Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 29 octobre 2018, le ministre de l'intérieur demande à la cour d'annuler les articles 1er et 2 du dispositif du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 septembre 2018.
Il soutient que :
- les premiers juges ont commis des erreurs de droit en assimilant les adjoints de sécurité aux personnels de la police nationale, en estimant que le ministre de l'intérieur était incompétent pour restreindre le champ de l'indemnité pour travail de nuit et en considérant que le préfet délégué à la sécurité ne pouvait s'opposer à la demande de M. A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le décret n° 74-1065 du 13 décembre 1974 ;
- le décret n° 81-959 du 21 octobre 1981 ;
- l'arrêté du 24 août 2000 fixant les droits et obligations des adjoints de sécurité recrutés au titre du développement d'activités pour l'emploi des jeunes ;
- l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... B... ;
- et les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A... a été engagé, par un contrat signé le 1er octobre 2010, en qualité d'adjoint de sécurité (ADS) de la police nationale. Après avoir rejoint l'école nationale de police de Saint-Malo, il a été muté à compter du 1er septembre 2011 à la circonscription de sécurité publique (CSP) de Poitiers où il a été affecté à la brigade de roulement de nuit à compter du 6 avril 2012 puis au centre d'information et de commandement de nuit à compter du 2 juillet 2015. Par un courrier en date du 28 décembre 2015, il a sollicité le paiement des heures effectuées la nuit ainsi que les dimanches et les jours fériés au titre des missions exercées depuis le 1er mars 2012. Il a saisi le tribunal administratif de Poitiers d'une requête tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur cette demande et à la condamnation de l'Etat à lui verser les sommes représentatives des indemnités horaires correspondant aux services effectués. Le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 19 septembre 2018 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu'il a annulé la décision implicite opposée à M. A... en ce qu'elle lui a refusé le bénéfice de l'indemnité horaire de nuit et de la majoration spéciale pour un travail intensif pour les heures oeuvrées de nuit.
Sur le moyen retenu par les premiers juges :
2. Aux termes de l'article 1er du décret du 21 octobre 1981 étendant aux personnels de la police nationale le bénéfice de l'indemnité horaire de nuit et de la majoration spéciale pour un travail intensif, qui vise l'ordonnance n° 59-244 du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires : " Les dispositions des décrets n° 50-1475 du 28 novembre 1950, n° 61-467 du 10 mai 1961 et n° 76-208 du 24 février 1976 sont applicables aux personnels de la police nationale ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Les personnels [de la police nationale] (...) qui, entre 21 heures et 6 heures, effectuent un travail intensif peuvent bénéficier de la majoration spéciale pour travail intensif ".
3. Par ailleurs, aux termes de l'article 10 de l'arrêté du 24 août 2000 fixant les droits et obligations des adjoints de sécurité recrutés au titre du développement d'activités pour l'emploi des jeunes, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : " (...) Les adjoints de sécurité bénéficient des régimes d'aménagements horaires au titre de la pénibilité et des compensations horaires consécutives aux services supplémentaires et astreintes propres à leur service d'affectation. (...) ". Aux termes de l'article 133-25 de l'arrêté du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale : " (...) Les adjoints de sécurité bénéficient des régimes d'aménagements horaires au titre de la pénibilité, d'un crédit férié annuel et des compensations horaires consécutives aux services supplémentaires (rappel au service, dépassement horaire de la journée de travail ou de la vacation) qu'ils sont susceptibles d'effectuer, dans les mêmes termes que les fonctionnaires du corps d'encadrement et d'application de la police nationale, à l'exception de la prise en compte de leurs heures supplémentaires, opérée en application du principe de "l'heure non sécable". Ils ne sont soumis ni à la permanence, ni à l'astreinte (...) ".
4. Contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, d'une part, les dispositions citées au point 1 de l'article 1er du décret du 21 octobre 1981, lequel abroge notamment le décret n° 52-1339 du 12 décembre 1952 qui instituait une indemnité horaire pour travail de nuit et d'une majoration pour travail intensif de nuit aux fonctionnaires de la police nationale, ne s'appliquent pas aux adjoints de sécurité qui sont des agents non titulaires de droit public. D'autre part, et dès lors, l'article 133-25 de l'arrêté du 6 juin 2006 cité au point 3, qui se borne à prévoir une compensation en temps pour le travail supplémentaire effectué la nuit, le dimanche et les jours fériés par les adjoints de sécurité, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de restreindre à leur détriment le champ d'une indemnité qui ne leur est pas applicable.
5. Il suit de là que c'est à tort que tribunal administratif de Poitiers a considéré que M. A... était susceptible de prétendre au bénéfice de l'indemnité horaire pour travail de nuit et de la majoration spéciale pour travail intensif pour les heures oeuvrées de nuit et a annulé la décision implicite de rejet opposée à la demande de versement de l'intéressé en tant qu'elle lui a refusé le bénéfice desdites indemnités.
6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des moyens par lesquels M. A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler dans cette mesure cette décision.
Sur l'autre moyen :
7. M. A... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 1er du décret des 13 décembre 1974 portant création d'une indemnité horaire pour travail du dimanche et des jours fériés en faveur des personnels relevant de la direction générale de la police nationale ou de la direction générale de la sécurité intérieure du ministère de l'intérieur qui ne s'appliquent pas aux agents contractuels tels que les adjoints de sécurité.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision implicite attaquée en tant qu'elle refuse à M. A... le bénéfice de l'indemnité horaire de nuit et de la majoration spéciale pour un travail intensif, pour les heures oeuvrées de nuit.
DECIDE :
Article 1er : Les articles 1er et 2 du dispositif du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 19 septembre 2018 sont annulés.
Article 2 : La demande de M. A... tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet attaquée en tant qu'elle lui refuse le bénéfice de l'indemnité horaire de nuit et de la majoration spéciale pour un travail intensif pour les heures oeuvrées de nuit est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... A.... Copie en sera transmise au préfet délégué pour la défense et la sécurité de la zone de défense et de sécurité du Sud-Ouest.
Délibéré après l'audience du 16 novembre 2020 à laquelle siégeaient :
- M. Dominique Naves, président,
- Mme D... B..., présidente-assesseure,
- Mme E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 décembre 2020.
Le rapporteur,
Karine B...Le président,
Dominique Naves
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 18BX03744 2