Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 février 2017, l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 15 décembre 2016 ;
2°) de rejeter la demande de la Sarl Guyelectrix présentée devant le tribunal administratif de la Guyane;
3°) de mettre à la charge de la société Guyelectrix à lui verser la somme de 2 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision attaquée est parfaitement motivée ;
- la matérialité de l'infraction est constituée ; le procès-verbal fait foi jusqu'à preuve du contraire ; les procès-verbaux dressés en matière d'infraction à l'article L. 8251-1 du code du travail n'ont pas à être transmis à l'employeur ;
- à l'occasion de son audition, M.A..., gérant de la société, a déclaré avoir fourni les équipements de sécurité au dénommé Paulo qu'il avait embauché comme artisan, en qualité de donneur d'ordre car la construction était à son nom ; or, l'article L. 8251-1 du code du travail expose que le donneur d'ordre est tenu solidairement responsable de son co-contractant ; si la société Guyelectrix n'a pas embauché M.B..., elle l'a indiscutablement employé ;
- le montant de la contribution spéciale a été fixé conformément aux dispositions de l'article R. 8253-2, sans qu'aucune minoration ait pu trouver à s'appliquer ; l'OFII a donc fait une exacte appréciation de l'amende forfaitaire.
Par une ordonnance en date du 1er août 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 août 2018.
Par lettre en date du 14 février 2019 les parties ont été informées, de ce que la cour était susceptible, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrégularité du jugement attaqué pour avoir statué sur des conclusions irrecevables.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,
- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. Le 21 janvier 2015, lors d'un contrôle sur un chantier de construction de deux immeubles sis à Rémire-Montjoly sur lesquels intervenait la société Guyelectrix, entreprise d'électricité générale, et appartenant, selon ses propres déclarations au gérant de cette société, M. A..., les services de la police aux frontières ont constaté qu'un ressortissant bissau-guinéen, détenteur d'un récépissé de demandeur d'asile mais démuni de titre de travail, y était employé pour le compte d'un dénommé Paulo, artisan-peintre. Un procès-verbal a été établi le même jour. L'enquête judiciaire, clôturée le 19 mars 2015, a eu pour suite la convocation du gérant de la société Guyelectrix devant le délégué du procureur de la République à Cayenne le 5 mai 2015 pour versement d'une amende de composition pénale de 250 euros. Par ailleurs, par un courrier en date du 11 août 2015, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a informé la société que, lors du contrôle effectué le 21 janvier 2015, il avait été établi par procès-verbal qu'elle avait employé un salarié étranger démunis d'un titre l'autorisant à travailler et l'a invitée à présenter ses observations dans un délai de quinze jours. Le 6 octobre 2015, le directeur général de l'OFII a notifié à la SARL Guyelectrix sa décision de lui appliquer la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail pour un montant de 17 600 euros. L'intéressée a contesté cette décision le 14 décembre 2015. L'OFII fait appel du jugement du 15 décembre 2016, par lequel le tribunal administratif de la Guyane a annulé la décision du directeur général de l'OFII en date du 6 octobre 2015, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux de la société Guyelectrix.
2. D'une part, la contestation des sanctions administratives, dont font parties les sanctions en litige, infligées en vertu des dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail et L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en cas d'emploi d'un étranger en situation irrégulière, ne peut être effectuée que par la voie du recours de plein contentieux. D'autre part, le juge d'appel est susceptible de soulever d'office l'irrégularité d'un jugement.
3. Les mémoires de première instance, présentés pour la société Guyelectrix, s'ils portent l'intitulé " requête de plein contentieux " présentent uniquement des moyens et des conclusions d'excès de pouvoir. Par suite, les premiers juges, qui ont d'une part, annulé les décisions contestées et, d'autre part, déchargé la société de l'obligation de payer sans avoir d'ailleurs procédé à une requalification de son recours, ont entaché leur jugement d'irrégularité, dès lors qu'ils ont ainsi statué au-delà des conclusions dont ils étaient saisis et qu'au vu des moyens et des conclusions énoncés par la société Guyelectrix, au demeurant représentée par un avocat, et alors que c'est la nature de ceux-ci et non l'éventuelle dénomination donnée ou non au recours qui l'emporte, sa demande était irrecevable, faute d'avoir la nature d'une contestation de plein contentieux.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de mettre à la charge de la société Guyelectrix la somme que l'OFII réclame sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, que le jugement attaqué est irrégulier et doit être annulé et que la demande présentée par la société Guyelectrix devant le tribunal administratif de la Guyane doit être rejetée comme entachée d'irrecevabilité.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1600102 du 15 décembre 2016 du tribunal administratif de la Guyane est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la société Guyelectrix devant le tribunal administratif de la Guyane et les conclusions présentées par l'OFII sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office français de l'immigration et de l'intégration et à la Sarl Guyelectrix. Copie en sera transmise à la direction régionale des finances publiques de la Guyane.
Délibéré après l'audience du 4 mars 2019, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,
M. Axel Basset, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er avril 2019.
Le rapporteur,
Florence Rey-GabriacLe président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 17BX00478