Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 juillet 2020, M. C... représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 2000040 du tribunal administratif ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 26 juillet 2019 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de lui délivrer le titre de séjour sollicité sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du délai de 45 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ; à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient, en ce qui concerne le refus de titre de séjour, que :
- il porte atteinte à son droit à une vie privée et familiale garanti par le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il vit en France depuis 2014 ; il y a mené des études sérieuses couronnées par l'obtention du baccalauréat en 2018 ; il s'est inscrit pour préparer un diplôme de brevet de technicien supérieur ; il a travaillé en 2018 et 2019 comme ouvrier agricole ; il justifie d'une réelle insertion dans la société française ;
- contrairement à ce qu'affirme la préfète dans la décision en litige, les documents d'état civil qu'il a produits à l'appui de sa demande sont authentiques.
Il soutient, en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français, que :
- cette décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il n'a plus de nouvelle de son père qui a disparu dans son pays d'origine en 2013.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2021, la préfète de la Vienne conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que tous les moyens de la requête doivent être écartés comme infondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau de l'aide juridictionnelle du 16 juillet 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. E... B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... est un ressortissant guinéen qui est entré irrégulièrement en France en octobre 2014. Il a bénéficié d'un placement auprès du service d'aide sociale à l'enfance du département de la Vienne par décision du juge pour enfants du 16 décembre 2014, de l'ouverture d'une tutelle par ordonnance du 4 février 2015 et d'un contrat " jeune majeur " signé le 21 juin 2016 avec le département. Le 27 novembre 2017, M. C... a déposé une demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " au titre des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a bénéficié de récépissés jusqu'à ce que la préfète de la Vienne décide, par arrêté du 26 juillet 2019, de rejeter sa demande de titre et d'assortir son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et de la désignation du pays de renvoi. M. C... relève appel du jugement rendu le 2 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 26 juillet 2019.
Sur le refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Pour l'application des stipulations précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
3. Pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité par M. C... sur le fondement des dispositions précitées, la préfète de la Vienne a, d'une part, retenu que les documents d'état civil produits à l'appui de la demande n'étaient pas authentiques et, d'autre part, que l'intéressé n'était pas suffisamment inséré dans la société française, faute de justifier de liens personnels ou familiaux présentant un caractère stable, intense et ancien.
4. En premier lieu, aux termes de l'article R. 311-2-2 du même code : " L'étranger qui demande la délivrance (...) d'un titre de séjour présente les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité (...) ". Aux termes de l'article L. 111-6 de ce code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".
5. L'article 47 du code civil pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays. Il résulte également de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis.
6. A l'appui de sa demande de titre de séjour, M. C..., qui soutient être né le 22 juin 1998, a présenté une carte nationale d'identité guinéenne. Pour l'instruction de cette demande, la préfète a consulté le fichier Visabio dont il est ressorti, après contrôle des empreintes, que M. C... y était enregistré comme étant né le 22 juin 1996, ce qui implique qu'il n'était pas mineur lors de sa prise en charge en décembre 2014 par les services de l'aide sociale à l'enfance. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la carte d'identité guinéenne fournie par M. C... lors de sa demande de titre est le résultat d'une contrefaçon d'une faible qualité comme l'a notamment estimé la direction de la police aux frontières saisie par le préfet pour examen de cette pièce. M. C... ne produit de son côté aucun élément permettant de mettre en doute les conclusions du rapport de la direction de la police aux frontières. Quant à la carte consulaire produite par M. C..., il s'agit d'un document à usage interne des services de l'administration guinéenne qui ne constitue pas un acte d'état civil. Enfin, pas plus en appel qu'en première instance, M. C... n'a produit d'autres documents permettant de connaître son état civil comme le lui imposent les dispositions précitées de l'article R. 311-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, la préfète a pu, sans commettre d'erreur de fait, estimer que M. C... ne justifiait pas de son identité.
7. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. C... séjourne en France depuis la fin de l'année 2014 au sein d'une famille d'accueil. Il y a suivi des études en lycée, couronnées par son succès au baccalauréat en 2018, suivies d'une inscription en vue de préparer un B.T.S. en " conception et réalisation de systèmes automatiques ". Pour établir son intégration en France, M. C... produit également des attestations de tiers et des documents montrant qu'il a travaillé au cours des étés 2018 et 2019. Toutefois et ainsi qu'il a été dit, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... était mineur lors de son entrée en France comme il l'a soutenu alors, ce qui lui a permis de bénéficier indûment d'une prise en charge par le service d'aide sociale à l'enfance et de l'ouverture d'une tutelle. Les études que M. C... a menées ne lui ouvrent pas un droit à rester sur le territoire français où il ne possède pas d'attaches familiales alors qu'il n'est pas contesté que sa mère réside dans son pays d'origine où lui-même a vécu l'essentiel de son existence. Dans ces conditions, la préfète n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit du requérant à une vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. Compte tenu de ce qui vient d'être dit, la mesure d'éloignement en litige n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause, le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 20BX02199 est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... C... et au ministre de l'intérieur. Copie pour information en sera délivrée à la préfète de la Vienne.
Délibéré après l'audience du 23 mars 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
M. E... B..., président-assesseur,
Mme D... F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mai 2021.
La présidente,
Elisabeth Jayat
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 20BX02199 2