Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2013, et un mémoire, enregistré le 24 mars 2014, la communauté d'agglomération du Grand Guéret, venant aux droits de la communauté de communes de Guéret Saint-Vaury, représentée par Me B...et MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 mai 2013 du tribunal administratif de Limoges ;
2°) de confirmer que les pénalités de retard appliquées à la société nouvelle d'équipements électriques (SNEE) étaient fondées et qu'aucun intérêt moratoire n'était dû ou, à titre subsidiaire, de limiter le montant des intérêts moratoires sur la base du constat que seul trois jours de retard peuvent être justifiés ;
3°) à titre subsidiaire en cas de condamnation, d'ordonner que la SARL Brochet-Lajus-Pueyo, M. L...H..., M. I...N..., la SARL Sigma Ingénierie, M. K...F..., M. K...A..., M. C...J...ainsi que la SELARL Gallerand - Ribaudeau - G...soient condamnés solidairement ou qui d'entre eux le mieux devra la garantir à hauteur de l'intégralité des sommes qui seraient mises à sa charge ;
4°) à titre infiniment subsidiaire en cas de condamnation, d'ordonner que la SARL Brochet-Lajus-Pueyo, la SELARL Gallerand - Ribaudeau -G..., la SARL Sigma Ingénierie, M. K...F..., M. K...A...et M. C...J...soient condamnés solidairement à hauteur de l'intégralité des sommes qui seraient mises à sa charge ;
5°) de mettre à la charge de la société nouvelle d'équipements électriques la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
..........................................................................................................
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code des marchés publics ;
- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 modifiée relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée ;
- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Henri de Philip de Laborie,
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant la communauté d'agglomération du Grand Guéret, de MeE..., représentant la société Nouvelle d'Equipements Electriques, et de MeM..., représentant M.H..., M. A...et l'agence architectes associés Gallerand-Ribeaudeau-G....
Une note en délibéré a été enregistrée pour la communauté d'agglomération du Grand Guéret.
Considérant ce qui suit :
1. En octobre 2006, la communauté de communes de Guéret Saint Vaury a lancé une consultation pour la construction d'une bibliothèque multimédia intercommunale sur la commune de Guéret. La maîtrise d'oeuvre de cette opération de construction a été confiée au groupement de personnes conjoints composé de la SARL Brochet-Lajus-Peyo, MM.G..., H..., N..., F..., A..., J...et la SARL Sigma Ingénierie. Le lot n° 17 relatif à des travaux d'électricité a été attribué à la société Nouvelle d'Equipements Electriques (SNEE). La communauté d'agglomération du Grand Guéret fait appel du jugement du 30 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Limoges a supprimé les pénalités de retard mises à la charge de la société Nouvelle d'Equipements Electriques (SNEE) et l'a condamnée à verser à cette société la somme de trente-deux mille six cent soixante treize euros et neuf centimes (32 673,09 euros), assortie des intérêts moratoires au taux applicable aux marchés publics à compter du 18 mars 2011 au titre du solde du lot n° 17 du marché relatif à la construction d'une bibliothèque multimédia intercommunale.
Sur les pénalités de retard infligées à la SNEE :
2. Aux termes de l'article 20 du cahier des clauses administratives générales : " Pénalités, primes et retenues : 20.1. En cas de retard dans l'exécution des travaux, qu'il s'agisse de l'ensemble du marché ou d'une tranche pour laquelle un délai d'exécution partiel ou une date limite a été fixé, il est appliqué, sauf stipulation différente du CCAP, une pénalité journalière (...). Les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation du retard par le maître d'oeuvre. Dans le cas de résiliation, les pénalités sont appliquées jusqu'au jour inclus de la notification de la résiliation (...). Les dispositions des deux alinéas qui précèdent sont applicables aux pénalités éventuellement prévues par le CCAP pour le cas de retard dans la réalisation de certains ouvrages, parties d'ouvrages ou ensembles de prestations faisant l'objet de délais partiels ou particuliers ou de dates limites fixés dans le marché " ; qu'aux termes de l'article 4.3.1 du CCAP du marché en cause : " (...) en dérogation à l'article 20.1 du CCAG-Travaux, l'entrepreneur subira par jour calendaire de retard dans l'achèvement des travaux, une pénalité fixée comme suit : /- Pour chaque jour calendaire de retard : 1/1000 du montant du marché, y compris les avenants éventuels, sans être inférieure à 150 euros HT" ;
