Procédure devant la cour :
Par une requête du 22 juillet 2016, Mme C...A..., représentée par MeG..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 juin 2016.
2°) d'annuler la décision du 4 juin 2014 par laquelle le ministre du travail a autorisé son licenciement.
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en premier lieu, s'agissant de la compétence du ministre pour autoriser son licenciement, c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le ministre n'était pas incompétent pour se prononcer sur la demande d'autorisation de licenciement au motif que son contrat de travail ne pouvait être regardé comme résilié compte tenu de ce que si le conseil des prud'hommes de Limoges, par un jugement du 7 avril 2014, a prononcé la résiliation judiciaire de son contrat de travail, il n'a pas prononcé l'exécution provisoire de son jugement en ce qui concerne la résiliation ; en effet, le Conseil d'Etat juge de façon constante depuis un arrêt du 14 novembre 2001 n° 219365 et un arrêt du 17 décembre 2008, n° 310889, que si la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée, l'inspection du travail et le ministre ne sont pas compétents pour statuer sur une demande d'autorisation de licenciement ; cette jurisprudence du Conseil d'Etat est également celle de la Cour de Cassation 29 septembre 2010, n° 09-41.127 ; le ministre du travail, compte tenu de la résiliation de son contrat de travail, était donc incompétent pour statuer sur sa demande d'autorisation de licenciement ; en deuxième lieu, le ministre ne pouvait se fonder sur le constat de l'huissier, MeE..., retranscrivant la vidéo, ce constat étant lui-même nul, dès lors que l'enregistrement vidéo était nul ; si la SAS Cora a produit en appel (lors de l'audience de référé de décembre 2011 devant la chambre sociale) l'arrêté préfectoral du 17 février 2011 ayant autorisé l'installation des caméras de surveillance, cet arrêté prévoit en son article 3, les enregistrements seront détruits dans un délai maximum de 30 jours ; la société Cora, n'a pas lors de son dépôt de plainte communiqué aux enquêteurs l'enregistrement vidéo supposer prouver les faits de filouterie et de complicité de filouterie reprochés aux salariés, la société ayant choisi de déposer plainte sur la foi des seules déclaration de M.H..., responsable de la sécurité, qui a donné sa version des faits particulièrement subjective, sans donner aux enquêteurs l'enregistrement vidéo ; si l'employeur n'a pas communiqué cette bande vidéo, c'est bien parce qu'elle ne comportait pas d'éléments compromettants pour les salariées ; en toute hypothèse l'enregistrement vidéo aurait du être détruit le 30 octobre 2011 et ne pouvait être produit à l'appui des demandes d'autorisation de licenciement ni devant les juridictions ; la société ne pouvait en aucun cas dresser procès-verbal par Me E...du contenu de cette vidéo alors qu'elle aurait du être détruite le 30 octobre 2011 et le ministre du travail ne pouvait se fonder sur ce constat d'huissier, d'autant plus que ce constat d'huissier omet certains détails de la vidéo notamment quant au comportement de Mme A... et quant à la présence des vigiles aux caisses où le vol est censé s'être produit ;
- en ce qui concerne l'information des salariées mises en cause, quant au recours à l'enregistrement vidéo des lieux de travail, si une information a été donnée lors des comités d'établissement des 22 juillet et 2 septembre 2010, à aucun moment, il n'est précisé que le système mis en place servira à surveiller les salariés ; or une jurisprudence constante de la cour de cassation, indique que les enregistrements à l'insu du salarié, ne peuvent constituer un mode de preuve licite ; Mme A...a bien été filmée à son insu dès lors que le système de vidéosurveillance a été présenté au comité d'établissement comme étant seulement un moyen de surveiller la surface de vente et non le travail des caissières en particulier ; le ministre ne pouvait donc fonder sa décision d'autorisation de licenciement sur cette preuve illicite ;
- en deuxième lieu, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le ministre avait pu s'appuyer pour prendre la décision d'autorisation de licenciement, sur les éléments résultant de l'enregistrement de vidéosurveillance du 30 septembre 2011, tels qu'ils ont été décrits lors de la séance du comité d'établissement du 11 octobre 2011, alors que l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011 aurait du être détruit dans le délai d'un mois à compter de sa création, soit le 30 octobre 2011 ;
