Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 février 2015, et un mémoire ampliatif du 30 novembre 2015, M. B...D..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 4 décembre 2014 du tribunal administratif de la Guyane et la décision du 4 juin 2013 ;
2°) d'enjoindre à l'autorité hiérarchique d'exécuter l'arrêt et de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de sa notification, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat à lui verser la somme de 2 500 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- faute pour la ministre de la santé, d'avoir produit un mémoire en défense, l'Etat doit être regardé comme ayant acquiescé aux faits de la requête ;
- au titre de la régularité du jugement, le jugement est insuffisamment motivé quant à sa réponse à son moyen tiré de l'existence d'une sanction disciplinaire déguisée ;
- le jugement est également irrégulier du fait de la dénaturation des pièces du dossier concernant son moyen invoqué tiré de l'erreur d'appréciation dont se trouve entachée la décision du 4 juin 2013 ;
- la décision du 4 juin 2013 portant refus d'attribution de la part résultats de la prime de fonctions est entachée d'une incompétence négative dès lors que le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) s'est borné à viser l'avis de la commission administrative paritaire nationale sans porter d'appréciation personnelle sur sa situation ;
- la décision du 4 juin 2013 est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que la fixation du montant de la prime de fonctions et de résultats pour l'année 2012 est intervenue avant l'entretien d'évaluation fixé au 29 octobre 2012, et faute pour cet entretien d'avoir été utile pour la fixation de sa prime, il a été privé d'une garantie substantielle ;
- la décision de refus d'attribution de la part résultats de la prime de fonctions a été prise en considération de la personne, dès lors qu'elle se fonde sur ses prises de position à l'égard du directeur général adjoint de l'ARS, le docteur OlivierA..., et n'a pas été précédée de la communication de son dossier ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle fixe à 3 le coefficient total de la part de résultats pour 2012 alors que les coefficients de la part de résultat doivent être fixés entre -1 et + 1, voire 2 dans le cadre d'une attribution exceptionnelle de prime. L'augmentation enregistrée de la prime est seulement la conséquence mécanique liée à l'ajustement à 3, de la cotation du poste en raison de l'augmentation du budget du centre hospitalier de Cayenne et n'a donc pas pour cause, la prise en compte de ses résultats ;
- l'appréciation de ses résultats doit donc s'ajouter à l'ajustement de la cotation de l'établissement qu'il dirige ;
- la décision de refus d'attribution de la part résultats de la prime de fonction est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il n'a pas été tenu compte de sa manière de servir et des résultats atteints en 2012, qui auraient du à minima lui permettre le maintien de la prime allouée en 2011. En effet, le projet d'établissement transmis le 26 janvier 2012 a été approuvé sans réserve. Par ailleurs, en 2012, il a du coordonner toute une série d'actions pour préparer la visite du président de la République en janvier 2013 et il en avait été félicité par le préfet de région et la ministre de la santé. Il a par ailleurs été félicité de sa gestion en octobre 2012 par le préfet de région. L'établissement de santé n'a par ailleurs connu depuis 2006, aucun conflit social, alors que le taux d'absentéisme diminue régulièrement, et que la moitié du personnel a pu bénéficier d'une formation. La qualité du travail accompli a été mise en évidence par un courrier adressé le 18 septembre 2012 par le président du conseil de surveillance au directeur de l'ARS et a également été mise en exergue par la chambre régionale des comptes dans un rapport du 19 décembre 2012 ;
- la décision de refus d'attribution de prime a été prise pour des considérations étrangères à l'intérêt du service et aux résultats atteints par le requérant. Elle se fonde uniquement sur le courrier du 7 août 2013 par lequel le directeur général de l'offre de soins rejette comme non éligible, le projet de réhabilitation et d'extension des locaux du CHR de Cayenne alors que ce projet avait été approuvé par le directeur de l'ARS ;
