Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 23 mars 2018, M. H... A..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 23 janvier 2018 en tant qu'il rejette la requête n° 1602076 ;
2°) d'annuler la délibération n° 2016-09/01 du 7 septembre 2016 du conseil municipal de Puymoyen refusant de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle ;
3°) d'enjoindre au conseil municipal de Puymoyen de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Puymoyen la somme de 4 000 euros à lui verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il n'expose pas les raisons pour lesquelles il a écarté les moyens tirés de la partialité du conseil municipal et de la violation du principe d'égalité ;
- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré du défaut d'impartialité affectant la délibération litigieuse dès lors qu'elle a été prise en présence du maire dont la défiance à son égard est notoire ;
- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la violation du principe d'égalité dès lors que, par ailleurs, le bénéfice de la protection fonctionnelle a été accordé au maire ;
- les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en écartant le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales sans mentionner ni des considérations d'intérêt général ni une faute personnelle qu'il aurait commise.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2018, la commune de Puymoyen, représentée par Me D..., conclut à l'irrecevabilité de la requête et, à défaut, au rejet de celle-ci ainsi qu'à la mise à la charge de M. A... d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- M. A... est dépourvu d'intérêt à agir dès lors que la plainte qu'il a déposée a fait l'objet d'un classement sans suite ;
- les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 17 mai 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 8 juillet 2019 à 12 h 00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 2 décembre 2019 :
- le rapport de Mme E... C... ;
- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public ;
- et les observations de Me B..., représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. Le 20 juillet 2015, M. A..., alors premier adjoint de la commune de Puymoyen (Charente), a déposé plainte sur son lieu de vacances auprès du commissariat de Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques) contre M. G..., également élu municipal, pour des faits qualifiés de menaces de mort réitérées commis le 17 juillet 2015 à Puymoyen. Ce conflit a conduit M. A... à solliciter, le 28 juillet 2015, le bénéfice de la protection fonctionnelle. Par une délibération du 11 juillet 2016, le conseil municipal a refusé d'accorder la protection fonctionnelle à M. A.... Par une ordonnance du 29 août 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers a ordonné la suspension de l'exécution de la délibération du 11 juillet 2016 et a enjoint à la commune de Puymoyen de réexaminer la demande de M. A.... Par une délibération du 7 septembre 2016, le conseil municipal de la commune de Puymoyen a une nouvelle fois refusé l'octroi de la protection fonctionnelle à M. A.... Par un jugement du 23 janvier 2018, le tribunal administratif de Poitiers a estimé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de la délibération du 11 juillet 2016 et a rejeté celles tendant à l'annulation de la délibération du 7 septembre 2016. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il rejette les conclusions dirigées contre la délibération du 7 septembre 2016.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. M. A... soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il n'expose pas les raisons pour lesquelles les moyens tirés de la partialité du conseil municipal résultant de la présence du maire lors du vote de la délibération litigieuse et de la violation du principe d'égalité ont été écartés. Il résulte toutefois des motifs du jugement, en particulier de son point 8, que les premiers juges ont écarté les moyens tirés de la partialité du conseil municipal et de la violation du principe d'égalité après avoir indiqué que la circonstance que le maire de la commune de Puymoyen ait pris part au vote de la délibération attaquée comme celle que, lors de la même séance, le conseil municipal ait décidé d'accorder la protection fonctionnelle au maire en raison de la plainte que celui-ci envisageait de déposer pour diffamation était sans influence sur sa légalité dès lors qu'il n'était pas établi que le maire se serait trouvé à cette occasion en situation de conflit d'intérêts au sens des dispositions du décret du 31 janvier 2014. Il suit de là que les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité sur ce point.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Aux termes de l'article L.2123-35 du code général des collectivités territoriales : " Le maire ou les élus municipaux, le suppléant ou ayant reçu délégation bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la commune conformément aux règles fixées par le code pénal, les lois spéciales et le présent code. / La commune est tenue de protéger le maire ou les élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation contre les violences, menaces ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion ou du fait de leurs fonctions et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. ". Ces dispositions prévoient expressément d'étendre aux élus locaux chargés de missions d'exécutif le bénéfice de la protection fonctionnelle, accordée aux fonctionnaires par l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires, lorsqu'ils font l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère de faute détachable de l'exercice de leurs fonctions ou de menaces ou attaques à l'occasion ou du fait de leurs fonctions. Aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 dans sa version applicable aux faits de l'espèce : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire.(...) / La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (...) ".
5. Lorsque les menaces ou attaques subies par un élu municipal ne trouvent pas leur origine dans les fonctions exercées par l'intéressé, ces attaques ne peuvent être regardées comme subies par lui à l'occasion de ses fonctions, au sens des dispositions législatives précitées.
6. M. A... soutient que les faits qualifiés de menaces de mort réitérées, commis le 17 juillet 2015 par M. G... sur la voie publique, pour lesquels il a déposé plainte le 20 juillet 2015, trouvent leur origine dans la procédure disciplinaire ouverte à l'encontre Mme G..., adjoint technique chargée de l'entretien des locaux communaux. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que ces faits, présentés par M. G... comme liés à des relations conflictuelles notamment de voisinage et à des dissensions d'ordre politique, puissent être regardés comme trouvant directement leur origine dans les fonctions exercées par M. A..., chargé de la gestion du personnel communal au sein de la commune de Puymoyen. Le conseil municipal était donc tenu de refuser à M. A... le bénéfice de la protection fonctionnelle sollicitée. Les autres moyens soulevés par l'appelant, tirés du défaut d'impartialité du conseil municipal et de la méconnaissance du principe d'égalité, sont par conséquent inopérants.
7. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel, M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 7 septembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Puymoyen a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle. Par voie de conséquence, il y a également lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Puymoyen, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces mêmes dispositions au bénéfice de la commune de Puymoyen.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Puymoyen sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... A... et à la commune de Puymoyen.
Délibéré après l'audience du 2 décembre 2019, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
Mme E... C..., présidente-assesseure,
M. Paul-André Braud, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 décembre 2019.
Le rapporteur,
Karine C...Le président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 18BX01204 2