- c'est également à tort que les premiers juges ont retenu qu'il n'y avait pas eu de la part du ministre, une confusion entre Mme B...et MmeA... ; en effet, la décision du ministre reproche à Mme A...un vol qui aurait été commis le 30 septembre 2011 à 8 h 55 pour non -paiement d'une console de jeu, alors que ce reproche n'avait jamais été formulé par l'employeur, la société Cora reprochant à Mme A...une complicité de vol, dans l'après-midi du 30 septembre 2011 pour ne pas avoir relevé le non-paiement d'une console de jeux achetée par Mme B...lors de son passage à la caisse libre-service ; il appartenait aux vigiles de s'assurer du paiement du produit par MmeB... ; il y a eu abandon par l'employeur de la plainte pénale présentée à son encontre, le procureur de la République après l'avoir convoquée pour une composition pénale a finalement abandonné les poursuites ; dès lors, la décision d'autorisation de licenciement est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle entend reprendre à son compte les éléments sur lesquels s'est fondé l'inspecteur du travail dans sa décision du 6 décembre 2011 pour refuser l'autorisation de licenciement.
Par un mémoire en défense enregistré le 24 octobre 2016, la société Cora Limoges, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête de Mme A...et à ce que soit mise à sa charge la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- en premier lieu, le principe de séparation des pouvoirs réserve aux juridictions administratives, le jugement de la légalité des autorisations administratives de licenciement concernant les salariés protégés et interdit dès lors au conseil des prud'hommes de juger de la validité des autorisations administratives ; le conseil des prud'hommes de Limoges devait donc surseoir à statuer sur la requête de MmeA..., dans l'attente du jugement définitif par les juridictions administratives, de la légalité de l'autorisation de licenciement de MmeA... ; c'est ce qu'a d'ailleurs fait la cour d'appel de Limoges dans son arrêt du 11 mai 2015 ; en tout état de cause, le conseil des prud'hommes n'a prononcé qu'une exécution provisoire sur le versement d'un certain nombre de sommes au bénéfice de Mme A...et non sur la rupture du contrat ; contrairement à ce qu'invoque la requérante, il n'y a donc pas eu de rupture du contrat de travail ; en tout état de cause en l'espèce, le juge administratif a été saisi avant que Mme A...ne demande une résiliation judiciaire de son contrat ;
- en ce qui concerne en deuxième lieu, l'utilisation de l'enregistrement vidéo comme fondement de la procédure de licenciement, il est inexact d'affirmer que la décision du ministre serait fondée intégralement sur cet enregistrement vidéo dès lors qu'il ressort de la décision du ministre, qu'elle se fonde sur l'intégralité du dossier ; lors de la réunion exceptionnelle du comité d'établissement le 11 octobre 2011, les membres du comité habilités à voter se sont prononcés à quatre voix contre une en faveur du licenciement de MmeA... ;
- en troisième lieu, la matérialité des faits est établie, dès lors qu'une console de jeux non payée a été trouvée dans le caddie de MmeB..., et le manquement aux autres règles du règlement intérieur est également avéré ; M.H..., responsable de la sécurité, entendu par la police, a été lui-même témoin des agissements fautifs et les a décrits de manière concordante ; à la date de la demande d'autorisation de licenciement du 12 octobre 2011, l'enregistrement vidéo était parfaitement visible ; il est faux d'indiquer que les salariées auraient été filmées à leur insu dès lors que le système de vidéosurveillance a été autorisé par arrêté du 17 février 2011 et une information a cet égard a été donnée lors de la réunion du 22 juillet 2010 du comité d'établissement ; la requérante ne démontre pas avoir exercé son droit d'accès aux images ; l'entretien préalable ne lui permettait pas de se voir communiquer les éléments en possession de la société ; Mme A...a pu avoir accès aux images, lors de la séance du comité d'établissement soumettant pour avis son projet de licenciement, et n'a pas présenté d'observations ;
- les faits sont établis et justifiaient le licenciement de Mme A...sans que n'ait d'incidence à cet égard, le fait que la société a retiré sa plainte pénale contre MmeA..., dans la seule volonté de ne pas l'accabler ;