3. En vertu de l'acte d'engagement signé le 9 juillet 2007, le délai global d'exécution du marché était fixé, hors période de préparation, à dix-huit mois. L'ordre de service n° 2 notifié à la SNEE indique que la date de début des travaux est le 1er avril 2008 et que leur date de fin est le 27 octobre 2009. La société SNEE, qui a signé deux avenants à son contrat, n'a émis aucune réserve sur le délai d'exécution du marché et ces avenants ne prévoient aucune clause relative à la modification du délai d'exécution du marché ou à la non-application des pénalités de retard. De même, les travaux supplémentaires demandés à la SNEE n'ont pas fait l'objet d'un délai supplémentaire ou d'une prolongation de délai. En raison des intempéries survenues pendant soixante-cinq jours ouvrés à la fin de l'année 2009, le bureau d'études membre du groupement de maîtrise d'oeuvre a reporté au 5 février 2010 la date de livraison des travaux pour l'ensemble des lots du marché. Compte tenu des répercussions du retard de certains corps d'état sur l'activité des autres, il a ensuite reporté au 5 mai 2010 la date de livraison des lots techniques, incluant le lot n° 17. Dans un courrier adressé le 17 novembre 2010 à la SNEE, le bureau d'études relève que les travaux prévus au titre du lot n° 17 n'ont pu être livrés que le 15 juin 2010, soit quarante-et-un jours après l'échéance contractuelle du 5 mai 2010, mais que, compte tenu des intempéries constatées en 2010, seuls dix jours de retard devaient être retenus à l'encontre de la société et donner lieu à pénalités. Il résulte toutefois de l'instruction que ni la communauté d'agglomération du Grand Guéret ni son maître d'oeuvre ne produise aucun élément ou compte-rendu établissant que les retards constatés dans le planning d'exécution des travaux seraient personnellement imputables à la société SNEE. Dans ces conditions et ainsi que l'ont retenu les premiers juges, la requérante ne justifie pas que soient appliqués dix jours de pénalités de retard contractuelles à la société SNEE.
Sur les intérêts moratoires :
4. Aux termes de l'article 98 du code des marchés publics dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Le délai global de paiement d'un marché public ne peut excéder 45 jours.(...) / Le dépassement du délai de paiement ouvre de plein droit et sans autre formalité, pour le titulaire du marché ou le sous-traitant, le bénéfice d'intérêts moratoires, à compter du jour suivant l'expiration du délai. / Un décret précise les modalités d'application du présent article ". Il résulte de ces dispositions que le défaut de mandatement du solde d'un marché dans les délais prévus par l'article 98 du code des marchés publics fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire, des intérêts moratoires contractuels. Les délais courent à partir de la date à laquelle le solde du marché aurait dû être établi par le maître d'ouvrage. Il n'en va autrement, sans préjudice des stipulations du marché, que lorsque le retard dans l'établissement du solde est imputable au titulaire du marché, le point de départ de ces intérêts étant alors fixé à la date à laquelle le juge est saisi en vue du règlement du litige.
5. Aux termes de l'article 13 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de travaux : " (...) 13-32 : Le projet de décompte final est remis au maître d'oeuvre dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux telle qu'elle est prévue au 3 de l'article 41, ce délai étant réduit à quinze jours pour les marchés dont le délai d'exécution n'excède pas trois mois. Toutefois, s'il est fait application des dispositions du 5 de l'article 41, la date du procès-verbal constatant l'exécution des prestations complémentaires est substituée à la date de notification de la décision de réception des travaux comme point de départ des délais ci-dessus (...) 13-34 : Le projet de décompte final établi par l'entrepreneur est accepté ou rectifié par le maître d'oeuvre ; il devient alors le décompte final (...) 13-41 : Le maître d'oeuvre établit le décompte général (...) 13-42 : Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service (...) : quarante-cinq jours après la date de remise du projet de décompte final ; (...) ; qu'aux termes du 5 de l'article 41 du même cahier des clauses administratives générales : " S'il apparaît que certaines prestations prévues au marché et devant encore donner lieu à règlement n'ont pas été exécutées, la personne responsable du marché peut décider de prononcer la réception, sous réserve que l'entrepreneur s'engage à exécuter ces prestations dans un délai qui n'excède pas trois mois. La constatation de l'exécution de ces prestations doit donner lieu à un procès-verbal dressé dans les mêmes conditions que le procès-verbal des opérations préalables à la réception ".
6. Il résulte des stipulations précitées qu'en cas de réception avec réserves, la procédure d'élaboration du décompte général prévue par l'article 13 du cahier des clauses administratives générales ne peut être engagée avant l'intervention du procès-verbal constatant la levée des réserves ou, le cas échéant, l'absence de levée de ces réserves, dans le délai fixé par le maître d'ouvrage pour y procéder. Le maître d'ouvrage dispose d'un délai de quarante-cinq jours à compter de la remise du projet de décompte final par l'entreprise pour lui adresser le décompte général. En l'absence de décompte général à l'expiration de ce délai, le maître d'ouvrage est tenu de mandater le solde du marché avant l'expiration d'un nouveau délai de quarante-cinq jours.