- au titre des années 2010 et 2011, soit avant l'arrivée de la nouvelle direction de l'ARS, le montant de la prime qui lui était attribuée était proche du maximum. Contrairement à ce qu'il en est de la direction de l'ARS, le conseil de surveillance et les élus guyanais ont apprécié le travail qu'il a accompli à la tête du centre hospitalier de Cayenne ;
- la décision de refus d'attribution de prime ne tient absolument pas compte de ses résultats et vise à le sanctionner en raison des relations privilégiées qu'il a su tisser avec les élus et les responsables de la santé en Guyane.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 2012-749 du 9 mai 2012 ;
- l'arrêté du 9 mai 2012 fixant les montants de référence de la prime de fonctions et de résultats applicables aux corps ou emplois fonctionnels des personnels de direction et des directeurs des soins de la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. D...était directeur du centre hospitalier de Cayenne jusqu'au mois de juillet 2013. Par une décision du 19 octobre 2012, le directeur de l'agence régionale de santé (ARS) de Guyane a fixé le montant de la part " fonctions " de la prime de fonctions et de résultats sur la base de la cotation de l'emploi à 2,8 à un montant annuel de la part de fonctions de 15 680 euros. Cette décision a été rectifiée par une décision du 9 novembre 2012 qui fixe la cotation de l'emploi à 3 et le montant annuel de la part de fonctions à 16 439,11, euros.Par une décision du 11 décembre 2012, le directeur de l'ARS a fixé le montant de la part "résultats" de la prime de fonctions et de résultats, pour l'année 2012 en fonction de la cotation de l'emploi à 3, à un montant annuel de 16800 euros. Cette décision, sur recours gracieux de M.D..., a été confirmée par une décision du 4 juin 2013 du directeur de l'ARS de Guyane. Par un jugement du 4 décembre 2014, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté la demande de M. D...tendant à l'annulation de la décision du 4 juin 2013.
Sur l'acquiescement aux faits :
2. En vertu de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, lorsqu'une des parties appelées à produire un mémoire dans le cadre de l'instruction n'a pas respecté le délai qui lui a été imparti à cet effet, le président de la formation de jugement du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel peut lui adresser une mise en demeure. Aux termes de l'article R. 612-6 du même code : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant. ". Faute en l'espèce de mise en demeure adressée à l'ARS, le moyen tiré de l'acquiescement aux faits doit être écarté.
Sur la régularité du jugement :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués à l'appui de ces conclusions :
3. Ainsi que le fait valoir, le requérant, le jugement est insuffisamment motivé dans sa réponse à son moyen, tiré de l'existence d'une sanction disciplinaire déguisée, dès lors que M. D...avait dans sa demande devant le tribunal fait valoir notamment que les décisions prises concernant la prime de fonctions et de résultats avaient suivi de quelques mois l'envoi de sa part d'un courrier le 29 juin 2012 adressé à la directrice générale du centre de gestion de la fonction publique hospitalière et qu'il existait d'autres situations conflictuelles avec l'ARS notamment avec le président de la fédération hospitalière de Guyane. Le tribunal, en se bornant à considérer " (...) que si M.D..., soutient que les décisions attaquées sont révélatrices d'une sanction disciplinaire déguisée, il n'en apporte, en tout état de cause pas la démonstration à sa charge (...) " a insuffisamment motivé son jugement, qui doit être annulé pour irrégularité.
4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M.D....
Sur la demande d'annulation de la décision du 4 juin 2013 rejetant le recours gracieux de M. D...contre la décision du 19 octobre 2012 relative au montant de la part résultats de la prime de fonctions :
5. Si M. D...fait valoir que la décision du 4 juin 2013 serait entachée d'une incompétence négative dès lors que le directeur général de l'ARS n'aurait pas exercé son pouvoir d'appréciation en se bornant à se référer à l'avis de la commission administrative paritaire sans porter d'appréciation personnelle sur sa situation, les pièces du dossier et notamment les différents courriers sur lesquels l'ARS a fondé la décision contestée d'attribution de la part résultats de la prime de fonction n'établissent pas qu'il n'aurait pas été porté d'appréciation sur la situation particulière de M.D....
