Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 juillet 2016 et un mémoire en réplique du 22 janvier 2018, M. B...C...représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente du jugement devant être rendu par le tribunal administratif de Poitiers sur sa requête n° 1502809, tendant à l'annulation des décisions de la Poste rejetant sa demande tendant à ce que soient établies des listes d'aptitude, des examens professionnels et des tableaux d'avancement aux titres des années 2003 à 2009 pour le grade de contrôleur, d'enjoindre au président de la Poste d'établir une liste d'aptitude et un tableau d'avancement pour le grade de contrôleur au titre de l'année 2010 et de le nommer au 1er janvier 2003 au grade de contrôleur ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision implicite de rejet de sa demande de reconstitution de carrière et de l'indemnisation de ses préjudices ;
3°) d'ordonner sa reconstitution de carrière en le réintégrant au grade de contrôleur au 12ème échelon, à compter du 1er janvier 2003, puis au grade de CTDIV, au 6ème échelon avec un an d'ancienneté à compter du 1er janvier 2008, et en rétablissant rétroactivement les promotions d'échelons jusqu'au 1er février 2010 ;
4°) de condamner la Poste à lui verser la somme de 19 998,27 euros au titre de la réparation des pertes de traitement induite par cette reconstitution de carrière ;
5°) de condamner la Poste à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice qu'il subit en raison du retard pris dans la reconstitution de sa carrière ;
6°) de condamner la Poste à lui verser la somme de 133 943 euros en réparation de son préjudice de retraite ;
7°) de condamner la Poste à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice résultant pour lui de l'illégalité du dispositif de promotion interne mis en place par la Poste depuis le 14 décembre 2009 ;
8°) de mettre à la charge de la Poste une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient :
- qu'il est nécessaire pour la cour de surseoir à statuer dans l'attente de l'intervention à venir du jugement du tribunal administratif de Poitiers relatif à la requête qu'il a présentée (n°1502809) tendant à ce qu'il soit enjoint à la Poste de procéder à l'établissement de listes d'aptitude et de tableaux d'avancement, rétroactivement de 2003 à 2009, et de réexaminer ses possibilités de promotion interne depuis 2003 ;
- à titre subsidiaire, il est fondé à demander la reconstitution de sa carrière sur le fondement de la jurisprudence Rodière ; en effet, sa carrière a subi un blocage dès 1993 et il a subi une perte de chance sérieuse de promotion au grade de contrôleur général dès 2003 ; il est également fondé à demander la reconstitution de sa carrière dans le cadre de l'établissement rétroactif de listes d'aptitude, ainsi que l'admet la jurisprudence du Conseil d'Etat Rodière ; il est donc fondé à demander la reconstitution de sa carrière au grade de contrôleur des travaux ; la reconstitution de carrière nécessite de le replacer au 1er janvier 2003, date à laquelle il était placé au 12ème et dernier échelon du grade d'AAPSG, avec un indice brut de 474, depuis le 1er juillet 1999 ; il aurait du bénéficier d'un avancement au 13ème échelon du grade, au bout de 3 ans, puis au 14ème échelon au bout de 4 ans ; il doit bénéficier d'une promotion au grade de CTDIV à compter du 1er janvier 2008, et d'un avancement d'échelon à compter de février 2010 ; une reconstitution de carrière des fonctionnaires reclassés ayant subi une perte de chance sérieuse de promotion, assurerait une égalité entre les fonctionnaires reclassifiés, méritants, et les fonctionnaires reclassés, tout aussi méritants, mais qui n'ont pas été promus ; la perte de chance sérieuse d'obtenir une promotion implique qu'elle soit rétroactivement attribuée ainsi que le rappel des traitements y afférents ; il est donc fondé à demander le versement d'une somme calculée sur le différentiel d'indices entre les grades issus de la reconstitution de sa carrière et les grades réellement détenus, en multipliant les différentiels annuels reconstitués par la valeur moyenne du point d'indice sur la période considérée, soit du 1er janvier 2003 au 1er février 2010 ; le tableau produit fait apparaitre une perte de traitements qui s'élève