur,
Déborah A...Le président,
Didier ARTUSLe greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°20BX01576 2