- si la décision d'autorisation de licenciement indique à tort par une erreur matérielle qu'il est reproché à Mme A...la soustraction d'une console alors qu'en réalité ce qui lui est reproché comme l'indique également la décision d'autorisation de licenciement est le fait d'avoir participé à la soustraction frauduleuse d'une console de jeux par MmeB..., il s'agit d'une simple erreur matérielle, et le juge pourra procéder à une substitution de motifs ; les faits sont établis, et constitués par la complicité de vol d'une console Nintendo ; Mme A...a participé à un véritable manège qui s'est déroulé sur l'ensemble de la journée, ayant consisté à avoir tout d'abord dissimulé deux consoles Nintendo DS dans le meuble de rangement des caisses, ce qui constitue un premier manquement au règlement intérieur, puis dans un passage à la caisse en libre-service supervisée par MmeB..., d'avoir réglé par le jeu d'une carte " malin " ne lui appartenant pas, l'une des consoles mises de côté et d'avoir utilisé des bulletins de participation à la tombola du magasin alors que les membres du personnel ne sont pas autorisés à y participer ; en fin d'après-midi, alors qu'elle supervise la caisse en libre-service, Mme A...a délaissé son poste, pour se livrer avec Mme B...à de nombreuses manipulations sur les caisses, afin de participer en toute connaissance de cause au vol d'une Nintendo DS par MmeB..., puisqu'elle Mme A...a enlevé l'antivol des quatre consoles que lui a présentées Mme B...alors qu'elle venait d'aider celle-ci à procéder au paiement de seulement trois d'entre elles ; la preuve de cette conscience du vol est d'ailleurs renforcée par le fait que les deux salariées ont pris soin de vérifier qu'il n'existait plus de système antivol sur la console dérobée en passant plusieurs fois le chariot au système de détection et de dissimuler la console dérobée sous d'autres articles ; les faits sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement et s'inscrivent dans le contexte très précis de l'établissement relevé par l'inspecteur du travail dans lequel, M. F...avait repris la direction du magasin et souhaitait diminuer sensiblement les vols et à cet égard, des instructions de vigilance et d'exemplarité avaient été données dans un contexte où la négligence était précédemment admise.
Par un mémoire du 31 août 2017, la ministre du travail, demande le rejet de la requête de MmeA....
Elle indique se référer aux écritures présentées en première instance ; en ce qui concerne la compétence de l'autorité administrative, tant que le contrat de travail du salarié protégé n'est pas rompu, l'autorité administrative ne peut décliner sa compétence au seul motif que le salarié aurait saisi le juge judiciaire d'une demande en résiliation ; en tout état de cause le conseil des prud'hommes de Limoges n'a pas prononcé une exécution provisoire sur la rupture du contrat de MmeA..., et la cour d'appel de Limoges dans son arrêt du 11 mai 2015, a indiqué surseoir à statuer sur la requête de Mme A...dans l'attente du jugement définitif par les juridictions administratives, sur la légalité de l'autorisation de licenciement de Mme A...; en ce qui concerne la licéité des modes de preuve, en application de l'article L .1121-1 du code du travail, les méthodes de surveillance de l'employeur doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché et les dispositifs de surveillance doivent être préalablement portés à la connaissance du comité d'entreprise et des salariés ; en l'espèce, comme l'a jugé le tribunal administratif, ces conditions sont réunies ; pour ce qui est de l'erreur d'appréciation invoquée quant à la gravité des faits, le tribunal administratif a à juste titre, retenu l'intention dolosive et estimé que les faits reprochés et imputables à Mme A...étaient suffisamment graves pour justifier son licenciement ; l'autorisation administrative de licenciement n'est donc pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant la société Cora.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A...salariée de la société Cora, déléguée du personnel et membre titulaire du comité d'entreprise, relève appel du jugement du 2 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juin 2014 par laquelle le ministre du travail a accordé à la société Cora l'autorisation de la licencier pour faute.