à 19 998,27 euros ; la Poste devra également verser la cotisation correspondant à ces rappels de traitement, auprès du service des pensions de retraite de la Poste ; la Poste devra également l'indemniser des retards mis par la Poste pour procéder à la reconstitution de sa carrière alors que cette obligation remonte à un arrêt du Conseil d'Etat du 5 mai 1999 ; dès lors qu'en ce qui le concerne, la perte de chance sérieuse de promotion lui a été reconnue par un arrêt de la cour du 13 décembre 2010, la Poste doit l'indemniser du retard pris pour la reconstitution de sa carrière, en lui versant la somme de 10 000 euros ; il subit par ailleurs un préjudice lié à la minoration de sa pension de retraite, devant conduire à une indemnisation la somme de 133 943 euros en réparation de son préjudice de retraite ; il subit également un préjudice du fait de l'illégalité du dispositif de promotion interne depuis 2009 ; en effet, la décision du 16 décembre 2009 est entachée d'illégalité dès lors que les seules modalités de promotion mises en place sont constituées par des listes d'aptitude, ce qui méconnait l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 qui impose d'organiser différentes voies de promotion, à savoir le concours et l'examen et la liste d'aptitude et le décret n° 2009-1555 du 14 décembre 2009 ; plusieurs décisions des juridictions administratives ont condamné Orange en raison d'une irrégularité similaire affectant le dispositif de promotion interne de ses fonctionnaires reclassés ; les préjudices subis par le requérant depuis 2009 du fait de la réitération du blocage de sa carrière par la Poste devront être réparés par l'allocation d'une somme de 30 000 euros.
Par des mémoires du 27 décembre 2017 et 2 février 2018, la société la Poste, représentée par Me E... conclut au rejet de la requête de M.C..., à la réformation du jugement en ce qu'il a retenu la faute de la Poste en l'absence d'organisation d'un concours interne pour l'accès aux corps des contrôleurs à compter du 16 décembre 2009, et à ce que soit mise à la charge de M. C...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la demande d'indemnisation de la pension de retraite fondée sur le blocage de la carrière entre 1993 et 2009 est irrecevable dès lors que M. C...n'a présenté une demande préalable indemnitaire que par lettre du 16 juillet 2015 ; ces conclusions sont irrecevables pour constituer des conclusions nouvelles sans lien avec les conclusions initiales ; par ailleurs les conclusions relatives à la reconstitution de carrière doivent être rejetées dès lors qu'elles se heurtent à l'autorité de la chose jugée, du fait de la triple identité de parties, de cause et d'objet à l'instance ayant donné lieu à l'arrêt de la cour du 13 décembre 2010 (09BX01948) ayant condamné la Poste à verser à M. C...la somme de 7 000 euros au titre de la perte de chances de bénéficier d'un avancement au grade de contrôleur ; la cour a donc fixé le quantum global d'indemnisation de l'ensemble des préjudices matériels subis par l'agent du fait de son absence de promotion incluant nécessairement le préjudice né de la perte des droits à pension ; la demande dans le cadre de la présente instance, d'indemnisation de son préjudice de retraite présente un objet identique avec celle déjà examinée par la Cour dans son arrêt du 13 décembre 2010 ; la requête présente une identité de cause avec les précédentes instances, dès lors qu'elle repose également sur la responsabilité pour faute et sur le même fait générateur, à savoir le blocage de carrière entre 1993 et 2009 ; dans ces conditions, la Poste est fondée à opposer une exception de chose jugée aux conclusions indemnitaires présentées au titre du préjudice de retraite fondées sur le blocage de carrière subi entre 1993 et 2009 ; en tout état de cause, le blocage de la carrière de M. C...entre 1993 et 2009 ne saurait donner lieu à reconstitution de carrière ; en effet, M. C...pouvait accéder à un grade de reclassification, et son préjudice s'est éteint le 1er février 2010, date de son départ à la retraite et il n'est pas possible de déduire de la seule absence d'organisation de concours interne, un droit à bénéficier d'une promotion dès 2009 ; il ne peut conclure à une perte de chance sérieuse de promotion, sans