Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 février 2018, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 19 décembre 2018 ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, pour un montant total de 41 689 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a commis une erreur de fait et une erreur de droit en jugeant qu'il n'était pas implanté en zone franche urbaine au motif qu'il ne disposait pas en propre d'un cabinet dès lors qu'il exerçait son activité au sein de la SCM " SOS Médecins Rive Droite " ;
- il justifie d'une implantation matérielle en zone franche urbaine dès lors qu'il y dispose d'un local mis à disposition par la SCM en contrepartie du versement de redevances et qu'il paye en son nom la cotisation foncière des entreprises et la quote-part de la taxe foncière pour la partie des locaux qui sont mis à la disposition de son cabinet individuel ; il dispose en ces lieux de tous les moyens lui permettant d'exercer son activité dont un lit de consultation, du matériel informatique, un bureau, des fournitures diverses et téléphones ;
- l'article 44 octies A du code général des impôts retient l'implantation en zone franche urbaine au regard de l'activité, sans considération du titre d'occupation du contribuable exerçant son activité dans cette implantation alors au demeurant que la SCM loue elle-même les locaux à la SCI CLEMINVEST dont il est également associé ;
- il résulte de sa comptabilité, sans que cela ne soit contesté par l'administration, que plus de 25 % de son chiffre d'affaires est réalisé auprès de clients situés en zone franche urbaine ;
- l'administration a admis l'application du régime de faveur des zones franches urbaines pour des médecins exerçant leurs activités dans des conditions strictement identiques ;
- le tribunal administratif a commis une erreur manifeste d'appréciation en jugeant qu'il ne remplissait pas les conditions légales pour bénéficier de l'exonération prévue à l'article 44 octies A du code général des impôts.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles ;
- la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ;
- la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., médecin généraliste, exerce son activité depuis juillet 2009, au sein de la société civile de moyens (SCM) " SOS Médecins Rive Droite " implantée dans la zone franche urbaine de Cenon, dont il détient 20 parts. Il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause, au titre des années 2013 et 2014, le bénéfice du régime d'exonération prévu par les dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts en faveur des contribuables créant ou exerçant une activité dans une zone franche urbaine (ZFU). M. D... a formé contre les suppléments d'impôt sur le revenu résultant de ce contrôle une réclamation qui a été rejetée le 18 novembre 2016. Il relève appel du jugement du 19 décembre 2018, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, pour un montant total de 41 689 euros.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 44 octies A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " I.-Les contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2014, créent des activités dans les zones franches urbaines (...) sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui y exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l'une de ces zones. (...). / Lorsque l'activité non sédentaire d'un contribuable est implantée dans une zone franche urbaine mais est exercée en tout ou partie en dehors d'une telle zone, l'exonération s'applique si ce contribuable emploie au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité, ou si ce contribuable réalise au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines. (...). ".
3. Il résulte de l'instruction que l'activité de M. D... comporte, d'une part, la réalisation de consultations sur place, selon un système de garde auquel participent les autres médecins associés, d'autre part, de nombreuses visites de patients à domicile. Par suite, l'activité du requérant présente un caractère non sédentaire au sens des dispositions précitées de l'article 44 octies A du code général des impôts. L'intéressé peut se prévaloir du dispositif fiscal de faveur prévu par les dispositions précitées, sous réserve de justifier, d'une part, que son activité était réellement implantée dans une zone franche urbaine et, d'autre part, qu'il employait au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent ou qu'il réalisait au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans une telle zone.
4. M. D... exerce son activité professionnelle de médecin généraliste dans le cadre de la SCM " SOS Médecins Rive droite " dont les locaux sont situés au 19 avenue Georges Clémenceau à Cenon (33150) dans l'une des ZFU définies par la loi du 4 février 1995 et dont la liste figure en annexe à la loi du 14 novembre 1996. Ces locaux comportent un cabinet de consultation loué par la SCM " SOS Médecins Rive droite " laquelle emploie une personne à temps plein, chargée de diverses tâches administratives. M. D... soutient sans être valablement contredit, disposer d'une implantation matérielle et de moyens d'exploitation propres et notamment d'un cabinet individuel, meublé et équipé, sans partage avec les autres médecins pour l'exercice de son activité au sein des locaux mis à sa disposition par la SCM et que toute la partie administrative de son activité comportant notamment les correspondances, les liaisons avec les administrations et les organismes de santé ainsi que l'établissement des plannings était gérée dans les locaux situés en ZFU. Par conséquent, et alors même que son activité est exercée dans le cadre d'une société civile de moyens et qu'il est par ailleurs associé d'une autre SCM chargée de la gestion des appels téléphoniques, M. D... doit être regardé comme justifiant d'une implantation réelle de son activité en zone franche urbaine. M. D... qui produit les relevés d'activité globaux et ceux relatifs aux actes pratiquées en ZFU des années 2013 et 2014, reprenant la liste des visites et consultations avec l'indication de l'adresse des patients ainsi que l'analyse du relevé de ses honoraires, issu du Système National Inter Régime (SNIR), soutient remplir la condition tendant à la réalisation d'au moins 25 % du chiffre d'affaires auprès de patients situés dans la zone franche urbaine, ce que l'administration fiscale ne conteste pas. Dès lors, il était éligible à l'exonération prévue par les dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux, a refusé de prononcer la décharge en droits et en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013 et 2014.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au bénéfice de M. D... en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°°1700073 du 19 décembre 2018 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.
Article 2 : M. D... est déchargé, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, pour un montant total de 41 689 euros.
Article 3 : L'Etat versera à M. D... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal sud-ouest
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme E... A..., présidente,
M. Frédéric Faïck, président assesseur,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, premier conseiller,
Rendu public par mise à la disposition au greffe le 15 décembre 2020.
La présidente,
Elisabeth A... La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX00601