Sur le bien-fondé du jugement et de la décision attaquée :
2. En vertu des dispositions de l'article L. 2411-3 du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives, bénéficient, dans l'intérêt des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, et ne peuvent être licenciés qu'avec l'autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution du mandat dont il est investi.
3. En premier lieu, Mme A...soutient comme en première instance, que le ministre du travail n'aurait pas été compétent pour prendre une décision d'autorisation de son licenciement dès lors qu'à la date de la décision en litige du 4 juin 2014, son contrat de travail avait fait l'objet d'une résiliation judiciaire par le conseil des prud'hommes de Limoges par un jugement du 7 avril 2014. Toutefois, ce jugement indique que l'exécution provisoire n'est prononcée que sur les sommes auxquelles la société Cora est par ailleurs condamnée par le même jugement et non sur la résiliation judiciaire du contrat de travail. En tout état de cause, la cour d'appel de Limoges par un arrêt du 11 mai 2015, a prononcé un sursis à statuer sur le litige dans l'attente du jugement du tribunal administratif de Limoges sur la décision du 4 juin 2014 par laquelle le ministre du travail a accordé à la société Cora l'autorisation de licencier Mme A...pour motif disciplinaire. Dans ces conditions, à la date de la décision du 4 juin 2014 à laquelle le ministre du travail a accordé à la société Cora l'autorisation de licencier pour faute Mme A...la résiliation pour motif disciplinaire de son contrat de travail ne peut être regardée comme ayant été prononcée.
4. En deuxième lieu, la requérante soutient que c'est à tort que le ministre du travail, dans sa décision d'autorisation du licenciement, et le tribunal administratif, dans son jugement se sont fondés sur l'existence de l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011, alors qu'un tel enregistrement devait être considéré comme nul dès lors que l'arrêté préfectoral du 17 février 2011 ayant autorisé l'installation des caméras de surveillance, prévoit en son article 3, que les enregistrements seront détruits dans un délai maximum de 30 jours. Toutefois, cet arrêté prévoit une exception à l'obligation de détruire les enregistrements dans un délai maximum de 30 jours dans " (...) le cas d'une enquête de flagrant délit, d'une enquête préliminaire ou d'une information judiciaire " et en l'espèce, une plainte pénale a été déposée dès le 30 septembre 2011 par la société Cora ayant conduit à une convocation en justice de MmeA..., pour une composition pénale fixée au 12 décembre 2011, alors qu'en tout état de cause ainsi que l'ont considéré les premiers juges, l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011 a fait l'objet d'une description lors de la séance du comité d'établissement du 11 octobre 2011, soit dans le délai d'un mois d'autorisation de conservation des images. Dans ces conditions, le ministre a pu fonder sa décision d'autorisation du licenciement sur l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011 alors même que cet enregistrement n'aurait pas été transmis à la police ou à la justice. La circonstance par ailleurs alléguée selon laquelle l'enregistrement vidéo du 30 septembre 2011 a fait l'objet d'une transcription par un huissier de justice le 30 janvier 2012, soit au-delà du délai autorisé de conservation des images est sans incidence sur la légalité de l'autorisation administrative de licenciement dès lors qu'en tout état de cause, ainsi qu'il est susmentionné, une plainte pénale ayant été déposée, le délai de trente jours de conservation des images n'était pas opposable à la société Cora. Par ailleurs, contrairement à ce que soutenait la requérante en première instance elle a pu visionner l'enregistrement, lors de la séance du comité d'établissement du 11 octobre 2011 qui s'est prononcé sur le projet de son licenciement. Si elle soutient que les droits de la défense auraient été méconnus dès lors qu'il n'a pas été fait droit à sa demande de visionner les images dès le jour des faits, le 30 septembre 2011 et en tout cas lors de l'entretien préalable du 10 octobre 2011, elle ne se prévaut -alors qu'au demeurant elle ne justifie pas avoir présenté une demande de visionnage des images - d' aucune disposition législative ou réglementaire, ni d'aucun principe qui imposerait une telle communication avant l'enquête contradictoire organisée par l'inspecteur du travail dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation du licenciement.