établir ses chances de réussite au concours ; en tout état de cause, la perte de chance de promotion, n'implique pas une reconstitution de carrière ; en ce qui concerne l'établissement des listes d'aptitude, ce moyen est nouveau et donc irrecevable dès lors que la Poste n'a jamais été saisie d'une demande d'établissement rétroactif de listes d'aptitude ; en ce qui concerne la réparation du préjudice, par hypothèse, la perte de chance ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée ; ainsi, l'absence de promotion ne peut constituer qu'un préjudice éventuel dès lors qu'en l'absence de blocage de carrière, l'obtention de la promotion n'aurait pas été certaine ; M. C...a bénéficié de la réparation du préjudice de carrière, au titre de la perte de chances, par l'arrêt de la cour du 13 décembre 2010 (09BX01948) dont le Conseil d'Etat a rejeté le pourvoi formé à son encontre, par un arrêt du 9 février 2011 ; en ce qui concerne la minoration invoquée de la pension de retraite, dès lors que la Poste n'était pas tenue à la reconstitution de carrière, aucune minoration de la pension de retraite ne peut être retenue du fait de l'absence de reconstitution de carrière ; en ce qui concerne le moyen tiré de l'absence d'organisation de concours interne à compter de 2009, le moyen est irrecevable faute d'avoir été invoqué dans la demande préalable ni dans la requête introductive d'instance présentée devant le tribunal administratif et le moyen tiré de l'absence d'organisation de concours interne constitue un moyen distinct de celui d'absence d'établissement des listes d'aptitude qui avait été invoqué par M. C... ; les premiers juges ont donc commis une erreur de droit en se fondant sur l'absence d'établissement des listes d'aptitude ; pour la période comprise entre 1993 et 2008, le Conseil d'Etat n'a admis la responsabilité de la Post qu'à raison de la privation de toute possibilité de promotion et non au motif que telle ou telle voie de promotion n'était pas accessible ; le Conseil d'Etat par l'arrêt Escalas du 18 novembre 2011, n° 332082, a estimé que l'adoption par la Poste de la décision du 16 décembre 2009 et de la note de service relative à l'établissement des listes d'aptitude pour l'accès aux corps de reclassement au titre de l'année 2009 étaient de nature à satisfaire aux obligations résultant du décret du 14 décembre 2009 ; par ailleurs le Conseil d'Etat considère qu' aucune règle ni principe n'interdit de prévoir que certains fonctionnaires puissent être recrutés sans concours ; si plusieurs voies de promotion sont prévues, il ne ressort d'aucun principe qu'elles ne devront être organisées systématiquement et simultanément chaque année ; les corps de reclassement sont des corps en voie d'extinction, et ne donnent plus lieu à recrutement et c'est pourquoi seule la promotion interne est maintenue ; en tout état de cause, il appartient au requérant d'établir en quoi la privation du concours interne aurait pu lui causer un préjudice moral dès lors que les agents reclassés peuvent obtenir une promotion par un dispositif de listes d'aptitude et M. C...ne démontre pas l'existence d'un préjudice moral ni des troubles dans ses conditions d'existence alors que de toute façon, étant parti à la retraite le 1er février 2010, soit un mois et demi après l'intervention du décret du 14 décembre 2009, il n'aurait pas pu se présenter à un concours interne.
Par un courrier du 19 novembre 2018, les parties ont été informées, sur le fondement de l'article R 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de fonder la solution de l'appel " incident " présenté par la Poste, sur le moyen d'ordre public tiré de l'absence d'intérêt pour agir de la Poste à l'encontre du jugement de rejet de la requête de M. C....
La Poste a présenté des observations sur ce moyen d'ordre public le 21 novembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
- les décrets n° 72-503 du 23 juin 1972 et n° 90-1237 du 31 décembre 1990 ;
- le décret n° 90-1238 du 31 décembre 1990 ;
- le décret n° 2009-1555 du 14 décembre 2009 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
On été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila,
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public ;
- les observations de MeA..., représentant M.C....