6. Le requérant soutient que la décision contestée relative à la part " résultats " de la prime de fonctions serait intervenue sur une procédure irrégulière dès lors que la fixation du montant de cette prime serait intervenue avant l'entretien d'évaluation fixé au 29 octobre 2012. Mais la décision relative à l'attribution de la part résultats de la prime de fonctions pour l'année 2012 dont seule l'annulation est demandée par M.D..., est intervenue le 11 décembre 2012, soit après l'entretien d'évaluation fixé au 29 octobre 2012. Dans ces conditions, l'irrégularité de procédure invoquée manque en fait et doit être écartée.
7. M. D...soutient que la décision d'attribution de la part " résultats " de la prime de fonctions devait être précédée de la communication de son dossier dès lors qu'elle constituerait selon lui une sanction disciplinaire déguisée ou à tout le moins une mesure prise en considération de la personne. A cet égard, le requérant soutient que la décision de refus d'attribution de la part "résultats" de la prime de fonctions a suivi de quelques mois l'envoi de sa part d'un courrier le 29 juin 2012 adressé à la directrice générale du centre de gestion de la fonction publique hospitalière dans lequel il se plaignait du comportement de M. A...directeur général adjoint de l'agence régionale de santé. Si dans ce courrier, adressé par M. D... en qualité de délégué régional de la fédération hospitalière de Guyane, il mettait en cause le comportement de M.A..., dans le fait notamment qu'il aurait traité la pratique des soignants et médecins exerçant dans les centres de santé des communes de " médecine vétérinaire ", rien n'indique au dossier que l'attribution de la part " résultats " de la prime de fonction aurait pour cause l'envoi de ce courrier, alors qu'au contraire les pièces du dossier établissent qu'il a été reproché à M. D...notamment par les courriers qui lui ont été adressés les 7 et 21 janvier 2013, un manque d'écoute, et de justification des choix effectués en particulier quant au fait d'avoir " (...) sur la neurochirurgie, réalisé une activité, sans autorisation et sans évoquer avec l'agence régionale de santé la mise en place de celle-ci, ce qui génère des difficultés à la fois en interne et en externe (...) ". La décision portant attribution de la part "résultats" de la prime de fonctions n'a constitué ni une sanction disciplinaire déguisée ni une mesure prise en considération de la personne et le moyen tiré de l'absence de communication du dossier est inopérant et doit donc être écarté.
Sur la légalité interne :
8. En vertu de l'article 1er du décret n° 2012-749 susvisé du 9 mai 2012 relatif à la prime de fonctions et de résultats des corps ou emplois fonctionnels des personnels de direction et des directeurs de soins de la fonction publique hospitalière, les directeurs des soins des établissements hospitaliers ou détachés dans l'un de ces corps ou sur un emploi fonctionnel, perçoivent une prime de fonctions et de résultats, laquelle en vertu de l'article 2 du même décret comprend " - une part tenant compte des responsabilités, du niveau d'expertise et des sujétions spéciales liées aux fonctions exercées ; - une part tenant compte des résultats de la procédure d'évaluation individuelle prévue par la réglementation en vigueur et de la manière de servir. ". L'article 4 de ce décret renvoie à un arrêté la fixation de " montants annuels de référence de la part liée aux résultats de la procédure d'évaluation individuelle et à la manière de servir ". Selon l'article 5 de ce décret " (...) 2° Pour la part tenant compte des résultats, le montant de référence est modulable par application d'un coefficient compris dans une fourchette de 0 à 6. Le montant individuel attribué au titre de cette part fait l'objet d'un réexamen annuel au vu des résultats de la procédure d'évaluation individuelle mentionnée à l'article 2 et définie par le décret du 1er septembre 2005 susvisé. (...) ". Si le requérant soutient que le coefficient de 3 qui lui a été attribué pour le calcul de sa prime de résultats ne constitue qu'une base dès lors que ce coefficient serait celui de l'établissement et que les coefficients de la part de résultats doivent être compris entre -1 et + 1, voire 2 dans le cadre d'une attribution exceptionnelle de prime, il n'invoque à cet égard la méconnaissance d'aucune disposition législative ou règlementaire. Le moyen invoqué au titre de l'erreur de droit ne peut donc qu'être écarté.