5. En troisième lieu, la requérante soutient que si une information a été donnée lors des comités d'établissement des 22 juillet et 2 septembre 2010 quant à l'existence du dispositif de vidéosurveillance, à aucun moment, il n'a été précisé que le système mis en place servirait à surveiller les salariés et que dès lors l'autorisation de licenciement accordée par le ministre est entachée d'illégalité pour se fonder sur un enregistrement effectuée à l'insu du salarié, constituant un mode de preuve illicite. Il ressort des pièces du dossier, que si les comptes-rendus des comités d'établissement des 22 juillet et 2 septembre 2010 indiquent une information des salariés quant à l'installation de systèmes de vidéosurveillance sans toutefois spécifier expressément que les salariés aient été informés de ce qu'ils seraient visés par ces dispositifs, l'information donnée aux salariés quant à la mise en place du dispositif, qui incluait notamment les réserves du magasin, impliquait nécessairement que les salariés étaient concernés par l'ensemble du dispositif. La société Cora indique par ailleurs, sans être contredite par la requérante, qu'un courrier explicatif a été adressé à chaque salarié, quant à l'utilisation de la vidéosurveillance. Dans ces conditions, ainsi que l'ont considéré les premiers juges, l'information des salariés et notamment de Mme A...a été suffisante.
6. En quatrième lieu, en ce qui concerne la matérialité des faits sur lesquels repose l'autorisation ministérielle de licenciement, il ressort tout d'abord des pièces du dossier, qu'ainsi que le fait valoir Mme A...et comme l'a relevé le tribunal, au point 10 du jugement, le ministre a indiqué à tort que Mme A...avait procédé à la soustraction d'une console de jeu dans la matinée du 30 septembre 2011 alors qu'il est constant qu'elle a réglé le prix de la console acquise le matin, même si cette console a été réglée au moyen de la carte " Malin " appartenant à un tiers. Toutefois ce point de la décision du ministre relève d'une erreur matérielle, la décision d'autorisation de licenciement devant en réalité être regardée comme se trouvant fondée sur le fait, comme cette décision l'oppose, pour MmeA..., d'avoir activement participé à la soustraction frauduleuse d'une console de jeux par Mme B...dans l'après-midi du 30 septembre 2011 en enlevant l'antivol de cette console de jeux sans avoir vérifié le ticket de caisse. En effet, tant le ministre que le tribunal administratif se sont fondés sur la circonstance selon laquelle le 30 septembre 2011, alors que sa collègue Mme A...supervisait les caisses en libre-service, MmeB..., s'est présentée à 16h19 à la caisse où Mme A...a ôté les antivols apposés sur les consoles, a passé à plusieurs reprises en compagnie de MmeB..., le caddie, dans lequel étaient placées les consoles de jeu, au système de détection et a finalement été interpellée par le service de surveillance, qui avait suivi le déroulement des faits au moyen du système de vidéosurveillance. Il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal de retranscription par l'huissier de l'enregistrement vidéo, ainsi que du témoignage du 31 décembre 2012 du responsable de la surveillance du magasin, produit par le ministre en défense, que Mme B...a présenté au service de surveillance trois tickets de caisse concernant trois des consoles de jeu et, s'agissant de la quatrième console, un ticket de caisse dont le service de surveillance a constaté qu'il était daté du matin. Si MmeB..., a ensuite soutenu, après discussion, qu'elle avait oublié de régler cet achat, compte tenu des circonstances dans lesquelles s'est opérée cette soustraction de la console de jeux, dont Mme B...a cherché à justifier l'achat par la production d'un ticket de caisse afférent à l'achat antérieur d'un