Considérant ce qui suit :
1. M. B...C...fonctionnaire des postes et télécommunications depuis 1975, a été intégré dans les effectifs de la Poste, lors de la création de cette dernière, par la loi du 2 juillet 1990. Jusqu'à son départ à la retraite le 1er février 2010, il a conservé, du fait de son choix de conserver sa qualité de fonctionnaire, son appartenance au corps de " reclassement " des agents d'exploitation du service général de la Poste détenant en dernier lieu le grade d'agent d'exploitation principal du service général (AEXSG). Par un arrêt devenu définitif du 13 décembre 2010 n°s 09BX01948, 09BXX02002 la cour a considéré que la responsabilité de la Poste était engagée solidairement avec celle de l'Etat à raison, d'une part, du préjudice de carrière résultant pour M. C... de la perte d'une chance sérieuse de promotion entre 1993 et 2009, au grade de contrôleur des travaux, et, d'autre part, de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence du fait de l'absence de toute possibilité de promotion interne pour les fonctionnaires " reclassés " au sein de La Poste, la cour ayant solidairement condamné la Poste et l'Etat à verser à M. C...la somme totale de 12 000 euros au titre des préjudices subis. M. C... a adressé au directeur de La Poste, le 3 mai 2013 une demande préalable afin d'obtenir la reconstitution de sa carrière depuis le 1er janvier 2003, l'indemnisation des pertes de salaires et de retraite afférentes à l'absence de reconstitution de sa carrière, et l'indemnisation des préjudices résultant de l'illégalité du dispositif de promotion mis en oeuvre dans les corps de reclassement depuis l'entrée en vigueur du décret du 14 décembre 2009.
2. M. C... a demandé devant le tribunal administratif de Poitiers, l'annulation du refus de reconstitution de sa carrière, à ce qu'il soit enjoint à La Poste de reconstituer sa carrière à compter du 1er janvier 2003, la condamnation de la Poste à réparer les préjudices résultant des ses pertes de salaires et de retraite, du retard dans la reconstitution de sa carrière et de l'illégalité du dispositif de promotion interne mis en oeuvre en exécution du décret du 14 décembre 2009. M. C...relève appel du jugement du 18 mai 2016, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Sur l'appel de M. C...:
Sur les conclusions présentées à titre principal de sursis à statuer :
3. Les conclusions de M. C...tendant à ce que la cour sursoie à statuer, dans l'attente du jugement devant être rendu par le tribunal administratif de Poitiers sur sa requête en annulation de la décision implicite de rejet du 17 septembre 2015 par le président de la Poste, de sa demande tendant à ce que soient établies des listes d'aptitude, des examens professionnels et des tableaux d'avancement aux titres des années 2003 à 2009 pour l'accès au grade de contrôleur, sont en tout état de cause devenues sans objet dès lors que le tribunal administratif de Poitiers, par un jugement du 23 janvier 2018, a rejeté la requête n° 1502809 de M.C....
Sur les conclusions présentées à titre subsidiaire :
Sur les conclusions en annulation et en injonction :
4. M. C...demande l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande de reconstitution de sa carrière du 3 mai 2013. Toutefois, en appel, M. C...n'invoque pas plus qu'en première instance, de moyens spécifiques relatifs à sa demande d'annulation du refus de reconstitution de sa carrière. S'il fait valoir que la cour dans son arrêt du 13 décembre 2010 n°09BX01948 a reconnu la perte de chances au titre de sa carrière, cet arrêt rendu dans un litige indemnitaire et ne reconnaissant qu'une perte de chances au titre de la carrière se trouve sans incidence sur la légalité de la décision de refus de reconstitution de carrière. Les conclusions en annulation présentées par M. C...à raison du refus de reconstitution de sa carrière ne peuvent être que rejetées et par voie de conséquence doivent être également rejetées ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la Poste de procéder à la reconstitution de sa carrière et celles tendant à ce qu'il soit enjoint à la Poste de l'inscrire au grade de contrôleur au 12ème échelon, à compter du 1er janvier 2003, puis au grade de CTDIV, au 6ème échelon avec un an d'ancienneté à compter du 1er janvier 2008, et en rétablissant rétroactivement les promotions d'échelons jusqu'au 1er février 2010.
