Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 décembre 2016, et un mémoire complémentaire enregistré le 13 décembre 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de la cohésion des territoires demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures, à titre principal, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 13 octobre 2016, et à titre subsidiaire, de réformer ce jugement en tant qu'il a condamné l'Etat à verser à M. B...une somme d'un montant supérieur à 3 253,70 euros et qu'il a retenu la date du 23 juin 2014 comme point de départ des intérêts.
Ils soutiennent que :
- les conclusions indemnitaires présentées par M. B...devant le tribunal administratif étaient irrecevables en l'absence de demande préalable sollicitant expressément l'indemnisation de son préjudice financier ;
- les conclusions indemnitaires tendant à la réparation des pertes de revenus subies par M. B...au titre des années 2010 à 2012 étaient tardives et, par suite, irrecevables ; seules ses conclusions indemnitaires tendant à la réparation de la perte de revenus subie au pour l'année 2014 sont recevables ;
- les premiers juges ont déterminé à tort le montant du préjudice subi par M. B...résultant d'une perte de revenus en prenant en compte le montant brut des revenus dont il a été privé alors qu'il ne pouvait prétendre qu'à un montant net ;
- ils ont fait courir à tort les intérêts à compter du 23 juin 2014, date de la réception du courrier de M. B...du 12 mai 2014, cette lettre ne pouvant être regardée comme une demande indemnitaire préalable.
Par ordonnance du 6 décembre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 16 janvier 2018 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
- le décret n° 92-604 du 1er juillet 1992 ;
- le décret n° 93-236 du 22 février 1993 ;
- le décret n° 2008-1533 du 22 décembre 2008 ;
- l'arrêté du 22 décembre 2008 fixant les montants de référence de la prime de fonctions et de résultats ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M.C...,
- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., attaché principal d'administration de l'équipement, a été affecté à la mission interministérielle d'inspection du logement social au sein de la délégation territoriale de Toulouse sur un poste d'inspecteur-auditeur, jusqu'à sa radiation des cadres le 25 avril 2014. Par courriers du 28 juin 2011, du 13 décembre 2011, du 13 décembre 2012 et du 11 décembre 2013, le secrétaire général de la MIILOS l'a informé de ce que le montant de sa prime de fonctions et de résultats, respectivement au titre des années 2010, 2011, 2012 et 2013, s'élevait à 15 565 euros, 16 065 euros, 15 645 euros et 15 645 euros. Par courrier du 19 juin 2014 notifié le 23 juin suivant au chef adjoint de la MIILOS, M. B...a formulé une demande tendant au bénéfice, du régime indemnitaire applicable aux attachés principaux d'administration en service en administration centrale au titre des années 2010 à 2013, ayant fait l'objet d'une décision de refus implicite de la part du chef adjoint de la MIILOS. M. B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l'Etat à lui verser la somme de 14 270 euros en réparation du préjudice financier subi de 2010 à 2013 et la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral et d'enjoindre à l'administration de le rétablir dans ses droits pour l'attribution de la prime. Par un jugement du 13 octobre 2016 dont le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de la cohésion des territoires font appel, le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à l'intéressé la somme de 14 270 euros en réparation de son préjudice financier au titre des années 2010 à 2013 et a rejeté le surplus de ses conclusions.
Sur la recevabilité de la demande en première instance présentée par M. B... :
En ce qui concerne le défaut de décision préalable ayant lié le contentieux :
2. Il ressort des pièces du dossier que par un courrier en date du 19 juin 2014, notifié à l'administration le 23 juin suivant, M. B...a présenté une demande préalable d'indemnisation tendant au versement du différentiel entre le régime indemnitaire des agents affectés en service d'administration centrale et le régime indemnitaire des agents affectés en services déconcentrés pour les années 2010 à 2013. Par suite, les ministres ne sont pas fondés à soutenir en appel que les conclusions indemnitaires présentées par M. B...devant le tribunal administratif étaient irrecevables en raison du défaut de décision préalable ayant lié le contentieux.
Sur les primes versées à M. B...au titre des années 2010 à 2012 :
3. D'une part le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance. Cette règle, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance.
4. D'autre part, l'expiration du délai permettant d'introduire un recours en annulation contre une décision expresse dont l'objet est purement pécuniaire fait obstacle à ce que soient présentées des conclusions indemnitaires ayant la même portée.
5. Il ressort des pièces du dossier que la demande de M. B...n'a pas d'autre fondement que l'illégalité des décisions fixant le montant de sa prime de fonctions et de résultats au titre des années 2010 à 2012. Si ces décisions ne précisent pas les dates auxquelles elles lui ont été notifiées avec l'indication des voies et délais de recours, il est toutefois constant que M. B...a eu connaissance des ces décisions fixant les montants de prime alloués au titre des années 2010 à 2012 au plus tard au cours du mois de janvier de l'année respectivement suivante et n'a exercé aucun recours juridictionnel à leur encontre. Ainsi, à la date à laquelle il a contesté son régime indemnitaire devant l'administration le 23 juin 2014 et devant le juge le 8 septembre 2014, ces décisions, qui ont un objet purement pécuniaire, étaient devenues définitives, avec toutes les conséquences pécuniaires qui en sont inséparables. Par suite, les ministres chargés de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires sont fondés à soutenir que la demande présentée par M. B...devant le tribunal tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité au titre du préjudice causé par les décisions ayant fixé les montants de sa prime pour les années 2010 à 2012 était irrecevable car tardive.
Sur les primes versées à M. B...au titre de l'année 2013 :
6. Les premiers juges après avoir constaté que la MIILOS présentait le caractère d'une administration centrale et que M. B...était fondé en conséquence à bénéficier du régime indemnitaire applicable aux agents affectés dans les services centraux, ont évalué son préjudice financier à la somme de 3 570 euros pour l'année 2013 en retenant la différence entre le montant de la prime auquel l'intéressé pouvait prétendre au cours de cette même année selon le régime indemnitaire applicable aux agents des services déconcentrés, et le montant qu'il a perçu. Ce faisant le tribunal administratif a pris en compte le montant brut des revenus indemnitaires dont il a été privé et non leur montant net.
7. Il ressort des pièces du dossier que le montant de la perte de revenus dont l'intéressé peut obtenir réparation correspond, ainsi que le soutiennent les ministres requérants, aux revenus nets qu'il a perdus. En l'absence de contestation sérieuse des données chiffrées produites par les ministres en appel, il y a lieu d'évaluer le préjudice financier de M. B... à la somme de 3 253,70 euros assortie des intérêts légaux à compter du 23 juin 2014, date à laquelle sa demande indemnitaire est parvenue à l'administration, et de la capitalisation.
8. Il résulte de tout ce qui précède que les ministres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'Etat à verser à M. B...une somme supérieure à 3 253,70 euros.
Sur les exposés et non compris dans les dépens :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. B...demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La somme de 14 270 euros que l'Etat a été condamné à verser à M. B... par le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1404244 du 13 octobre 2016 est ramenée à 3 253,70 euros assortie des intérêts légaux à compter du 23 juin 2014 et de la capitalisation.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1404244 du 13 octobre 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Les conclusions de M. B...présentées en appel et le surplus des conclusions du le ministre de la transition écologique et solidaire et du ministre de la cohésion des territoires sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et solidaire, au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales à M. A... B...et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
M. Axel Basset, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 décembre 2018.
Le président-assesseur,
Pierre Bentolila
Le président,
Pierre C...
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 16BX04147