produit identique, cette soustraction d'une console de jeux par MmeB..., a présenté le caractère d'un acte volontaire. L'enlèvement de l'antivol par Mme A...sans présentation du ticket d'achat par Mme B... a également présenté de la part de MmeA..., le caractère d'un acte volontaire, ce qui est corroboré par le fait qu'à plusieurs reprises Mme A...et Mme B...ont passé le caddie, dans lequel étaient placés divers articles dissimulant les consoles de jeu dont celle qui avait été dérobée, au système de détection. Si Mme A...fait valoir que l'absence de vérification auprès de Mme B...de la possession du ticket d'achat de la console et l'enlèvement de l'antivol de ladite console ne procèdent que d'un oubli s'expliquant par le fait qu'elle était occupée avec d'autres clients, il ressort des pièces du dossier et notamment du compte-rendu de la réunion du comité d'établissement du 11 octobre 2011 qui s'est prononcé sur le projet de son licenciement, qu'à l'heure à laquelle s'est opérée la soustraction frauduleuse de la console, il n'y avait pas d'afflux de clients à la caisse en libre-service et que par ailleurs Mme A...a passé beaucoup de temps avec MmeB..., ce qui lui aurait normalement permis de procéder aux vérifications requises. Cette complicité de MmeA..., dans la soustraction d'un produit appartenant à la société qui l'emploie, et d'un montant significatif, présente un caractère fautif, et d'une gravité suffisante pour justifier l'autorisation de licenciement contestée, alors même que l'employeur avait retiré sa plainte pénale à l'encontre de MmeA....
7. La circonstance invoquée par la requérante, selon laquelle le terme de " filouterie " employé dans la demande d'autorisation de licenciement serait inapproprié, se trouve sans incidence sur la légalité de la décision attaquée d'autorisation du licenciement laquelle se fonde sur la participation active de Mme A...à la soustraction frauduleuse d'une console Nintendo par MmeB....
8. Si la décision d'autorisation du licenciement se fonde également sur la circonstance pour Mme B...d'avoir passé à MmeA..., en vue d'effectuer des achats une carte " Malin " appartenant à la soeur de MmeB..., contrairement aux instructions de l'employeur qui interdisent la transmission de ces cartes aux salariés, qui permettent de bénéficier de bons d'achat, et sur le fait pour Mme B...d'avoir donné à Mme A...des billets de tombola, alors que cette tombola n'était pas ouverte aux salariés de Cora, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier que le ministre aurait pris la même décision d'autorisation du licenciement pour faute sur le fondement du premier motif tenant à la participation active de Mme A...à la soustraction volontaire par Mme B...de la console de jeux.
9. Il résulte de ce qui précède, que Mme A...n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 2 juin 2016 et de la décision du 4 juin 2014 par laquelle le ministre du travail a autorisé son licenciement.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. La société Cora Limoges n'étant pas dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions de Mme A...tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Cora Limoges sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête présentée par Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la société Cora Limoges sur le fondement de l'article L761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., à la société Cora Limoges et à la ministre du travail.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
M. Axel Basset premier conseiller,
Lu en audience publique, le 8 octobre 2018.
Le rapporteur,
Pierre BentolilaLe président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre du travail, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
7
N° 16BX02511