Sur les conclusions indemnitaires :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées à certaines de ces conclusions :
5. M.C..., demande la condamnation de la Poste à lui verser les sommes de 19 998,27 euros au titre de la réparation des pertes de traitement induite par l'absence de reconstitution de carrière à laquelle il estime avoir droit, 10 000 euros en réparation du préjudice qu'il indique avoir subi en raison du retard pris dans la reconstitution de sa carrière, 133 943 euros en réparation de son préjudice de retraite, ainsi que 30 000 euros en réparation du préjudice résultant pour lui de l'illégalité du dispositif de promotion interne mis en place par la Poste depuis le 14 décembre 2009.
6. En premier lieu, le requérant demande la condamnation de la Poste à l'indemniser du préjudice de carrière subi entre 2003, année à compter de laquelle M. C...indique qu'il remplissait les conditions pour accéder au grade de contrôleur, et l'année 2009, année au cours de laquelle est intervenu le décret du 14 décembre 2009 permettant l'accès des fonctionnaires reclassés par la voie de la promotion interne, au grade de contrôleur.
7. Aux termes de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la Poste et de France Télécom : " Les personnels de la Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat (...) ". En vertu de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat applicable à M. C...en sa qualité de fonctionnaire : " En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration (...), non seulement par voie de concours (...) mais aussi par la nomination de fonctionnaires (...) suivant l'une des modalités ci-après : / 1° Examen professionnel ; / 2° Liste d'aptitude établie après avis de la commission paritaire du corps d'accueil (...) ". En vertu de l'article 58 de la loi du 11 janvier 1984 et des dispositions réglementaires prises pour son application, il appartient à l'autorité administrative, sauf à ce qu'aucun emploi vacant ne soit susceptible d'être occupé par des fonctionnaires à promouvoir, d'établir annuellement des tableaux d'avancement en vue de permettre l'avancement de grade. Il devait donc être offert aux fonctionnaires qui sont demeurés dans les corps de " reclassement " de la Poste, la possibilité de bénéficier, au même titre que les fonctionnaires ayant choisi d'intégrer les nouveaux corps dits de " reclassification " créés en 1993, de mesures de promotion interne. Le législateur, par la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales, en permettant à la Poste de ne recruter, le cas échéant, que des agents contractuels de droit privé, n'a pas entendu priver d'effet les dispositions de la loi du 11 janvier 1984 relatives au droit à la promotion interne à l'égard des fonctionnaires " reclassés ". Par suite, les décrets régissant les statuts particuliers des corps de " reclassement ", en ce qu'ils n'organisaient pas de voies de promotion interne autres que celles liées aux titularisations consécutives aux recrutements externes et privaient en conséquence les fonctionnaires " reclassés " de toute possibilité de promotion interne, étaient entachés d'illégalité. En faisant application de ces décrets illégaux et en refusant de prendre toute mesure de promotion interne au bénéfice des fonctionnaires " reclassés " au motif que ces décrets en interdisaient la possibilité, le président de la Poste a commis une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de la Poste, sans pouvoir utilement se prévaloir, pour s'exonérer de cette responsabilité, ni de la circonstance que les décrets statutaires des corps de " reclassement " auraient interdit ces promotions, ni de la circonstance qu'aucun emploi ne serait devenu vacant, au cours de la période, pour permettre de procéder à de telles promotions.