9. Pour soutenir que la décision portant attribution de la part "résultats" de la prime de fonctions serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, le requérant soutient qu'il n'a pas été tenu compte de sa manière de servir et des résultats atteints en 2012, qui auraient du à minima lui permettre le maintien de la prime allouée en 2011. Il fait valoir que le projet d'établissement transmis le 26 janvier 2012 a été approuvé sans réserves et qu'en 2012, il a du coordonner toute une série d'actions pour préparer la visite du président de la République en janvier 2013 et qu'il en a été félicité par le préfet de région et la ministre de la santé. Il soutient aussi que l'établissement de santé n'a connu depuis 2006, aucun conflit social, que le taux d'absentéisme diminue régulièrement, que la moitié du personnel a pu bénéficier d'une formation, et que la qualité du travail accompli a été mise en évidence par un courrier adressé le 18 septembre 2012 par le président du conseil de surveillance au directeur de l'ARS, et se trouve également mise en exergue par la chambre régionale des comptes dans un rapport du 19 décembre 2012. Mais compte tenu des éléments reprochés à M.D..., tenant à un manque d'écoute, et de justification des choix effectués et de façon plus concrète par les courriers des 7 et 21 janvier 2013 et d'avoir mis en place un service de neurochirurgie, sans autorisation et sans évoquer sa mise en place avec l'agence régionale de santé, l'attribution de la prime résultats ne se trouve pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
10. Le requérant soutient enfin que la décision de refus d'attribution de prime a été prise pour des considérations étrangères à l'intérêt du service et aux résultats atteints ce qui serait révélé par le courrier du 7 août 2013 par lequel le directeur général de l'offre de soins rejette comme non éligible, le projet de réhabilitation et d'extension des locaux du CHR de Cayenne alors que ce projet avait été approuvé par le directeur de l'ARS. Il fait également valoir qu' au titre des années 2010 et 2011, soit avant l'arrivée de la nouvelle direction de l'ARS, le montant de la prime qui lui était attribuée était proche du maximum et que contrairement à ce que soutient l'ARS , le conseil de surveillance et les élus guyanais ont apprécié le travail qu'il a accompli à la tête du centre hospitalier de Cayenne et que la décision de refus d'attribution de prime ne tient absolument pas compte de ses résultats et vise à le sanctionner en raison des relations privilégiées qu'il a su tisser avec les élus et les responsables de la santé en Guyane. Mais compte tenu des éléments produits au dossier par l'administration, faisant état de manquements professionnels de M. D...à l'égard desquels ce dernier n'apporte aucune contradiction, ni même d'explication, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté.
11. M. D...n'est donc pas fondé à demander l'annulation de la décision du 4 juin 2013.
Sur les conclusions en injonction et présentées au titre l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Compte tenu du rejet des conclusions en annulation de la décision du 4 juin 2013 afférente à la part "résultats" de la prime de fonctions, les conclusions en injonction présentées par M. D...et les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1300752 du 4 décembre 2014 du tribunal administratif de la Guyane est annulé.
Article 2 : La demande de M. D...présentée devant le tribunal administratif de la Guyane et le surplus de sa requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et à la ministre des affaires sociales et de la santé. Copie en sera transmise à l'agence régionale de santé de la Guyane.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Antoine Bec, président-assesseur,
M. Pierre Bentolila, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 3 janvier 2017.
Le rapporteur,
Pierre Bentolila
Le président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 15BX00440