7. Il est constant que le procès-verbal constatant la levée des réserves notifié à la SNEE le 9 mai 2011 a été établi le 6 décembre 2010. La SNEE ne saurait sérieusement se prévaloir de l'accusé de réception du décompte final notifié le 16 décembre 2010 à M. O...(P...) qui n'est pas membre du groupement conjoint de maitrise d'oeuvre alors qu'il résulte de l'instruction que ce décompte final a été reçu par le maître d'oeuvre le 14 mars 2011. D'autre part, le décompte général a été notifié à la SNEE par ordre de service adressé par courrier le 27 avril 2011 et réceptionné par cette société le 2 mai 2011, soit quarante-huit jours après la réception du décompte final par le maître d'oeuvre alors qu'en application de l'article 13 précité du CCAG, ladite notification devait intervenir au plus tard quarante-cinq jours après cette réception. Par suite, la communauté de communes est fondée à soutenir que le montant des intérêts moratoires dus à la SNEE doit être ramené à trois jours de retard, appliqué au solde du marché, soit 32 673,09 euros. Si la communauté d'agglomération soutient que l'ordre de mandatement a été signé par l'ordonnateur le 17 juin 2011, il ressort des pièces du dossier que dans sa comptabilité, la somme de 3 296, 28 euros apparaît comme ayant été payée le 4 juillet 2011 et celle de 29 376,81 euros, l'a été le 6 juillet 2011.
Sur les conclusions à fin d'appel en garantie formulées par la communauté d'agglomération à l'encontre du groupement conjoint maître d'oeuvre et de ses membres :
8. Il résulte de l'instruction que le maître d'oeuvre a proposé au maître d'ouvrage le projet de décompte général le 14 mars 2011 soit avant l'expiration du délai au terme duquel il aurait du être établi, d'autre part, contrairement à ce que soutient la communauté d'agglomération du grand Guéret, il lui appartenait de notifier à la SNEE le décompte général des travaux. Enfin, si la requérante invoque à l'encontre du groupement de maîtrise d'oeuvre un retard fautif dans la levée des réserves émises lors de la réception des travaux, ainsi que des fautes commises dans la direction de l'exécution des travaux, de telles fautes, qui auraient été commises antérieurement à la notification par la société SNEE de son projet de décompte final du marché, sont sans lien avec le paiement des intérêts moratoires en cause. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par chacun des membres du groupement conjoint de maître d'oeuvre, les conclusions d'appel en garantie présentées par la communauté d'agglomération du grand Guéret ne peuvent qu'être rejetées.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté d'agglomération du Grand Guéret, d'une part, n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement du 30 mai 2013, le tribunal administratif de Limoges a supprimé les pénalités de retard mises à la charge de la société SNEE, d'autre part, est seulement fondée à demander que le montant des intérêts moratoires dus à la SNEE sur la somme de trente-deux mille six cent soixante treize euros et neuf centimes (32 673,09 euros) soit ramené à trois jours de retard à compter du 29 avril 2011 au titre du solde du lot n° 17 du marché relatif à la construction d'une bibliothèque multimédia intercommunale.
Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Ces dispositions font obstacle à ce que la SNEE verse à la communauté d'agglomération du Grand Guéret la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Grand Guéret, d'une part, la somme de 1 500 euros à la société SNEE, d'autre part, la somme de 1 000 euros respectivement à M. N...et à M.F..., enfin la somme globale de 1 500 euros à M. H..., M. A... et l'agence architectes associés Gallerand-Ribeaudeau-G....
DÉCIDE :
Article 1er : La communauté d'agglomération du Grand Guéret est condamnée à verser à la société nouvelle d'équipements électriques les intérêts moratoires au taux applicable aux marchés publics à compter du 29 avril 2011 sur la somme de trente-deux mille six cent soixante treize euros et neuf centimes (32 673,09 euros).
Article 2 : Le jugement du 30 mai 2013 du tribunal administratif de Limoges est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus de la requête de la communauté d'agglomération du Grand Guéret et ses conclusions tendant à ce que les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre soient condamnés à la garantir des condamnations prononcées à son encontre sont rejetés.
Article 3 : La communauté d'agglomération du Grand Guéret versera, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros tant à la société SNEE qu'à M. N...et M.F....
Article 4 : La communauté d'agglomération du Grand Guéret versera, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme globale de 1 500 euros à M. H..., M. A... et l'agence architectes associés Gallerand-Ribeaudeau-G....
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N° 13BX02198