8. En l'espèce, si le requérant, précise les conditions dans lesquelles son déroulement de carrière en qualité de contrôleur des travaux (CT) puis de contrôleur principal (CTDIV) aurait du s'opérer à compter du 1er janvier 2003, il ne justifie pas plus en appel qu'en première instance, des chances certaines qu'il aurait eu d'accéder à ces grades. M. C...se réfère à l'arrêt de la cour du 13 décembre 2010 lequel a considéré que compte tenu de ses appréciations et de sa valeur professionnelle, il avait subi une " perte de chance sérieuse d'accéder au moins au corps des contrôleurs ", la Cour ayant condamné la Poste à verser à M. C..., tous intérêts compris, la somme de 7 000 euros au titre du préjudice de carrière. Toutefois il ne ressort pas des pièces du dossier, qu' au regard notamment de ses mérites et des conditions d'accès au corps des contrôleurs, M. C...devait de façon certaine bénéficier d'un reclassement dans le corps des contrôleurs, ni qu'il aurait subi une perte de chances de bénéficier d'un tel reclassement, à une hauteur supérieure à celle de 7 000 euros retenue au titre du préjudice de carrière par l'arrêt de la cour du 13 décembre 2010.
9. Dans ces conditions, les conclusions de M. C...tendant à la condamnation de la Poste à lui verser, du fait des sommes qui lui seraient dues au titre de la reconstitution de sa carrière, les sommes de 19 998,27 euros au titre de la réparation des pertes de traitement, de 10 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du retard pris dans la reconstitution de sa carrière, et de 133 943 euros en réparation de son préjudice de retraite, ne peuvent être que rejetées.
10. En second lieu, M. C...demande la condamnation de la Poste à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice résultant pour lui de l'illégalité du dispositif de promotion interne mis en place par la Poste depuis le 14 décembre 2009, du fait de l'absence d'organisation d'un concours interne pour l'accès au corps de contrôleur des travaux, la Poste n'ayant institué un accès à ce corps par promotion interne, que par voie d'établissement des listes d'aptitude.
11.Toutefois, ainsi que l'ont pertinemment retenu les premiers juges par des motifs, non contestés en appel, qu'il convient d'adopter, M.C..., ayant été admis à la retraite dès le 1er février 2010, soit quelques semaines après l'entrée en vigueur du décret du 14 décembre 2009, il n'est en tout état de cause pas fondé à prétendre que le défaut d'organisation d'un concours interne pour l'accès au corps des contrôleurs et contrôleurs divisionnaires lui aurait causé un préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête.
Sur l'appel incident de la Poste :
13. Les appels formés contre les jugements des tribunaux administratifs ne peuvent tendre qu'à l'annulation ou à la réformation du dispositif du jugement attaqué. Par suite, n'est pas recevable, quels que soient les motifs retenus par les premiers juges, l'appel dirigé contre un jugement qui, par son dispositif, fait droit aux conclusions de la demande qu'avait présentée l'appelant en première instance ou pour ce qui est du défendeur de première instance rejette intégralement les conclusions présentées par le demandeur de première instance. Le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 18 mai 2016 rejette intégralement les conclusions notamment indemnitaires présentées par M.C..., et en particulier, pour défaut de justification du préjudice subi, ses conclusions tendant à la condamnation de la Poste à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'illégalité du refus de la société d'établir des listes d'aptitude et des tableaux d'avancement depuis le 14 décembre 2009.
14. La Poste n'est donc pas fondée, quelle que soit par ailleurs la pertinence du raisonnement adopté par les premiers juges, à demander la réformation de ce jugement en ce que le tribunal, bien que rejetant la requête de M.C..., a considéré qu'en omettant d'organiser un concours interne, sans qu'aucune disposition dérogatoire n'ait légalement justifié cette exclusion, la Poste avait commis une illégalité fautive.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Les conclusions, présentées par M. C...partie perdante dans le présent litige, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la Poste sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Les conclusions de M. C...tendant à ce que la cour prononce un sursis à statuer, sont devenues sans objet.
Article2 : Le surplus de la requête de M. C...est rejeté.
Article 3 : L'appel incident et les conclusions présentées par la Poste sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et à la Poste.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
M. Axel Basset, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 décembre 2018.
Le rapporteur,
Pierre Bentolila
Le président,
Pierre LarroumecLe greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 16BX02360